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LE MODE DE RECUEIL DES DONNEES
Caractéristiques de l’enquêteur
Je suis une jeune femme médecin généraliste ayant terminé l’internat il y a un an et demi. Dans mon cursus, j’ai bénéficié d’une formation médicale axée sur le socio-culturel en effectuant des stages en PMI (Protection Maternelle et Infantile) au Havre, à la PASS (Permanence d’Accès aux Soins de Santé) et à la Maison d’Arrêt de Rouen. Je n’avais ni expérience en recherche clinique, ni lien avec les participants avant la réalisation de cette étude.
Guide d’entretien
Un questionnaire (annexe n°2) a été établi avant la réalisation des entretiens. Je l’ai construit, dans un premier temps, sur la base de mon expérience professionnelle, des interrogations qui en ont découlé, et des recherches bibliographiques effectuées ((24), (26), (27)). Ma directrice de thèse, le Docteur Elsa Fagot-Griffin, m’a également aidée à le structurer et à discerner les questions essentielles qui s’en dégageaient.
Ce guide d’entretien a été testé préalablement, puis ajusté et amélioré dans un second temps grâce à l’aide de Thomas Guillemin et de Haddia Diarra, que j’ai rencontrés à cet effet. Thomas Guillemin, directeur de l’association Pré Fleuri – Centre Social à Caucriauville, a une connaissance professionnelle approfondie de l’Afrique et de la population africaine. Haddia Diarra, psychologue clinicienne au sein de TERRA Psy au Havre, a bénéficié d’une formation d’ethnopsychologue5.
Il se composait de plusieurs parties. Une première partie contenant une présentation brève de l’enquêteur, de l’étude, ainsi que des modalités de réalisation de l’entretien. La seconde partie était constituée d’une trame de questions ouvertes et de quelques relances éventuelles permettant au participant d’aborder les grands thèmes suivants : la santé, la maladie, la médecine traditionnelle africaine et la médecine occidentale. La troisième partie abordait les critères démographiques et socio-professionnels du participant s’ils n’avaient pas été évoqués durant l’entretien. Puis ce dernier se clôturait par une formule de remerciement. Il n’a pas été proposé aux participants d’obtenir un retour des transcriptions. Ce canevas n’était pas figé. Il a été adapté au fil des premiers entretiens.
En définitive, le guide d’entretien servait essentiellement de guide au dialogue, et n’était en rien directif. « Son rôle consiste à effectuer les bonnes relances aux moments opportuns afin de balayer tout le guide d’entretien, sans pour autant influencer l’interviewé dans ses réponses ou lui couper la parole » (27). Ainsi, les grands thèmes spécifiés n’étaient pas obligatoirement abordés dans l’ordre préparé. La spontanéité du discours était importante.
L’élaboration de ce guide d’entretien était donc une étape primordiale.
L’entretien qualitatif semi-dirigé
Caractéristiques générales
Les entretiens étaient individuels, semi-dirigés. Ils étaient donc réalisés en face à face, à partir du guide d’entretien.
L’ensemble des entretiens était réalisé entre le 25 septembre 2017 et le 13 décembre 2017 inclus à Caucriauville. Le lieu des entrevues était choisi par chaque participant. En effet, il était nécessaire que l’entretien se déroule dans un cadre accueillant et bienveillant pour le participant. Les entretiens ont donc été effectués au cabinet médical, ou au domicile du participant, ou bien dans une des associations précédemment citées, ou encore sur le lieu de travail. La durée de chaque entretien était indiquée au participant, et estimée entre 20 à 60 minutes. Chaque entretien n’a été fait qu’une seule fois.
L’enregistrement audiophonique
L’intégralité des entretiens a dans un premier temps fait l’objet d’un enregistrement audiophonique, de façon anonyme, après accord oral du participant. Ils ont ensuite été retranscrits dans un second temps pour l’analyse.
L’aspect éthique
Fiche d’information auprès des participants
A chaque début d’entretien, je remettais au participant une fiche d’information (annexe n°3) que je commentais point par point. Elle relatait le but de l’étude et le mode de recueil des données. J’insistais sur le caractère strictement anonyme des informations qu’il me donnait. Je lui expliquais également qu’il pouvait se retirer de l’étude à tout moment, sans avoir à se justifier. Il devait simplement m’en informer. Si c’était le cas, les informations recueillies étaient détruites.
Un consentement éclairé était ensuite remis à la personne interrogée.
Consentement écrit
Le consentement était oral et écrit (annexe n°4), en double exemplaire. Il devait être signé avant l’entretien par le participant et par l’enquêteur.
LA METHODE D’ANALYSE DES DONNEES
La méthode d’analyse des données choisie était celle de la théorie ancrée ou « grounded theory ». C’est « une méthode de recherche inductive visant à la construction d’une théorie à partir de données empiriques recueillies » (29).
Les étapes d’élaboration de cette théorie étaient les suivantes : la transcription verbatim des données puis l’analyse descriptive (nommée également « codage ouvert ») et enfin l’analyse thématique (nommée également « codage axial »).
Transcription verbatim des données
L’ensemble des enregistrements audiophoniques a été retranscrit intégralement et informatiquement, « mots à mots », en conservant le langage non verbal, à l’aide du logiciel Microsoft Word® 2011. Cette transcription était faite dans les plus brefs délais après l’entretien, soit au maximum un jour après la réalisation de ce dernier.
Les entretiens retranscrits sont regroupés sur un DVD (annexe n° 5). Les initiales M.M correspondent à l’enquêteur. Chaque participant était désigné par la lettre « E », afin de garantir leur anonymat, suivi de chiffres correspondant à leur ordre de passage lors des entretiens.
Le codage ouvert : analyse descriptive
Dans un second temps, les verbatim ont été analysés de façon descriptive : chaque entretien a été relu phrase par phrase afin d’en dégager « une première formulation significative (code) » (22), qui correspond aux idées générales exprimées par le participant. Chaque code est désigné par un ou plusieurs mots-clés reproduits en caractère gras dans la partie « résultats ». Les étiquettes correspondent aux explications détaillées de certains codes et sont inscrites avant une ou plusieurs citations. Ce codage ouvert a été réalisé manuellement via Microsoft Word® 2011 par l’enquêteur seul.
L’analyse descriptive permet ainsi de résumer et de rassembler les concepts qui ressortent de chaque entretien. Elle était concomitante au recueil des données, donc continue. La saturation des données était obtenue lorsqu’aucune nouvelle idée n’était ressortie lors de l’entretien suivant.
Le codage axial : analyse thématique
Dans un troisième temps, chaque code établi était regroupé dans une catégorie représentant l’idée qu’il véhicule. Chaque phrase pouvait contenir plusieurs idées et être ainsi classée dans plusieurs catégories différentes. Les catégories de signification similaire des différents verbatim étaient ensuite regroupées en thèmes plus généraux, n’étant pas prédéfinis, et parfois déclinés en sous-thèmes plus détaillés selon la particularité de l’idée émise. La mise en relation des différentes catégories et des liens qui existent entre elles permettait de répondre à la question posée et d’élaborer ainsi une théorie. Ce codage thématique a été réalisé par mes soins et par le docteur Elsa Fagot-Griffin.
Les thèmes étaient au nombre de trois :
Représentations de la santé, de la maladie et du système de soins par une personne d’origine sénégalaise,
Représentations de la médecine traditionnelle africaine et de la médecine occidentale en France,
Représentations du système de soins au Sénégal.
LA RECHERCHE BIBLIOGRAPHIQUE
Les recherches bibliographiques pour cette étude ont été réalisées en langue française, principalement, et anglaise dans les bases de données suivantes : SUDOC, CISMeF, Pubmed, l’INSEE, la BDSP, CNRS (Francis), CAIRN, l’OMS, Google Scholar®. Les principaux mots clés utilisés étaient :
Recherche qualitative,
Afrique traditionnelle/ Sénégal / France,
Anthropologie de la santé/ Ethnomédecine,
Biomédecine / Médecine académique / Médecine occidentale/ Médecine moderne/ Médecine traditionnelle / Médecine interculturelle / Guérisseur/ Marabout/ médecin généraliste/ Pratique thérapeutique / tradithérapeute6 africains / tradithérapie africaine7
Itinéraires thérapeutiques / pluralisme médical,
Culture / Diversités culturelles / Identité culturelle/ Croyances/ Traditions,
Immigré,
Relation malade thérapeute/ Représentations de la maladie/ Représentations de la santé/ Représentations de la médecine,
Traditional african medicine/ modern medicine/ traditional and conventional medicine collaboration.
Tradithérapeute : thérapeute pratiquant la médecine traditionnelle.
Dans cette étude, le terme « tradithérapie » désigne la tradithérapie africaine.
RESULTATS
DESCRIPTION DES ENTRETIENS
J’ai réalisé treize entretiens semi dirigés en français entre le 25 septembre 2017 et le 13 décembre 2017 inclus. Chaque personne interrogée était seule durant l’entretien. Deux entretiens m’ont été refusés par manque d’intérêt pour le sujet et un autre entretien a été annulé par la personne pour raison de santé.
Sur ces treize entretiens, neuf personnes interrogées ont été recrutés dans les diverses associations citées dans la partie « matériel et méthode » et quatre au sein du même cabinet médical à Caucriauville par l’intermédiaire d’une des infirmières et de deux médecins qui y travaillent.
Concernant les lieux de réalisation des entrevues, un entretien a été réalisé au cabinet médical, six au domicile des personnes, cinq à l’association FADSA (citée ci-dessus) et un sur le lieu de travail du participant.
Les entretiens ont duré en moyenne 43 minutes (de 30 minutes 11 secondes à 66 minutes). L’ensemble des participants a accepté que l’entretien soit enregistré par dictaphone. Aucun des participants n’a souhaité interrompre l’entretien ou ne s’est rétracté a posteriori.
CARACTERISTIQUES SOCIO-PROFESSIONNELLES ET DEMOGRAPHIQUES DE LA POPULATION INTERROGEE
J’ai interrogé huit femmes et cinq hommes. L’âge moyen était de 47,73 ans (minimum 20 ans et maximum 74 ans) et la durée moyenne de résidence en France de 29,23 ans (minimum 7 ans, maximum 56 ans). Dix personnes sont nées au Sénégal et trois sont nées en France. Onze des participants étaient de confession musulmane, un de confession chrétienne et un animiste de confession chrétienne.
Concernant leur statut familial, neuf participants étaient mariés, un était divorcé, un était célibataire, un était veuf et un était veuf d’un premier mariage et en instance de divorce d’un second mariage. Neuf participants avaient au moins un enfant, trois participants n’avaient pas d’enfant. Pour un des participants, le nombre d’enfants n’était pas connu. Chaque participant avait un lien avec le Sénégal : il y retournait soit régulièrement, soit occasionnellement. Un des participants n’y était pas retourné depuis le décès de sa mère en 2004.
Le motif d’immigration était similaire pour neuf des participants : le rapprochement familial. Pour trois des participants, ce motif était inconnu. Pour un des participants, il s’agissait de trouver du travail et voyager.
Concernant le niveau scolaire, cinq des personnes interrogées avaient un diplôme (trois de niveau supérieur à BAC + 2, un de niveau BAC professionnel, un d’aide soignant et un niveau brevet des collèges) et un participant en cours d’obtention du diplôme d’aide soignant. Deux des participants ne savaient ni lire ni écrire, deux autres n’avaient pas de diplôme. Le niveau d’étude n’était pas connu pour deux participants.
Deux des participants avaient l’un de ses parents né en Guinée, et un né en Mauritanie. Les autres participants avaient leurs deux parents nés au Sénégal. Les pères de deux des participants avaient un statut professionnel reconnu au Sénégal (statut de cadre). Six autres participants étaient issus d’une famille moins aisée. Le contexte socio-professionnel familial des cinq autres n’était pas connu.
Tous les participants avaient consulté un tradithérapeute durant leur enfance en France ou au Sénégal, et avaient tous actuellement un médecin traitant. Deux d’entres eux avaient recours la médecine traditionnelle africaine en France (dont un occasionnellement, et un régulièrement), neuf à la médecine occidentale au Sénégal et six à la médecine traditionnelle africaine au Sénégal.
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Table des matières
INTRODUCTION
1. Caucriauville : bassin de population immigrée principalement sénégalaise
2. Dimension culturelle des soins
2.1. Quelques définitions
2.2. Approche interculturelle des soins
3. Objectifs de l’étude
3.1. Objectif principal
3.2. Objectifs secondaires
MATÉRIEL ET MÉTHODE
1. Le type d’étude
2. Population étudiée
2.1. Caractéristiques des personnes interrogées
2.2. Processus de recrutement
2.3. Saturation des données
3. Le mode de recueil des données
3.1. Caractéristiques de l’enquêteur
3.2. Guide d’entretien
3.3. L’entretien qualitatif semi-dirigé
3.4. L’aspect éthique
4. La méthode d’analyse des données
4.1. Transcription verbatim des données
4.2. Le codage ouvert : analyse descriptive
4.3. Le codage axial : analyse thématique
5. La recherche bibliographique
RÉSULTATS
1. Description des entretiens
2. Caractéristiques socio-professionnelles et démographiques de la population interrogée
3. Représentations de la santé, de la maladie et du système de soins par les personnes d’origine sénégalaise
3.1. La santé
3.2. La maladie
3.3. La prévention
3.4. Le suivi médical et l’éducation thérapeutique du patient
3.5. Les différentes solutions de soins
3.6. Comportements face aux traitements
4. Représentations de la médecine traditionnelle africaine et de la médecine occidentale en France
4.1. Définition des principaux termes
4.2. Quelle formation pour quelle pratique ?
4.3. Itinéraires thérapeutiques : motifs de recours aux différentes solutions de soins
4.4. Les différentes pratiques
4.5. Les charlatans
4.6. Les attentes des personnes d’origine sénégalaise concernant le système de soins
4.7. Possibilité d’une complémentarité des deux médecines en France ?
5. Représentations du système de soins au Sénégal
5.1. Comparaisons des différentes solutions de soins
5.2. Les itinéraires thérapeutiques des participants au Sénégal
5.3. Particularités des retours au pays
DISCUSSION
CONCLUSION
BIBLIOGRAPHIE
ANNEXES
1. ANNEXE N° 1 : ACCORD DE LA CNIL
2. ANNEXE N° 2 : GUIDE D’ENTRETIEN
3. ANNEXE N° 3 : NOTE D’INFORMATION DESTINEE AUX PARTICIPANTS
4. ANNEXE N° 4 : FORMULAIRE DE CONSENTEMENT
5. ANNEXE N° 5 : ENTRETIENS RETRANSCRITS EN PDF (DVD CI-JOINT)
6. ANNEXE N° 6 : TABLEAU N° 1 FORMAT A3 DÉTACHABLE
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