Dans le monde contemporain, les inondations représentent un risque naturel majeur. C’est l’un des risques naturels qui fait le plus de victimes, en occasionnant environ 20000 victimes par an (Simona et Cedric, 2007). En effet, d’après le Département des Affaires humanitaires des Nations Unies, entre 1970 et 1981, ces catastrophes ont représenté plus du tiers de l’ensemble des cataclysmes recensés (Ballais, 2011) ; et entre 2005 et 2014, plus de 85 millions de personnes ont été directement touchées par les inondations chaque année et environ 6000 personnes ont été tuées en moyenne chaque année à la suite d’inondations (UNISDR, 2015).La région méditerranéenne, par exemple, a vécu plusieurs inondations qui constituent une menace de plus en plus importante, avec des précipitations qui dépassent les 200 mm en 24 heures, et parfois même en un laps de temps qui ne dépasse pas les 6 heures (Ducrocq, 2006).Les inondations deviennent donc de plus en plus redoutées, et elles surviennent souvent à cause d’une vulnérabilité importante. L’augmentation observée de la vulnérabilité à ces inondations au cours des dernières décennies au sud de la France par exemple, est principalement due à des facteurs humains tels que l’urbanisation accrue et la croissance démographique (Tramblay et al., 2019). Au registre des épisodes marquants, le Maroc a connu des événements hydrologiques douloureux, comme ceux de l’été 2019 ou de l’automne 2014, sans oublier l’événement tristement célèbre d’août 1995 de l’oued Ourika (des centaines de morts). Au voisinage, l’Algérie a également connu en novembre 2001 des précipitations de 261 mm en 24 heures à Alger et des inondations qui ont causé d’importantes pertes humaines, d’environ 800 morts (Argence et al., 2008). D’autre part, il y a les inondations des côtes méditerranéennes françaises : les Bouches-du Rhône en 1993, l’Aude en 1999, le Gard en 2002 ou le Var en 2010 (Vinet et al., 2011) ; ou encore les côtes italiennes en février 2015 (Bevacqua et al., 2017), puis en septembre 2015 avec des précipitations cumulées atteignant 300 mm en 12h dans la vallée de Nure (Scorpio et al., 2018). Les bassins versants espagnols ont également connu une augmentation des inondations et des évènements pluviométriques intenses, à partir de 1996, notamment à l’Ouest et au sudouest du pays en automne et en hiver (Benito et Machado, 2012), mais aussi en d’autres régions, comme à Barcelone en 2002. (Damienne Provitolo, 2007) ou à la côte sud est (Pérez Morales et al., 2015).
caractéristiques physiogéographiques et géologiques des bassins versants
Situation géographique de l’aire d’étude et délimitation des bassins versants
Situé au centre ouest du Maroc, le bassin versant de Tensift occupe une superficie totale de 20 380 km2 . Ce large domaine est situé entre les latitudes 30° 50’ et 32° 10’ Nord et les longitudes 7°25’ et 9°25’ Ouest (Fig. 1). Administrativement l’oued Tensift côtoie au NordEst la province d’El kelâat Sraghna, à l’Est celle de’Azilal, au Sud-Est celle d’Ouarzazate, au Sud celle de Taroudannt, au Sud-Ouest les provinces d’Essaouira et au Nord-Ouest celle de Safi. Il s’écoule d’est en ouest et se déverse dans l’océan Atlantique. Les altitudes très différentes varient de 0 m à l’embouchure en allant jusqu’à 4167 m à Jbel Toubkal.
Ce bassin versant au sens large est subdivisé en 3 domaines distincts :
❖ Le Haut Atlas, zone de montagne formant les plus hauts reliefs du royaume avec comme point culminant, le Jbel Toubkal ;
❖ La zone de plaine (Haouz, Mejjat et Bousbaa), allongée d’est en ouest et large d’environ 40 km ;
❖ Le Jbilets, formé de montagnes de faibles altitudes, qui émergent au nord de la plaine de l’Haouz.
La variabilité spatiale des altitudes au sein du bassin a une influence considérable sur les caractéristiques météorologiques (précipitations, températures, etc.) et conditionne donc l’écoulement des eaux de surface qui impactent directement les débits de crues des oueds. Le bassin versant de Tensift est caractérisé par un climat semi-aride, influencé par le courant froid des Canaries dans la zone côtière, un climat semi-aride chaud dans les Jbilet et continental aride dans l’Haouz et le Mejjate. Quant aux reliefs du Haut Atlas, ils se distinguent par un climat plus frais et plus pluvieux. L’aridité marquante du bassin est conditionnée essentiellement par la latitude présaharienne et en une moindre mesure par la continentalité. Par ailleurs, le contraste saisonnier est très marqué, les pluies qui sont généralement importantes durant la période automnale et hivernale, sont irrégulières, intenses et violentes. La sécheresse prend après une ampleur considérable surtout dans les zones de plaine où les températures sont habituellement élevées en été. Les précipitations sont généralement faibles et caractérisées par une grande variabilité spatio-temporelle. La pluviométrie moyenne annuelle est de l’ordre de 250 mm à Marrakech et peut atteindre entre 500 et 600 mm sur les reliefs du Haut Atlas. L’alimentation du bassin de Tensift est assurée en grande partie par la partie montagneuse des oueds qui drainent le versant nord de l’Atlas grâce à leurs hautes altitudes, leurs pentes et la nature des sols. Du fait de l’existence du grand contraste entre la montagne et la plaine de l’Haouz, l’hydrologie de la plaine se reporte sur les eaux souterraines, alors que la zone montagneuse constitue la source d’écoulement de surface.
Caractéristiques du bassin versant de l’Ourika
Les caractéristiques physiographiques
Le bassin versant de l’Ourika est situé au sud-est du grand bassin versant de Tensift, et à 40Km au sud de la ville de Marrakech. Il est localisé entre les latitudes 31 et 31°20’ Nord et les longitudes 7°30’ et 7°60’ Ouest. Il est limité à l’est par le bassin versant de Zât et à l’ouest par celui de la Rheraya. À son exutoire « Aghbalou », le bassin est limité au nord par la plaine de l’Haouz, et au sud par l’axe de la chaîne du Haut Atlas. D’une superficie de 503 Km2 , le bassin versant de l’Ourika est connu par ses reliefs élevés. 75% des surfaces du bassin sont localisées entre 1600 et 3200 m (Saidi et al. 2010) (Fig. 2). Au niveau du cours d’eau principal, les pentes sont comprises entre 0% et 5%. En outre elles augmentent en allant du Nord au Sud (Fig. 3).
L’Oued de l’Ourika fait partie de la zone la plus menacée du bassin du Tensift vu que cette partie du bassin est la plus active. Les pentes y sont fortes en amont et la pluviométrie est relativement importante. Le réseau hydrographique de ce bassin est bien développé dans la partie amont du fait de l’imperméabilité du socle précambrien (Gneiss, granites, granodiorites…), du couvert végétal restreint et du relief très accidenté. Alors que dans la partie aval, le réseau est moins développé par la présence des terrains moins résistants et peu perméables, avec un relief plus ou moins modéré et un couvert végétal plus abondant que celui de l’amont.
Pour le bassin versant de l’Ourika, la densité de drainage est égale à 1,7 km/km², ce qui témoigne d’une hiérarchisation importante du réseau hydrographique qui va permettre une collecte efficace des eaux de ruissellement et qui pourrait accentuer la brutalité des crues .
Caractéristiques géologiques
Le bassin versant de l’Ourika est l’un des bassins de la chaîne atlasique (Haut Atlas de Marrakech). Celle-ci s’étendant depuis l’océan atlantique à l’Ouest jusqu’en Tunisie à l’Est. C’est une chaîne intracratonique typique, sensiblement allongée selon une direction ENEWSW.
Sur le plan géologique, le bassin versant de l’Ourika offre 2 grands types de facies (Fig. 5) :
❖ Une partie amont : située à des altitudes supérieures à 2000 m constitués de roches magmatiques et métamorphiques qui constituent le socle de la chaîne atlasique. On y rencontre des roches plutoniques (notamment des granites et granodiorites), des roches volcaniques (andésites, rhyolites …) et des faciès métamorphiques (gneiss et migmatites).
❖ Une partie aval : située à des altitudes inférieures à 2000 m, composée des dépôts permotriasiques et quaternaires plus tendres. La lithologie du permotrias est composée d’un faciès Nord Sub-atlasique formé de conglomérats, grés et siltites, et d’un faciès Sud du haut plateau, formé essentiellement de siltites argileuses et localement des grés massifs (Biron, 1982).
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Table des matières
INTRODUCTION GENERALE
CHAPITRE I : CARACTERISTIQUES PHYSIO-GEOGRAPHIQUES ET GEOLOGIQUES DES BASSINS VERSANTS
I. SITUATION GEOGRAPHIQUE DE L’AIRE D’ETUDE ET DELIMITATION DES BASSINS VERSANTS
II. CARACTERISTIQUES DU BASSIN VERSANT DE L’OURIKA
II.1. Les caractéristiques physiographiques
II.2. Caractéristiques géologiques
II.3. Occupation du sol
II.4. Climatologie générale
III. CARACTERISTIQUES DU BASSIN VERSANT DE LA RHERAYA
III.1. Caractéristiques physiographiques
III.2. Caractéristiques géologiques
III.3. Occupation du sol
III.4. Climatologie générale
IV. CONCLUSION SUR LA PHYSIO-GEOGRAPHIE ET LA GEOLOGIE DE LA REGION D’ETUDE
CHAPITRE II : HYDRO-PLUVIOMETRIE ET ANALYSE DES REGIMES
I. ACQUISITION ET ANALYSE DES DONNEES
II. VARIATION TEMPORELLE DES PRECIPITATIONS DANS LES BASSINS VERSANTS DE L’OURIKA ET DE LA RHERAYA
II.1. Variation annuelle
II.2. Variation mensuelle
II.3. Variation saisonnière
III. ANALYSE DES DONNEES DE DEBIT DES BASSINS DE L’OURIKA ET DE LA RHERAYA
III.1. Variation des débits max annuels
III.2. Variation des débits moyens mensuels
III.3. Variation des débits saisonnière
IV. RELATION PLUIE-DEBIT
IV.1. Le bassin versant d’Ourika
IV.2. Le bassin versant de la Rheraya
V. CONCLUSION SUR L’HYDRO-PLUVIOMETRIE
CHAPITRE III : LES CRUES DES OUEDS DE L’OURIKA ET DE LA RHERAYA
I. PRESENTATION D’UN HYDROGRAMME DE CRUE
II. HISTORIQUE DES CRUES DES BASSINS VERSANTS DE L’OURIKA ET DE LA RHERAYA
II.1. Le bassin versant de l’Ourika
II.2. Le bassin versant de la Rheraya
III. VITESSE DE PROPAGATION DES CRUES
III.1. Le bassin versant de l’Ourika
III.2. Le bassin versant de la Rheraya
IV. CONCLUSION SUR L’ETUDE DYNAMIQUE DES CRUES
CHAPITRE IV : ANALYSE FREQUENTIELLE DES DEBITS DE CRUES
I. LES TESTS STATISTIQUES
I.1. Test d’homogénéité
I.2. Test d’indépendance
I.3. Test de stationnarité
I.4. Résultats des tests statistiques sur les données utilisées
II. OUTILS D’ANALYSES ET PARAMETRES D’EVALUATION
III. AJUSTEMENT DES LOIS DE PROBABILITE ET DETERMINATION DES PERIODES DE RETOUR DES DEBITS EXTREMES
IV. RESULTATS DE L’ANALYSE FREQUENTIELLE ET ESTIMATION DES QUANTILES
IV.1. Le bassin versant de l’Ourika à la station d’Aghbalou
IV.2. Le bassin versant de la Rheraya à la station de Tahanaout
V. CONCLUSION SUR L’ANALYSE FREQUENTIELLE
CHAPITRE V : MODELISATION HYDRAULIQUE
I. GENERALITES SUR LA MODELISATION HYDRAULIQUE
II. OUTIL DE MODELISATION ET DONNEES UTILISEES
II.1. L’outil de modélisation hydraulique utilisé
II.2. Les données utilisées pour la modélisation hydraulique
III. RESULTATS DE LA MODELISATION HYDRAULIQUE
III.1. Bassin versant de l’ourika
III.2. Bassin versant de la Rheraya
IV. CONCLUSION SUR LA MODELISATION HYDRAULIQUE
CONCLUSION GENERALE