Catalycité et vieillissement des matériaux à haute technicité

Lors du retour dans l’atmosphère d’un engin spatial, son bouclier thermique subit de fortes contraintes résultant des flux énergétiques très élevés conduisant à l’échauffement de la surface jusqu’à des températures de 2000 K au niveau du nez de l’engin. Ce flux thermique provient en partie de la recombinaison de l’oxygène atomique produit par l’onde de choc provoquée par la vitesse supersonique de l’engin (environ 300 K dans l’intervalle de température 1573 K-1773 K, où la plupart des matériaux deviennent fragiles). Ces transferts sont mesurables par une grandeur appelée catalycité qui est définie comme étant le produit entre le coefficient de recombinaison γ et le coefficient d’accommodation β, à une constante près. La réaction de recombinaison de deux atomes d’oxygène à la surface du matériau est exothermique. L’énergie libérée lors de cette recombinaison est partagée entre la molécule qui désorbe et la surface du matériau. La catalycité d’un matériau se définit en fonction du transfert de matière (coefficient γ) et le transfert de chaleur (coefficient β) à la surface de celui-ci, augmentant ainsi sa température.

SIMULATION DES CONDITIONS DE RENTREE ATMOSPHERIQUE 

Généralités sur le plasma 

Le plasma, considéré comme le quatrième état de la matière, constitue la majorité de l’Univers. Présent sur Terre naturellement sous forme d’éclairs ou d’aurores boréales, il peut être créé artificiellement pour des applications telles que les téléviseurs, la fusion nucléaire (Tokamak), les néons… Il est définit comme un gaz ionisé, électriquement neutre et composé d’électrons, d’ions, de molécules et d’atomes dans leur état fondamental ou excité. C’est le résultat de collisions électrons-molécules qui sont régies par les lois suivantes :
– conservation de l’énergie
– conservation de la quantité de mouvement
– conservation du mouvement cinétique
– conservation des charges
– conservation des masses .

Il existe deux types de collisions : les collisions élastiques et les collisions inélastiques. Les collisions élastiques sont responsables du transfert d’énergie interne sans changement de la nature chimique et contribuent à l’établissement de l’équilibre thermodynamique ou du régime permanent. Elles sont responsables du transfert de quantité de mouvement (diffusion, viscosité, conduction de la chaleur). Les collisions inélastiques engendrent une redistribution de l’énergie interne du système. Elles sont à l’origine de l’excitation et de l’ionisation du gaz. Deux familles de plasma sont à considérer en fonction de l’énergie des électrons et de leur densité électronique :
– les plasmas froids à basse densité énergétique ou basse pression pour lesquels la température moyenne du gaz reste voisine de la température ambiante. Il n’y a pas d’équilibre thermodynamique d’ou le nom de plasma « hors équilibre ».
– à l’opposé, lorsque l’équilibre est réalisé, il s’agit d’un plasma thermique, ou plasma chaud dit à haute densité énergétique ou à pression atmosphérique. La température des molécules lourdes, voisine de celle des électrons, peut dépasser les 10 000 K.

La technique plasma basse pression 

Les conditions de rentrée dans l’atmosphère mettant en jeu des espèces hors équilibre thermodynamique, un plasma d’air à basse pression et à basse densité énergétique a été recréé. Celui-ci constituera l’outil de simulation. Ces plasmas, créés à basse pression (10² à 10⁴ Pa), sont des milieux énergétiquement et chimiquement complexes. L’ionisation provient de l’accélération des électrons dans la zone inductive. L’excitation primaire se fait par collision avec les électrons, dont l’énergie est répartie selon une fonction de distribution, elle-même dépendante de l’énergie de la décharge, de la pression et de la nature chimique du gaz. Il en résulte des milieux thermodynamiquement hors-équilibres.

Les plasmas froids sont le siège de processus d’excitation par impact direct d’électrons sur les atomes ou les molécules. Ainsi l’excitation primaire de la molécule par collisions électrons-molécules correspond à l’excitation vibrationnelle et/ou électronique, à l’ionisation et/ou à la dissociation. Il y a donc formation d’espèces à des états électroniques excités (triplets, orbitales liantes ou anti-liantes, ions positifs aux propriétés oxydantes, ions négatifs aux propriétés réductrices, radicaux). Quant aux collisions molécule-molécule, elles sont responsables du transfert d’énergie. Des transferts électronique / électronique, électronique / vibrationnelle, vibrationnelle / vibrationnelle, vibrationnelle / rotationnelle et vibrationnelle / translationnelle, ainsi que du transfert de charges et de la dissociation. Ces collisions contrôlent donc la redistribution de l’énergie acquise lors de l’excitation primaire sur les divers degrés de liberté de la molécule. En conséquence dans ce milieu hors-équilibre, coexistent des molécules ayant des énergies comprises entre les niveaux excités supérieurs et l’état fondamental. La répartition énergétique sur les quatre degrés de liberté n’est donc pas homogène. Par ailleurs la composition d’un plasma froid peut beaucoup varier suivant la nature du gaz, des conditions opératoires de pression, l’intensité du champ électrique, la vitesse du flux gazeux et la géométrie du réacteur. Mais les particules suivantes le constituent toujours :
– des molécules à l’état électronique fondamental
– des molécules dans un état électronique excité
– des atomes
– des ions
– des radicaux .

Le plasma d’oxygène 

Caractérisation de la phase gazeuse 

L’impact électronique sur les molécules d’oxygène à l’état électronique fondamental aboutit à l’excitation de l’oxygène moléculaire, à la dissociation des molécules d’oxygène et l’ionisation de l’oxygène moléculaire et atomique.

Réactivité du plasma d’oxygène 

Diverses études ont été menées par le passé, ayant pour but de déterminer les processus réactionnels qui régissent la décharge d’oxygène [4,5]. Il est ainsi possible de modéliser l’écoulement d’un plasma d’oxygène basse pression grâce aux schémas réactionnels qui comportent 140 réactions (450 réactions dans le cas d’une décharge haute pression), représentatives de la complexité du milieu. Le schéma cinétique retenu par Hassouni [6,7] regroupant uniquement les espèces majoritaires et les réactions jouant un rôle important dans l’évolution de la concentration des espèces, est dérivé de celui proposé par Panafieu [5] dans les conditions de décharge suivantes : pression comprise entre 10 et 500 Pa et température électronique comprise entre 10000 et 20000 K.

LA CATALYCITE 

La catalycité est définie comme étant le produit entre le coefficient de recombinaison γ et le coefficient d’accommodation β, à une constante près. La réaction de recombinaison de deux atomes d’oxygène à la surface du matériau est exothermique. L’énergie libérée lors de cette recombinaison est partagée entre la molécule qui désorbe et la surface du matériau. La catalycité d’un matériau se définit en fonction du transfert de matière (coefficient γ) et du transfert de chaleur (coefficient β) à la surface de celui-ci, augmentant ainsi sa température.

LA RECOMBINAISON ET LES MECANISMES ASSOCIES 

Principe des processus de recombinaison catalytique. 

Lors d’écoulements hypersoniques dans les conditions de rentrée atmosphérique, l’oxygène moléculaire est fractionné en oxygène atomique qui est une espèce très réactive et très oxydante. A l’intérieur de la couche limite, les espèces monoatomiques prédominantes se recombinent à la surface et l’énergie cinétique dégagée est transférée à la paroi suivant leur aptitude recombinante, c’est à dire de la catalycité. Dès lors, il faut tenir compte de réactions élémentaires telles que l’adsorption des atomes, les réactions de recombinaison et les différentes désorptions.

L’adsorption 

L’interaction entre une particule et la surface est caractérisée par le potentiel d’interaction du type Lennard-Jones. Les forces de liaison et les mécanismes mis en jeu dans cette interaction sont de deux types [22] :
– l’adsorption physique ou physisorption, dans laquelle les molécules adsorbées sont liées par des forces attractives de type Van der Waals [23]. Elle dépend de l’interaction dipôle- dipôle.
– l’adsorption chimique ou chimisorption, dans laquelle les molécules adsorbées sont liées par la création de liaisons covalentes.

Les forces de liaison mises en jeu pour la chimisorption sont plus grandes que celles pour la physisorption, car dans le premier cas une véritable liaison chimique est formée entre l’espèce gazeuse et la surface. Cette surface dispose d’un nombre de sites actifs qui seront occupés en partie ou totalement par les molécules ou des atomes adsorbés. Quel que soit le nombre de ces sites occupés, un équilibre va s’établir entre l’adsorption et la désorption des molécules sur la surface.

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Table des matières

Introduction générale
Chapitre I : Contexte et présentation du sujet
Introduction
I Objectifs et stratégie
II Simulation des conditions de rentrée atmosphérique
II.1 Généralités sur le plasma
II.2 La technique plasma basse pression
II.3 Le plasma d’oxygène
II.3.1 Caractérisation de la phase gazeuse
II.3.2 Réactivité du plasma d’oxygène
III La catalycité
III.1 Le coefficient de recombinaison γ
III.2 Le coefficient d’accommodation β
III.3 Evolution de la catalycité
III.4 Les méthodes de mesures de la catalycité
III.4.1 Le Moyen d’Essai Solaire d’Oxydation (MESOX)
IV La recombinaison et les mécanismes associés
IV.1 Principe des processus de recombinaison catalytique
IV.2 L’adsorption
IV.2.1 L’adsorption moléculaire
IV.2.2 L’adsorption atomique
IV.3 Mécanismes théoriques de recombinaison-désorption
IV.3.1 Recombinaison directe de type Eley-Rideal
IV.3.2 Recombinaison par migration de type Langmuir-Hinshelwood
IV.4 Transfert de l’énergie libérée par recombinaison
V Rappel : rôle des propriétés semi-conductrices sur la catalycité
VI Vieillissement du Carbure de Silicium
VI.1 Oxydation du carbure de silicium : passive- active
VI.1.a L’oxydation passive
VI.1.b L’oxydation active
VI.2 Diffusion de l’oxygène à coeur
VII Le chrome
VII.1 Historique
VII.2 Quelques propriétés physique du chrome
VII.3 L’oxyde de chrome trivalent
Conclusion
Annexe I.1 : Le carbure de silicium
Références bibliographiques
Chapitre II : Mesure du coefficient de recombinaison sur différents oxydes
Introduction
I La méthode d’actinométrie
I.1 Présentation générale
I.2 La méthode d’actinométrie dans le cas de notre étude
I.3 Application à la mesure du coefficient de recombinaison
I.4 Choix des raies atomiques pour la titration
I.4.a L’oxygène atomique
I.4.b L’argon
I.5 Les profils actinométriques
II Descriptif du dispositif expérimental
II.1 La décharge intermittente
II.2 Le réacteur de mesure
II.3 Spectroscopie d’Emission Optique en ligne
III Système de chauffage
III.1 Présentation du système
III.2 Etalonnage du système
IV Mesure du coefficient de recombinaison de l’oygène atomique
IV.I Détermination des coefficients de recombinaison γ en fonction de l’évolution
de la température
IV.4 Calcul de l’énergie d’activation
IV.5 Etudes de surface et du cœur du matériau
IV.5.a Echantillon de carbure de silicium
IV.5.b Echantillon de SiC + Silice
IV.5.c Echantillon de SiC + Cr + Silice
IV.5.d Echantillon de SiC + Cr
Conclusion
Annexe II.1: La Spectroscopie d’Electron Auger
Présentation de la technique
Taux d’érosion et calibration de l’échelle de profondeur
Conditions expérimentales
Analyses AES de surface
Analyses AES en profondeur
Annexe II.2: L’évaporation par faisceau d’electrons
Annexe II.3 : La PECVD
Références bibliographiques
Chapitre III : Etude du vieillissement des matériaux
Introduction
I Les phénomènes de vieillissement
II Identification des réactions d’ablation
II.1 Les conditions d’analyse
II.2 Dispositif expérimental et protocole de mesure des réactions de surface
II.2.a Le dispositif expérimental : la spectrométrie de masse
II.2.b Les protocoles de mesure
III Etude du vieillissemnt du Carbure de Silicium
III.1 Caractérisation du milieu plasmagène Ar/O2 (80/20) – Protocole I
III.2 Caractérisation du milieu plasmagène N2/O2 (80/20) – Protocole II
III.3 Caractérisation du milieu plasmagène N2/O2/O2
(80/18/2) – Protocole III
IV Etude du vieillissement du SiC dopé au Chrome
V Etude du vieillissement du SiC passivé à la Silice
VI Etude du vieillissement du SiC+Cr+Silice
VII Etude de la diffusion de l’oxygène à cœur
VII.1 Diffusion dans les échantillons traités par la spectrométrie de masse
VII.2 Cinétique de diffusion pour les échantillons SiC + Silice et
SiC + Cr +Silice
VII.3 Cinétique de diffusion dans le cas du SiC + Cr
Conclusion

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