A l’heure où le monde est à la recherche de liens entre les sociétés à travers les siècles mais aussi à travers les différentes civilisations, un animal apparaît comme porteur de cette universalité : l’âne. En effet, utilisé aussi bien pour l’élevage, la traite ou sa viande, il constitue un outil de travail très important. Il est principalement utilisé pour le transport des hommes ou des biens, pour les travaux champêtres et pour l’exhaure (TAPSOBA, 2012). Le Mali, vaste pays sahélien enclavé au cœur de l’Afrique de l’Ouest, couvre une superficie de 1 241 138 km2 dont près de 60% appartiennent à la zone désertique. Il est limité au Nord par l’Algérie, au Sud par la Guinée et la Côte d’Ivoire, à l’Est par le Burkina Faso et le Niger, à l’Ouest par la Mauritanie et le Sénégal (MALI, 2002). Au Mali, l’agriculture est marquée par la prépondérance des systèmes de production agro-sylvo-pastoraux traditionnels extensifs. L’élevage de l’âne est encouragé par le climat chaud et sec du Mali. L’effectif national des ânes est estimé à 1 480 000 têtes (PRADERE et al., 2007). En raison de la faible mécanisation de l’agriculture, l’âne est utilisé pour la culture attelée, le transport des récoltes, mais également pour les travaux ménagers. En élevage, il est utilisé pour le transport des aliments, l’évacuation des fientes des poules et les bouses des vaches (SOW, 2012). C’est une activité traditionnelle qui se pratique depuis des siècles. En effet, sa rusticité et son endurance au travail ont fait de lui « un animal à tout faire ». Il joue ainsi un rôle économique et social important. Sur le plan des races d’ânes rencontrées en Afrique de l’Ouest, l’unique documentation disponible est celle faite par DOUTRESSOULE (1947) pendant la période coloniale. Cet auteur a décrit six races d’ânes dans les pays sahéliens d’Afrique de l’Ouest. Les six races d’ânes sont phénotypiquement identifiables et l’aire de répartition est la zone sahélo-soudanienne d’Afrique de l’Ouest. Ces races sont l’âne du Gourma, l’âne de l’Aïr, l’âne du Yatenga, l’âne du Sahel, l’âne de Mauritanie et l’âne Minianka. Malgré son importance, très peu d’études sont consacrées à cette espèce et l’âne est souvent abandonné à son seul propriétaire qui l’exploite au maximum au rythme des saisons sans nécessairement connaître ses besoins.
GENERALITES SUR LE MALI
Géographie
Situation
Situé au cœur de l’Afrique de l’Ouest entre les latitudes 10°30 et 25°00 Nord et les longitudes 12°00 Ouest et 4°00 Est, le Mali est un vaste pays sahélien qui ne bénéficie d’aucun accès à la mer.
Importance de la pluviométrie en fonction des régions
Le climat est caractérisé par l’alternance d’une saison sèche (dont la durée varie de cinq mois dans la partie Sud à neuf mois au Nord) et d’une saison humide ou hivernage qui débute en avril-mai et se termine en octobre-novembre. La pluviométrie, très variable suivant les régions du pays, est le principal facteur qui détermine les quatre zones agro-écologiques du pays. Nous trouvons du Sud au Nord la zone soudano-guinéenne (>1100 mm de pluie par an), la zone soudanienne (600-1100 mm), la zone sahélienne (200-600 mm) et la zone saharienne ou désertique (moins de 200 mm) (Figure 1).
Relief et hydrographie
Le relief, peu contrasté, est constitué de plateaux et de plaines avec des systèmes dunaires bien développés dans les régions du Nord et de l’Est (Figure 2). Hormis le fleuve Niger, les cours d’eau permanents n’existent que dans les régions Ouest et Sud du pays (le fleuve Sénégal, le fleuve Bani). D’une longueur totale de 4200 km, le fleuve Niger traverse le Mali sur 1600 km et représente la principale voie de communication entre les différentes régions. Ressource primordiale pour les hommes, les cultures et les troupeaux, il joue un rôle prépondérant dans l’inondation du delta intérieur du Niger (MILET, 2007).
L’économie malienne
Une grande partie de l’économie malienne est basée sur le secteur agricole au sens large, comprenant les cultures (coton, riz, mil, arachide, canne à sucre, maïs) mais également la pêche et l’élevage. Ainsi, l’économie malienne est essentiellement agropastorale. Le Mali a également d’autres ressources, notamment les gisements miniers (or, phosphate, sel). Malgré ces richesses, l’économie du Mali est restée vulnérable aux chocs extérieurs (aléas hydroclimatiques, invasions acridiennes, chute des cours de coton). Au sein du secteur agricole, le Produit Intérieur Brut (PIB) de l’élevage estimé contribue pour 40% au PIB du secteur primaire et pour 12% au PIB national. En dépit de ces contributions, les ressources budgétaires affectées à l’élevage pendant la période allant de 1992 à 2005 ne représentent que 4,8% du budget total affecté au secteur primaire (PRADERE et al., 2008).
Peuplement humain
La population malienne, estimée à 13,9 millions d’habitants, est jeune et en croissance rapide (2,7% par an). Le Mali est un carrefour de cultures et d’ethnies (MILET, 2007), cela confirme ce que disait GALLAIS (1984) : « L’ethnicité commande en Afrique non seulement la culture, au sens le plus étroit du terme, mais aussi un grand nombre de composantes matérielles de l’existence – habitat, techniques de productions – et l’organisation sociopolitique de l’espace ».
Importance de l’élevage au Mali
L’élevage est exercé historiquement par les peuples d’éleveurs : Peuls, Touaregs et Maures. Mais actuellement, il est en réalité pratiqué par au moins 80% de la population rurale. L’élevage assure des fonctions multiples et essentielles. Pour les maliens, son importance n’est pas seulement économique, elle est aussi sociale et culturelle.
Fonction économique
Pour 30% de la population, l’élevage est la principale source de subsistance (VAUDAUX, 2010). Le revenu est tiré de la vente d’animaux ou de la vente du lait. Mais il peut être aussi un complément de revenu pour d’autres professions (commerçants, fonctionnaires, artisans). L’élevage est également une forme d’épargne (appelée épargne sur pieds) et une source de liquidités pour ceux qui n’ont pas accès au système bancaire (VAUDAUX, 2010).
Signification sociale et culturelle
Chez les éleveurs, le prestige social est fortement lié au bétail. S’il est vrai qu’il peut y avoir un souci de prestige tiré de la taille du troupeau, il s’agit aussi de pouvoir remplir certaines obligations sociales (dots, cérémonies) et de préserver la tradition pastorale (MANOLI, 2006 ; BA, 1982). Des échanges commerciaux ont lieu entre les éleveurs et d’autres groupes sociaux. Le lait et les animaux sur pieds sont vendus ou échangés contre d’autres produits alimentaires ou des biens matériels (BA, 1982). Il existe donc dans la société malienne un tissu social rural autour de l’élevage, qui procure des revenus à différentes catégories de la population.
Systèmes de production diversifiés
Elevage sédentaire
L’élevage sédentaire est lié au système agro-pastoral et se situe surtout dans la zone soudanienne et soudano-guinéenne. Même s’il concerne parfois de faibles effectifs, il existe dans tous les villages. Le plus souvent, les animaux sont gardés la nuit dans les concessions et rassemblés le matin afin d’être pris en charge par des bergers salariés (BA, 1982). Suivant la place de l’élevage, il peut y avoir :
o L’élevage par possession de cheptel de trait (qui représente actuellement près de 25% du cheptel malien).
o L’élevage semi-sédentaire : Les campements d’élevage sont bien caractérisés dans le terroir d’accueil et l’intégration sociale des éleveurs est avancée (nombreux échanges économiques) ;
o L’élevage de thésaurisation : Il est le fait de ruraux qui consacrent traditionnellement l’essentiel de leurs activités à l’agriculture. Les surplus dégagés sont épargnés sous forme d’animaux. C’est le système villageois traditionnel d’épargne (TRAORE et TRAORE, 2002).
Elevage transhumant
L’élevage transhumant se rattache au système pastoral. Dans le système transhumant, les déplacements sont cycliques et ont pour but la recherche de pâturages et de points d’eau (TRAORE et TRAORE, 2002). Suivant les ethnies ou les groupes sociaux, ils intéressent la totalité de la famille qui déplace son habitat et les animaux, ou seulement les gardiens ou bergers qui accompagnent les troupeaux (PAGOT, 1985). Dans un pays sahélien comme le Mali, ce système d’élevage représente au moins 70% du cheptel (CSAO et al., 2008).
|
Table des matières
INTRODUCTION
CHAPITRE I : GENERALITES SUR LE MALI
I.1. Géographie
I.1.1. Situation
I.1.2. Importance de la pluviométrie en fonction des régions
I.1.3. Relief et hydrographie
I.2. Economie malienne
I.3. Peuplement humain
I.4. Importance de l’élevage au Mali
I.4.1. Fonction économique
I.4.2. Signification sociale et culturelle
I.4.3. Systèmes de production diversifiés
CHAPITRE II : GENERALITES SUR L’ESPECE ASINE
II.1. Âne : Rappel sur la classification
II.2. Origines préhistoriques et historiques des equidés
II.3. Différentes races d’ânes
II.3.1. Âne sauvage africain
II.3.2. Ânes domestiques
II.3.3. Les races d’ânes domestiques d’Afrique de l’Ouest
II.4. Caractères généraux des ânes
II.4.1. Allures
II.4.2. Apparence de l’extérieur
II.5. Hybrides
II.6. Elevage de l’âne
II.6.1. Elevage de l’ânon
II.6.2. Elevage des asins
II.6.3. Sélection traditionnelle des asins d’élevage de trait
II.7. Reproduction
II.7.1. Physiologie de la reproduction
II.7.2. Mise à la reproduction
II.7.3. Chaleurs
II.7.4. Saillies des ânesses
II.7.5. Gestation et mise-bas
II.8. Comportement et contention
II.8.1. Ethologie des asins
II.8.2. Techniques et astuces pour la contention
CHAPITRE III : IMPORTANCE DES ASINS
III.1. Cheptel asin du Mali
III.2. Importance sociale
III.3. Importance économique
III.3.1. Traction des charrettes
III.3.2. Moyen de transport
III.3.3. Culture attelée
CHAPITRE IV : MORPHOBIOMETRIE DES ÂNES
IV.1. Identification des ânes
IV.1.1. Signalement codifié
IV.1.2. Signalement graphique
IV.1.3. Règles générales du signalement
IV.1.4. Signalement des ânes
IV.1.4.1. Robe
IV.1.4.2. Epi
IV.1.4.3. Marques
IV.2. Détermination de l’âge par la dentition chez l’âne
IV.3. Note d’état corporel
IV.4. Mensurations
CONCLUSION