Flore rencontrée dans le processus cellulitique
Les germes habituellement impliqués dans les infections orofaciales d’origine dentaire sont multiples et reflètent généralement la flore orale présente, à l’état physiologique, chez l’adulte. La flore commensale est composée en moyenne de 70% de bactéries aérobies ou aéro-anaérobies strictes encore appelée flore de Veillon. On y trouve également des champignons (candida et divers protozoaires) [12]. La flore buccale présente trois caractéristiques principales. Elle est très riche: on dénombre entre 100 et 1000 milliards de bactéries par millilitre de salive. Elle est hétérogène: gram+, gram-, aérobies, anaérobies facultatives, microaérophiles, anaérobies strictes… Elle est polymorphe: cocci-bâtonnets, cocci-bacilles, fusobactéries, filament courbe, filament en virgule et filament en spirale, bactéries mobiles. La grande majorité de ces germes est retrouvée dans la plaque dentaire. Selon le Collège de l’Association Dentaire Américaine, la flore buccale est définie comme « une entité hautement variable, résultant de la colonisation et de la croissance de micro-organismes sur les surfaces dentaires et quelques tissus mous de la cavité buccale, et constituée par un grand nombre d’espèces de micro-organismes regroupées dans une matrice extracellulaire ». Ces bactéries adhèrent à des sites spécifiques de la cavité buccale, tels que le sillon gingivo-dentaire, les replis muqueux des joues, du palais, du plancher de la bouche et des gencives, les puits et fissures au niveau de l’émail. A chacune de ces niches écologiques correspond une composition particulière de la flore bactérienne. Certains micro-organismes peuvent se retrouver également en suspension dans la salive [12]. Les germes responsables de la cellulite se trouvent dans la cavité buccale en proportions déterminées pour réaliser un équilibre. Ces germes sont à l’état saprophyte et deviennent pathogènes dans certaines conditions de baisse des défenses tissulaires. Il existe normalement 70% d’aérobies pour 30% d’anaérobies, en cas d’infection aiguë, ces proportions s’inversent et les anaérobies dominent [21, 50]. Le diagnostic bactériologique n’est pas toujours fait dans les infections à germes anaérobies, et tous les germes dans les infections plurimicrobiennes ne sont pas identifiés, en raison de l’urgence et des conditions imparfaites de prélèvement et de transport [22, 38]. FASQUELLE [23] sépare nettement :
– les germes telluriques responsables de la gangrène classique qui sont essentiellement des clostridies producteurs d’enzymes protéolytiques ;
– les germes anaérobies non telluriques commensaux des muqueuses aérodigestives qui sont responsables : soit d’infections putrides dont le type est l’angine de Ludwig, soit des septicémies mono-microbiennes.
Parmi ces germes, on retrouve, en particulier :
– des cocci : streptocoques anaérobies et veillonella,
– des bacilles: bacteroides, fusibacterium, ramibacterium, corynebacterium, bifidobacterium [Peron J.].
Parmi les anaérobies, MARGENET [41] décrit par ordre de fréquence:
– clostriduim perfringens;
– bacteroides fragilis;
– corynebacterium;
– streptocoques anaérobies.
En ce qui concerne la gangrène gazeuse à point de départ dentaire, il faut faire deux remarques fondamentales :
– clostriduim perfringens et bacteroides fragilisgermes essentiels de la gangrène gazeuse, ne sont pas des hôtes de la cavité buccale ; ces germes sont seulement de passage apportés par l’alimentation ou le cure-dent végétal par exemple,
– certaines cellulites limitées de la région cervico-faciale, différentes par leur évolution de la gangrène gazeuse, sont dues à des germes anaérobies producteur de gaz tel que les bacteroides melanogeniticus hôtes de la muqueuse buccale.
L’ANGINE DE LUDWIG OU CELLULITE SUS- MYLOHYOÏDIENNE
Lorsque l’atteinte vient d’une dent postérieure, elle ne peut être due qu’à une péricoronarite de la dent de sagesse inférieure puisque les apex sont au dessous du muscle mylohyoïdien. La première molaire est, le plus souvent, à l’origine des cellulites susmylohyoïdiennes, par l’intermédiaire d’une lésion apicale dont le pus s’évacue vers le plancher au dessus du muscle mylohyoïdien [1, 16, 54].
Symptômes
A côté des signes généraux décrits apparaissent dès les premiers jours :
– des signes fonctionnels (dus au refoulement de la langue par la tuméfaction du plancher); la bouche entrouverte laisse écouler la salive sécrétée en abondance et qui n’est plus avalée ; la mastication et la déglutition sont difficiles, voire impossible ; la respiration est gênée, le malade est cyanosé ;
– localement apparaît une tuméfaction qui diffuse avec une extrême rapidité, pour envahir le plancher puis les régions voisines et atteint son complet développement en trois ou quatre jours [1, 16, 54]. La tuméfaction se manifeste extérieurement dans la région sus- hyoïdienne latérale sans modifier la couleur des téguments et surtout dans la bouche sous forme d’un bourrelet sublinguale qui refoule la langue en haut et en arrière. Le bourrelet gingival interne de Delorme borde la dent causale. D’abord mou, il devient d’heures en heures, de plus en plus dur. La crête sublinguale est recouverte d’une écume blanchâtre donnant ainsi, l’image d’une ¨crête sur la vague ¨. L’infection s’étend rapidement en produisant des indurations douloureuses de la région sous maxillaire et du plancher de la bouche qui expulse la langue de la cavité buccale. Partout cette tuméfaction est douloureuse, indurée. Le gêne respiratoire survient après extension de l’infection aux muscles linguaux qui obstruent le pharynx, l’œdème laryngé complète l’obstruction. La respiration est très difficile, une intubation nasotrachéale ou une trachéotomie est souvent nécessaire d’urgence [14]. L’asphyxie est le plus souvent due à un envahissement de l’espace thyroglosso-épiglottique. Puis vers le 6e ou 7e jour, si le malade résiste, des phlyctènes apparaissent sur la muqueuse sublinguale, des marbrures puis des eschares sur la peau de la région sus-hyoïdienne. On peut sentir en certains points, de la crépitation gazeuse qui correspond à une production de gaz par des germes responsables. Par la peau perforée spontanément ou après incision, s’écoule une sérosité louche et fétide, des débris sphacélés. Si le malade ne succombe pas à l’intoxication générale, il peut être emporté par une complication à type d’œdème de la glotte, de broncho-pneumonie, de syncope [1, 16, 57].
Antibiotique
L’objectif est d’agir sur la flore pathogène en cause, qu’elle soit spécifique ou non spécifique, qu’elle soit identifiée ou seulement suspectée. L’antibiothérapie est initialement probabiliste, elle est adaptée par la suite en fonction des résultats des différents prélèvements effectués (hémocultures, prélèvements préopératoires) [22, 38, 49].
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Table des matières
INTRODUCTION
PREMIERE PARTIE : GENERALITES
I. ANATOMIE DESCRIPTIVE
I.1. tissu cellulaire et loges celluleuses de la face
I.1. 1. Constitution
I.1.2.répartition
I .1. 2.1. Partie supérieure de la face
I .1.2. 2. Partie inférieure de la face ou bucco-pharyngienne
I.2. Situation des dents par rapport aux structures anatomiques de voisinages
I.2.1. Au maxillaire
I. 2. 2. A la mandibule
II. PATHOGENIE
II.1. Voie directe
II.2.Voie ostéopériostée
II. 3. Voie lymphatique et veineuse
III. ETIOLOGIE
III.1. Causes déterminantes
III.1.1. Causes dentaires
III.1.1.1. Complications de caries
III.1. 1.2. Traumatismes dentaires
III.1.2. Causes parodontales
III1.2.1. Eruption dentaire
III. 1.2. 2 . Parodontite
III. 1. 3. Causes iatrogènes
III.1.3.1. Extractions dentaires
III.1.3.2. Traitement canalaire
III.1. 3.3. Taille agressive d’une dent vivante
III.1.3.4. Prothèse traumatisante
III.1. 3.5. Après complication post opératoire
III.1.3.6. Anesthésie
III.2. Causes favorisantes
III.2.1. La mauvaise hygiène buccodentaire
III.2.2. Diabète
III.2.3. Prise d’Anti inflammatoires non stéroïdiens (AINS)
III.2.4. Corticoïdes
III.3. Autres causes
IV. BACTERIOLOGIE
IV.1. Flore rencontrée dans le processus cellulitique
IV.2. Action bactérienne
V. CLINIQUE
V.1. aspects cliniques des cellulites diffuses
V.1.1. Formes cliniques
V.1.1.1. Cellulites diffuses d’emblées
V.1.1.2. Cellulites diffusées
V. 1.1.3. Cellulites diffuses gangreneuses ou cellulites diffusantes
V.1.2. Formes topographiques
V.1.2.1. Cellulite diffuse de la face ou phlegmon du petit Duteil
V.1.2.2. Cellulite diffuse sus- mylohyoïdienne ou angine de Ludwig
V.1.2.3. Cellulite diffuse sous –Mylohyoïdienne ou phlegmon diffus de Lemaitre et rupe
V.1.2. 4. Cellulite diffuse péri- pharyngienne ou angine de Senator
V. 2. Examens complémentaires
V.2.1. Examens radiographiques
V.2.1.1. Radiographies classiques
V.2.1.1.1. Radiographie rétro alvéolaire
V.2.1.1. 2. Orthopantomogramme
V.2.1.2. Imagerie médicale moderne
V.2.1.2. 1. La tomodensitométrie (TDM)
V.2.1.2.2. Imagerie par résonance magnétique (IRM)
V.2.2. Examens bactériologiques
V.3. Diagnostic
V. 3.1. Diagnostic positif
V.3.2 Diagnostic étiologique
V.3.3. Diagnostic différentiel
VI. TRAITEMENTS
VI.1. Buts
VI.2. Moyens thérapeutiques
VI.2.1. Traitement préventif
VI.2.2. Traitement curatif
VI.2.2.1. Moyens Médicamenteux
VI.2.2.1.1. Antibiotique
VI.2.2.1.2. Choix de l’antibiotique
VI.2.2.1.3. Posologie et mode d’administration
VI.2.2.1.4. Corticothérapie
VI.2.2.1.5. Oxygénothérapie hyperbare (OHB)
VI.2.2.1.6. Antalgiques
VI.2.2.1.7. Alimentation
VI.2.2.1.8. Antiseptique
VI.2.2.1.9. Myorelaxant
VI.2.2. 2. Chirurgicaux
VI.2.2.2.1. Dispositions pré opératoires
VI.2.2.2.2. Protocole opératoire
VI.2.3. Traitement étiologique
VI.2. 3.1 Traitement conservateur
VI.2. 3.2 Traitement radical ou extraction dentaire
VI. 3. Indications
DEUXIEME PARTIE : NOTRE ETUDE
I. JUSTIFICATIF ET INTERET
II. OBJECTIFS DE L’ETUDE
III. PATIENTS ET METHODES
III.1. Cadre d’étude
III.1.1. LE SERVICE D’ODONTOSTOMATOLOGIE
III.1.2. SERVICE D’ORL
III.2. Type d’étude
III.3. Population d’étude
III.4. Procédure de collecte des données
III.5. Analyse des données
IV. RESULTATS
IV.1. Caractéristiques socio-demographiques
IV.1.1. Le sexe
IV.1.2. L’âge
IV.1.3. La zone de résidence
IV.1.4. La profession
IV.2. Caractéristiques cliniques
IV.2.1. Le délai de la consultation
IV.2.2. Etat général et facteurs de risque
IV.2.3. Répartition des patients selon l’étiologie
IV.2.4. Répartition des cellulites selon la dent causale
IV.2.5. Répartition des cellulites selon la forme clinique
IV.2.6. Répartition des formes cliniques en fonction de la topographie
IV.3. Répartition des patients selon le traitement
IV.3.1. Selon la durée de l’hospitalisation
IV.3.2. Le traitement précédent la consultation
IV.3.3. Le traitement reçu en milieu hospitalier
IV.3.3.1. Le traitement médicamenteux
IV.3.3.2. Le traitement chirurgical
V. DISCUSSION
V.1. Données sociodémographiques
V.2. Données cliniques
V.3. Données thérapeutiques
CONCLUSION
REFERENCES BIBLIOGRAPHIQUES
ANNEXES
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