Cellulite périmaxillaire chez la femme enceinte

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Physiopathologie

Phase séreuse 

Cette phase est caractérisée par des réactions vasculaires d’une part (principalement une vasodilatation responsable d’une augmentation du débit sanguin et d’un œdème par exsudation des protéines) et des réactions cellulaires d’autre part notamment une diapédèse en vue de la phagocytose.

Phase collectée 

La fuite liquidienne au travers des cellules endothéliales engendre une augmentation de la viscosité sanguine et un ralentissement circulatoire local responsable d’une margination des globules blancs suivi de leur adhérence aux parois vasculaires et de leur diapédèse. Les deux phases vasculaire et cellulaire sont étroitement intriquées. Les différents temps d’adhésion et de phagocytose mènent à la destruction des germes. En absence de traitement, les débris tissulaires nécrosés, les germes actifs ou détruits, les macrophages sains ou nécrosés forment le pus.

Etiologie 

Facteurs favorisants 

Différents facteurs peuvent favoriser l’apparition de cellulites tels que (11) (12) :
– l’immunodépression (SIDA, chimiothérapie anticancéreux, etc.) ;
– la grossesse ;
– le diabète ;
– la prise d’anti-inflammatoire seul ;
– l’antibiotique non adéquat aux germes responsables de ces cellulites.

Porte d’entrée

La cellulite est :
– soit d’origine dentaire : secondaire à la carie ou à la parodontopathie ; (7)
– soit des causes non dentaires : fractures ouvertes de la mandibule, infections maxillo-faciale et ORL etc… (7)

Carie dentaire 

La carie est une protéolyse microbienne de l’émail et de la dentine liée au développement et à la stagnation de la plaque dentaire (13).
Les germes responsables sont des germes commensaux pathogènes du milieu buccale, devenant pathogènes lors des conditions favorisantes (14) (15).
Les caries peuvent évoluer vers les abcès ou cellulites en absence de traitement (16).

Parodontopathies 

Les parodontopathies peuvent évoluer vers la pulpite par voie ligamentaire « a rétro », vers une monoarthrite latéro-radiculaire, vers une pyorrhée avec abcès intragingival ou vers une cellulite (17) (18).

Hôte 

L’affaiblissement des défenses de l’hôte joue un rôle essentiel en le désarment contre les infections banales qui, dès lors, s’exacerbent. Il peut être lié à des facteurs physiologiques : l’âge, la grossesse, (surtout au dernier trimestre), la nutrition (carence protéique et vitaminique), des facteurs immunitaires : le diabète, les traitements immunosuppresseurs, SIDA (6). Une prescription médicamenteuse inappropriée peut éventuellement être incriminée comme cela a été rapporté concernant les anti-inflammatoires. Une antibiothérapie inadaptée, facteur de sélection des germes, fait courir le risque de ne plus permettre de maîtriser les phénomènes infectieux (19) (20).

Germes en cause 

Comme la cellulite est un processus infectieux, les microbes tiennent une grande place dans leur étiologie. Ils proviennent de la flore buccale endogène (14). La diversité de cette flore rend compte du grand nombre d’agents pathogènes responsables (21) (22). Comme il n’est pas toujours facile de faire un prélèvement pour identifier les germes, il n’y a pas de germes spécifiques des cellulites dentaires. Cependant, on rencontre souvent des Streptocoques, des anaérobies genre Bacteroïdes, des Staphylocoques etc (23).

Symptomatologie 

Forme typique 

Type de description : la cellulite aiguë génienne d’origine dentaire passe par deux stades ; la phase séreuse et la phase suppurée.

Cellulite séreuse 

Elle est marquée par une fièvre 38°C à 38,5°C, une céphalée et un malaise général. Le patient se plaint d’une douleur violente spontanée, exacerbée par le contact des dents antagonistes et par la position de décubitus. Il y a apparition progressive d’une tuméfaction de la région génienne basse. C’est une tuméfaction de consistance élastique, douloureuse, recouverte d’une muqueuse inflammatoire. A la palpation, elle est mal limitée, ne prenant pas le godet, arrondie, recouverte d’une peau tendue lisse, rosée et chaude.

Cellulite suppurée

Elle succède à la cellulite séreuse. C’est le stade d’abcédation. Les signes généraux s’exacerbent. Les signes fonctionnels de périodontite régressent mais la douleur s’accentue : douleur lancinante avec irradiation diverse, insomniante, accompagnée d’asthénie et de céphalée, avec sensation d’abattement et de tension au niveau de la tuméfaction. Le trismus est majeur. Il peut y avoir aussi une fétidité de l’haleine, une sialorrhée et d’une dysphagie secondaire à l’infiltration des muscles de la langue et du plancher buccal. La tuméfaction est assez bien limitée, prend le godet, fluctuante. Les téguments sont luisants, rouge violacés, tendus et chauds.
La palpation est très douloureuse et peut mettre en évidence une fluctuation : signe de collection qu’on peut confirmer par une ponction exploratrice.

Forme clinique 

Formes topographiques 

Cellulite circonscrite

– Cellulite génienne :
La limitation de l’ouverture buccale est d’autant plus intense que la dent est postérieure (6).
– Cellulite massétérine :
Elle est peu fréquente. Il s’agit plus volontiers d’un accident sur dent de sagesse en malposition avec racine vestibulaire. Le tableau est dominé par un trismus très serré et douleur intense qui rendent compte de la difficulté de l’examen. La cellulite collectée initialement sous le masséter peut diffuser par l’échancrure sigmoïde vers la région para-amygdalienne et les espaces infra temporaux (7).
– Cellulite sous-mylohyoïdienne :
Le point de départ est la molaire inférieure. Le plancher buccal est oedèmateux simplement (6).
– Phlegmon de la face interne mandibulaire :
C’est le même degré de gravité que la cellulite du plancher. Ici, on est en présence de trismus serré. La dent de sagesse est souvent la dent responsable. Le phlegmon se collecte dans l’espace sous parotidien antérieur puis tend à gagner la région sous-maxillaire (24).

– Cellulite temporale :
Elle est exceptionnelle actuellement. Elle est secondaire à des processus infectieux étendus au décours d’autres abcès ou cellulite comme les sinusites maxillaires, l’abcès ptérygo-mandibulaire, les abcès jugaux, l’abcès masséterico-maxillaire. Sa complication primordiale est la myosite rétractile du muscle temporal, responsable d’une constriction permanente de la mâchoire. Cette cellulite complique la cellulite massétérine (5).
– Abcès migrateur vestibulaire inférieur ou buccinato-maxillaire de Chrompret et l’Hirondel :
Il a comme point de départ la dent de sagesse inférieure. Il y a une limitation de l’ouverture buccale, une hypœsthésie labio-mentonnère homolatérale (6).
– Abcès palatins :
Les infections périapicales des racines palatines de la première prémolaire ou des deux premières molaires supérieures sont responsables d’abcès palatin. Il peut y avoir une extension musculaire et cellulo-graisseuse sous forme phlegmoneuse avec dysphagie et dysphonie (7).
– Abcès jugal :
C’est une cellulite à point de départ prémolaire. La tuméfaction est en arrière de la commissure labiale. L’œdème ferme la fente palpébrale au bout d’un certain temps d’évolution. Il n’y a pas de trismus sauf en cas d’extension à l’espace parotidien. Le danger est le phlegmon périorbitaire avec un risque de cécité (7).
– Abcès vestibulaire :
Il est situé en regard de la dent causale sauf en cas d’abcès migrateur. C’est un processus purulent soulevant la muqueuse au maxillaire supérieur (5).
– Abcès infra temporal :
La symptomatologie fonctionnelle est bruyante avec un trismus, une douleur hémifaciale pulsatile, une fièvre. L’oedème est d’abord temporal puis jugal, œdème bipalpebral puis installation d’une exophtalmie et d’une limitation de l’oculomotricité, dysesthésie sous-orbitaire et bombement de cul de sac vestibulaire supérieur et inférieur ; le scanner est indispensable pour localiser la collection. Le risque primordial est la thrombophlébite ptérygoïdienne avec un risque d’extension au sinus caverneux (24).

Cellulite diffusée 

C’est le phlegmon péri maxillaire diffus qui fait suite à des cellulites circonscrites et se manifeste avec des signes généraux intenses et des signes locaux marqués par une diffusion à plusieurs loges cellulaires avec un processus nécrotique (16).
Sur le plan général, on est en présence d’une toxi-infection maligne. Rapidement après des frissons, le malade est couvert de sueurs, le faciès est pâle, la conscience est conservée et des signes méningés ou pleuro pulmonaires peuvent se sur rajouter (16) (24).
Sur le plan local, on note une tuméfaction limitée, molle, mais non fluctuante. Très vite, elle s’étend. Dans l’ensemble de la face, le début est génien ou ptérygo-maxillaire, mais très rapidement toute la face est intéressée ainsi que les régions environnantes. La diffusion peut se faire vers le cou et même le thorax et le médiastin (25) (26).

Cellulite diffuse d’emblée 

Elle ne fait pas suite à des cellulites circonscrites mais d’emblée diffuse avec un pronostic plus sombre. Les étiologies sont les périodontites, une extraction dentaire simple ou un traitement endodontique de la 2ème molaire inférieure infectée. A la clinique, on note un tableau général de toxi-infection et tableau loco régional dominé par une nécrose tissulaire galopante d’installation brutale voire foudroyante. Le signe clinique est débuté par un état de choc infectieux associant frisson, dissociation du pouls et de la température, sueur, pâleur, polypnée et hypotension artérielle suivi des signes secondaires signant les perturbations fonctionnelles avec diarrhée, vomissement, urines foncées et subictère. En absence de traitement, elles évoluent vers la mort par collapsus cardio-vasculaire (6) (7).
A l’examen physique, on note une tuméfaction molle, non fluctuante, peu douloureuse, de consistance ligneuse et qui s’étend rapidement. Les phénomènes purulents se voient 5 à 6 jours après. Si une artère est atteinte par le processus destructif, on assiste à des hémorragies cataclysmiques. On a :
– l’angine de Ludwig : cellulite de la région sus mylo-hyoïdienne Plus qu’une angine vraie, il s’agit d’une cellulite diffuse gangréneuse du plancher buccal et sus mylo-hyoïdien. L’œdème gagne rapidement la base de la langue. La respiration est gênée, de même la déglutition (27). Le danger primordial est l’obstruction des voies aériennes. La dent de six ans en est souvent la cause. Le creux sous mandibulaire se comble. Les signes fonctionnels s’exacerbent : douleur, trismus, dysphagie avec hypersalivation, gêne à l’élocution et dyspnée. Il faut considérer cette cellulite comme une urgence absolue dès ce stade. En effet, plus ou moins rapidement, l’œdème s’étend et la langue se trouve refoulée, d’autant plus vite que la cellulite s’étend vers l’oropharynx et vers le plancher buccal antérieur (27).
– le Phlegmon de Patel et Clavel, Lemaître et Ruppe : cellulite de la région sous-mylohyoïdienne Débutant dans la région sous maxillaire, l’infection gagne rapidement la région sous mentale et le côté opposé. La peau est couverte de phlyctène. L’envahissement se fait en direction des étages sous mylo hyoïdiens, thyro-hyo-épiglottique et également en arrière vers le muscle sterno-cléido-mastoïdien (6).
– l’angine de Senator : cellulite de la région péri pharyngée
La dent de sagesse inférieure est parfois en cause. La dysphagie, la dysphonie et surtout les troubles asphyxiques sont très précoces. L’ensemble du cou, voire le médiastin peut être envahi. Le pronostic est redoutable (6).
– le Phlegmon diffus de Petit-Dutaillis : cellulite de l’ensemble de la face
C’est une cellulite à point de départ ptérygo-maxillaire avec d’emblée un trismus intense, mais qui diffuse très vite à toute la face (7).

Formes évolutives 

Cellulite aiguë 

Elles peuvent résulter de causes dentaires ou péridentaires, notamment des infections apicales des dents permanentes. La cellulite, d’abord séreuse, caractérisée par des troubles circulatoires locales puis évolue vers une inflammation suppurative circonscrite. Leur localisation est variable et dépend de l’épaisseur de l’os alvéolaire, de la situation des apex par rapport au fond du vestibule ou aux insertions musculo-aponevrotiques. Elles peuvent donc être périmandibulaire ou péri maxillaire (28).
Les complications de ces cellulites peuvent être : une atteinte ganglionnaire, une cellulite diffuse, une ostéite, une thrombophlébite cranio-faciale ou une septicémie, ou une suppuration (29).

Cellulite subaiguë 

Elle fait suite à une cellulite suppurée mal traitée, soit en raison d’un drainage insuffisant, soit en raison d’un traitement étiologique mal dirigé ou négligé. Elle se caractérise par l’apparition de nodule arrondi, ovalaire le plus souvent, de volume variable de contours précis, de reliefs irréguliers sous la peau amincie, de couleur normale, sans augmentation de la température. La palpation du nodule est indolore ou peu douloureuse, de consistance dure ou ferme, parfois avec une zone plus ou moins molle au centre, adhérent à la peau mais souvent non fixée aux tissus sous jacents. On perçoit parfois un cordon induré reliant le nodule à la région en cause. On note l’absence de signes infectieux généraux (7).

Cellulite chronique 

Elle ne s’accompagne pas d’une atteinte de l’état général ni d’adénopathie. La suppuration s’extériorise et laisse une fistule cutanée. Il existe toujours une adhérence au plan osseux sous jacent. Une extension à l’orbite, aux méninges, au cerveau sont des complications possibles de ces affections (30) (31).

Cellulite gangréneuse 

Elle est beaucoup plus rare. Elle est caractérisée par une gangrène localisée. C’est-à-dire une destruction tissulaire par nécrose. Cliniquement, il s’agit d’une cellulite suppurée avec des crépitations (ou bruits hydroaériques) perceptibles à la palpation. Les signes généraux sont importants sans atteindre cependant le degré de gravité d’une toxi-infection généralisée. Macroscopiquement, le pus est fétide, de couleur brunâtre, avec présence de gaz (7).

Evolution 

En absence de traitement, la cellulite évolue vers : (16) (32)
– la fistulisation cutanée ou muqueuse
– la diffusion vers d’autres structures donnant les myosites et ostéites
– la thrombophlébite faciale, cranio-faciale et cervicale
– le décès
Sous traitement, elle évolue vers :
– la régression des symptômes ou leur disparition
– la chronicité en cas de traitement incomplet et inadéquat (7)

Traitement 

But 

Le but de ce traitement est de :
– soulager le patient,
– lutter contre la propagation et de l’infection,
– traiter la cause de la cellulite,
– empêcher la survenue de l’avortement ou de l’accouchement prématuré chez la femme enceinte (2) (4).

Traitement dentaire 

Le traitement conservateur consiste en une trépanation dentaire avec drainage transcanalaire. Un traitement radical par extraction dentaire avec curetage chirurgical de l’alvéole et du tissu parodontal est réalisé. Cette extraction dentaire est indiquée uniquement lors du deuxième trimestre de la grossesse. Dans d’autre cas, on attend l’accouchement (39).

Moyen préventif 

– Hygiène dentaire : constitué de brossage dentaire après chaque prise alimentaire, surtout après prise de sucre, détartrage une fois par an pour diminuer l’apparition de carie ou de parodontopathie ;
– Traitement et prophylaxie des caries ;
– Antibiothérapie préventive, lors des soins dentaires chez les immunodéprimés (36).

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Table des matières

INTRODUCTION
Première partie : RAPPELS THEORIQUES
1. Modification de l’organisme maternel au cours de la grossesse
1.1. Modification hématologique
1.2. Réaction de l’organisme maternel à l’hyperthermie
2. Cellulite périmaxillaire chez la femme enceinte
2.1. Définition
2.2. Rappels anatomiques
2.2.1. Position des apex dentaires
2.2.2. Espaces de glissements
3. Physiopathologie
3.1 Phase séreuse
3.2 Phase collectée
4. Etiologie
4.1 Facteurs favorisants
4.2 Porte d’entrée
4.2.1 Carie dentaire
4.2.2 Parodontopathies
4.3 Hôte
4.4 Germes en cause
5 Symptomatologie
5.1 Forme typique
5.1.1 Cellulite séreuse
5.1.2 Cellulite suppurée
5.2 Forme clinique
5.2.1 Formes topographiques
5.2.2 Formes évolutives
6. Evolution
7. Traitement
7.1 But
7.2 Moyen
7.2.1 Moyen curatif
7.2.2 Moyen préventif
7.3 Indications
7.3.1 Cellulites circonscrites aiguës
7.3.2 Cellulites diffuses
7.3.3 Cellulites subaiguës et chroniques
7.3.4 Traitement d’une fistule dentaire
Deuxième partie : NOTRE ETUDE
1. Matériels et méthodes
2. Nos observations
3. Résultats
Troisième partie : DISCUSSION ET SUGGESTIONS
Discussion
Suggestions
CONCLUSION

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