Caracterisation et diagnostic de l’hypoxie

Caractérisation et diagnostic de l’hypoxie

Comme discuté précédemment, les conséquences de l’hypoxie sont nombreuses au niveau moléculaire et cellulaire. Disposer d’une technique d’imagerie de l’hypoxie sensible pour la cancérologie permettrait de : 1) caractériser la nature de la tumeur, 2) aider dans le choix de la stratégie thérapeutique, 3) mieux cerner les zones à traiter (cartographie) et guider la radiothérapie 4) suivre l’efficacité des traitements, 5) évaluer la résistance. Des essais cliniques récents ont montré que l’identification de l’hypoxie dans les tumeurs permettait d’avoir de meilleures réponses après l’adaptation des traitements comparé à une thérapie standard qui donnait même de mauvais résultats sur les tumeurs hypoxiques.

Historiquement, l’hypoxie était détectée grâce à la mesure à la pression d’oxygène (pO2), via des électrodes implantées dans la tumeur. Cette méthode invasive n’était envisageable que sur les tumeurs facilement accessibles. Elle s’est également révélée peu reproductible en raison de l’emplacement de l’électrode choisi pour la mesure. Les techniques d’imagerie médicales non invasives, et notamment les imageries nucléaires, ont largement été exploitées pour le diagnostic de l’hypoxie, celles-ci devant répondre aux critères suivants :

– être spécifiques de l’hypoxie
– être sensibles à la pO2
– être reproductibles quelles que soient la taille et la nature de la tumeur
– être non invasive.

Les deux techniques d’imagerie nucléaire majeures sont la TEP (Tomographie par Emission de Positons) et la TEMP (Tomographie par Emission MonoPhotonique), qui reposent toutes les deux sur l’injection d’une molécule radioactive (traceur, radiotraceur ou radiopharmaceutique) possédant un radionucléide instable capable d’émettre suite à sa désintégration un rayonnement détectable à l’extérieur de la matière.

Tomographie par émission de positons (TEP)

La TEP met en jeu un isotope émetteur de positon (+). Son principe est basé sur la détection par une série de détecteurs, disposés en couronne, de deux photons gamma de 511 kev et diamétralement opposés résultant de l’annihilation du positon émis par le radionucléide avec un électron. Des images 2D et 3D peuvent être ensuite reconstituées informatiquement. La TEP est caractérisée par une très bonne sensibilité temporelle mais une faible résolution spatiale (4-7 mm pour les imageurs cliniques, ~1.5 mm pour les imageurs précliniques).

La TEP utilise en routine quasi-exclusivement le [18F]FDG (fluorodésoxyglucose), un analogue fluoré du glucose, qui contient un atome radioactif, le fluor-18 (Figure 7). Le [ 18F]FDG, « gold » standard en imagerie TEP, est un marqueur métabolique qui permet de visualiser la consommation du glucose particulièrement active dans les cellules cancéreuses. Cependant, le [ 18F]FDG est connu pour son manque de spécificité générant ainsi des faux positifs (en particulier dans le cas des cellules du système immunitaire impliquées dans la réaction inflammatoire).

Tomographie par émission monophotonique (TEMP)

La Tomographie par émission monophotonique utilise des radioisotopes émetteurs d’un seul photon. Ces derniers traversent le corps du patient et sont détectés par la caméra équipée d’un collimateur qui ne laisse passer que les rayons parallèles, pour délimiter les points d’émission des photons. La caméra tourne autour du patient afin d’obtenir, après reconstitution informatique, des images 3D de l’organe étudié. Sa résolution spatiale est légèrement plus faible que celle de la TEP néanmoins, elle a un moindre coût et utilise des isotopes émetteur γ tels que : le technetium-99m et l’iode-123 souvent moins onéreux à produire et avec une demi vie plus longue que celle des radioisotopes émetteurs de positons.

A côté des techniques nucléaires, l’imagerie moléculaire comprend également l’imagerie optique par fluorescence ou par bioluminescence. Sa résolution spatiale, de l’ordre de 100 µm, est bien meilleure que celle de la TEP ou la TEMP. Néanmoins, elle ne permet pas une imagerie en profondeur et reste limitée aux études précliniques ou aux diagnostics de surface.

Les radioisotopes pour l’imagerie médicale

Les radioisotopes utilisés en imagerie TEMP et TEP se caractérisent par leur demi-vie, leur mode de désintégration, l’énergie des particules ou photons émis ainsi que par leur méthode de production .

En TEP, les radioisotopes les plus connus sont le fluor-18, le carbone-11, l’oxygène-15, l’azote-13, le gallium-68 et le cuivre-64. Le fluor-18 reste le radioisotope le plus avantageux en raison 1) de sa période de 2 h suffisamment courte pour l’innocuité vis-à-vis du patient et suffisamment longue pour développer une radiochimie et des examens d’imagerie confortables, 2) de sa pureté d’émission β+ (≈97%) favorable pour la sensibilité, 3) de l’énergie cinétique faible du positon émis lui conférant le parcours le plus court dans la matière avant de rencontrer l’électron et donc induisant la meilleure résolution spatiale. Le carbone 11 trouve son utilité pour le marquage de molécules ne possédant pas d’atome de fluor. Le cuivre-64 avec sa période de 12 h est souvent exploité avec succès pour le radiomarquage de radiopharmaceutiques caractérisés par des pharmacocinétiques particulièrement lentes comme les anticorps. Enfin, le gallium-68 est attractif en clinique par sa production à partir d’un générateur de moindre coût de fonctionnement et de plus grande disponibilité qu’un cyclotron.

Le technétium-99m utilisé en TEMP est aussi fourni à partir d’un générateur. Comme pour le gallium-68 et le cuivre-64, sa radiochimie fait appel à la chimie de complexation ou de coordination plutôt dédiée au marquage de peptides et de macromolécules. Enfin, l’iode123 dont l’application la plus connue est celle du MIBG, est le plus souvent limité au marquage de dérivés iodoaromatiques. En effet, la liaison carbone-iode aliphatique est instable in vivo et des problèmes de déshalogénation sont souvent observés.

Les 2-nitroimidazoles et l’hypoxie : une longue histoire

Mécanisme des 2-nitroimidazoles et spécificité pour l’hypoxie

En 1981 Chapman a décrit le marquage du misonidazole au carbone-14, et au tritium-3. Ces traceurs, adaptés du radiosensibilisateur misonidazole, ont mis en lumière l’hétérocycle 2-nitroimidazole 6 comme motif clé pour la spécificité vis-à-vis des cellules hypoxiques. Le motif 2-nitroimidazole a été intégré à de nombreuses molécules pour créer des outils de diagnostic et de traitement de l’hypoxie La spécificité du 2-nitroimidazole provient de la sensibilité de cet hétérocycle à l’oxydoréduction. En effet, il a été proposé que dans les cellules en normoxie, le groupement fonctionnel nitro est facilement réduit par un transfert d’électrons, puis facilement ré-oxydé par l’oxygène présent . Le dérivé 2-nitroimidazole est alors sans cesse régénéré, pouvant ressortir (puis re-pénétrer) de la cellule. En revanche, en condition d’hypoxie, la réoxydation n’est pas possible. L’hétérocycle est soumis à plusieurs réductions successives par les enzymes nitroréductases conduisant aux dérivés nitroso, hydroxylamines ou amines capables de se lier de manière irréversible à divers composants et protéines cellulaires environnants. Ainsi, le dérivé initial 2-nitroimidazole n’est pas régénéré ; il reste piégé et s’accumule dans le milieu intracellulaire sous forme de métabolites de différentes natures . Des études couplées en histochimie et en spectroscopie de masse ont mis en évidence récemment le couplage de dérivés 2-aminoimidazoliques issus des composés parents 2-nitroimidazoliques avec le gluthation (GS) 7, un tripeptide composé d’acide glutamique, de cystéine et de glycine. Le GS 7 peut jouer le rôle de transporteur, le produit  de couplage pouvant ainsi ressortir de la cellule. Ce couplage est important car il relativise le mécanisme des 2-nitroimidazoles initialement admis impliquant l’accumulation des 2-nitroimidazoles modifiés dans les cellules hypoxiques.

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Table des matières

I. INTRODUCTION
1) L’HYPOXIE
1.1. L’hypoxie tumorale
1.2. Résistance aux traitements
2) CARACTERISATION ET DIAGNOSTIC DE L’HYPOXIE
2.1. Tomographie par émission de positons (TEP)
2.2. Tomographie par émission monophotonique (TEMP)
2.3. Les radioisotopes pour l’imagerie médicale
3) LES 2-NITROIMIDAZOLES ET L’HYPOXIE : UNE LONGUE HISTOIRE
3.1. Mécanisme des 2-nitroimidazoles et spécificité pour l’hypoxie
3.2. Les nitroimidazoles pour la RT
3.3. Les 2-nitroimidazoles dans les prodrogues
3.4. Les 2-nitroimidazoles pour l’histologie
3.5. Les 2-nitroimidazoles pour la fluorescence
3.6. Les 2-nitroimidazoles pour l’imagerie nucléaire
3.6.a) Radiotraceurs SPECT
3.6.b) Radiotraceurs TEP
4) LES MARQUEURS D’HYPOXIE NON NITROIMIDAZOLE
4.1. Cuivre ATSM pour la PET
4.2. Marquage de l’anhydrase carbonique CAIX
5) RADIOSYNTHESES DE DERIVES 2-NITROIMIDAZOLES RADIOFLUORES
5.1. Rappel de la chimie de fluor-18
5.1.a) Formation de liaison C18F en série aliphatique
5.1.a) Formation de liaison C18F en série aromatique
5.2. Radiosynthèse des principaux radiotraceurs de l’hypoxie
6) CONCLUSIONS
II. TRAVAUX ENVISAGES
1) JUSTIFICATION DES CHOIX STRUCTURAUX
1.1. Le motif 1,2,3-triazole
1.2. Les chainons alkylidènes, phenylènes et perfluorés
1.3. Le groupe sulfonate
1.4. Stratégie et sultones clés
III. RESULTATS
2) LE FLUSONIM
2.1. Synthèse du précurseur du [18F]FLUSONIM
2.1.a) Approche utilisant le bromochlorométhane
2.1.b) Approches alternatives
2.2. Fluoration et radiofluoration du [18F]FLUSONIM
2.2.a) Purification par cartouches
2.2.b) Automatisation de la radiosynthèse du [18F]FLUSONIM
2.3. Vers une synthèse GMP du [18F]FLUSONIM pour des applications cliniques
2.4. Evaluation du [18F]FLUSONIM
2.4.a) Pharmacocinétique chez l’animal sain
2.4.b) Evaluation dans le modèle de rhabdomyosarcome
2.4.c) Modèles de tumeurs cérébrales
2.4.a) Evaluation sur un modèle de mélanome murin
3) DEVELOPPEMENT D’ANALOGUES DU FLUSONIM
3.1. Présentation
3.2. Synthèse des précurseurs sultones
3.2.a) Sultone 132
3.2.b) Sultone 133 et 134
3.2.c) Sultone 137
3.2.d) Sultone 135
3.2.e) Sultone 136
3.2.f) Sultone 138
3.2.g) Sultone 139
3.3. Fluoration
3.4. Radiofluoration
3.5. Evaluation des radiotraceurs
3.5.a) Chez l’animal sain
3.5.b) Evaluation sur un modèle de mélanome murin
IV. CONCLUSIONS ET PERSPECTIVES
CONCLUSION GENERALE

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