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Le concept d’invalidité lombalgique
Définition de l’invalidité lombalgique
Les lombalgies communes ont une évolution favorable dans la majorité des cas (90% des épisodes lombalgiques aigus s’améliorent en moins d’un mois). Cependant lorsque la lombalgie persiste et tend à évoluer vers la chronicité, elle est responsable de conséquences fonctionnelles majeures pour le patient entrainant une invalidité lombalgique.
L’invalidité lombalgique se définit par une désinsertion professionnelle et sociale du patient du fait de ses douleurs lombaires.(16) Il se retrouve dans une situation de handicap notamment lorsque les lombalgies deviennent chroniques. Le retentissement personnel et social de ces lombalgies chroniques est majeur et la qualité de vie de ces patients peut en être altérée.
Evaluation de l’invalidité lombalgique
Un outil, appelé SF-36, a été élaboré pour mesurer cette qualité de vie. La SF-36 a été développée par Ware et Sherbourne (17) en 1992 à partir du Medical Outcome Study (MOS), questionnaire englobant 149 items et utilisé pour évaluer la manière dont le système de santé américain affecte l’issue des soins. La SF-36, ou MOS SF-36, est une échelle multidimensionnelle, générique, c’est-à-dire qui évalue l’état de santé indépendamment de la pathologie causale, du sexe, de l’âge, et du traitement.
Cette échelle peut être administrée en auto- ou hétéro-questionnaire. Le temps d’administration est de 5 à 10 minutes. Ses 36 items évaluent 8 dimensions : activité physique, limitations dues à l’état physique, douleurs physiques, santé perçue, vitalité, vie et relation avec les autres, limitations dues à l’état physique et santé psychique, ainsi qu’une dimension particulière à savoir l’évaluation de la santé perçue comparée à un an auparavant. Le questionnaire d’état de santé SF-36 (18) est validé dans plusieurs langues, dont le français. Un score moyen physique (PCS = Physical Composite Score) et un score moyen mental (MCS = Mental Composite Score) peuvent être calculés selon un algorithme établi. En dehors de l’évaluation quantitative par score moyen (MCS ou PCS), on peut utiliser la SF-36, en comparant (recherche de corrélations) les scores des différents domaines de la SF-36 sur une population étudiée, avec ceux de la population normale.
Dans une étude datant de 2002, T.Morken et al (19) ont montré que la qualité de vie, mesurée à l’aide de l’échelle SF-36, est inférieure chez les patients présentant des troubles musculo-squelettiques et plus particulièrement chez les patients lombalgiques. La qualité de vie mesurée à l’aide du SF-36 d’employés se plaignant de lombalgies était équivalente au 15e percentile de la qualité de vie mesurée avec le même instrument dans la population générale.
L’essentiel du poids socio-économique de la lombalgie repose sur ces patients dont la qualité de vie est altérée du fait du retentissement de la douleur. En effet, l’invalidé lombalgique constitue un problème de santé publique majeur de par les journées d’arrêt de travail prescrites, la diminution de la productivité et les demandes d’indemnisation en cas d’arrêt de travail prolongé.
Facteurs de risque de l’invalidité lombalgique
Une prise en charge adaptée, dès les premiers jours des symptômes lombaires pourrait permettre de diminuer l’impact de l’invalidité lombalgique sur les dépenses de santé.
Dans une étude menée en 2008 au Royaume Uni, Jonathan C Hill (20) a montré qu’une prise en charge stratifiée, c’est-à-dire selon le risque de passage à la chronicité des patients lombalgiques aigus, permettait de réduire l’incapacité fonctionnelle des patients.
Les patients de cette étude ont été séparés en deux groupes : un groupe expérimental et un groupe contrôle. Les patients du groupe expérimental ont bénéficié d’une prise en charge spécifique de kinésithérapie (nombre de séances variable selon leur risque de passage à la chronicité). Ce risque de passage à la chronicité était évalué par un score validé appelé le Start Back screening Tool. Les patients du groupe contrôle ont été pris en charge en fonction du bilan initial du kinésithérapeute et sans savoir le résultat du Start Back Screening Tool. Les patients ont été réévalués à 4 mois et à 12 mois à l’aide de différentes échelles dont l’échelle EIFEL qui évalue l’incapacité fonctionnelle des patients lombalgiques.
Les résultats de l’étude ont montré que les patients du groupe expérimental avaient une réduction de leur score EIFEL (entre T0 et T4 puis T12) plus importante que celle du groupe contrôle. L’analyse de l’évolution à 12 mois a également montré une réduction significativement plus importante des scores de catastrophisme, de peurs, de dépression et du nombre de jours d’incapacité de travail dans le groupe expérimental. En termes de rapport coût/efficacité, l’utilisation de cette approche ciblée a permis de meilleurs résultats cliniques pour des coûts inférieurs tant pour le patient que pour la société.
Par ailleurs, on sait qu’une offre de soins fortement médicalisée est un facteur de risque de passage à la chronicité (10). Ainsi, il a été démontré chez 975 patients en arrêt de travail depuis 8 à 12 semaines, qu’une simple information du patient, associée à des conseils de reprise des activités, était plus efficace que les traitements conventionnels (21). Une autre étude (22) illustrait l’impact de la surmédicalisation des soins sur l’invalidité. La durée de l’invalidité était corrélée au nombre de visites chez les professionnels de santé et au recours au spécialiste, à la prescription précoce d’une imagerie (radiographies et surtout IRM) et à la « positivité » de l’imagerie. Enfin, le repos au lit ne doit jamais être prescrit, mais seulement autorisé si l’intensité des douleurs le nécessite. Il doit être le plus court possible (< 7 jours) (12). Le praticien doit inciter au maintien ou à la reprise des activités normales de la vie quotidienne pour chaque patient, dans les limites autorisées par la douleur. La délivrance de conseils positifs au sujet pour rester actif améliore les résultats cliniques et permet de réduire l’impact personnel et social des maux de dos. (23)
Comme le souligne le Pr Valat (24), il a été mis en évidence différents facteurs influençant l’importance de cette invalidité lombalgique : les facteurs professionnels (inadaptation physique ou l’insatisfaction), les facteurs socio-économiques (faible niveau d’éducation, de ressources), les facteurs médico-légaux (prise en charge en accident de travail, litige) et les facteurs psychologiques (terrain dépressif, sensation d’être toujours malade). Tous ces facteurs influencent davantage le poids économique de cette invalidité lombalgique que les caractéristiques médicales de la lombalgie aiguë en elle-même. En effet, l’intensité de la douleur représente moins de 10% de la variance du handicap alors que 35% est liée aux facteurs psychosociaux. (25)
Conséquences économiques de l’invalidité lombalgique
La notion de prise en charge de l’invalidité lombalgique, pouvant générer un véritable handicap pour le patient, est capitale dans la mesure où elle représente un poids socio-économique important.
Par exemple, aux États-Unis, entre les années 1960 et 1980, l’invalidité lombalgique a augmenté 14 fois plus vite que la population. Le coût d’indemnisation de l’invalidité rachidienne a été multiplié par 27 alors que le coût de l’invalidité, toutes causes confondues n’était multiplié que par 3,5. (16)
Toujours aux Etats Unis, le coût annuel en termes de perte de productivité a été estimé à approximativement 28 milliards de dollars. (26)
Les conclusions du congrès de la société française de médecine du travail et de la société française de rhumatologie illustrent ce poids socio-économique de l’invalidité lombalgique (27). Elles rappellent l’importance du poids relatif des coûts directs (diagnostics, soins) et des coûts indirects (indemnités, remplacements). Les démarches diagnostiques et de soins ne représentent qu’un quart du total des dépenses en rapport avec les lombalgies au travail.
Le nombre d’arrêts de travail relatif à des lumbagos est relativement stable depuis 20 ans. Le nombre de jours d’arrêt pour lumbago progresse légèrement ainsi que la proportion d’arrêt secondaire à un lumbago rapporté au nombre total d’arrêts. Le nombre de journées d’arrêt de travail représente une ville de 60000 habitants dans laquelle tous les salariés seraient arrêtés pendant un an.
L’analyse de la reconnaissance en maladie professionnelle des sciatiques et des cruralgies montre qu’elles font partie des pathologies professionnelles les plus fréquemment reconnues. Le nombre de journées de travail perdues pour ces deux pathologies est de 82 000 soit 70 fois moins que les journées perdues dans le cadre des accidents du travail pour lumbago.
Ainsi, l’essentiel de la prise en charge du patient lombalgique réside dans la prévention de cette invalidité lombalgique.
Cette prévention passe notamment par l’identification précoce des facteurs de risque de passage à la chronicité comme l’indiquent le Dr Migneault (28): l’évaluation en soins primaires des patients lombalgiques devrait comprendre une évaluation des facteurs de risque psychosociaux (« drapeaux jaunes ») en l’absence d’amélioration clinique.
Recommandations Européennes et Françaises sur la prise en charge précoce des facteurs de passage à la chronicité
En 2000, l’ANAES, dans ses recommandations sur la prise en charge des lombalgies communes, avait mis l’accent sur le manque de données dans la littérature concernant les facteurs de risque de chronicisation. Des études avaient mis en évidence une association entre certains facteurs et le passage à la chronicité et l’ANAES proposait des actions de recherche futures sur la mise en évidence des liens de causalité entre les facteurs de risque identifiés et la chronicisation de la lombalgie.
Des études ultérieures (8,10) ont cherché à préciser les connaissances en matière de facteurs de risque de passage à la chronicité. Différents auteurs ont mis en évidence des facteurs de risque de passage à la chronicité permettant la constitution de scores prédictifs.
En 2006, les recommandations européennes (29) en matière de prévention et de prise en charge de la lombalgie non spécifique, rappellent l’importance de l’interrogatoire d’un patient lombalgique. Cet interrogatoire, mené par le médecin généraliste, lors d’une consultation initiale d’un patient lombalgique, doit permettre d’identifier les facteurs psychosociaux (professionnels et concernant la vie privée du patient) de risque de passage à la chronicité.
Elles préconisent également de réévaluer le patient dont les symptômes ne s’améliorent pas après quatre à six semaines ou lorsque celle-ci s’aggrave. Cette consultation permet de rechercher les yellow flags (facteurs de risque de passage à la chronicité) et ainsi d’orienter la prise en charge (technique de réassurance, éducation thérapeutique, psychothérapie par exemple).
Facteurs de risques de passage à la chronicité
De nombreuses études ont cherché à mettre en évidence les facteurs de risque de passage à la chronicité qui doivent être recherchés dès la consultation initiale en soins primaires (8,10,21,30). La connaissance de ces facteurs de risque est indispensable pour adapter la prise en charge initiale et limiter l’évolution vers la lombalgie chronique. Ces différents facteurs de risque sont regroupés sous le terme de yellow flags par opposition aux reds flags. Ces yellow flags sont des facteurs non spécifiques identifiés chez les patients lombalgiques évoluant vers la lombalgie chronique.
Les yellow flags regroupent les blue flags ou facteurs individuels et les black flags ou facteurs professionnels.
Parmi les facteurs individuels donc liés au patient, les facteurs identifiés comme des facteurs de risque de passage à la chronicité avec un fort niveau de preuve scientifique sont (10) :
– L’âge élevé du patient.
– Un antécédent de lombalgie : les caractéristiques du précédent épisode douloureux lombaire doivent être prises en compte dans l’évaluation du risque de passage à la chronicité : la sévérité, la durée et les caractéristiques de la douleur (irradiation au membre inférieur), la sévérité de l’incapacité fonctionnelle, la prescription d’un arrêt de travail.
– La sévérité de l’incapacité fonctionnelle, la présence d’une sciatique et la durée de l’épisode lombalgique lors de l’inclusion.
Les facteurs individuels ayant un niveau de preuve scientifique moindre sont :
– Un mauvais état général.
– Un antécédent de chirurgie lombaire.
– Le sexe féminin.
– La sévérité de la douleur autoévaluée sur une échelle visuelle analogique à l’inclusion.
– L’avis global du médecin sur le risque de chronicité évalué sur une échelle semi-quantitative à quatre niveaux.
– Les caractéristiques psychologiques du patient tel qu’un mauvais statut psychologique global, la dépression, la mauvaise capacité du patient « à faire face » (coping), la peur et la croyance du patient concernant la relation entre sa lombalgie et son activité physique ou professionnelle.
Les facteurs professionnels de risque de passage à la chronicité peuvent également être classés selon leur niveau de preuve scientifique.
Le seul facteur professionnel ayant un fort niveau de preuve est l’insatisfaction au travail.
Les autres facteurs professionnels ayant un plus faible niveau de preuve scientifique sont :
– L’absence de poste aménagé
– Une faible qualification professionnelle
– L’indemnisation
– L’inadéquation du salaire
– Un arrêt de travail supérieur à 8 jours
– Une charge élevée de travail
– Présence de stress au travail
– Une mauvaise posture au travail
– Une durée élevée de port de charge lourde
Les autres facteurs de risque de passage à la chronicité peuvent être d’ordre socioculturel (statut social non satisfaisant autoévalué, faible niveau d’étude, insatisfaction pendant ses activités de loisirs, nombre élevé d’enfants, le fait de vivre seul) ou liés à la prise en charge initiale (surmédicalisation de la prise en charge, peurs et croyances des médecins concernant les activités professionnelles du patient).
L’identification de ces facteurs de risque est souvent difficile du fait des qualités méthodologiques que cela impose. Les études prospectives paraissent les plus adaptées pour mettre en évidence ces facteurs de risque mais elles sont rares dans la littérature car souvent difficiles à réaliser.
Mais la connaissance de ces facteurs de risque a permis l’élaboration de scores prédictifs de l’évolution chronique des patients lombalgiques. Ces scores peuvent être une aide dans la prise en charge des patients lombalgiques aigus en soins primaires lors de la consultation initiale.
Scores prédictifs de l’évolution chronique des patients lombalgiques aigus
Depuis les années 1990, certains auteurs se sont intéressés à la mise en œuvre de score prédictif de l’’évolution chronique des patients lombalgiques.
Par exemple, Deyo et al ont proposé un score corrélé au risque d’absentéisme professionnel. Ce score était composé de trois items : antécédents de rachialgies, nombre d’années de scolarisation et sensation d’être toujours malade, chaque item étant coté de 0 à 1.
Puis Rossignol et al ont également développé un questionnaire de trois items : limitation des activités professionnelles, limitation des activités quotidiennes au domicile et antécédent d’indemnisation pour un problème rachidien. Ce questionnaire était hautement prédictif d’une incapacité totale au travail.
En 2000, l’équipe du Pr Valat (30) a également élaboré un indice prédictif lors d’une enquête prospective. Cette étude, réalisée auprès de 500 médecins, portant sur 2487 patients a permis la mise en évidence de facteurs prédictifs de l’évolution chronique des patients lombalgiques aigus. Dans un premier temps l’analyse statistique a permis de mettre en évidence les éléments sociaux et cliniques dont la répartition différait entre les groupes de patients évoluant ou non vers la chronicité.
Puis dans un deuxième temps, les facteurs sociaux et comportementaux ont été introduits dans un modèle de régression logistique afin de déterminer les caractéristiques cliniques à prendre en compte pour élaborer ce score.
Quatre paramètres expliquaient à 73% le passage à la chronicité. Il s’agissait de la nature de la lombalgie (lombalgie aiguë isolée, lombosciatique ou exacerbation d’une lombalgie chronique), la durée de l’arrêt de travail prescrit (inférieur ou égal à huit jours d’une part et supérieur à huit jours d’autre part), et deux items des activités de la vie quotidienne dans les jours précédents la consultation (difficulté à marcher sur une courte distance, à monter un escalier d’une part, difficulté à se lever d’un lit ou d’une chaise d’autre part).
Puis d’autres facteurs ont été introduits dans le modèle de régression logistique et il est apparu que la pratique du sport était un facteur diminuant les risques de passage à la chronicité.
A partir de ces données, l’indice prédictif a été fabriqué en attribuant une valeur numérique simple à chaque item correspondant à la valeur numérique entière la plus proche de l’odds ratio.
Dans cette étude, il apparait que cet indice a une bonne valeur discriminante et qu’il permet d’identifier les patients ayant un risque inférieur, égal ou supérieur à la moyenne d’évoluer vers la chronicité. Cependant, cet indice n’a pas été validé sur une autre population que celle qui a servi à sa construction.
En 2008, l’équipe de Hill a fabriqué un score appelé le Start Back screening Tool (31). Il a été créé à partir de deux échantillons de patients (l’un correspondant à une étude de cohorte prospective et l’autre à un essai randomisé) et d’une analyse de la littérature. Il est composé de 9 items. Ces items correspondent à des variables psychosociales potentiellement modifiables par la prise en charge du médecin généraliste. Ces items se regroupent sous la forme de questions amenant le patient à exprimer son accord avec la proposition faite. Les thèmes abordés par les 9 items sont donc :
– la perception de la douleur
– l’irradiation de la douleur dans la jambe
– la douleur ressentie à d’autres endroits du corps
– la peur de l’activité physique
– le statut fonctionnel (deux items)
– l’anxiété
– la dramatisation et les symptômes dépressifs.
Parmi ces 9 items, 5 items composent un sous score permettant de stratifier les patients lombalgiques aigus à haut risque d’évolution vers la chronicité. Ce sous score regroupe les principaux facteurs psychosociaux de risque de passage à la chronicité : dramatisation, peur de l’activité physique, symptômes dépressifs, anxiété et la perception de la douleur.
Les propriétés psychométriques du score ont été testées sur un échantillon de 131 patients et la validité prédictive du score a été testée sur un échantillon de 500 personnes.
Ainsi, le Start back screening Tool a une sensibilité de 80,1%, une spécificité de 65,4%, un rapport de vraisemblance négatif de 0,30 et un rapport de vraisemblance positif de 2,32 dans l’identification des patients ayant un score EIFEL supérieur ou égal à 7 à 6 mois.
La cohérence interne est de 0,79 (alpha de Cronbach) pour l’ensemble des sous-échelles et de 0,74 (alpha de Cronbach) pour les facteurs psychosociaux (cinq items). La stabilité a été déterminée à partir d’un échantillon de 53 personnes ayant rempli le questionnaire deux semaines suivant la première administration. Elle est modérée pour l’ensemble des sous-échelles (kappa de Cohen 0,79 [95 % IC 0,73-0,95]) et le questionnaire (kappa de Cohen 0,76 [95 % IC 0,52-0,89]). C’est dans l’étude menée au Royaume-Uni en 2008 (20) que ce score a également été testé sur une population de lombalgiques permettant la mise en place d’une approche stratifiée (approche start back screening tool). Deux groupes de patients lombalgiques ont été comparés :
– l’un, stratifié et bénéficiant d’une prise en charge en fonction du risque de passage à la chronicité
– l’autre, non stratifié, bénéficiant d’une prise en charge selon le bilan initial du kinésithérapeute.
Cette étude a permis de mettre en évidence une amélioration clinique significative des patients présentant une lombalgie aiguë commune et bénéficiant d’une prise en charge stratifiée.
Les patients de cette étude ont été réévalués grâce notamment à l’échelle EIFEL. Cette échelle d’incapacité fonctionnelle pour l’évaluation des lombalgies, est la traduction française du Disability questionnaire de Roland and Morris. (32)
Ce questionnaire a été développé par Martin Roland et Richard Morris en 1982 et validé sur une cohorte de 230 patients lombalgiques en soins primaires. Ses items ont été construits à partir du Sickness Impact Profile, échelle générique auto-administrée, comportant 138 items et évaluant la qualité de vie du patient. Vingt-quatre items ont été sélectionnés afin de couvrir les différents aspects de la vie quotidienne.
L’EIFEL est donc une échelle auto-administrée comportant 24 items permettant de recueillir le retentissement de la douleur du dos sur la vie quotidienne du patient. Chaque item coché par le patient vaut un point ce qui permet d’obtenir un score maximal de 24 points lorsque l’invalidité du patient est majeure.
L’EIFEL a été validée sur une population de lombalgiques aiguës (33) lors de sa traduction française mais également, plus récemment, sur une population de lombalgiques chroniques. (34) Ces différentes études ont permis de mettre en évidence les qualités psychométriques de cette échelle.
Elle est donc utilisée dans le suivi des patients lombalgiques aigus pour mesurer l’efficacité de certaines thérapeutiques.
Par la suite de nombreux scores ont été fabriqués sans pour autant qu’il y ait de score de référence.
Le Dr Cambou (35), dans sa thèse « les outils d’évaluation du risque de passage à la chronicité chez le patient lombalgique » avait également recensé les différents outils disponibles. Il note dans sa conclusion qu’un des scores appelé Orébro Musculoskeletal Pain Screening Questionnaire parait être celui qui recherche le maximum de facteurs de risque de passage à la chronicité (particulièrement les facteurs psychosociaux) en un minimum de question (24 items). Ce score, élaboré en nouvelle Zélande en 1996, est un questionnaire qui regroupe un certain nombre de facteurs de risques psychosociaux de passage à la chronicité. En effet, il évalue la pénibilité et la satisfaction au travail, les peurs et croyances, l’anxiété, la dépression et le catastrophisme. Ce questionnaire évalue également l’intensité et la fréquence des douleurs. La plupart des items ont été empruntés à d’autres questionnaires validés. Il permettrait d’identifier 75 % des personnes qui n’ont pas besoin de changement de prise en charge, 86 % de ceux qui vont avoir entre 1 et 30 jours d’arrêt de travail et 83 % de ceux qui vont avoir plus de 30 jours d’arrêt de travail.
Il nous apparait toutefois qu’un score à 24 items est difficile à utiliser en consultation de médecine générale.
L’enjeu réside donc dans le fait de trouver un score non chronophage qui peut être une aide complémentaire en consultation de soins primaires à l’expertise du médecin dans l’évaluation du risque de passage à la chronicité.
Objectif de l’étude et question de recherche
Nous avons cherché à savoir si un score clinique simple, élaboré de façon prospective, permettait en soins primaires l’identification des patients lombalgiques aigus à risque d’évoluer vers la chronicité.
La simplicité et la rapidité d’utilisation du score du Pr Valat, explorant, au-delà des caractéristiques de la lombalgie, le retentissement socio-professionnel de la douleur nous ont paru intéressantes, laissant pressentir une appropriation possible en consultation de soins primaires.
L’objectif principal de l’étude est de valider un score prédictif de l’évolution chronique des patients lombalgiques (hétéro-administré) correspondant au score du Pr Valat, en le comparant à un score de référence (auto administré) correspondant au Start Back screening Tool et à l’évolution clinique des patients.
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Table des matières
I) Introduction
A) Données épidémiologiques
B) Définitions et évolution des lombalgies aiguës
C) Le concept d’invalidité lombalgique
D) Recommandations Européennes et Françaises sur la prise en charge précoce des facteurs de passage à la chronicité
E) Facteurs de risques de passage à la chronicité
F) Scores prédictifs de l’évolution chronique des patients lombalgiques aigus
G) Objectif de l’étude et question de recherche
II) Matériel et méthode
A) Population de l’étude
B) Elaboration du questionnaire
C) Justification de l’utilisation de ces différents scores
D) Cotation des scores
1) Indice prédictif du Pr Valat
2) Start Back Screening Tool
3) L’échelle EIFEL
E) Protocole de l’étude
III) Résultats
A) Analyse descriptive
1) Caractéristiques socio-démographiques des médecins
2) Caractéristiques socio-démographiques des patients inclus
3) Caractéristiques médicales des patients
4) Analyse des résultats de l’indice prédictif du Pr Valat
5) Analyse des résultats du Start Back screening Tool.
6) Analyse des résultats du score EIFEL
B) Analyse Comparative
1) Valeur intrinsèque et extrinsèque de l’indice prédictif du Pr Valat
2) Analyse bivariée
IV) Discussion
A) Résultats principaux de l’étude
B) Forces et limites de l’étude
C) Comparaison avec les autres scores de la littérature
D) Perspectives
1) Perspectives pour la pratique
2) Perspectives pour l’enseignement
3) Perspectives pour la recherche
V) Conclusion
VI) Bibliographie
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