CCHE, un bureau d’architecte pluridisciplinaire
La gouvernance de l’information
Depuis 2010, la gouvernance de l’information essaye de répondre à des besoins ayant émergés dans le contexte d’une mondialisation des échanges toujours plus grands, ainsi qu’aux différentes évolutions liées au numérique :
Techniques ;
Règlementaires, imposant aux entreprises de mieux gérer leurs flux d’information ;
Du marché, plus exigeant face à l’image des entreprises ;
Normatives, visant à rendre plus cohérente la gestion de l’information.
Dans ce contexte de plus en plus intransigeant, le management de l’information doit devenir une des préoccupations centrales des entreprises : pour Makhlouf Shabou (2016), une bonne gouvernance de l’information doit se conformer aux principes fondamentaux que sont l’intégrité, la sécurité, l’accessibilité, la préservation, la réutilisation, la responsabilité et la traçabilité de l’information. Afin d’harmoniser ces différents éléments :
« La gouvernance de l’information englobe et permet de rapprocher les diverses exigences juridiques et de conformité ainsi que les risques qui relèvent de différentes disciplines (gestion des documents et de l’information, confidentialité des données, sécurité de l’information, administration de la preuve électronique) .L’examen des objectifs poursuivis par ces disciplines permet de dégager des chevauchements fonctionnels qu’il est possible de rentabiliser (s’ils sont synergiques), de coordonner (s’ils fonctionnent en parallèle) ou de réconcilier (s’ils entrent en conflit) [traduction]».
Les objets de la gouvernance : l’information, les actifs informationnels et le document
Une gouvernance de l’information, à travers ses aspects globaux et multidimensionnels, gère différents objets, qu’il est souvent difficile de distinguer les uns des autres, ces éléments étant dans la pratique interdépendants. L’un des objets constitutifs, et qui apparait dans le nom même de la discipline, est l’information : cette dernière, pour qu’elle existe, est constituée de plusieurs dimensions, représentée ici par Perrein :Dans le contexte de notre travail, qui est celui de l’entreprise, l’information est souvent synonyme de facteur de production, au même titre que les ressources financières ou encore humaines : en effet, Wildhaber (2017, p.47) définit l’information comme « data which, through analysis, interpretation, or combination, creates value for the compagny. ». Plus précisément, on parle de l’information comme étant « (…) un bien commun, c’est-à-dire comme une ressource stratégique faisant partie de la culture de l’institution. » (Université de Lausanne, 2014, p.4). Elle est dès lors un des constituants principaux de la stratégie des organisations et entreprises, dès l’instant où elle est, selon l’Université de Lausanne (2014, p.4) « (…) correctement gérée, exploitable et transformée en connaissance. ».
Les processus de la gouvernance : le cycle de vie, le flux et la gestion d’information
Une fois les objets de la gouvernance définis, il est nécessaire de présenter les trois processus constituant la gouvernance de l’information.
Tout d’abord, il est important de rappeler qu’une information ainsi qu’un document ont tous deux un cycle de vie, c’est-à-dire que chacun passe par des étapes, de sa création à son sort final .De manière traditionnelle en archive, le cycle de vie est souvent défini à travers la théorie des trois âges, popularisée en France par Yves Pérotin.
Cette théorie affirme que tout document passe successivement par deux à trois étapes durant son existence :
1. Les archives courantes (ou document actif), qui sont les documents utilisés au quotidien,
2. Les archives intermédiaires ou semi-actives (document passif), où le document est gardé à titre consultatif, mais n’est plus nécessaire au fonctionnement quotidien ;
3. Les archives définitives, qui sont les documents dont la conservation n’est plus nécessaire du point de vue légal et de l’activité. A ce stade, ils sont soit détruits, soit confiés à un service d’archive historique.
Afin de faire coordonner l’information et le document, nous choisissons dans notre travail de nous placer du point de vue du records management, où les étapes sont résumées comme suit :
1. « Création (ou capture) du document ;
2. Validation du document (avec plusieurs itérations possibles) ;
3. Utilisation (diffusion/publication) ;
4. Fin de l’usage courant ;
5. Échéance légale ou institutionnelle (déterminée par une durée d’utilité administrative). »
Etat des lieux des pratiques en entreprises
L’environnement dans lequel évoluent les entreprises ces cinq dernières années change de plus en plus rapidement. En effet, avec les innovations numériques, et dans une société fonctionnant par flux et produisant des informations toujours plus nombreuses, les organisations se trouvent dans l’obligation d’intégrer dans leur stratégie d’entreprise une réflexion autour de la gestion informationnelle, afin de pouvoir s’intégrer dans une société où le changement est devenu le moteur principal.
Dans la pratique, on constate toutefois que la gouvernance de l’information est une réalité limitée : dans son étude de 2016, Serdalab (2016, p.7) constate qu’en France, seulement dix sept pourcents des entreprises privées et sept pourcents des organisations publiques mettent en œuvre une démarche de gouvernance. Fuzeau (2017) et Hassanaly (2013) expliquent que les entreprises fonctionnent non pas de manière globale, comme la gouvernance de l’information le préconise, mais par métier, ou par projet : on est alors dans une démarche dite de « gouvernance d’activité », où « l’organisation se fait par projet/client même si cela ne suit pas tous les aspects normatifs préconisés dans les manuels. » (Hassanaly, 2013). On observe alors que les pratiques de gouvernance sont, selon Fuzeau (2017), principalement appliquées sur les entités métiers et sur les ressources électroniques, les données techniques n’étant pas intégrées dans les processus. Pour Blanger (2013) les dirigeants priorisent leurs processus et leurs besoins dans leur fonctionnement
La place de la gouvernance de l‘information
Loin d’être incompatible avec cet objectif, mettre en place une démarche de gouvernance permet, au contraire :
« D’encadrer la mise en œuvre de processus de gestion de l’information numérique pour toute activité exercée, pour assurer la cohérence d’ensemble, la rationalisation et le management. Elle est un outil d’échanges et d’appropriation pour les utilisateurs, de plus en plus acteurs » (Fuzeau, 2017, p. 17).
Elle peut donc être comparée à une démarche qualité et d’amélioration continue qui s’inscrit, comme toutes les problématiques de l’entreprise, à un programme global : ainsi « une bonne gouvernance de l’information doit s’accorder avec la gouvernance et la stratégie de l’entreprise. Il est donc important de connaître les objectifs stratégiques afin de s’aligner dessus » (Nicolet, 2016, p.32). Plus précisément, Wildhaber (2016, p.34) la situe au niveau de la recherche de la conformité, en amont des activités quotidiennes de l’entreprise. En effet, elle est un outil de prévision de potentiels risques et dangers que peut rencontrer une organisation. Pour Glassig (2016): « An Information Governance program should be compared to the organization’s corporate governance program or its health and safety program; as something permanent that the organization will always have. This means the establishment and operation of an Information Governance program needs a strong commitment from the executive suite and drive from key sponsors to make it happen, and make it continue. »
La culture informationnelle
Dans cet objectif, la gouvernance doit être consignée (comme nous venons de le voir), engagée (avec la direction) et surtout communiquée. En effet, s’intégrant dans la stratégie globale, elle est un outil du décideur, mais également un outil de communication et de collaboration. Il est dès lors important, pour la valoriser mais aussi pour garantir son bon fonctionnement, de mettre en place une culture informationnelle dans l’entreprise : dans son travail, Grazhenskaya (2017, p.32) explique « IG implementation requires a lot of change in the field of culture and change management. And « a lot of people have completely underestimated the cultural factors in IG implementation. » (Expert 6) ». En effet, l’un des comportements souvent identifiés en entreprise dans la gestion de l’information est le fonctionnement par silo, qui rejoint les pratiques définies comme gouvernance de l’activité explicité ci-dessus. De Géry (2009, p.15) a constaté qu’il y existe rarement une organisation transverse de contenu, ce qui provoque une démultiplication des lieux de stockage, des formats et de l’information en elle-même : on assiste alors à une perte de contrôle sur les processus et actifs informationnels, qui expose les organisations de nombreux risques, notamment au niveau légal et de la sécurité de l’information.
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Table des matières
1. Introduction
1.1 Problématique
2. Méthodologie
2.1 Collecte des données
2.1.1 Étape de la collecte
2.1.2 Plan d’échantillonnage
2.2 Devis de recherche : processus et qualité
2.2.1 Processus de la recherche
2.2.2 Qualité de la recherche
3. Un état des lieux de la gouvernance informationnelle, et de sa place au sein des pratiques des entreprises
3.1 Quelques concepts à définir
3.1.1 La gouvernance de l’information
3.1.2 Les objets de la gouvernance : l’information, les actifs informationnels et le document
3.1.3 Les processus de la gouvernance : le cycle de vie, le flux et la gestion d’information
3.2 La gouvernance de l’information en entreprise : état des lieux et pratiques
3.2.1 Etat des lieux des pratiques en entreprises
3.2.2 La place de la gouvernance de l‘information
3.2.3 L’outil de la gouvernance : la politique de gouvernance de l‘information
3.2.4 La culture informationnelle
3.2.5 Les bénéfices de la gouvernance pour l’entreprise
3.3 Gérer l’information : une dimension de la stratégie d’entreprise
3.3.1 Premier axe : l’instance de gouvernance informationnelle
3.3.2 Deuxième axe : construire une architecture de l‘information
3.3.3 Troisième axe : s’inscrire dans une démarche qualité
3.4 Les différentes dimensions de la gouvernance de l’information
3.4.1 La sécurité de l’information
3.4.2 Le stockage de l’information
3.5 En résumé
4. CCHE, un bureau d’architecte pluridisciplinaire
4.1 Présentation et structure de l’entreprise
4.1.1 Les secteurs de l’entreprise
4.1.2 Les normes SIA, ou l’art de bâtir en Suisse
4.1.3 Le cycle de vie d’une affaire
5. Analyse de l’existant
5.1 Analyse globale
5.1.1 Etat actuel de la gouvernance de l’information
5.1.2 Les documents importants
5.1.3 Présentation des trois serveurs
5.1.4 L’arborescence informatique
5.2 Gestion d’une affaire au niveau informationnel
5.2.1 Le cycle de vie documentaire d’une affaire
5.2.2 Les serveurs « DAO » et « Affaire »
5.3 Portrait général des pratiques : besoins et problèmes identifiés
5.3.1 Les besoins de CCHE : Cohérence, Coordination et Cohésion
5.3.2 Les problèmes identifiés
5.4 Une photographie des pratiques actuelles
6. Recommandations
6.1 Outil : la politique de gouvernance informationnelle
6.1.1 Axe de la politique
6.1.2 Outils de la politique
6.2 Démarche
6.2.1 La formation, un outil d’aide au changement
6.2.2 Les indicateurs comme preuve d’efficacité
6.2.3 La gouvernance de l’information : guider et être guidé
6.2.4 Un accès aux connaissances plus central
6.2.5 Intégrer des notions de knowledge mangement
7. Conclusion
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