LES MYCOBACTÉRIES
Classification
Les mycobactéries sont classées dans l’ordre des Actinomycétales, famille des Mycobacteriaceae qui comprend un seul genre Mycobacterium (Shinnick & Good, 1994). Les mycobactéries peuvent être divisées en trois grandes catégories :
– le complexe M. tuberculosis ou bacille tuberculeux ou bacille de Koch (BK) comprenant M. tuberculosis, M. bovis, M. africanum, M. canettii, M. microti qui est responsable de la tuberculose des mammifères (Brosch et al., 2002)
– le groupe des MOTT « Mycobacterium Others Than tuberculosis complex » ou mycobactéries atypiques qui sont des bactéries environnementales pouvant causer occasionnellement des infections opportunistes appelées mycobactérioses.
– les agents de la lèpre, M. leprae (chez l’homme) et M. leprae murium (chez le rat).
Caractéristiques des mycobactéries
Les mycobactéries sont des bactéries appartenant au genre Mycobacterium. Ce sont des bacilles aérobies assez longs, fins et immobiles. Ils ont une longueur de 1 à 10 µm et un diamètre 0,2 à 0,6 µm. Bien que la plupart des mycobactéries soient non sporulées, de récentes observations sur M. marinum et M. bovis semblent indiquer un « état de sporulation » après une étape d’adaptation suite à un changement brutal des conditions du milieu environnant (Ghosh et al., 2009), observations cependant remises en question par d’autres chercheurs qui n’ont pas observé d’endospores chez ces mycobactéries (Traag et al.).
Les mycobactéries sont caractérisées par :
– une paroi bactérienne particulièrement épaisse (figure 1). Cette paroi est hydrophobe et riche en acides gras µ-ramifiés et s-hydroxylés avec 60 à 90 atomes de carbones appelés acides mycoliques ou mycolates. Ces acides mycoliques sont à l’origine des formes mycéliennes observées chez les mycobacteries (Besra et al., 1994). Le squelette de la paroi est composé de peptidoglycane (appelé aussi muréine) relié de façon covalente à un hétéroside : l’arabinogalactane, lui même estérifié par des acides mycoliques. Ils forment alors des cires. (http://fr.wikipedia.org/wiki/Mycobacteriaceae).
– la séquence des génomes avec un taux en G+C % élevé, allant de 61 a 71%.
– l’acido-alcoolo-résistance d’où leur nom de BAAR ou « bacilles acido alcoolorésistants ».
Les bactéries du complexe M. tuberculosis (MTBC) sont groupées dans les bactéries à croissance lente, avec un temps de génération de 15 à 20 heures. Les espèces bactériennes retrouvées chez les MTBC sont toutes pathogènes ou potentiellement pathogènes pour l’homme et les animaux (Tortoli, 2003). Certaines propriétés des bactéries du complexe sont dues à la concentration élevée en lipides dans leurs parois bactériennes. Ces propriétés concernent non seulement les caractéristiques tinctoriales qui leur sont associées (BAAR), mais permettent aussi la survie des bactéries dans leur environnement (résistance naturelle aux antibiotiques, résistance à la destruction par les macrophages,…) (Morris et al., 2005).
Dans les années quatre-vingt dix, le séquençage du génome de M. tuberculosis a permis d’identifier plusieurs régions, baptisées régions de différence (de RD1 à RD16) (Liu et al., 2004) qui sont délétées chez d’autres mycobactéries, notamment M. bovis BCG. En ce qui concerne les régions RD1et RD3, pour le BCG, cette délétion est la conséquence des repiquages de la souche de M. bovis ayant conduit à l’atténuation de la virulence. Trois protéines d’intérêt sont codées dans la région RD1 : ESAT-6 (« early secretory antigenic target 6 »), CFP-10 (« culture filtrate protein 10 ») et TB7.7. ESAT-6 et CFP-10 sont secrétés par les mycobactéries qui se répliquent in vitro et in vivo, et la sécrétion de ces molécules est en corrélation, dans des modèles animaux, avec la virulence de différentes souches M. tuberculosis génétiquement modifiées (Andersen et al., 2007). Ces protéines (ESAT-6 et CFP-10) sont les cibles des lymphocytes T CD4 Th1 (Lalvani, 2007). Elles sont absentes des souches de M. bovis BCG et de la plupart des mycobacteries atypiques, à l’exception de M. kansasii, M. marinum et M. szulgai. En pratique, seule la première peut poser des problèmes de diagnostic différentiel compte tenu du tableau clinique particulier de M. marinum et la très faible incidence de M. szulgai (Andersen et al., 2000). Il est à noter que M. leprae possède une protéine homologue d’ESAT-6, source de possibles réactions croisées (Blanc et al., 2008).
ÉPIDÉMIOLOGIE DE LA TUBERCULOSE
La tuberculose reste une des causes les plus fréquentes de décès par maladie infectieuse dans le monde et la lutte contre la tuberculose est une priorité pour l’OMS. Un tiers de la population mondiale est infecté par le bacille de Koch (Gaudelus & De Pontual, 2005). On estime, à l’heure actuelle, à 9,4 millions le nombre de nouveaux cas par an et à presque 2 millions le nombre annuel de décès dans le monde (WHO, 2010). L’épidémie à VIH dans les pays en développement favorise l’accroissement du nombre de patients tuberculeux avec une mortalité importante liée notamment à la fréquence accrue des formes extrapulmonaires et la dissémination de souches résistantes à un ou plusieurs antituberculeux (Ammouri et al., 2009).
IMMUNITÉ ANTITUBERCULEUSE
Réponse immunitaire innée
Lorsqu’un bacille entre dans les poumons, celui-ci peut être capté par des macrophages ou des cellules dendritiques qui se trouvent au niveau des alvéoles pulmonaires. Les macrophages de sujets prémunis ont une activité phagocytaire accrue et peuvent après phagocytose du germe l’empêcher de se multiplier dans leur cytoplasme et même le détruire par une augmentation de leur pouvoir bactéricide. Il existe différents mécanismes bactéricides au sein des phagocytes infectés tels que la bactéricidie déclenchée par l’ATP extracellulaire (Kusner & Adams, 2000), la synthèse par les phagocytes de radicaux libres toxiques oxygénés comme le peroxyde d’hydrogène (H2O2), O2- , etc (Nathan & Shiloh, 2000) et ou nitrés comme le NO (Nathan & Shiloh, 2000; Peteroy-Kelly et al., 2001). La formation des radicaux toxiques dès le début de la primo-infection est rendue possible par l’intervention des lymphocytes NK qui, une fois stimulés par les cytokines rapidement sécrétées par le phagocyte infecté (notament l’IL-12 ), peuvent à leur tour libérer du TNF-α et de l’IFN-γ (Flynn & Chan, 2001; Kusner & Adams, 2000; Wigginton & Kirschner, 2001). Sous l’effet prolongé de l’IL-12, ces macrophages infectés peuvent devenir des sources autocrines d’IFNγ, du moins in vitro (Wang et al., 1999).
Parmi les évènements cellulaires non spécifiques, il y a aussi la synthèse et la libération par les phagocytes résidents de cytokines cellulaire telles que des cytokines proinflammatoires comme le TNF-α , IL-1, IL-6 (Cavaillon, 1995) et des cytokines activatrices notamment l’IL-12, l’IFN-γ, l’IL-18 et le TNF-α (Hartmann & Plum, 1999; Toossi, 1996). Cependant, certaines mycobactéries peuvent échapper à ces mécanismes de bactéricidie exercés par les phagocytes par différents processus, notamment par l’inhibition de la maturation des phagosomes en phagolysosomes (Deretic & Fratti, 1999; Noss et al., 2001). En outre, certains germes peuvent résister à la toxicité des radicaux libres grâce aux molécules intégrées dans leur paroi ou libérées dans l’environnement péri-bacillaire comme le LAM (lipoarabinomananne), les glycolipides phénoliques et les sulfolipides (Flynn & Chan, 2001; Piddington et al., 2001). Ces mécanismes d’échappement permettent à M. tuberculosis de rester à l’état quiescent qui se définit par une tuberculose infection latente chez l’individu. M. tuberculosis pourra se multiplier plus tard à l’intérieur des cellules infectées et conduire, lors d’un éventuel déficit immunitaire, vers une tuberculose-maladie.
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Table des matières
I – INTRODUCTION
II – GÉNÉRALITÉS
II.1 Historique
II.2 Les mycobactéries
II.2.1 Classification
II.2.2 Caractéristiques des mycobactéries
II.3 Épidémiologie de la tuberculose
II.4 Immunité antituberculeuse
II.4.1 Réponse immunitaire innée
II.4.2 Réponse immunitaire spécifique
II.5 Diagnostic de la tuberculose
II.5.1 Dépistage de la tuberculose latente
II.5.1.1 Test d’intradermo-réaction à la tuberculine
II.5.1.2 Tests de détection in vitro de la production de l’IFN-γ pour le diagnostic de l’infection tuberculeuse
II.5.2 Diagnostic de la tuberculose active
II.5.2.1 Examen radiologique
II.5.2.2 L’examen microscopique
II.5.2.3 Culture
II.5.2.4 Techniques moléculaires
II.6 Traitement de la tuberculose
II.6.1 Traitement de la tuberculose latente
II.6.2 Traitement de la tuberculose active
II.6.3 Résistance de M. tuberculosis aux anti-tuberculeux
II.7 Prévention
II.8 Les vaccins contre la tuberculose
II.8.1 Le BCG
II.8.2 Nouveaux candidats vaccins antituberculeux
II.8.2.1 Evaluation des candidats vaccins
II.8.2.2 Essais en cours de nouveaux vaccins antituberculeux
III – MATÉRIELS ET MÉTHODES
III.1 Matériels biologiques
III.1.1 Mise au point des tests biologiques
III.1.1.1 Recrutement des sujets sains volontaires adultes
III.1.1.2 Essais des tests biologiques
III.1.2 Étude de la réponse IFN-γ chez les enfants sains
III.1.2.1 Population de l’étude
III.1.2.2 Taille de l’échantillon
III.1.2.3 Inclusion des sujets
III.1.2.3.1 Information des sujets et consentement
III.1.2.3.2 Critères d’inclusion
III.1.2.3.3 Critères d’exclusion
III.1.2.4 Examens cliniques, recueil d’information et prélèvements
III.2 Produits et réactifs
III.2.1 Produits
III.2.2 Tampons
III.2.3 Substrat
III.3 Matériels
III.4 Tests biologiques
III.4.1 Le test ELISPOT
III.4.1.1 Définition
III.4.1.2 Principe
III.4.1.3 Mode opératoire
III.4.1.3.1 Isolement des PBMC
III.4.1.3.2 Réalisation du test ELISPOT
III.4.1.3.2.1 Préparation de la microplaque ELISPOT: « coating » et blocage
III.4.1.3.2.2 Préparation des antigènes
III.4.1.3.2.3 Préparation des cellules
III.4.1.3.2.4 Détection des cellules sécrétant de l’IFN-γ
III.4.1.3.2.5 Révélation
III.4.1.3.2.6 Enregistrement des résultats
III.5 Analyses des données
III.5.1 Base de données
III.5.2 Analyse des données
III.5.3 Statistique
IV – RÉSULTATS
IV.1 Standardisation de la technique ELISPOT
IV.1.1 Quantité de cellules
IV.1.2 Choix du lot de FCS
IV.1.3 Concentration en antigène
IV.2 Caractéristiques de la population de l’étude
IV.2.1 Sujets recrutés
IV.2.2 Sujets retenus pour l’étude
IV.3 Résultats de l’IDR chez les sujets retenus dans l’étude
IV.4 Corrélation entre la réponse ELISPOT/IFN-γ et le résultat du test d’IDR
IV.5 Variations de la réponse IFN-γ en fonction de l’âge chez les enfants vaccinés et les enfants non vaccinés par le BCG
IV.5.1 Analyse des résultats selon la déclaration de vaccination par le BCG
IV.5.2 Analyse de la réponse IFN-γ selon la présence ou l’absence de cicatrice vaccinale
V – DISCUSSION
VI – CONCLUSION ET PERSPECTIVES
VI.1 Conclusion
VI.2 Perspectives
VII – RÉFÉRENCES BIBLIOGRAPHIQUES
VIII – ANNEXES