Concilier une étude de représentations sociales avec celle de la sociologie de l’art ou celle de la sociologie de la musique ainsi que celle de la sociologie de la culture dans un même volume n’est pas une mince affaire. Ainsi, pour essayer d’éclaircir notre piste de réflexion, nous allons voir dans cette phase introductive quelques définitions de quelques spécialistes en ces matières. Il y a, en premier lieu, des différents genres de textes des chansons qui ont chacun leur spécificité. Concernent les chansons à texte, qui ont notre objet d’étude, ce sont de chansons que l’on appelle aussi « chansons engagées ». Elles se concentrent souvent autours des thèmes spécifiques. Ainsi, il y a des chanteurs qui parlent de la politique ou encore qui critiquent la politique des autorités en place. Par ailleurs, la vie en société est l première cible de ce genre de chanson. Pour cela, des thèmes qui révèlent des problèmes sociaux touchant l’amour et le contexte de la pauvreté sont évoqués très souvent dans ces chansons.
Dans cette foulée, les chansons à texte obscènes entrent dans cette catégorie de chanson. Celles-ci sont devenues une sorte rempart de l’expression « libertine » favorisant la réticence de certaines personnes. Par contre, ce genre de chanson commence à se faire une place dans le monde de la musique malgache. Les chansons à textes obscènes dans le monde francophone avaient comme précurseur Georges Brassens. Il racontait souvent dans ses textes l’amour dans tous ses états. Dans les années 80 à Madagascar, elles ont vu le jour par les groupes de folk song de l’époque, notamment Lolo sy ny Tariny ou Tselonina. Mais à cette ère les textes portent toujours de ses figuré.
Dans la cours des années 90 par un chanteur nommé Samoëla sortait de son anonymat avec des textes directs et choquant pour certains. Pourtant dans cette époque, ses textes ne sont pas tellement si obscènes qu’on pense. Par contre, les gens de cette époque ne sont pas habitués à les entendre. Toujours dans ce temps, il y a aussi le chanteur Ricky qui était accusé de grossier suite à une interprétation erronée du public de ses œuvres. Après ces deux artistes, un autre du nom de Rah-Ckiki vient d’adhérer dans le club des chanteurs à textes choquants.
Repères méthodologiques
Les éléments constitutifs d’une représentation sociale n’ont pas la même importance. Il y en a qui sont essentiels, importants et secondaires.
L’organisation noyau central permet de donner une signification (fonction génératrice) ainsi que de voir relation entre ses éléments constitutifs (fonction organisatrice). » « La théorie du noyau central a une conséquence méthodologique essentielle : étudier une représentation sociale, c’est d’abord, et avant toute chose, chercher les constituants du noyau central. En effet, la connaissance du contenu ne suffit pas, c’est l’organisation de ce contenu qui donne le sens. Deux contenus identiques peuvent correspondre à deux représentations sociales différentes. » .
« La zone muette est un élément de la représentation qui a un caractère contre normatif. Elle peut être définie comme un « sous ensemble spécifique de cognition ou de croyances qui tout en étant disponibles, ne sont pas exprimées par le sujet dans les conditions normales de production… « « et qui » », si elles étaient exprimées (notamment dans certaines situations), pourraient mettre en cause des valeurs morales ou des normes valorisées par le groupe » (Guimelli et Deschamps, 2000) » « La notion de « zone muette » s’inscrit d’ailleurs assez facilement dans les derniers développements théoriques de l’approche structurale. Elle rejoint la notion de « schèmes dormants » introduite par Guimelli (1998), et s’inscrit dans l’idée que certains éléments du noyau central peuvent être « non activés » dans certaines situations. On pourrait donc dire qu’il peut exister dans une représentation, en particulier dans son noyau central, deux types d’éléments dormants :
-ceux qui sont en sommeil parce que non activés ;
-ceux qui sont en sommeil parce que non exprimables (zone muette).
L’existence de cette zone muette implique que des outils spécifiques soient Mis en œuvre pour la faire verbaliser. La démarche méthodologique d’étude des représentations sociales doit donc s’articuler en quatre phases :
-recueil du contenu explicite de la représentation ;
-recherche de la zone muette ;
-recherche de la structure de la représentation et de son noyau central ;
-contenu de la centralité » .
Les chansons à texte obscènes : productrices des liens sociaux ou génératrices de stigmatisation sociale ?
Quête de changement social ou révolution culturelle ?
Pour les artistes optant pour les chansons à texte obscènes, cette option est une simple production intellectuelle et/ou un outil pour véhiculer des idées.
En termes de représentations sociales, cette situation est une attitude qui se définit comme expression d’un positionnement, une orientation générale, positive ou négative par rapport à l’objet de la représentation .
Du fantasme à la réalité de la sexualité
Pour les chansons à texte obscènes, leurs paroles osées prennent de plus en plus d’ampleur selon l’époque. Etant donné qu’elles relatent la réalité sexuelle des individus d’une société donnée, c’est à partir de leur imaginaire social concernant la sexualité que les artistes puisent leurs inspirations pour en faire des chansons à texte dites obscènes.
A titre d’illustration, en voici quelques unes. Ainsi, au début, elle parle du voyeurisme qui était de plus en plus fréquent à cette époque. Voyons ce que le groupe Lolo sy ny Tariny voyait la chose :
“(…) Raha vao lasa i Baomijijy
Ka mitondra zinga kely
Ka mivadika ao ambadiky ny trano
Ialahy natao an-tsagory ka afaka nijery
Izaho avy ato ambany mamonany (…)” .
Nous pouvons traduire cet extrait de chanson comme suit : quand une fille prénommée Baomijijy prend un gobelet et part derrière sa maison, deux garçons la suivent dans le but de la regarder faire sa toilette intime. Pour ce faire, l’un se met sur les épaules de l’autre pour mieux la voire en action. Alors, celui qui est en haut peut contenter pleinement de tout ce qui se passe mais celui qui le supporte ne peut rien qu’imaginer. A part le côté qui raconte l’histoire des deux garçons qui, l’un domine l’autre de la tête et des épaules, regardent souvent en cachette une fille en train de faire sa toilette intime. On peut avancer que dans cette époque, les chanteurs s’intéressaient déjà au phénomène qui relève de la sexualité, étant donné que le voyeurisme fait preuve de l’éveil sexuel des jeunes. Cette situation évoque déjà une réalité que nous n’avons pas pensée. En effet, discrètement, les garçons s’intéressent dès leur jeun âge à l’intimité de la femme. Dans certains cas, cette curiosité éveille le désir sexuel des jeunes et incite à entrer précocement à ce stade.
Par conséquent, la réticence des parents est évidente concernant ces chansons car ils pensent qu’à force d’entendre souvent ces dernières, les personnes qui les écoutent pourraient être influencées. Ces chansons parlent aussi de la réconciliation entre un couple par l’orgasme. De ce fait, quand il y a dispute entre deux personnes amoureuses, c’est dans des actes sexuels ou encore dans la satisfaction sexuelle qu’ils trouvent un point d’attente dans leur vie de couple. Effectivement, le passage suivant en parle.
“(…) Odiako nadra,
Nefa ny tanako mijangajanga
Ao anaty lamba (…)”
(Traduction libre : « je fais semblant d’être crédule, pourtant ma main balade (sur la partie intime) sous la couverture ») .
Cet extrait de chanson montre la façon dont un homme entre dans un prélude de l’acte sexuel. Notons que dans cette chanson pour faire taire sa femme qui est entrain de lui gronder ou pour compenser son retard, un homme utilise une tactique un peu intelligente : il va donner une satisfaction sexuelle à sa femme pour qu’elle arrête de lui gronder. Il est clair d’après ce que cet artiste veut évoquer dans sa chanson qu’on peut tout arranger à partir de la sexualité et que les individus se réfugient dans cette lorsqu’ils sont à court d’idée pour la résolution d’un conflit entre leur couple.
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Table des matières
INTRODUCTION GENERALE
PREMIERE PARTIE : Cadre de la recherche
11 Repères méthodologiques
12 Cadre théorique
DEUXIEME PARTIE : les chansons à texte obscènes : productrices des liens sociaux ou génératrices de stigmatisation sociale ?
21 Quête de changement social ou révolution culturelle ?
22 L’obscénité dans les chansons : de l’underground à la médiatisation
23 Faux rituel ou suivisme des fans ?
24-La théorie textuelle dialectique dans les chansons à texte obscènes
TROSIEME PARTIE : De la praxis individuelle à la praxis collective
31 De l’interculturalité au conformisme
32 La soif d’un changement
33 Opérationnalisation de l’hypothèse
34 Limites épistémologiques de la recherche entreprise
35 Perspectives des nouveaux liens sociaux dans les chansons à texte
CONCLUSION GENERALE
QUESTIONNAIRE
BIBLIBOGRAPHIE