Caractéristiques et évolution d’un patrimoine architectural

Les différents types et catégories de baraques à frites

Une catégorisation établie par Paul Ilegems 

Les fritkots, visibles sur tout le territoire belge, se distinguent de part leur architecture typique. Comme évoqué précédemment, on recense à l’heure actuelle plus de 5000 fritkots dans le royaume. Et pourtant, tous (ou presque) sont différents. Vraiment ? Et bien oui, chaque fritkot est identifiable à son propriétaire. Une atmosphère différente se dégage de chacun d’entre eux, les couleurs, les formes et les tailles varient. Cette diversité de scénarisation du fritkot est possible grâce à l’évolution de ce dernier à travers le temps. Les normes d’hygiène, les règlements et prescriptions urbanistiques ainsi que les dictats d’une clientèle qui évolue sont tant d’aspects qui ont participé à l’élaboration de pluralité formelle et architecturale de la baraque à frites. Les frituristes se sont souvent retrouvés à fabriquer leur lieu de travail de leurs propres mains. Faits de brics ou de brocs, aménagés dans une caravane ou dans un vieux bus, au rez-de-chaussée d’une maison familiale ou encore dans un bungalow au centre de la place du village, les formes changent mais pas le plaisir.Paul Ilegems, professeur d’art à Anvers et à l’Université de Gent et surtout passionné de frites, s’est adonné dans son livre Het Belgisch Frietenboek  (Le livre des Frites Belges) à la mise en exergue des différentes typologies de fritkots existants. Il établit ainsi une classification de ces petits éléments architecturés selon plusieurs typologies. Si nous suivons scrupuleusement la liste de Paul Ilegems, il y aurait cinq typologies de baraques à frites. Les termes utilisés ci-après sont ceux employés par Paul Ilegems dans son ouvrage.

Frietbarak

Il s’agit là de la friterie type conçue par l’exploitant lui-même. Cela se rapproche bien souvent du bricolage. Le résultat peut être assez approximatif, mais ce n’est pas vraiment cela qui compte. Cette typologie de fritkot n’est que peu présente de nos jours du fait de la volonté des mairies et administrations de les enlever de l’espace public. Cette typologie est en quelque sorte la grand-mère des baraques à frites.

Fritkot ou Caravanfrituur 

Cela correspond la friterie « standard », celle à laquelle on pense immédiatement et instinctivement à l’évocation du mot « friterie ». Elle est bien souvent mobile. Pas dans le sens d’un food truck qui peut se déplacer indépendamment, mais plutôt dans le sens d’une caravane. Cette typologie peut se mouvoir dans l’espace urbain facilement. Cela permet de s’adapter à des situations particulières comme par exemple des évènements sportifs. Les friteries visibles aux alentours des stades de football ou sur les parkings de foires font bien souvent partie de cette typologie. Pour donner un exemple concret qui parlera, j’en suis certain, à tous les Français, la friterie « Momo » de film Bienvenue chez les Ch’tis. Pour les amateurs de cinéma, vous pouvez apercevoir ce type de friterie dans le délicieux film Dikkenek d’Olivier Van Hoofstadt.

Chalet frituur

Ce petit édifice en forme de chalet ou d’abri de jardin (selon les tailles et perceptions) est selon Paul Ilegems, la plus noble des baraques à frites. Elle prend l’aspect d’une maison de montagne en bois. Ce serait donc là le haut de gamme de la baraque à frites. Ce qui est intéressant dans cette typologie à part entière mise en avant par l’auteur, c’est la volonté de s’embourgeoiser, quitte à se décontextualiser totalement. C’est un peu le même problème dans nos jardins. Chacun achète son petit abri de jardin type « chalet » chez Leroy Merlin pour y ranger sa tondeuse. Ce que je veux dire par là, c’est qu’en soit, cet abri n’a pas besoin de ressembler à un chalet dans son usage. Mais si il s’est démocratisé, c’est parce que les gens ont quasi sacralisé cet objet, il est devenu un must. Avec le Chaletfrituur, c’est la même chose.
Pourquoi donner l’aspect d’un chalet à une friterie en plein milieu du plat pays ? A première vue il n’y a aucune bonne raison, à part la plaisanterie. Mais, si on y réfléchit, il s’agit en fait d’une sorte de marketing. Le chalet évoque un endroit chaud, où il fait bon s’y retrouver. Le bois lui confère une atmosphère chaleureuse et conviviale. Cet embourgeoisement participe à l’évolution de l’idée de ce que pourrait être la friterie. La friterie n’est donc plus qu’un lieu de passage où l’on mange son cornet en extérieur sous la banne publicitaire. Elle devient un lieu où l’on s’assoit, un lieu où on prend le temps de déguster. Ce n’est plus un petit abri où l’on cuisine des frites, mais plutôt un refuge.

Busfrituur 

La friterie-bus est une typologie de friterie bordant les routes et chemins du plat pays. Bien souvent ces friteries typiques, qui se sont développées principalement au cours des années 1970 et 1980, s’implantaient le long des routes nationales et au intersections de ces dernières. De plus en plus, ce modèle a été délaissé au profit d’autres typologies de friterie, plus simple à entretenir et plus facile d’emploi. Le Busfrituur est une typologie de construction qu’on pourrait qualifier d’home-made. Home-made dans le sens où l’exploitant rachète généralement un bus ayant servi dans le domaine du transport public (TEC en Belgique) et se débrouille pour la transformer en friterie avec les équipements nécessaires. La transformation du bus se fait généralement en famille ou entre amis. Les Busfrituurs ont quelque peu disparu des bords de route du petit royaume. Le nombre de ces derniers le long de la Nationale était tellement important que cela a inspiré les camionneurs allemands qui l’empruntaient et surnommèrent cette route la « Frietenstrasse » (littéralement la rue des frites). Il s’agit là d’une route emblématique de Belgique, qui est l’une des plus empruntées et qui a participé à l’essor de beaucoup de régions de Belgique avant le développement autoroutier.

Huisfrituur 

Huis = Maison. Paul Ilegems emploie aussi le terme de « Frietannen ». Elle correspond à la friterie en dur, qui de ce fait est permanente et résidentielle. Ce type de friterie possède pignon sur rue. La vitrine est visible depuis la rue, elle est souvent fortement éclairée. A la manière des fritkots plus ambulants, ces Huisfrituur ont souvent une banne au dessus de la devanture qu’ils détendent une fois le dit établissement ouvert. Les friteries en dur existent pour plusieurs raisons. Les exploitants frituristes décident parfois de s’installer au rez-de-chaussée de leur maison, ou encore de racheter un local commercial et de le convertir en friterie. Dans les villages et villes ouvrières cette typologie est présente depuis relativement longtemps. Dans les années 1970-1980, la pratique de transformer son garage en fritkot de village n’était pas si exceptionnelle. Il s’agissait là d’une époque où les règles d’hygiène n’existaient pas ou très peu. Une des raisons de leur existence et développement, plus récente celle-ci, est la volonté des autorités de camoufler les fritkots de leurs places publiques. Ainsi, certains frituristes se voient obliger de fermer boutique et de rouvrir au sein d’un bâtiment en dur, à l’urbanisme contrôlé et à l’atmosphère policée. Cependant, certaines des friteries/fritkots les plus connues et importantes de Belgique ont souvent été de cette typologie. En témoigne Chez Léon à Bruxelles ou encore Fritkot Max véritable emblème de la ville d’Anvers. La caractéristique principale qui démarque cette typologie des autres est sa sédentarisation et son caractère pérenne.Paul Ilegems distingue deux sous-catégories du fritkot en dur : la friterie brasserie et la friterie salon (Salonfrituur). Cette dernière se pare de « beaux décors », c’est un lieu où l’on dégusterait les frites de façon maniérée. Un peu comme un salon de thé, mais où le liquide jaune est remplacé par le solide jaune et doré. Les typologies de fritkots étudiées à l’instant, nous offrent un panel important de ce à quoi peut ressembler ce lieu si cher aux Belges. Nous venons de le voir, sa forme peut différer, son esthétique peut varier, sa taille aussi. Mais pas le bonheur qu’il apporte. Ces cinq grandes familles énoncées par Paul Ilegems permettent de mieux comprendre les différents enjeux liés à la place du fritkot dans la ville et dans la vie belges. Se dégagent alors des questions portant sur la forme même de cet objet mais aussi sur son usage et sa pérennité. En effet, on se rend compte avec ce classement par typologie que le fritkot, un objet avec une fonction précise qui ne varie pas, peut prendre des formes totalement différentes. Tantôt mobilier urbain, tantôt maison ou encore objet architectural vernaculaire, le fritkot s’est diversifié dans sa forme au fil du temps. De ce constat, il peut en ressortir deux grandes catégories : le fritkot sédentaire et le fritkot mobile. Ce sont deux écoles différentes, mais qui ont un but commun : éduquer le client au goût d’une frite bien chaude.

Une autre manière de catégoriser les baraques à frites : la mienne

De cette analyse des différentes typologies établies par Paul Ilegems, il semble important de se forger une idée personnelle sur la question. Sont-ce là les seules catégories existantes ? Cette catégorisation est-elle perceptible par tous et partout ? La place est maintenant laissée à un classement personnel, basé sur une expérience de vie, commencée dès l’âge d’avoir pu goûter ma première frite. Pour l’enfant que j’étais et que je suis toujours, la baraque à frites, comme j’aime à l’appeler, n’est autre qu’un petit boui-boui, en bord de route ou sur une place publique. En y réfléchissant j’ai pu dégager de mes souvenirs et de mon expérience différents attributs qui caractérisent le fritkot. Il existe en effet différents types de ce lieu, de cet espace, de ce volume typiquement belge.La première catégorisation est celle concernant la mobilité ou non de l’objet. C’est pour moi le caractère premier d’un fritkot, son attribut principal. Sa mobilité ou sa pérennité. Viennent ensuite sa forme, sa réalisation architecturale et son utilisation dans l’espace urbain ou rural. C’est ainsi que dans mon langage courant, je distingue friterie de baraque à frites.
La baraque à frites : La baraque à frite est le petit boui-boui du coin, celui qui a été bricolé dans la bonne humeur par son exploitant. A mon sens, le mot « baraque » a une importance particulière. Ce mot fait référence à la brinquebalance, la fragilité et la typicité d’une construction. Il s’agit d’une construction légère, souvent démontable. A l’origine la baraque est construite en planche de bois et fait référence au monde rural, agricole mais aussi forain. C’est aussi le nom que l’on donnait aux logements militaires. Aujourd’hui le mot est péjorativement connoté, on l’utilise pour une maison mal construite, pas très belle. Mais la baraque est bien plus qu’une maison mal construite, elle évoque à mes yeux le caractère convivial et chaleureux de ce type de construction. La baraque à frites se situe souvent sur les places des villes, autrement dit sur l’espace public. Cette typologie se retrouve aussi sur les bords des terrains de football, sur les places d’églises. Elle n’est pas pérenne dans l’espace, elle n’est pas indépendamment mobile non plus. Sa construction légère permet de la démonter et la déplacer facilement mais elle ne peut pas se mouvoir dans l’espace de manière autonome à contrario d’une autre catégorie que nous développerons par la suite. Généralement cette petite construction de fortune, en bois, taule d’acier ou encore « algeco » est agrémentée d’une petite terrasse, elle aussi de fortune, composée d’une table de jardin ou table en formica et de petites chaises… Son déploiement dans l’espace est aussi parfois opéré par le biais d’un panneau publicitaire étalant le menu aux yeux de tous. Cela reste une construction modeste, pour un plat modeste qui vous réchauffe le coeur et l’estomac. La typologie ici décrite peut être mise en lien avec la Frietbarak de Paul Ilegems. Au sein même de cette catégorie peut se retrouver différentes formes, allant du petit chalet construit en planche de bois récupérées et de vis rouillées au parallélépipède de taules soigneusement assemblées.

La friterie 

La friterie se démarque quant à elle par son côté pérenne, elle est construite en dur, elle peut se tenir seule ou alors être intégrée au tissu urbain déjà existant. De part la présence de fondations, nécessaires, à sa mise en place, elle n’est en aucun cas mobile et n’a pas vocation à le devenir. La friterie offre généralement un espace intérieur de dégustation. Ici, on prend le temps de manger, même si la moitié des clients prennent à emporter. Le rapport à l’espace public n’est pas le même. Le plaisir est différent, on s’abrite pour manger sa frite, on rentre au chaud, on commande, on attend patiemment assis, on regarde par la fenêtre. L’interaction avec l’extérieur et l’espace public environnant est indirect, contrairement à la baraque à frites qui elle est en contact immédiat avec l’environnement extérieur. Elle reprend beaucoup des caractéristiques de la Huisfrituur décrite précédemment. Les friteries 48sont pour certaines villes belges de véritables repères, comme la friterie du Perron à Liège faisant face au Palais des Princes-Evêques. Proposant une atmosphère différente de la baraque à frites, elle n’est cependant pas moins authentique que cette dernière. Parfois installée dans un bâtiment typique en briques rouges faisant face à la grand’ place, elle s’intègre à son environnement bâti. Son moyen de distinction devient alors sa vitrine, son nom, et ses éclairages qui lui permettent de briller dans la nuit. Depuis toujours on retrouve ce type de friterie dans les villes belges. A Bruges, les établissements du centre ville sont tous de cet ordre. Ils sont intégrés dans le contexte urbain, architectural et historique. Ils prennent place dans les rez-de-chaussée des bâtiments en briques datant de parfois plusieurs siècles. Il est en effet plus fréquent de voir ce type de friteries dans les milieux urbains que dans un contexte rural (où les réglementations sont un peu plus tendres avec les baraques à frites).

Le bungalow 

Le bungalow est la friterie en kit, celle qu’on achète sur catalogue, celle qui est « personnalisable » mais qui au final ne ressemble pas forcément à son propriétaire. Généralement de forme parallélépipédique, ce sont les devantures et accessoires qui les différencient entre elles. Des entrepreneurs se sont spécialisés dans la construction et commercialisation de ce type d’objet. Il s’agit bien souvent d’un algeco pourvu de tous les équipements nécessaires. Cette typologie se retrouve à mi-chemin entre la friterie en dur non mobile et la baraque à frites. Elle fait preuve de simplicité tout en apportant un confort d’utilisation aussi bien pour le client que pour l’exploitant qui n’est pas forcément présent dans une baraque à frites. C’est un moyen de répondre aux exigences de plus en plus drastiques des communes et des associations de défense du consommateur concernant les normes d’hygiène. De plus, son caractère mobile par le fait qu’il soit déplaçable relativement facilement est un gage de sécurité en prévision de devoir mettre les voiles et voguer vers d’autres horizons pour causes de refus des autorités de perdurer l’exploitation du commerce en lieu et place.

Le frite-truck

Cousin du food-truck, il n’est ni plus ni moins qu’un camion aménagé en friterie. Le camion est modifié afin de recevoir tous les ustensiles et équipements nécessaires à la découpe, cuisson et vente de frites. Le frite-truck a pour avantage d’être extrêmement mobile, c’est en effet la catégorie la plus mobile de friktots existant actuellement. La mobilité de cet objet roulant et autonome permet à l’exploitant de changer d’emplacement au gré de ses volontés, si tentées que les autorités locales lui accordent le droit de stationner et d’exercer où il le souhaite. Dans un monde qui bouge de plus en plus et de plus en plus vite, cela peut-être un avantage. Mais, certains clients ne retrouveront pas le sentiment d’appartenance, de proximité sociale qu’une baraque à frites ou une friterie peut offrir. Le frite-truck s’est beaucoup développé depuis la fin des années 2000 en Belgique et dans le nord de la France. Peut-être est-il plus en phase avec son temps, mais il n’offre pas, à mon sens, l’atmosphère et la chaleur nécessaire pour me satisfaire lorsque je commande une frite. La société Hedimag installée dans le nord de la France en fait une de ses marques de fabrique. Hedimag se décrit d’ailleurs comme étant fabricant de commerce mobile.

La voyageuse 

Cette typologie correspond à la Caravan frituur. Dans cette catégorie il me semble indispensable de séparer celle vendue sur catalogue et celle conçue et aménagée par le frituriste lui-même. C’est dans les années 1970-1980 que cette typologie de fritkot s’est fortement développée, bien qu’elle soit née plusieurs décennies auparavant avec l’avènement des foires et fêtes foraines. Elle trouve son essence même dans le monde forain. Elle est en quelque sorte la digne héritière de ce passé forain qui continue de persister. Son caractère mobile est donc indispensable. A l’origine, les frituristes (cette appellation n’existait d’ailleurs pas encore) récupéraient des anciennes caravanes ou remorques et les transformaient de leurs propres mains en friterie mobile, capable de les suivre n’importe où et de s’implanter sur n’importe quelle place publique. L’exploitant peut donc se déplacer en fonction des opportunités commerciales, sociales et festives. Si cette catégorie s’est développée dans les années 1980, c’est notamment parce que le camping et le caravaning comme type de vacances étaient en plein boom. Ainsi, de nombreuses caravanes et remorques se retrouvaient sur le marché et offraient une opportunité nouvelle, pas si chère et attractive aux heureux désirant se lancer dans le commerce de la frite. En fait, cela correspond aussi aux années fastes du fritkot. C’est en effet à cette époque qu’on comptait le plus d’établissements frituresques en Belgique. Les chiffres s’accordent sur une hypothèse de plus ou moins 8000 friteries dans les années 1980.Autres que celles transformées par le propriétaire directement, il existe, de plus en plus, des « friteries mobiles » achetées intégralement équipées et montées chez un fabricant spécialisé. Hedimag est un des cadors du milieu de la friterie mobile. Le catalogue va de la petite remorque aménagée à la caravane dite « rétro » ou encore « design ». Le client peut ensuite, une fois le véhicule choisi, le transformer selon son activité. Par transformation il faut entendre le choix d’équipements spécifiques à la profession, les couleurs, les lumières parfois… Pour faire simple, le véhicule vendu à la base n’a rien de spécifique au commerce de la frite ; il est vendu à tout type de commerçants de nourriture ambulants : glaciers, vendeurs de sandwichs, rôtisseurs ou frituristes peuvent donc se retrouver avec un outil de travail grosso-modo identique, qu’ils personnaliseront selon les modalités du fabricant.

Qui devient le symbole d’une unité nationale

Comme précédemment évoqué, le fritkot offre un fort sentiment d’appartenance à un pays, à une culture.De part sa présence étendue sur l’ensemble du territoire belge et son caractère historiquement populaire qui rassemble l’entièreté du peuple, un peu à l’image du football, le fritkot est un symbole de la Belgique. Il est le garant d’une culture qui lui est propre. Cet élément phare de la société procure un sentiment d’appartenance, un sentiment identitaire. Non pas identitaire dans le sens d’un repli sur soi et d’une entrave à l’ouverture sur les autres cultures, mais identitaire dans le sens où il représente une part des souvenirs de chaque belge, il renvoie la personne à sa propre identité.Qui es-tu ? D’où viens-tu ? Et bien je suis belge, avant d’être wallon, flamand ou germanophone, et le fritkot nous rassemble. Lucien Decraeye croit fortement en cette frite unioniste, à tel point que « la frite artisanale, c’est ni wallon, ni flamand, mais belge ».8Les baraques à frites sont un moyen de cohésion sociale, quand on y commande un cornet, on s’affranchit de toute appartenance à une classe sociale, de toute religion, de tout bord politique. Tout ça, ce n’est pas important, ce qui importe c’est l’objet de la venue, la frite et la joie.La mixité et le dialogue social au sein et autour d’une baraque à frites est le plus fort dans la ville Belge. Ce serait en effet un très bon défi que de vous demandez de trouver un autre lieu, espace où toutes les barrières et entraves sociales tombent. Encore une fois, le football et son stade peut en être un, mais son envergure et son caractère évènementiel ne procurent pas le même sentiment de proximité entre toutes les personnes le pratiquant. De plus, les luttes entre supporters, cependant rarement violentes, font preuve d’une certaine rivalité et en quelque sorte catégorisent les populations en fonction de leur club de coeur. Pas de ça au fritkot ! Aucune catégorisation sociale ne sera permise, par qui que ce soit, aussi bien par le frituriste que par les clients. Cette pièce architecturale devient le lieu où chaque belge 170peut se sentir chez lui, quelle que soit la ville dans laquelle il est, quelle que soit la langue qu’il parle. Et cela prend d’autant plus d’importance dans un pays où les deux grandes communautés (wallonne et flamande) qui regroupent 99% de la population peinent parfois à se comprendre.Le fritkot joue un rôle bien particulier dans le paysage social de la ville en Belgique. A mi-chemin entre lieu de consommation nourricière, de discussion et de confession, Jean-Claude Salemi le compare au refuge dans la montagne. Il exerce à son sens le même rôle primordial qui est celui de rassembler les gens, de les faire se rencontrer, par la force des choses, et de leur estomac.Le fritkot est un stéréotype de la ville belge et de la Belgique en général, dans le sens où il est l’une des premières choses à laquelle on pense lorsqu’on entend le mot Belgique. Il est un lieu de représentation du peuple belge. Mais ce stéréotype est bien fondé, du fait que cet édicule se retrouve partout, tout le temps et en très grand nombre. Il unit la Belgique entre les communautés mais pas que ! Il est présent partout : ville, village, campagne, routes. Il est le lien entre les différentes personnes vivant en Belgique et entre les différents territoires, servant d’élément d’accroche, de base culturelle commune. Son caractère ni wallon, ni flamand lui donne un aspect unificateur, qui va être repris lors de plusieurs manifestations et qui est devenu plus qu’un stéréotype : un symbole, une identité. Il n’est donc pas étonnant que des mouvements politiques se soient servi de ce dernier comme un élément fédérateur. Avec son élocution légendaire Jan Bucquoy, artiste cinéaste anarchiste belge (qui a tenté plusieurs tentatives de « coups d’état ») déclarait en 2002 sur le site internet frites.be 9 : « Je crois que la frite ne se politise pas, elle se déguste. Je suis contre l’utilisation de la frite dans l’art et dans la politique. Je suis vraiment pour le signifiant, je ne veux pas que ça devienne un symbole signifié ». Quoi qu’il en soit le fritkot et les frites sont déjà devenus plusieurs fois le symbole d’une contestation contre la politique gouvernementale menée en Belgique. Et la politique en Belgique, ce n’est pas histoire facile… rappelons-nous de ce fameux record 171du monde de la plus longue durée sans gouvernement effectif… 249 jours. C’était en 2010-2011, une période marquée par la montée d’un nationalisme ridicule basé sur fond de séparatisme communautaire, autrement dit d’une division.Ce contexte politique assez méprisable a donné naissance à la « Révolution des Frites » le 17 février 2011 suite à un appel lancé par la plateforme « Pas en notre nom – jeune / Niet onze naam – jong » regroupant plus d’une trentaine d’associations étudiantes. L’action fait fureur, des milliers d’étudiants répondent présents à l’appel dans plusieurs grandes villes du Nord et du Sud de la Belgique. Mais cela ne s’arrête pas là. Le 29 mars 2011, toujours las de la situation politique de leur pays, des milliers d’étudiants soutenus par des artistes et intellectuels occupent les places principales de leurs villes étudiantes. Cela se passe dans sept villes dont Bruxelles, Anvers et Liège. Les étudiants et les membres du mouvement rebaptisent alors ces places publiques en « Places des frites ». Des frituristes prennent aussi part au mouvement. Lors de ces manifestations politiques et festives, des frites étaient distribuées gratuitement. Cette opération a été possible grâce, entre autres, à l’implication du Frietmuseum de Bruges.La frite et son fritkot deviennent un symbole national pour les personnes s’engageant et militant pour une Belgique unie et par la même occasion un étendard politique. Si bien que le terme « Frietrevolutie » (révolution des frites) fait son apparition dans le palmarès des mots de l’année du dictionnaire Van Dale. Classé dans la catégorie Politique, le mot est défini comme étant « une protestation en Belgique contre les lenteurs à former un gouvernement ». La baraque à frites est un espace où la discussion prend une part importante, son occupation de l’espace public lui donne un statut à part entière dans la ville. Il devient un lieu de débat, tout comme un lieu de partage.

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Table des matières

SOMMAIRE
Avant-Propos
Introduction
Fritkot=Frituur=Baraque à frites:Caractéristiques et évolution d’un patrimoine architectural
Typologies_photographies
Six établissements_reportage
– La culture Fritkot, Appellation d’origine Belgo-controlée
American Way of food_photographies
– Un patrimoine vivant et qui s’exporte
Percevoir le fritkot comme une oeuvre d’art
Un potentiel futur
Conclusion
Annexes
Bibliographie
Iconographie

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