Le terme « nanosciences » cerne un champ définit par la taille des objets étudiés. Ainsi, l’échelle nanométrique est un lieu de recherche pluridisciplinaire où se retrouvent biologistes, chimistes et physiciens pour concevoir, manipuler, assembler des objets de taille nanométrique et de comprendre leurs propriétés. Le développement des techniques de champ proche, a permis l’étude des surfaces à l’échelle moléculaire. Parmi les auto-assemblages 2D, les réseaux nanoporeux font l’objet d’un vif intérêt en raison de leurs multiples propriétés. En effet, certaines structures permettent le piégeage, l’immobilisation de molécules invitées. Dans le cas de structure avec des cavités chirales, une adsorption énantio-sélective pourrait être envisagée. D’autres part, les aspects dynamiques de peuvent êtres étudié grâce aux observations en temps réel par microscopie à effet tunnel.
Chimie supramoléculaire et phénomènes d’autoassemblage
Depuis les travaux de J.-M. Lehn, D. Cram et C. Pedersen , la chimie supramoléculaire a fait l’objet de nombreux travaux de recherche. Cette discipline étudie les auto-assemblages moléculaires, c’est-à-dire la formation de manière spontanée de structures ordonnées à partir de briques élémentaires (molécules). Ce sont des phénomènes de reconnaissance moléculaire qui guident la formation de ces systèmes supramoléculaires fondés sur des interactions noncovalentes de faible énergie.
Interactions intervenant dans les auto-assemblages
Les auto-assemblages moléculaires résultent de l’utilisation de « briques moléculaires » (i.e. molécules organiques), qui interagissent entre elles via des liaisons faibles. Les liaisons physiques (liaisons faibles) résultent de forces intermoléculaires s’exerçant entre atomes ou molécules distinctes, alors que les liaisons chimiques (liaisons fortes ou covalentes) mettent en jeu des forces intramoléculaires. Les deux types de liaison se différencient :
• au niveau du mécanisme de création de la liaison : pour les liaisons faibles, contrairement aux liaisons fortes, il n’y a pas de redistribution des électrons entre molécules. (En comparaison avec le changement complet des orbitales électroniques intervenant dans les liaisons chimiques, les distributions électroniques sont peu perturbées dans les liaisons physiques),
• au niveau de l’intensité : les liaisons fortes ont une énergie très supérieure à l’énergie thermique kᵦT à température ambiante alors que les liaisons faibles ont une énergie de l’ordre de l’énergie thermique kᵦT . Les liaisons faibles sont donc réversibles à température ambiante, d’où des possibilités d’utilisation beaucoup plus riches.
Effet d’induction de Debye
C’est une orientation de type « dipôle permanent – dipôle induit ». Elle s’effectue entre une molécule polaire et une molécule apolaire qui se polarise sous l’effet du champ électrique créé par la molécule polaire.
Effet de dispersion de London
C’est une orientation de type « dipôle instantané – dipôle induit » ou « dipôle instantané – dipôle instantané ». Elle s’effectue entre deux molécules apolaires : une molécule apolaire a un moment dipolaire moyen nul, mais à chaque instant, elle a un moment dipolaire non nul (dû aux déplacements des électrons). Elle peut donc interagir avec une autre molécule possédant un moment dipolaire instantané, ou elle peut créer un moment dipolaire induit sur une molécule proche et donc interagir avec elle. Précisons que le dipôle instantané provient de fluctuations quantiques du nuage électronique. Les forces de London sont très importantes, car toujours présentes (contrairement aux forces de Keesom et Debye). De plus, l’amplitude des dipôles instantanés est généralement comparable, voire supérieure à celle des dipôles permanents des molécules polaires. Les forces de London représentent donc généralement la contribution principale aux interactions de van der Waals.
Liaison hydrogène
D’une autre nature que les liaisons de van der Waals, la liaison hydrogène est d’intensité supérieure. Elle est attractive et intervient pour des molécules portant un atome d’hydrogènequi, lié à un atome fortement électronégatif, va interagir avec un doublet non liant d’un atome électronégatif (souvent O ou N). Cette liaison est ainsi impliquée dans la structure spatiale de l’ADN et dans beaucoup d’auto assemblages faisant interagir des acides carboxyliques .
Interactions aromatiques π-π ou arène-arène
Ces interactions ont lieu entre composés organiques aromatiques. Elles sont attractives et causées par le recouvrement de type π, d’orbitales atomiques p de systèmes π-conjugués et sont d’autant plus importantes que le nombre d’électrons π mis en jeu est élevé. Les molécules aromatiques polycycliques planes, comme le coronène ou le triphénylène, ayant un nombre important d’électrons π délocalisés, interagissent fortement entre elles par l’intermédiaire de ce type d’interaction. Ajoutons que la structure en double hélice de l’ADN profite de ce type d’interaction entre ses bases consécutives.
Exemples d’auto-assemblages en volume (3D)
Pour illustrer comment les interactions décrites ci-dessus peuvent intervenir pour structurer des auto-assemblages 3D, deux exemples très différents seront détaillés. Le premier, d’origine naturelle, est celui de l’ADN dont la structure repose à la fois sur des interactions covalentes, mais également sur des liaisons hydrogène et arène-arène. Une autre architecture supramoléculaire, fondée sur des interactions arène-arène sera présentée : les cristaux liquides colonnaires.
L’ADN, un exemple d’auto-assemblage biologique
Présentes dans les systèmes biologiques, liaisons faibles et liaisons fortes sont essentielles aux êtres vivants. Un exemple qui illustre leur rôle est l’ADN. Porteur de l’information génétique de presque tous les organismes vivants, ce complexe macromoléculaire est en forme de double hélice (structure établie par J. Watson, F. Crick, M. Wilkins et R. Franklin en 1953 , grâce à la technique de diffraction des rayons X). On dit qu’il est bicaténaire, car constitué de deux brins.
Chaque brin résulte de la formation de liaisons covalentes entre sucres, unités phosphates et bases . Les deux brins sont en interaction grâce aux liaisons hydrogène entre les bases complémentaires A-T (adénine-thymine) et G-C (guanine-cytosine) . La structure est stabilisée à la fois par ces interactions et par les forces de recouvrement (« stacking ») qui existent entre les cycles aromatiques des bases qui sont empilées. Cette stabilité est primordiale pour garder intacte l’information dont est porteur l’ADN. Cependant, les deux brins doivent aussi être facilement séparés pour les étapes de transcription et de réplication de la molécule, ce que permettent les liaisons faibles.
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Table des matières
INTRODUCTION
CHAPITRE 1 : BIBLIOGRAPHIE, SYSTEME ETUDIE ET OBJECTIFS
INTRODUCTION
I. CHIMIE SUPRAMOLECULAIRE ET PHENOMENES D’AUTO-ASSEMBLAGE
A. Interactions intervenant dans les auto-assemblages
B. Exemples d’auto-assemblages en volume (3D)
II. AUTO-ASSEMBLAGES BIDIMENSIONNELS
A. Le microscope à effet tunnel (STM) : un outil de choix pour la caractérisation de monocouches physisorbées
B. Monocouches auto-assemblées sur une surface, observées par microscopie à effet tunnel
III. AUTO-ASSEMBLAGES 2D NANOPOREUX
A. Définitions : Systèmes multi-composants et hôte-invité
B. Différentes stratégies de conception de réseaux nanoporeux
C. Cas particulier des auto-assemblages à base de molécules de type tristilbène (TSB)
OBJET DE LA THESE
CHAPITRE 2 : CONTROLE DE LA FORMATION DE LA STRUCTURE EN NID D’ABEILLES
INTRODUCTION
I. CONTEXTE
II. METHODE
III. RESULTATS
A. Effet de la concentration
B. Effet de la température et du temps
IV. DISCUSSION
A. Contrôle thermodynamique ? Pas toujours !
B. Comment former un domaine métastable ? (contrôle cinétique)
PERSPECTIVES
CHAPITRE 3 : VARIATION DE LA TAILLE DES CAVITES
INTRODUCTION
I. MODULATION DE LA TAILLE DES CAVITES DE LA STRUCTURE EN NID D’ABEILLES GRACE A LA MODIFICATION DE LA LONGUEUR DES CHAINES ALIPHATIQUES PERIPHERIQUES DES MOLECULES DE TSB3,5
A. Méthode
B. Résultats
C. Discussion
D. Conclusion
II. EXTENSION DU CŒUR
A. Méthode
B. Résultats
C. Caractérisation du réseau nanoporeux : modèle théorique
D. Conclusion
III. CO-DEPOTS, SYSTEMES MULTI-COMPOSANTS
A. Auto-assemblages nanoporeux bi-composants
B. Possibilité de former des auto-assemblages bi-composants fondés sur des clips?
C. Discussion
D. Conclusion
CONCLUSION
CHAPITRE 4 : MODIFICATION DE LA GEOMETRIE DES CAVITES (EFFET LIES A LA PARITE ET FORMATION D’UN NOUVEAU RESEAU NANOPOREUX)
INTRODUCTION
I. SYNTHESE CHIMIQUE
A. Molécules ayant des chaînes comportant un nombre impair d’atomes de carbone
B. Molécules dissymétriques
II. EFFET DE LA PARITE SUR LA FORMATION DE RESEAUX DE TSB3,5
A. Conditions d’obtention du réseau en nid d’abeilles
B. Caractéristiques des réseaux en nid d’abeilles obtenus
C. Observation d’un nouveau réseau : réseau II
III. AJOUT DE MOLECULES INVITEES
A. Matériel et méthode
B. Utilisation de molécules invitées pour sonder les propriétés des réseaux en nid d’abeilles
C. Réorganisation induite par l’introduction de molécules dans le milieu (diversité constitutionnelle dynamique)
CONCLUSION
CHAPITRE 5 : VERS DES CAVITES D’AFFINITE CHIMIQUE SPECIFIQUE
INTRODUCTION
I. CONCEPTION DES MOLECULES
II. SYNTHESE CHIMIQUE
A. Schémas rétrosynthétiques
B. Synthèse des synthons clés
C. Réaction de Wittig Horner
III. FORMATION DES RESEAUX AVEC DES MOLECULES FONCTIONNALISEES
A. Molécule de TSB3,5 C11-OH
B. Molécules dissymétriques portant des fonctions hydroxyles
IV. AJOUT DE MOLECULES INVITEES
A. Choix des molécules invitées
B. Effet de l’ajout de molécules invitées
CONCLUSION
CONCLUSION GENERALE
ANNEXES