Caractéristiques générales des sols ferrallitiques
Les sols ferrallitiques représentent plus de 19 % de la surface de la terre et se développent sous un climat sub-tropical et tropical humide (Bohn, 1982). Ce sont des sols acides, profonds, caractérisés par des accumulations de fer et d’aluminium, généralement pauvres en matières organiques avec une faible capacité d’échange et carencés en phosphore. L’évolution pédologique a conduit à la formation d’argiles à kaolinite, d’oxydes et hydroxydes de fer (goethite, hématite), d’aluminium (gibbsite) et de silice (amorphes ou cristallisés). Ces minéraux sont dotés de surface spécifique élevée, d’une grande réactivité due à leur petite taille et leurs propriétés de dispersion ou de floculation. Dans les sols ferrallitiques, les réactions de rétention du groupement orthophosphate sont donc importantes. Elles sont dues à la fixation par les oxydes et hydroxydes de fer et d’aluminium, soit par adsorption lorsque la concentration en phosphore est faible voire par précipitation à plus forte concentration de phosphore.
Les sols ferrallitiques des hautes terres malgaches sont caractérisés par une forte proportion en argile kaolinite et en gibbsite. La fertilité de ces sols est également contrôlée par la toxicité aluminique résultant de la présence d’une teneur élevée en aluminium phytodisponible. A Madagascar, à cause de leurs propriétés physicochimiques, les sols ferrallitiques supportent des cultures souvent caractérisées par des rendements et des productivités de travail très faibles.
Le phosphore dans le système sol-plante
Rôles du phosphore pour les végétaux
Représentant environ 0,5 à 1% de la matière sèche végétale, le phosphore est présent dans les tissus végétaux sous forme d’ions phosphates souvent associés dans des composés organiques. Environ 2/3 du phosphore absorbé par la plante se retrouvent en général dans les graines à la récolte (Castillon, 2005), les organes végétatifs recèlent une teneur nettement plus faible. Chez les végétaux, comme chez tous les organismes vivants, le phosphore est un nutriment majeur. Il joue un rôle essentiel dans de nombreux processus biologiques entre autres la croissance, la photosynthèse, la fixation symbiotique de l’azote atmosphérique… (Marschner, 1995). Il entre dans la composition des acides nucléiques donc dans la composition de l’ADN ainsi que de l’ARN. Il est aussi impliqué dans les transferts d’énergie à l’intérieur des cellules par l’intermédiaire de molécules telles que l’ATP.
Les formes de P dans le sol
a- Phosphore dissous
Le phosphore dans la solution du sol peut se trouver sous différentes formes organiques et minérales. Il peut se présenter à l’état d’ions libres, les ions orthophosphates, formes d’absorption par les plantes L’anion orthophosphate monovalent (H2PO4) et divalent (HPO4) représentant 50 pour cent des ions orthophosphates à un pH proche de la neutralité (pH 6 à 7). A pH acide (4-6), comme dans les sols ferrallitiques, l’ion H2PO4- représente environ 100 pour cent des ions en solution. Il existe aussi sous forme d’ions complexés, molécules et colloïdes minéraux ou organiques contenant des groupements phosphates. Des composés organiques contenant du phosphate et des polyphosphates ont été identifiés en solution (Morel, 2002).
b- Phosphore inorganique
Dans le sol, la forme minérale du phosphore provient de l’altération de la roche mère et de la minéralisation du phosphore organique. Le sol contient une réserve de phosphore inorganique sous la forme de minéraux phosphatés (apatites) qui libère des phosphates progressivement par dissolution. Une partie du phosphore inorganique est incluse dans des minéraux phosphatés secondaires tels les phosphates de fer, d’aluminium et de calcium. Ces minéraux sont issus de la précipitation des phosphates avec des cations métalliques. La nature et l’abondance de ces derniers dans la solution du sol, généralement fonction du pH, déterminent le type du minéral formé. La solubilité de ces minéraux dépend également du pH du sol. Celle des phosphates de fer et d’aluminium augmente avec le pH alors que les phosphates de calcium présentent un minimum de solubilité autour du pH 8 (Hinsinger, 2001). Une autre partie est retenue par des réactions de sorption sur des composés à charge positive comme les argiles, les oxyhydroxydes de fer et d’aluminium. Le pH du sol, la concentration de phosphates en solution et la présence d’anions pouvant entrer en compétition avec le phosphore sur les sites de sorption conditionnent la quantité de phosphore adsorbé. Il existe aussi des complexes de composés humiques avec du fer et d’aluminium qui peuvent fixer du phosphate.
c- Phosphore organique
Les formes organiques représentent 20 à 80 % du phosphore total suivant les types du sol et les pratiques agricoles ; elles regroupent des phosphates d’inositol, mais également des acides nucléiques, des phospholipides,… Certains de ces composés organiques phosphorés sont associés aux argiles et aux hydroxydes, ou à des composés humifiés les rendant difficilement hydrolysables par les enzymes. D’autres sont immobilisés par des microorganismes, notamment une partie de ceux issus de la dégradation des résidus organiques et du phosphore de la solution du sol. Cette fraction organique ne peut donc intervenir dans la nutrition des plantes qu’après hydrolyse et libération d’ions orthophosphates. Cette hydrolyse est catalysée par des enzymes appelées phosphatases.
La macrofaune du sol
Définition
D’une manière générale, Lavelle et al. (1991) ; Gobat et al. (1998) définissent la faune du sol comme l’ensemble des animaux qui passent une partie de leur cycle biologique dans le sol (faune endogée) ou sur sa surface (faune épigée) dont la majorité intervient dans le « fonctionnement biologique du sol ». Bachelier (1978) classe la faune du sol en 4 catégories suivant leur taille : dans l’ordre croissant, la microfaune, la mésofaune, la macrofaune et la mégafaune. Selon cette classification, la majorité des vers de terre font partie de la macrofaune du sol. Cette catégorie regroupe en effet les organismes de longueur variant de 4 à 80 cm.
Les lombriciens
Les vers de terre appartiennent dans les embranchements des Annelides, classe des Clitellates, Ordre des Oligochètes.
Répartition écologique et zones d’influence
a- Répartition écologique
Les vers de terre ou lombriciens font probablement partie des organismes terrestres les plus anciens. En terme de biomasse, ils dominent la macrofaune du sol dans la plupart des écosystèmes terrestres (Girard et al., 2005). Cependant, l’abondance et la biomasse de leurs communautés dans le sol sont fortement liées aux caractéristiques environnementales locales, qu’elles soient d’origine pédoclimatique ou anthropique. La profondeur de la couverture pédologique et son humidité affectent la population des vers dans le sol. Ils sont plus sensibles à la sécheresse qu’à une immersion temporaire. De même pour le pH dont l’optimum est compris entre 4,5 et 10. Une forte acidification des sols, c’est-à-dire un pH inférieur à 4, peut provoquer leur diminution voire leur disparition dans le sol.
b- Zone d’influence
A cause de la forte contribution aux taux de renouvellement du sol, les vers de terre sont d’importance spéciale pour le cycle des nutriments, la structure du sol et les processus de transfert de matières (Buck et al., 1999). Ils sont qualifiés d’«ingénieur du sol ».
Les peuplements de vers de terre ont la particularité de présenter une diversité fonctionnelle importante et relativement bien caractérisée sur le plan écologique et biologique. Leur effet sur le fonctionnement des sols dépend des interactions avec les facteurs biotiques et abiotiques, à différentes échelles spatiales et temporelles (Lavelle et al.,1998) .
La drilosphère, ensemble du volume de terre sous l’influence des vers de terre, est une sphère dynamique qui est constamment en changement dans le temps et dans l’espace. Les dynamiques temporelles sont dépendantes des périodes d’activités de la communauté des vers (durée de vie des vers et âge des structures créées), alors que les dynamiques spatiales sont contrôlées par la distribution horizontale et verticale, et les facteurs abiotiques et biotiques qui déterminent cette distribution (Brown et al., 2000).
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Table des matières
1 INTRODUCTION
1.1 Contexte général de l’étude et problématique
1.2 Objectif
1.3 Importance de l’étude et cadre institutionnel
2 BASES SCIENTIFIQUES
2.1 Caractéristiques générales des sols ferrallitiques
2.2 Le phosphore dans le système sol-plante
2.2.1 Rôles du phosphore pour les végétaux
2.2.2 Les formes de P dans le sol
2.3 La macrofaune du sol
2.3.1 Définition
2.3.2 Les lombriciens
2.3.2.1- Répartition écologique et zones d’influence
2.3.2.2 Rôles des vers de terre dans le fonctionnement du sol
3 MATERIELS ET METHODES
3.1 Présentation des échantillons
3.1.1 Localisation des sites de prélèvement
3.1.2 Caractéristiques des sols
3.1.3 Caractéristiques du ver de terre
3.1.4 Types d’échantillon
3.2 Méthodes analytiques
3.2.1 Détermination du phosphore total
3.2.2 Détermination du phosphore extractible à la soude (NaOH-P)
3.2.3 Détermination du potentiel d’activité des phosphatases
3.2.4 Détermination du phosphore diffusible (échangeable)
3.2.5 Analyses statistiques
4 RESULTATS
4.1 Le phosphore total et le phosphore potentiellement biodisponible
4.1.1 Le Phosphore total (Pt)
4.1.2 Phosphore extractible par la soude (NaOH-P)
4.1.2.1 Phosphore total extractible par la soude (NaOH-Pt)
4.1.2.2 Le phosphore inorganique et organique extractible par la soude (NaOH-Pi & NaOH-Po)
4.2 Détermination de l’activité phosphatasique
4.3 Le Phosphore diffusible
5 DISCUSSION
5.1 Discussion des résultats
5.1.1 Etat de la fertilité phosphatée des sols ferrallitiques des « Tanety » malgaches
5.1.2 Effet des vers de terre sur la biodisponibilité du phosphore dans le sol
5.2 Limites du travail
5.3 Intérêt agronomique de l’étude
6 CONCLUSION
7 BIBLIOGRAPHIE
8 ANNEXES