Cartographie harmonisée des mangroves de l’Outre-mer français

La mangrove, un écosystème menacé 

Les mangroves forment un écosystème forestier qui s’étend le long des littoraux principalement tropicaux (Alongi, 2009). Cet écosystème se localise préférentiellement sur des substrats vaseux dans les zones d’eaux calmes telles que les baies, les lagunes, les lagons et les estuaires (FAO, 2007; Tomlinson, 1994). Les forêts de mangroves couvrent à l’heure actuelle près de 150 000 km² à l’échelle mondiale (Spalding et al., 2011).

Les mangroves subissent un rythme important de disparition et dégradation d’origines naturelle et humaine. Les dernières estimations présentent un recul des superficies de mangroves de 1 à 2% par an, soit plus que les forêts de terre ferme et les récifs coralliens (FAO, 2007). D’ores et déjà un quart de la superficie mondiale des mangroves aurait disparu au cours des cinquante dernières années (Spalding et al., 2010). Les prédictions ne sont guère plus optimistes. Ainsi, l’Indonésie et la péninsule du Sud-Est asiatique pourraient perdre respectivement 38 % et 35 % de leurs superficies actuelles de mangroves d’ici à 2050 (ibid.). En outre, ces chiffres ne tiennent pas compte des dégradations et fragmentations des forêts de mangroves.

Avec plus de 100 000 ha de mangroves (Spalding et al., 2011), la France se classerait, selon cette estimation, au 29e rang mondial. Toutefois, les mangroves françaises ont connu un rapide déclin de leur superficie dans les années 1970, en particulier dans les Antilles (Guadeloupe, Martinique, mais surtout Saint-Martin et Saint-Barthélemy), conséquences d’une rapide croissance économique et urbaine, notamment la construction d’infrastructures portuaires et aéroportuaires (Imbert et al., 1988, 2000; Spalding et al., 2011). Bien que le rythme de disparition ait été ralenti par des politiques de gestion, les mangroves françaises continuent encore aujourd’hui d’être menacées . Elles subissent toujours les pollutions diffuses depuis les principaux centres urbains, mais également des dégradations, reconversions illégales , rejets d’ordures, et ce en dépit des zonages réglementaires. Fragilisées par les dégradations et fragmentations d’origine anthropique, ces mangroves sont rendues d’autant plus vulnérables aux forçages naturels.

Les autorités en charge de la préservation, protection et gestion de l’environnement et de la biodiversité réagissent, et les mangroves françaises font l’objet de plusieurs zonages de gestion et de conservation : Parc national, propriétés du Conservatoire du littoral, sites RAMSAR, Réserve de Biosphère, Parc naturel Régional, Parc marin comptent parmi les outils les plus couramment utilisés à travers l’Outre-mer.

Un écosystème utile pour nos sociétés 

Bien que certaines mangroves aient fait l’objet indirectement de statut de protection ou conservation depuis les années 1990 (désignation du Grand Cul-de-Sac Marin en Guadeloupe au titre de la convention RAMSAR en 1992 par exemple), l’engagement des politiques publiques envers les mangroves à proprement parlé s’est accentué ces dernières années. Une des raisons de cet engagement provient de la prise de conscience collective et relativement récente des « services écosystémiques » que fournissent les mangroves à de multiples niveaux scalaires. Les « services écosystémiques » peuvent être définis comme les bénéfices que tirent les sociétés humaines des écosystèmes, en vue de l’amélioration de leur bien-être (Millenium Ecosystem Assessment, 2005).

Globalement le rôle des mangroves a été estimé à 10 000 $US/ha/an, c’est-à-dire un peu moins que les herbiers et les estuaires, mais plus que les récifs coralliens, les plateaux continentaux ou l’océan (Alongi, 2009). A l’échelle globale la ressource mangrove est estimée a minima à 180 900 000 000 $US selon l’évaluation de Constanza (Costanza et al., 1997). Une étude plus récente (UNEP-WCMC, 2006) a démontré que les services rendus par les mangroves pouvaient être estimés sur une fourchette allant de 2 000 à 9 000$US/an (Ruiz-Luna et al., 2008).

Parmi les services écosystémiques et fonctions écologiques que procurent les mangroves et la biodiversité qu’elles abritent, sont régulièrement mis en avant :

❖ Un rôle de nursery : les mangroves sont un site privilégié de reproduction/nidification de nombreuses espèces (oiseaux, poissons, crustacés, reptiles, amphibiens,…), dont certaines font l’objet de commercialisation. Une fois à l’âge adulte ces espèces quittent la mangrove pour se développer dans d’autres écosystèmes (de Groot et al., 2002). L’impact de la disparition des mangroves pour les écosystèmes adjacents est une question complexe qui reste encore à étudier ;
❖ Une ressource pour les populations locales : les mangroves sont actuellement utilisées pour leur bois. Certaines espèces de mollusques et de crustacés vivants dans les mangroves sont également exploitées et commercialisées. Par exemple, le crabe de palétuvier dans les Antilles est principalement consommé durant la période de Pâques et représente ainsi un élément important de la culture créole (Niphon, 2001). En Nouvelle-Calédonie, 100 tonnes de crabes sont prélevées et commercialisées chaque année près de la commune de Voh (Rocklin, 2006) ;
❖ Un rôle de fixation du sédiment et donc de lutte contre le recul du trait de côte : les mangroves parviennent à fixer le sédiment en raison de leur position géographique dans le paysage (Ewel et al., 1998) ;
❖ Un rôle de défense naturelle contre les évènements météo-marins extrêmes (tsunami, ouragans) ;
❖ Un rôle de piège à carbone : les mangroves parviennent à fixer le carbone durant leur croissance dans la biomasse épigée, mais également dans les racines et le sol (Kauffman et al., 2011). A contrario, la reconversion d’une surface de mangrove libère d’importantes quantités de gaz carbonique dans l’atmosphère (Lee et al., 2014a). Les émissions de carbone provoquées par la reconversion des surfaces de mangrove représenteraient entre 10 et 25 % des émissions globale de CO2 résultant des actions de déforestation (Donato et al., 2011; Duke et al., 2014);
❖ Un rôle récréatif : par endroit, les mangroves sont le support de nombreuses activités touristiques (kayak, pêche, bateau sans permis, vtt de mer, etc.) d’une importance majeure pour l’économie locale.

De nombreuses politiques de gestion 

Face à ce double constat (menaces subies et services rendus par les mangroves), les enjeux de la conservation des mangroves ont été soulignés dans le Grenelle de la mer à travers la sous-proposition 48 du groupe 1 : « établir un plan concerté de gestion des mangroves : déterminer celles qui doivent être protégées » (Groupe 1, 2009).

A cela s’ajoutent trois stratégies nationales :
● La stratégie nationale de gestion intégrée du trait de côte qui place les littoraux à mangrove en position centrale à travers la préconisation « Développer l’observation du trait de côte et identifier les territoires à risque d’érosion pour hiérarchiser l’action publique » en lien directement avec les services/fonctions écosystémiques des mangroves ;
● La stratégie nationale de la biodiversité de 2011-2020 indique que les mangroves font partie des milieux naturels « particulièrement emblématiques, rares ou menacés et nécessitent une attention particulière » ;
● La stratégie nationale d’adaptation au changement climatique pour le littoral (2007) et le Plan national d’adaptation au changement climatique (2011) où les mangroves apparaissent dans les fiches « Risques », « Littoral » et le registre du renforcement des « puits de carbone ».

D’un point de vu législatif cela se traduit par l’adoption :
➢ Dès 1986 de la loi littoral qui stipule que les mangroves sont des espaces à préserver pour leur « intérêt écologique » en tant que « milieu nécessaire au maintien des équilibres biologiques » et qu’elles forment « un paysage caractéristique du patrimoine naturel et culturel du littoral » ;
➢ de la loi pour la reconquête de la biodiversité, de la nature et des paysages visant la mise en place d’un programme territorialisé de protection de 55 000 ha de mangroves.

S’ajoutent également d’autres projets d’action publique sur les mangroves à des niveaux nationaux et européens :
➢ La mise en place de la directive cadre sur l’eau en Outre-mer par l’ONEMA (aujourd’hui Agence Française de la Biodiversité – AFB) dont l’une des tâches consiste à qualifier l’état écologique des masses d’eaux côtières et de transition, au regard entre autre de la construction d’un bioindicateur « mangrove » ;
➢ La mise en place d’un observatoire des mangroves dans le cadre des réseaux d’observation de l’IFRECOR coordonné par le Pôle Relais Zones Humides Tropicales.

La mise en œuvre de ces politiques se fait grâce aux nombreux établissements publics (Etat et collectivités) en charge de la gestion des mangroves. En effet, du fait de leur nature (forêt et zone humide) et de leur localisation sur le littoral (à cheval bien souvent sur la partie cadastrée et le Domaine Public Maritime), les mangroves font l’objet de l’intervention de multiples institutions (Conservatoire du littoral, IFRECOR, DEAL, ONEMA, Parc nationaux et régionaux, Parc marin, Provinces, DITTT, ONF, etc.). Ce sont également des zones de pêche dont une partie de la réglementation est alors décidée par le Ministère des pêches en tant que milieu « sylvo-piscicole » (Gaudin, 2006).

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Table des matières

INTRODUCTION GENERALE
PREMIERE PARTIE – BIOGEOGRAPHIE DES MANGROVES
Chapitre 1- Diversité spatiale des mangroves de l’Outre-mer : analyse biogéographique, typologie et problématique cartographique
Chapitre 2- Campagnes de terrain : choix des sites, protocole d’échantillonnage et résultats
DEUXIEME PARTIE – RESULTATS DU GUIDE METHODOLOGIQUE ET CHOIX D’UNE APPROCHE SEQUENCEE
Chapitre 3- Résultats du guide méthodologique : approche totale sur les quatre sites d’étude
Chapitre 4- Approche séquencée : état de l’art sur la quantification indépendante des trois paramètres de la typologie
TROISIEME PARTIE – ESTIMATION DES SUPERFICIES DE MANGROVES
Chapitre 5- Etat de l’art sur la cartographie des superficies de mangrove
Chapitre 6- Estimation de la superficie des mangroves à l’échelle nationale à partir d’images Landsat-8 OLI
Chapitre 7- Optimization of mangrove extent estimation using SWIR Sentinel-2 bands through an object-based approach: application to three French Overseas Territories
QUATRIEME PARTIE – CARTOGRAPHIE DES MANGROVES DE L’OUTRE-MER PAR APPROCHE SEQUENCEE
Chapitre 8- Mapping the mangrove forest canopy using spectral unmixing of very high spatial resolution optical satellite images
Chapitre 9- Estimation des hauteurs et des taxons de mangroves par télédétection
DISCUSSION GENERALE
CONCLUSION GENERALE
REFERENCES BIBLIOGRAPHIQUES
TABLE DES MATIERES
TABLE DES TABLEAUX
TABLE DES ILLUSTRATIONS
TABLE DES CARTES

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