Symbiose mycorhizienne
Généralités
Dans la nature, les associations mutualistes entre les champignons et les algues ou entre les champignons et les cyanobactéries formant les lichens sont bien connues. Cependant, des champignons peuvent aussi être bénéfiques à la croissance des végétaux en formant des associations symbiotiques appelées mycorhizes avec les racines des plantes. Ce terme “mycorhize” créé en 1885 par le phytopathologiste allemand Frank désigne la symbiose entre la racine d’un végétal supérieur et le mycélium d’un champignon. L’union favorise la croissance des deux partenaires et permet aussi la fructification du champignon (Dommergues et Mangenot, 1970 ; Strullu, 1991). Les mycorhizes sont observées chez la majorité des plantes terrestres (Smith et Read, 1997) à l’exception d’un petit nombre de familles telles que les Crucifères, les Chénopodiacées, les Polygonacées, les Cypéracées, les Joncacées (Strullu, 1991). Environ 170 espèces de champignons sont impliquées dans les symbioses mycorhiziennes (Dalpé, 1997). Selon Plenchette (1993), le sol au voisinage des racines est le siège d’une intense activité microbienne et peut être divisé en 3 parties:
➤ La rhizosphère est la couche de sol de quelques mm d’épaisseur directement au contact de la racine. C’est la zone d’échanges entre la plante et le sol environnant. Elle abrite divers microorganismes intervenant dans les cycles biogéochimiques de la matière (cycles du carbone, du phosphore…) ou entrant en interaction avec les plantes (symbiotes, phytopathogènes) ;
➤ La mycorhizosphère est le volume de sol influencé par les mycorhizes (Rambelli, 1973) ;
➤ La mycosphère est le volume de sol envahi par le vaste réseau d’hyphes fongiques entraînant la formation d’agrégats (Linderman, 1988).
Caractéristiques des mycorhizes et classifications
Caractères physiologiques
Sur le plan physiologique, Strullu (1991) montre que l’extension des surfaces absorbantes, la formation d’un apoplaste mixte polysaccharidique riche en Ca2+ et la présence de polyphosphates sont les trois caractères essentiels de la symbiose mycorhizienne. Ces caractères sont communs à l’ensemble des types d’associations mycorhiziennes. Il en déduit que seuls les caractères anatomiques font apparaître de réelles différences ; ce qui explique que les classifications de ces types soient anatomiques plutôt que physiologiques.
Caractères morphologiques
Plusieurs types d’associations mycorhiziennes sont identifiés sur la base de caractères morphologiques et mettent en jeu différentes espèces de champignons et de plantes hôtes (Harley et Smith, 1983). Les plus communes de ces associations sont:
✦ Les mycorhizes arbusculaires (MA): le champignon inférieur appartenant à la classe des Zygomycètes (classification de Morton et Benny, 1990) produit des arbuscules, des hyphes et dans certains cas, des vésicules dans les cellules corticales de la racine ;
✦ Les ectomycorhizes: le partenaire fongique appartient soit à la classe des Basidiomycètes ou à celle des Ascomycètes. Il forme un manteau autour des racines et un réseau de Hartig entre les cellules racinaires ;
✦ Les mycorhizes orchidoïdes: le champignon produit des rouleaux d’hyphes autour des racines ou des tiges des orchidées ;
✦ Les mycorhizes éricoïdes: le champignon forme des rouleaux d’hyphes à l’extérieur des poils absorbants des plantes éricoïdes ;
✦ Les associations ectendomycorhiziennes, arbustives, et monotropoïdes: qui sont identiques aux associations ectomycorhiziennes, mais qui ont des caractéristiques anatomiques particulières .
Actuellement, la proposition de Peyronel et al. (1969) fait l’unanimité. De façon classique, les mycorhizes se séparent en trois principaux groupes:
● Les ectomycorhizes
● Les endomycorhizes
● Les ectendomycorhizes.
Les ectomycorhizes
Les ectomycorhizes ou mycorhizes externes désignent les symbioses entre les racines d’une plante et un champignon. Les hyphes de ces derniers s’infiltrent entre les cellules racinaires, dans l’espace intercellulaire. Les ectomycorhizes se présentent toujours sous forme de racines courtes, ramifiées en fourche chez les pins ou en forme de grappe chez les autres espèces. Du point de vue anatomique, le champignon entoure complètement la racine et constitue le manteau fongique. Des hyphes issus de ce manteau s’insèrent entre les cellules corticales de la racine pour former le réseau de Hartig. A partir du manteau, d’autres hyphes prolifèrent et colonisent le milieu environnant en formant “le réseau extra matriciel” d’environ 10 cm d’épaisseur au minimum et qui permet d’élargir la surface d’échanges (Strullu, 1991 ; Hampp et al., 1999).Après l’installation du champignon, la morphologie de la racine est très modifiée, mais les cellules racinaires gardent leur organisation classique. Une grande vacuole occupe le centre de la cellule, une fine pellicule de cytoplasme est appliquée le long de la paroi et donc à proximité immédiate des hyphes du réseau de Hartig. Le parenchyme cortical profond est souvent exempt d’infection et le cylindre central n’est jamais colonisé. Le développement de l’ectomycorhize impose donc aux partenaires des changements considérables dans leur morphologie et leur physiologie (Strullu, 1991). La symbiose ectomycorhizienne ne concerne qu’environ 3 % des espèces végétales (Mousain, 1991) dont certaines sont cependant d’importance économique, en particulier les essences sociales des régions tempérées (Fagacées, Bétulacées, Tiliacées, Pinacées) (Trappe, 1977 ; Le Tacon et al., 1989) et certaines essences tropicales (Le Tacon et al., 1989). Les ectomycorhizes existent principalement chez les dicotylédones et les gymnospermes en raison de la morphologie et de l’anatomie de leurs racines primaires qui sont de taille limitée et spécialisées dans l’absorption. Des formations secondaires se mettent ensuite en place (Strullu, 1991). Les champignons responsables des symbioses ectomycorhiziennes appartiennent aux classes des Basidiomycètes (russules, bolets, lactaires) et plus rarement des Ascomycètes (Truffes…) (Trappe, 1977). En saison sèche, ces champignons ectomycorhiziens sont présents dans le sol sous forme de propagules de dissémination (spores, mycélium…) et lorsque les conditions d’humidité deviennent favorables en saison des pluies, les propagules sont aptes à produire du mycélium capable de coloniser les racines des plantes (Bâ et al., 1991). L’interaction ectomycorhizienne s’établit alors entre le champignon et l’arbre au niveau des racines nourricières. La symbiose ectomycorhizienne améliore la nutrition minérale de la plante grâce à l’augmentation du volume de sol prospecté par les hyphes extra matriciels et la production de divers composés tels que les enzymes solubilisant les formes de phosphore peu solubles (Lapeyrie et al., 1987 ; 1991). Elle peut aussi réduire les effets de différents stress que peut subir la plante (Dehne, 1982). C’est une association à bénéfice réciproque où la plante hôte apporte en retour des éléments carbonés au champignon (Le Tacon et al., 1991).
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Table des matières
INTRODUCTION
SYNTHESE BIBLIOGRAPHIQUE
1. Symbiose mycorhizienne
1.1. Généralités
1.2. Caractéristiques des mycorhizes et classifications
1.2.1. Caractères physiologiques
1.2.2. Caractères morphologiques
1.2.2.1. Les ectomycorhizes
1.2.2.2. Les endomycorhizes
1.2.2.2.1. Les plantes hôtes
1.2.2.2.2. Classifications des champignons mycorhiziens arbusculaires
1.2.2.2.3. Ecologie des champignons mycorhiziens arbusculaires
1.2.2.2.4. Biologie des champignons MA
1.2.2.2.5. Rôles des endomycorhizes
1.2.2.2.5.1. Nutrition hydrominérale des plantes
1.2.2.2.5.2. Conservation de la structure du sol
1.2.2.2.5.3. Résistance aux pathogènes
1.2.2.2.5.4. Tolérance aux stress
1.2.2.2.5.5. Mycorhization et durabilité des écosystèmes
1.2.2.3. Les ectendomycorhizes
1.3. Interactions avec d’autres microorganismes : la double symbiose fixatrice d’azote et mycorhizienne chez les légumineuses
1.4. L’inoculation mycorhizienne au Sénégal
2. L’amendement organique
3. L’Arachide (Arachis hypogaea L.)
3.1. Systématique
3.2. Caractères généraux
3.2.1. Les tiges
3.2.2. Les feuilles
3.2.3. Le système racinaire
3.2.4. Les fleurs
3.2.5. Les fruits
3.3. Conditions écologiques
3.3.1. Les facteurs édaphiques
3.3.2. Les facteurs climatiques
3.3.2.1. L’eau
3.3.2.2. Les températures
3.3.2.3. L’éclairement
3.4. Nutrition minérale
3.4.1. Le phosphore
3.4.2. L’azote
3.4.3. Le potassium
3.4.4. Le calcium
3.4.5. Le soufre
3.5. Techniques culturales
3.5.1. La préparation du sol
3.5.2. Le semis
3.5.3. La fertilisation
3.5.4. L’entretien des cultures
3.5.5. La récolte
3.6. Production arachidière au Sénégal
3.7. Importance alimentaire et économique de l’arachide au Sénégal
4. Les mycorhizes chez l’arachide
MATERIEL ET METHODES
1. Effet de l’inoculation microbienne et de l’amendement organique sur la culture de la variété d’arachide 73-33 au champ
1.1. Matériel
1.1.1. Le matériel végétal
1.1.2. L’inoculum fongique
1.1.3. L’inoculum bactérien
1.1.4. L’amendement organique
1.2. Méthodologies
1.2.1. Le cadre d’étude
1.2.2. Le dispositif expérimental
1.2.3. Le semis
1.2.4. L’inoculation
1.2.5. L’apport de matière organique
1.2.6. Le désherbage
1.2.7. Echantillonnages
1.2.7.1. Echantillonnages de plants
1.2.7.2. Echantillonnages de racines
1.2.7.3. Echantillonnages de sols
1.2.8. Evaluation des paramètres de la mycorhization
1.2.8.1. Coloration des racines
1.2.8.2. Observations et mesures des paramètres de mycorhization
1.2.9. Mesure de l’activité microbienne des sols: dosage de la fluorescéine di acétate (FDA)
1.2.10. Paramètres mesurés
2. Impact de la culture arachidière sur les champignons MA dans les sols du Bassin arachidier
2.1. Méthode d’échantillonnage
2.2. Extraction et dénombrement des spores, identification des champignons MA
2.2.1. Extraction des spores
2.2.2. Dénombrement des spores et identification des champignons MA
2.3. Mesure du potentiel infectieux Mycorhizogène des sols de certaines localités (MPN : Most Probable Number)
2.4. Paramètres mesurés
3. Analyses statistiques
RESULTATS
1. Effet de l’inoculation microbienne et de l’amendement organique sur la culture de la variété d’arachide 73-33 au champ
1.1. Mycorhization des plants de la variété d’arachide 73-33
1.2. Effet sur les biomasses des plants
1.3. Effet sur la nodulation
1.4. Effet sur le rendement en gousses
1.5. Effet sur l’activité microbienne du sol
2. Impact de la culture arachidière sur les champignons MA dans les sols du Bassin arachidier
2.1. Effet sur les densités de spores des champignons MA
2.2. Effet sur la diversité des champignons MA
2.3. Effet de la culture arachidière sur le potentiel infectieux mycorhizogène des sols (MPN)
DISCUSSION
1. Effet de l’inoculation microbienne et de l’amendement organique sur la culture de la variété d’arachide 73-33
2. Impact de la culture arachidière sur les populations champignons mycorhiziens arbusculaires (MA) indigènes
CONCLUSION ET PERSPECTIVES
REFERENCES BIBLIOGRAPHIQUES
ANNEXES