Situé entre 12°16’ et 12° 36’ nord et 12° 36’ et 12°48’ ouest (Fig.1), le bassin versant du Diarha est soumis à une forte variabilité spatiotemporelle des précipitations caractéristique du domaine tropical. Quatre périodes bien distinctes ont été mises en évidence qui confirme d’une part, la tendance à la hausse de la pluviosité entre 1950 et 1967 – d’autre part, sa baisse entre 1968 et 1993 – la période avant 1950 et depuis le milieu des années 90 se ressemblent – entourant la moyenne par une forte variabilité interannuelle. La reprise des pluies, amorcée depuis le milieu des années 90, s’est accentuée au cours de la décennie 2001-2010, qui marque un retour des conditions pluviométriques à leur niveau moyen (Thiaw I.,2015,2017). De 1968 à 1993, la pluviosité annuelle moyenne du bassin a baissé de l’ordre de 11%. Ce fléchissement de la pluviosité est imputable à la sécheresse des années 1970, amorcée depuis 1968 pour toutes stations pluviométriques étudiées.
En plus de modifier son régime hydrologique et ses problèmes d’érosion hydrique, la sécheresse des années 1968-1993 et la forte irrégularité des pluies, surtout sur la période 1994-2016, ont entraîné un affaiblissement des systèmes de cultures pluviales et posent maintenant un problème de l’autosuffisance. Or, selon Raunet M. (1984), « la mise en valeur des bas-fonds, petites vallées à fond plat que l’on rencontre fréquemment en région intertropicale, représente un enjeu considérable pour le développement de l’agriculture en Afrique et à Madagascar ». Ceux du bassin versant du Diarha, depuis les années 1970, deviennent le support privilégié des activités socio-économiques notamment l’exploitation des ressources forestières et l’introduction des cultures de saisons sèches. Cependant, l’exercice de telles activités n’est pas exempt de méfaits sur l’écosystème. La conjonction de facteurs dégradants – maintien des pratiques culturales séculaires souvent inadaptées – l’introduction de cultures de rente – concentration démographique évidente aggravée par l’abandon des sommets de versant (impropres à la culture de saison sèche) par les Bassaris, auxquels s’ajoute la forte irrégularité interannuelle des pluies, affecte la durabilité des agroécosystèmes de bas-fonds. En effet, cette concentration d’activités expose les bas-fonds à divers problèmes dont la baisse de fertilité des sols, les difficultés liées à la gestion de l’eau (Sinaré Y., Daurensan N., et Cudennec C., 1993 ; Thioubou A., 1995 ; Konaté L., 1997) et les problèmes liés à l’érosion hydrique des sols mis en évidence par Thiaw I., Dacosta H., Mendy A., et al. (2017).
L’État du Sénégal à travers l’acte 3 de la décentralisation et le « Plan Sénégal Emergent » (PSE), accorde une place de plus en plus importante à l’agriculture de bas-fonds pour le renforcement de la sécurité alimentaire par l’augmentation quantitative et qualitative de la production agricole. Celle-ci passe nécessairement par une amélioration de la productivité du travail à travers la mécanisation de l’agriculture, l’accroissement de la productivité par la maîtrise de l’eau, et l’amélioration des capacités techniques et organisationnelles des producteurs. À cela s’ajoute l’implication des acteurs locaux dans la recherche de solutions et la prise de décisions pour une gestion durable des ressources naturelles.
Le concept de bas-fond
Plusieurs auteurs (Killian J., et Teisser J., 1973 ; Albergel J., et Lamachère J.M., 1989) ont donné différentes définitions aux bas-fonds, parmi lesquelles, celle de Raunet M. (1985) est la plus adoptée en Afrique intertropicale. Cette définition indique que « les bas-fonds, en régions intertropicales, sont les fonds plats ou concaves des vallons, petites vallées et gouttières d’écoulement inondable, qui constituent les axes de drainage élémentaires emboîtés dans les épaisses altérations des socles cristallins (pénéplanisés). Ce sont les axes de convergence préférentielle des eaux de surface, des écoulements hypodermiques et des nappes phréatiques contenues dans l’épais manteau d’altération et alimentées par les pluies. Leurs sols sont engorgés ou submergés pendant une période plus ou moins longue de l’année par une nappe d’eau correspondant à des affleurements de nappe phréatique et à des apports par ruissellement ». Par ailleurs, en tenant compte de l’interaction entre les différentes composantes du milieu, la définition la plus large et la plus complète ne peut être envisagée que dans le cadre d’une équipe pluridisciplinaire. À ce propos, trois équipes ont travaillé sur le thème des basfonds avec des méthodes différentes.
La première équipe a été coordonnée par un réseau de recherche anglophone, Hekstra P., Andriesse W., De Vries C.A., et al. (1983). Elle s’est intéressée d’abord à l’ensemble des zones inondables sans restriction appelées « Wetlands ». Les « Wetlands » comprennent les deltas, les plaines d’inondation, les terres sous influence de la mer, les dépressions et les petites vallées. Certaines parties des « Wetlands » s’apparentent dans leurs définitions et leurs caractéristiques aux bas fonds de RAUNET M. ; d’autres aux dépressions et aux petites vallées de Hekstra P., et Andriesse W., (1983) qui expliquent leur évolution par ces termes : « Ces vallées ont été formées dans les parties amont des bassins versants sur une longueur d’environ 25 kilomètres. Leur largeur varie de 10 mètres (à l’amont) jusqu’à 250 mètres (vers l’aval). La pente longitudinale est de 2 à 5 %, la superficie du bassin versant est au moins 2 km² ». Le régime hydrologique de ces vallées dépend de la pluviométrie, du ruissellement sur le bassin versant et de l’écoulement des nappes. Cette définition sera reprise plus tard par Andriesse W. (1986), à l’échelle des petites vallées sur des bassins versants dont la superficie est comprise entre 100 et 2000 hectares.
La seconde équipe, coordonnée par le C.I.E.H, définit les bas-fonds comme suit : « des fonds plats ou concaves des vallons et des axes d’écoulement déprimés, ne possédant pas de cours d’eau important bien marqués, submergés pendant une période de l’année par une nappe d’eau qui s’écoule. Les sols sont d’origine colluviale. Le bassin versant a une superficie variant de 1 à 200 km2 . Les parcelles appartiennent au même village ou à quelques villages voisins. Les aménagements de régulation d’eau relèvent d’investissements financiers faibles ou moyens. Ils peuvent être réalisés avec une forte participation paysanne. Leur gestion est compatible avec l’organisation sociale existante » (Albergel J., Bernard A., Dacosta H., et al. 1991).
La troisième équipe, coordonnée par le Consortium Bas-fond (CBF, 1997-2001), considère que : « les bas-fonds correspondent à la partie amont du réseau hydrographique. Leur fonctionnement met en jeu le fond de vallée lui-même et ses petites plaines alluviales, ainsi que les franges hydromorphes, les versants et les plateaux, sur toute l’étendue qui contribuent à l’alimentation hydrique du bas-fond. Leurs caractéristiques varient suivant les paramètres considérés » (Jamin J-Y., et Windmeijer P.N., 1995). Ces définitions résultent d’un croisement de données physiques (climat, géologie, pédologie, hydrologie) et sociales (démographie, micro et macro-économie, foncier). Elles intègrent tous les paramètres qui entrent dans le fonctionnement d’un bas-fond et permettent de le caractériser comme une zone inondable éventuellement aménagée, suivant le contexte local.
Traitement de l’information
Le traitement des données a consisté à l’organisation et à l’exploitation de la base de données. Pour caractériser les ressources en eau des bas-fonds du Diarha et les diverses pressions qui pèsent sur elles, la création d’un SIG s’avère capitale. Les données sont ainsi exploitées avec ArcGis, Global Mapper, Surfer (SIG et cartographie). Des logiciels tels que eCognition, Hydraccess, HyfranPlus, Khronostat, et Idrissi ont été utilisés lors du traitement des données satellitales, climatiques et hydrologiques ; le modèle RS Minerve, pour la modélisation Pluiedébit; Sphinx au dépouillement des questionnaires ; Xlstat et R aux calculs des paramètres statistiques et dérivés, à faire des tableurs, des graphiques, etc.
Délimitation du bassin versant du Diarha et de ses sous bassins
La délimitation du bassin versant du Diarha et de ses sous bassins est basée sur le traitement du MNT ASTER (30 m de résolution). Ce traitement a été facilité par le modèle HEC-GeoHMS, développé par l’U.S Corps of Engineers, pour caractériser les bassins versants et simuler leur réaction face aux impulsions pluviométriques. Le modèle HEC-GeoHMS est un package exécutable sous ArcMap 10.2, qui intègre plusieurs outils de géotraitement d’un MNT. La première étape pour la délimitation d’un bassin versant par le modèle HEC-GeoHMS, consiste à la détermination des processus de terrain « Terrain Preprocessing ». Ainsi, après projection et correction géométrique et radiométrique du MNT ASTER, nous avions passé à la sauvegarde du projet dans un répertoire de travail dénommé « Diarha Watershed ». Une fois le projet sauvegardé, nous avons utilisé l’algorithme présenté à la figure 4 pour la délimitation des bassins versants. La méthodologie consiste d’abord à remplir les trous (cellules fictives) du MNT (Fill Sinks), qui sont souvent des erreurs occasionnées par la résolution des données ou l’arrondissement d’altitudes à la valeur entière la plus proche. Si les trous du MNT ne sont pas remplis, un réseau de drainage dérivé risque d’être discontinu.
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Table des matières
INTRODUCTION GÉNÉRALE
Objectifs de l’étude
Hypothèses de recherche
État de la question
Le concept de bas-fond
Classification des bas-fonds
MÉTHODOLOGIE DE RECHERCHE
Collecte des données
Travaux de terrain
Traitement de l’information
1. Délimitation du bassin versant du Diarha et de ses sous bassins
2. Courbes Hauteur-Volume et Hauteur-Surface
3. Modélisation Pluie-Débit
4. Elaboration des différentes parties de la thèse
CHAPITRE I. GÉOLOGIE, HYDROGÉOLOGIE, GÉOMORPHOLOGIE, MORPHOPÉDOLOGIE ET BIOGÉOGRAPHIE
Introduction
I.1. Contexte géologique du bassin versant du Diarha
I.2. Contexte hydrogéologique du bassin du Diarha
I.3. Caractéristiques Géomorphologiques
I.4. Typologie des sols du bassin versant du Diarha
I.5. Caractéristiques Biogéographiques
Conclusion
CHAPITRE II. CARACTERISTIQUES OROHYDROGRAPHIQUES DU BASSIN DU DIARHA
Introduction
II.1. Caractéristiques Morphométriques
II.2. Les caractéristiques du chevelu hydrographique
Conclusion
CHAPITRE III. CARACTERISATION DES BAS-FONDS DANS LES SOUS BASSINS DU DIARHA
III.1. Caractérisation des sous bassins versants du Diarha
III.2. Analyse Statistique des Données Physiographiques
Conclusion
CHAPITRE IV. ÉLÉMENTS DU CLIMAT ET VARIABILITÉ PLUVIOMÉTRIQUE
Introduction
IV.1. Circulation aérologique
IV.2. Paramètres Climatiques
IV.3. Etude de la Variabilité Pluviométrique
Conclusion
CHAPITRE V. ÉTUDE HYDROLOGIQUE DU DIARHA ET DES BAS-FONDS DE SES SOUS BASSINS
Introduction
V.1. Données hydrométriques
V.2. Ecoulements annuels et interannuels
V.3. Répartition mensuelle des écoulements
V.4. Débits Caractéristiques de Crue et d’Étiage
V.5.Analyse fréquentielle des écoulements
V.8. Modélisation du fonctionnement hydrologique des bas-fonds
V.9. Classification des bas-fonds en fonction des « faciès » des régimes hydroclimatiques
Conclusion
CHAPITRE VI. IMPACTS HYDROLOGIQUES DES CHANGEMENTS CLIMATIQUES
Article scientifique
Résumé en français
Abstract
1. Introduction
2. Materials and Methods
3. Results
4. Discussions and Conclusions
CHAPITRE VII. IMPACTS ECOLOGIQUES DU CLIMAT
Article scientifique
Résumé en français
Abstract
1. Introduction
2. Study Area
3. Materials and methods
4. Results and discussions
5. Conclusion
CHAPITRE VIII. ETUDE DE LA MISE EN VALEUR AGRICOLE DES BAS-FONDS
Introduction
VIII.1. Perception de l’espace par les populations
VIII.2. Localisation spatiale des activités humaines
VIII.3. Impact de la Pluviométrie sur la Production Agricole
VIII.4. Le système poste-récolte
VIII.5. L’eau dans les bas-fonds
VIII.7. Les perspectives et stratégies d’adaptation
Conclusion
CONCLUSION GÉNÉRALE
BIBLIOGRAPHIE