Caractérisation géochimique de l’arc du Kohistan (Nord Pakistan)

La subduction océanique constitue un des processus tectoniques majeurs observables à la surface du globe terrestre (von Huene et Scholl, 1991 ; Lallemand, 1999). La longueur totale cumulée des frontières convergentes à l’échelle terrestre [en contexte de subduction océanique et de collision continentale] atteint environ 67000 km, soit une valeur globalement équivalente à la longueur cumulée des dorsales océaniques (Nicolas, communication personnelle dans Lallemand, 1999) . Les zones de subduction représentent des zones d’évolution clés dans l’évolution de la planète. Elles constituent des domaines extrêmement complexes où de nombreux échanges et processus se produisent simultanément. La subduction océanique permet, en particulier, le recyclage dans le manteau de portions de lithosphère océanique formée plusieurs dizaines de millions d’années auparavant, au niveau d’une ride médio-océanique. Le processus de subduction génère très souvent un abondant magmatisme en profondeur associé à des émissions volcaniques importantes en surface. Ces émissions magmatiques contribuent au fil du temps à la formation et au développement de zones d’arcs océaniques .

Depuis plusieurs dizaines d’années, l’origine et l’évolution des magmas en contexte de subduction représentent un des centres d’intérêt majeur pour les géochimistes et les pétrologues de la communauté scientifique internationale (cf., par exemple, Kelemen et al., 2003 et références citées). Parmi les thèmes de recherche relatifs à cette problématique, deux axes principaux peuvent être distingués et concernent :

(1) la caractérisation de la source du magmatisme d’arc en fonction du contexte de subduction considéré (ex. : subduction océanique ou continentale, géométrie et cinématique de la zone de subduction, évolution temporelle …) ;
(2) la détermination des processus responsables de la différenciation des liquides extraits du coin du manteau infra-arc. Ces liquides, en équilibre avec les péridotites du manteau, sont caractérisés par des valeurs de Mg#1 de l’ordre de 70 ; et leur différenciation se traduit par la formation de matériel crustal « évolué » (Mg# ≤ 50).

Ouverture et évolution de la Néotéthys, relations avec la fermeture de la Paléotéthys

A ∼440-420 Ma, la fragmentation de la marge Nord du supercontinent Gondwana est accompagnée par l’ouverture de l’océan Paléotéthys (Figure II.1a,b, d’après Stampfli et Borel, 2002). La fermeture de cet océan débute au Carbonifère supérieur (~320 290 Ma), au moment de la collision du Gondwana avec la Laurasie (formation de la Pangée) . La fermeture de la Paléotéthys se termine au cours du Trias moyen (~230 Ma) et seule une relique de cet océan, nommée Mésotéthys, subsiste jusqu’au Crétacé inférieur/moyen entre l’Eurasie au Nord et le bloc Lhasa/Karakoram . L’ouverture de l’océan Néotéthys s’opère entre la fin du Carbonifère supérieur (~290 Ma) et la fin du Permien inférieur (~260 Ma) ; démarrant à l’Est de l’Australie pour s’étendre jusqu’à l’Est de la zone Méditerranéenne .

A partir du Jurassique inférieur, la subduction de l’océan Néotéthys au niveau de sa marge Nord (Iranienne) est associée à la fragmentation de la Pangée et à l’ouverture de l’Océan Central Atlantique . Entre le Valanginien (~135 Ma) et le Santonien (~85 Ma), la subduction de la ride médio-océanique de la Néotéthys au niveau de la marge Sud de l’Iran est en partie associée au déclenchement de forces trans-tensionnelles importantes qui ont favorisé la fragmentation du Gondwana et l’ouverture d’un domaine océanique depuis la zone du Mozambique (SO Afrique), jusqu’à la Néotéthys . La collision du bloc Karakoram/Lhasa avec la plaque Asie se produit durant cette période, à environ 130-120 Ma (Besse et al., 1988) .

La rotation de l’Est Gondwana (comprenant la future plaque Indienne) par rapport à l’Afrique est probablement responsable de l’initiation de la subduction intra-océanique au sein de la Néotéthys, le long d’une faille transformante ou bien d’une zone de fracture (Stampfli et Borel, 2002, d’après le modèle de Stern et Bloomer, 1992 et Stern, 2002) . Cette subduction est associée à l’initiation d’un bassin d’arrière-arc de type Mariannes qui sépare alors les arcs intra-océaniques du Kohistan et du Ladakh, du bloc Karakoram/Lhasa, au Nord . Au niveau de la marge Karakoram, la présence d’un magmatisme suprasubductif calco-alcalin (batholite Karakoram) contemporain de l’évolution intra-océanique des arcs du Kohistan et du Ladakh (Debon et al., 1987 ; Crawford et Searle, 1992), suggère la présence de deux zones de subduction durant cette période . L’évolution du magmatisme du  batholite du Kohistan vers un pôle alcalin à environ 88 Ma est interprété comme un signe précurseur de la collision arc-continent (Debon et Khan, 1996) . Toutefois l’âge exact de la collision arc-continent (Kohistan/Ladakh – Karakoram) est mal contraint, estimé entre 102 ± 12 Ma et 75 Ma (Petterson et Windley, 1985 ; Weinberg et al., 2000).

Les données d’anomalies magnétiques de l’Océan Indien suggèrent la séparation de l’Inde avec l’Est Gondwana (Australie + Antarctique) à environ 130 Ma (Molnar et Tapponnier, 1975 ; Johnson et al., 1976 ; Powell, 1979). D’après Patriat et Achache (1984), la plaque Indienne convergea ensuite vers le Nord selon trois phases principales : (1) une phase de convergence à 15-20 cm/an entre 83 Ma et 52 Ma ; (2) une phase de convergence inférieure à 10 cm/an entre 52 Ma et 36 Ma ; et enfin (3) une phase de convergence inférieure à 5 cm/an depuis 36 Ma. La réduction de vitesse, aux environs de 52 Ma, serait attribuée selon Patriat et Achache (1984) à la collision Inde-Asie. Ceci est cohérent avec les âges établis pour cette collision à ~55 57 Ma, à partir de données paléomagnétiques, paléontologiques et géochronologiques (Klootwijk et al., 1985 ; Jaeger et al., 1989 ; Royer et al., 1992 ; de Sigoyer et al., 2000 ; Guillot et al., 2003 ; Leech et al., 2005). Enfin la collision Inde-Asie est responsable de la formation des trois plus grandes chaînes de montagnes au monde : Himalaya, Karakoram et Hindukush.

L’arc obducté du Kohistan : évolution et principales unités 

L’arc du Kohistan (« Kohistan island Arc Complex », KAC, Nord du Pakistan, Figure II.3) constitue la section exhumée d’un arc intra-océanique d’âge Crétacé, formé au sein de l’océan Néo-Téthys au cours de la subduction vers le Nord de la lithosphère Indienne sous la plaque Asie (Tahirkheli, 1979 ; Bard et al., 1980 ; Coward et al., 1982 ; Bard, 1983a,b ; Coward et al., 1986). La portion exhumée de l’arc du Kohistan couvre une superficie de plus 30 000 km2 , délimitée par deux zones de chevauchement majeures, le « Main Karakoram Thrust »  (MKT, ou Suture Nord) au Nord et le « Main Mantle Thrust » (MMT, ou Suture de l’Indus) au Sud. Ces zones de chevauchement constituent les limites respectives de l’arc du Kohistan avec la plaque Karakoram au Nord et, avec la Plaque Indienne, au Sud. A l’Est, l’arc du Kohistan est séparé de l’arc du Ladakh par la zone de convergence de chaînes montagneuses de Nanga Parbat, qui forme une fenêtre structurale d’élongation N/S de croûte indienne érigée à travers la couverture Kohistan-Ladakh .

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Table des matières

I. INTRODUCTION GENERALE
II. CONTEXTE GÉOLOGIQUE : EVOLUTION DE LA NÉOTÉTHYS –PRÉSENTATION DE L’ARC OBDUCTÉ DU KOHISTAN
II.1. OUVERTURE ET ÉVOLUTION DE LA NÉOTÉTHYS, RELATIONS AVEC LA FERMETURE DE LA PALÉOTÉTHYS
II.2. L’ARC OBDUCTÉ DU KOHISTAN : ÉVOLUTION ET PRINCIPALES UNITÉS
II.2.1. Principales étapes de l’évolution temporelle de l’arc du Kohistan
II.2.2. Les différentes unités pétrographiques et structurales
II.3. LA SÉQUENCE DE JIJAL-PATAN-KIRU-KAMILA DE L’ARC DU KOHISTAN
II.3.1. Le complexe ultrabasique et basique de Jijal
II.3.1.1. Section ultrabasique
II.3.1.2. Section basique (gabbroïque)
II.3.2. Le complexe métaplutonique de Patan-Kiru-Kamila
II.3.2.1. La séquence de Patan
II.3.2.2. La séquence de Kiru
II.3.2.3. La séquence de Kamila
II.3.3. Contraintes thermo-barométriques et géochronologiques pour la séquence de Jijal-Patan-KiruKamila
III. ORIGINE ET ÉVOLUTION DU COMPLEXE ULTRABASIQUE-BASIQUE DE JIJAL – CONTRAINTES GÉOCHIMIQUES
III.1. PROBLÉMATIQUE ET OBJECTIFS PRINCIPAUX DE L’ÉTUDE
III.2. PRINCIPAUX RÉSULTATS
III.3. MODÈLE D’ÉVOLUTION GÉODYNAMIQUE
III.4. ARTICLE RENVOYÉ À LA REVUE GEOLOGY APRÈS RÉVISION
III.5. ARTICLE SOUMIS POUR PUBLICATION À LA REVUE EARTH AND PLANETARY SCIENCE LETTERS
IV. ORIGINE ET ÉVOLUTION DE LA SECTION CRUSTALE DE JIJAL-PATAN-KIRU-KAMILA DE L’ARC DU KOHISTAN (PAKISTAN) – CARACTÉRISATION DES PROCESSUS – IMPLICATIONS GÉODYNAMIQUES
IV.1. INTRODUCTION
IV.2. RÉSULTATS
IV.2.1. Caractérisation de la section crustale du complexe de Jijal (0-3,0 km)
IV.2.1.1. Les éléments majeurs et en trace (n=43)
IV.2.1.1.A- Hornblendites-grenatites (groupe « Jijal-A ») (n=16)
IV.2.1.1.B- Gabbronorites à hornblende et granulites à grenat (groupe « Jijal-B ») (n=27)
IV.2.1.2. Les isotopes (n=17)
IV.2.2. Caractérisation de la séquence de Patan (3,0-9,7 km)
IV.2.2.1. Les éléments majeurs et en trace (n=23)
IV.2.2.1.A- Les « gabbros de Sarangar » (3,0-6,5 km) (n=10)
IV.2.2.1.B- Roches du groupe Patan-1 (6,5-6,6 km) (n=4)
IV.2.2.1.C- Roches du groupe Patan-2 (6,6-9,7 km) (n=9)
IV.2.2.2. Les isotopes (n=11)
IV.2.3. Caractérisation du Groupe Kiru (9,7-17,0 km)
IV.2.3.1. Les éléments majeurs et en trace (n=13)
IV.2.3.1.A- Roches du groupe Kiru-1 (9,7-~11,5 km) (n=3)
IV.2.3.1.B- Roches du groupe Kiru-2 (~11,5-15,0 km) (n=7)
IV.2.3.1.C- Roches du groupe Kiru-3 (15,0-17,0 km) (n=2)
IV.2.3.2. Les isotopes (n=5)
IV.2.4. Caractérisation du Groupe Kamila (17,0- >30,0 km)
IV.2.4.1. Les éléments majeurs et en trace (n=16)
IV.2.4.1.A- Roches du groupe Kamila-1 (17,0-18,3 km) (n=3)
IV.2.4.1.B- Roches du groupe Kamila-2 (18,3-19,3 km) (n=3)
IV.2.4.1.C- Roches du groupe Kamila-3 (19,3-23 km) (n=4)
IV.2.4.1.D- Roches du groupe Kamila-4 (23-25 km) (n=3)
IV.2.4.1.E- Roches du groupe Kamila-5 (25-30 km) (n=3)
IV.2.4.2. Les isotopes (n=8)
IV.2.5. Caractérisation des granites intrusifs dans les différentes séquences
IV.2.5.1. Les éléments majeurs et en trace (n=20)
IV.2.5.1.A- Granites de Type 1 (n=12)
IV.2.5.1.B- Granites de Type 2 (n=3)
IV.2.5.1.C- Autres granites (n=5)
IV.2.5.2. Les isotopes (n=7)
IV.3. CARACTÉRISATION ET ÉVOLUTION DES MAGMAS DE L’ARC DU KOHISTAN
IV.3.1. Caractérisation de la source du magmatisme : bilan et synthèse des résultats obtenus
IV.3.1.1. Modèle d’évolution des éléments en trace
IV.3.1.2. Corrélations entre les variations des éléments en trace et les variations isotopiques
IV.3.1.2.A- Caractérisation des domaines d’évolution géochimique A et B
IV.3.1.2.B- Cas particulier des groupes Jijal-A et Jijal-B
IV.3.1.2.C- Données géochimiques antérieures sur les unités de Kamila et Chilas
IV.3.2. Evolution du magmatisme au cours de la subduction
IV.3.2.1. Contraintes temporelles
IV.3.2.1.A- Contraintes temporelles sur l’évolution des roches du domaine « A »
IV.3.2.1.B- Contraintes temporelles sur l’évolution des roches du domaine « B »
IV.3.2.2. Nature des composantes impliquées dans la source des magmas
IV.3.2.2.A- Caractérisation des composantes « slab fluid » et « slab melt »
IV.3.2.2.B- Contraintes isotopiques
IV.3.2.3. Comportement de Nb et Ta selon les composantes impliquées dans la source
IV.3.3. Origine des granites intrusifs
IV.3.3.1. Origine des granites de type 2
IV.3.3.2. Origine des granites de type 1
V. CONCLUSION GENERALE

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