Dans le cadre de la mise en œuvre de la loi sur la transition énergétique et la croissance verte, les acteurs publics et privés de la recherche sont invités à jouer un rôle prépondérant sur des thématiques telles que la gestion d’énergie, et l’efficacité énergétique. En effet, la production et la consommation d’énergie enregistrent aujourd’hui un lourd bilan environnemental. Les défis environnementaux liés à l’énergie sont de plus en plus nombreux. Et, la demande croissante en énergie exerce une pression sur l’environnement. Toutefois, une réduction de sa consommation présente un défi majeur pour la recherche fondamentale et technologique, ainsi qu’un enjeu économique et environnemental. Une solution assez prometteuse en termes de réduction de consommation dans le domaine industriel, est la récupération des sources de chaleurs « fatales », autrement dites « chaleurs perdues ». Ces dernières peuvent être rejetées sous forme d’eau de refroidissement, des condensats, fumées, air chaud ou vapeur… Ces chaleurs fatales sont issues d’un procédé de production ou de transformation, où l’énergie thermique n’est pas utilisée en totalité. Une partie de la chaleur est alors inévitablement rejetée. C’est en raison de ce caractère inéluctable qu’on parle de production de « chaleur fatale ». L’industrie présente un gisement de récupération de chaleur fatale de 109,5 TWh, soit 36 % de sa consommation de combustibles, dont 52,9 TWh sont à des températures supérieures à de 100℃ (Source ADEME, 2017). Cependant, la production d’énergie à partir de la chaleur fatale, n’est pas forcément synchrone avec la consommation, d’où le stockage d’énergie est nécessaire pour répondre à ces enjeux. En effet, il s’agit d’équilibrer dans le temps l’offre et la demande en énergie.
Stockage d’énergie
Trois principaux phénomènes physiques sont utilisés pour le stockage d’énergie thermique :
♦ Stockage par chaleur sensible : la quantité de chaleur échangée s’effectue sans transition de phase par variation de température du matériau de stockage.
♦ Stockage par chaleur latente : la quantité d’énergie échangée entraine un changement de phase du matériau.
♦ Stockage thermo-chimique : Le stockage est réalisé grâce à l’énergie échangée lors d’une réaction chimique réversible endo/exothermique.
Stockage par chaleur sensible
Le stockage par chaleur sensible consiste à stocker de l’énergie par variation de température. Il s’agit de réchauffer un matériau d’une température T1, jusqu’à une température T2, et ensuite l’isoler thermiquement.
Pour les matériaux solides les plus utilisés, on retrouve les métaux, tels que le cuivre, l’aluminium, la fonte, le fer ainsi que d’autres alliages [8], ou les non métaux, tels que le béton, la roche, le gravier, la brique et le granit [9]. A savoir que les métaux présentent des diffusivités thermiques élevées et sont donc adaptés aux applications impliquant une charge et une décharge rapides. Tandis que les matériaux à faible diffusivité thermique conviennent aux applications impliquant une charge et une décharge plus lentes. Pour les matériaux liquides, on retrouve les sels fondus, l’eau, les huiles thermiques. L’eau possède une capacité thermique élevée (4186 J.kg-1 .K-1 ) et représente un des candidats les plus performants pour des systèmes de stockage sensible à températures inférieures à 100°C [10]. Tandis que les sels fondus sont adaptés à des températures élevées [11].
Un exemple d’un système de stockage par chaleur sensible à base de béton . Ce système est utilisé en industrie pour la récupération d’énergie fatale. Le béton est employé à cause de son faible coût, de sa disponibilité, et de sa résistance mécanique élevée. Le fait que le béton présente une faible conductivité thermique n’est pas forcément un handicap pour un temps caractéristique de stockage long .
Le centre allemand de recherche DLR et son partenaire industriel Züblin AG ont présenté le 16 septembre 2008 un système pilote de stockage de chaleur sensible, en utilisant du béton pour centrales solaires thermiques à concentration (CSP).
Dr. Rainer Tamme montre que le système de béton testé est une solution très économique en comparaison aux systèmes de stockage thermique par sel fondu. Ceci a déjà été démontré avec succès en Espagne, sur la plateforme solaire d’Almeria, où le DLR exploite des installations solaires expérimentales [14]. Pour charger le stock, le fluide caloporteur chauffé passe à travers les tubes et réchauffe le béton. Lors de la décharge, le fluide caloporteur froid s’écoule dans la direction d’écoulement opposée à celle dans l’opération de charge et elle est chauffée par le béton.
Pour le stockage thermique par chaleur sensible utilisant des matériaux liquides, le ballon d’eau chaude sanitaire en est l’exemple le plus répandu. Pour les applications à hautes températures (200-300°C), un fluide organique ou des sels sont utilisés comme agent stockant. Le système peut être constitué d’un ou de deux réservoirs. Le stockage dans un seul réservoir est privilégié pour des questions de coût. Cependant, il impose une maitrise du gradient thermique dans le réservoir. En effet, cette application repose sur la stratification naturelle du matériau pour stocker un fluide chaud et froid dans un même réservoir. Ce réservoir est composé d’une couche à une température élevée dans la partie supérieure, et une couche à une température plus faible dans la partie inférieure. Entre les deux, on retrouve une zone de gradient thermique, qu’on appelle la thermocline.
Stockage par chaleur latente
Le stockage par chaleur latente, consiste à chauffer un matériau jusqu’à ce qu’il change son état physique, c’est-à-dire, de la phase solide à la phase liquide, ou soit de la phase liquide à la phase gaz, ou encore lors d’une transition solide-solide. Les matériaux utilisés pour ce type de stockage, sont appelés « Les Matériaux à Changement de Phase (MCP) ». Lorsque le matériau est chauffé, il accumule tout d’abord une quantité d’énergie sous forme de chaleur sensible jusqu’à ce qu’il atteigne sa température de changement de phase. A ce stade, l’énergie apportée au matériau est utilisée pour accomplir le changement de phase.
Une fois la transformation complète, la température du matériau augmente de nouveaujusqu’à atteindre la température de la source de chaleur. A l’inverse, au cours du refroidissement, le matériau retourne à la phase solide ou liquide en cédant sa chaleur latente. Le changement de phase s’opère en général dans une faible plage de température [1].
L’avantage d’utiliser les matériaux présentant une transition solide-solide est leur faible expansion volumique, ce qui limite les risques de fuites et de surpression. Cependant, la chaleur latente est généralement plus faible devant une transition solide-liquide. Les transformations de type liquide-gaz présentent la plus grande chaleur latente. Néanmoins l’expansion du matériau est importante, due à l’évaporation du liquide, rendant ce système de stockage technologiquement complexe.
Bien que la chaleur latente de fusion soit plus faible que la chaleur latente d’évaporation, la transition solide-liquide est la plus utilisée [20]. Les matériaux à changement de phase solide/liquide présentent un bon équilibre entre leurs capacités de stockage et leurs facilités de mise en œuvre.
Stockage thermochimique
Le stockage d’énergie thermique par thermochimie consiste en l’utilisation de l’énergie endothermique des réactions chimiques réversibles. La chaleur de réaction stockée est restituée los de la réaction inverse (exothermique). Il s’agit généralement de réactions entre différents sels et un liquide (hydrates). Il est possible d’associer les matériaux réactifs (sels) à une matrice (cuivre, aluminium…), afin d’améliorer les paramètres de transfert thermique. La réaction thermochimique est définie par l’Équation :
A(s) + Q ↔ B(s) + C(g)
avec A, B et C trois composés chimiques différents et Q la quantité d’énergie thermique. S et g désignent respectivement les phases solides et gazeuses. Lors de la charge, un composé A(s) chauffé se décompose pour former les produits B(s) et C(g) lors d’une réaction endothermique. Ce type de stockage est sous forme d’un potentiel chimique sans perte de chaleur. La réaction réversible exothermique, correspond à la phase de restitution. Les produits B et C sont mis en contact afin de régénérer le produit initial A et restituer une quantité de chaleur Q .
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Table des matières
Introduction générale
I. Etude bibliographique
I.1 Introduction
I.2 Stockage d’énergie
I.2.1 Stockage par chaleur sensible
I.2.2 Stockage par chaleur latente
I.2.3 Stockage thermochimique
I.2.4 Comparaison des trois principes de stockage
I.3 Matériaux à changement de phase
I.3.1 Types de matériaux à changement de phase solide ↔ liquide
I.3.2 Critères de sélection d’un MCP
I.3.3 Domaines d’applications des MCP
I.4 Méthodes d’intensification du transfert thermique dans les MCP
I.4.1 Conductivité thermique effective
I.4.2 Surface d’échange
I.4.3 Dimension caractéristique du module
I.4.4 Utilisation de plusieurs MCP – MCP en cascade
I.4.5 Synthèse des techniques d’intensifications de la conductivité thermique
I.5 Cristallisation des matériaux à changement de phase
I.5.1 Surfusion
I.5.2 Théorie de germination-croissance
I.5.3 Théories globales de cinétique de cristallisation
I.6 Conclusion partielle
II. Caractérisation thermique du matériau composite GNE-MCP
II.1 Introduction
II.2 Fabrication du matériau composite MCP-GNE
II.3 Caractérisation thermique du matériau composite
II.3.1 La conductivité thermique
II.3.2 Détermination des propriétés par calorimétrie différentielle à balayage
II.3.3 Cinétique de cristallisation par DSC
II.3.4 Dilatation thermique du matériau composite
II.4 Conclusion partielle
III. Modélisation du changement de phase dans un matériau composite GNE-MCP
III.1 Introduction
III.2 Modélisation du changement de phase d’une plaque de GNE-MCP
III.2.1 Description du dispositif expérimental
III.2.2 Instrumentation du matériau composite
III.2.3 Modélisation de changement de phase
III.2.4 Description de la modélisation numérique
III.2.5 Identification de la résistance thermique entre l’échantillon et les plaques en téflon
III.2.6 Estimation de la conductivité thermique plane et de la résistance thermique de contact entre l’échantillon et la pièce de cuivre
III.2.7 Validation des modèles numériques en utilisant trois formulations de conservation d’énergie pendant le changement de phase
III.3 Modélisation du changement de phase sur un cylindre MCP-GNE
III.3.1 Dispositif expérimental
III.3.2 Modélisation numérique
III.4 Conclusion partielle
IV. Etude numérique et expérimentale d’un échangeur stockeur composé de plaques en matériau composite
IV.1 Introduction
IV.2 Etude expérimentale
IV.2.1 Description du dispositif expérimental
IV.2.2 Instrumentation
IV.3 Simulation numérique
IV.3.1 Modèle numérique
IV.3.2 Propriétés thermiques
IV.3.3 Algorithme de calcul
IV.3.4 Vérification du caractère conservatif du modèle numérique
IV.4 Comparaison calcul-essais
IV.4.1 Variation de température expérimentale au sein du stock – données expérimentales
IV.4.2 Comparaison entre les puissances thermiques calculées et mesurées
IV.4.3 Comparaison des températures dans le stock
IV.4.4 Coefficient d’échange thermique global
IV.5 Conclusion partielle
V. Etude du vieillissement du matériau composite
V.1 Introduction
V.2 Vieillissement d’une plaque de matériau composite
V.2.1 Description du dispositif expérimental
V.2.2 Protocole d’essai
V.2.3 Résultats
V.2.4 Identification des propriétés thermiques
V.3 Etude du vieillissement d’un cylindre de matériau composite GNE-MCP
V.3.1 Description du dispositif expérimental
V.3.2 Instrumentation
V.3.3 Principe de fonctionnement
V.3.4 Exploitation des résultats
V.4 Conclusion partielle
Conclusion générale