Caractérisation du sous-système de traitement des données hétérogènes

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Reconception

La reconception est l’activité qui vise à remplacer complètement ou partiellement un produit/système en utilisant les spécifications qui caractérisent le besoin relatif à ce produit/système au moins, ou en ajoutant de nouvelles spécifications qui complètent celles qui existent. La reconception totale d’un produit ou d’un système entrainera donc l’utilisation des spécifications du produit identifiées, pour le reconcevoir en ne tenant compte que de celles-ci. La reconception partielle quant à elle dépend du cas de son application, dans le cas d’un système cela correspondrait à la reconception totale ou partielle d’une partie des composants le constituant. La reconception totale d’un composant consiste en la récupération des données de ses interfaces avec les autres composants, alors que la reconception partielle consiste en la reconception et l’implémentation d’une partie de ses spécifications en réutilisant l’autre partie. Dans tous les cas, on aura besoin d’informations concernant le produit à reconcevoir à des niveaux d’abstraction élevés (fonctions, spécifications, etc.). Pour ce faire, la reconception aura recours à l’examen du produit que réalise la rétro-conception.
Dans [VPERI] on indique que dans certains cas, il serait plus pertinent d’ignorer le composant d’origine dans son ensemble et de le reconcevoir complètement, ou le remplacer par un objet équivalent contemporain. Avant que la reconception ne soit réalisée, les spécifications et les contraintes d’interfaces doivent être extraites du système existant, en d’autres termes, utiliser la rétro-conception pour réaliser cette tâche.

Travaux sur la rétro-conception

Dans cette partie nous présenterons dans un premier temps la rétro-conception de façon générique avec toutes les activités qui permettent de la réaliser, puis nous introduirons les travaux de recherche qui ont abouti à des méthodologies ou des solutions dans le domaine de la mécanique.

La rétro-conception conventionnelle

La rétro-conception de manière classique concerne l’élaboration de représentations géométriques du produit à partir de données de capteurs. Les données issues des capteurs sont ensuite traitées et analysées dans le but de construire un modèle 3D géométrique de l’objet en question.
Généralement, le processus de rétro-conception peut être découpé en quatre parties différentes [Durupt & al. 10]:

Création du modèle 3D

Ces différentes étapes font partie du processus de traitement des données issues de la digitalisation des objets. Ces opérations font partie des techniques de reconstruction numérique des formes (Digital Shape Reconstruction), et ne permettent que de créer un modèle 3D pouvant être utilisé par des solutions CAO/FAO/CAE. Chaque technique correspond à un contexte d’utilisation donné, il reviendra donc à l’utilisateur de choisir les bonnes techniques mais aussi les bons outils. De plus, aucune méthodologie ne ressort de cet ensemble de techniques, c’est alors l’utilisateur qui définira la méthodologie qui lui permettra de partir d’un objet physique et d’arriver à un modèle 3D le plus représentatif possible de celui-ci.
Nous avons choisi de ne pas détailler davantage cette partie. Néanmoins, vous trouverez en annexe les différentes techniques et méthodes relatives à chaque étape de manière détaillée.

Méthodologies

Dans cette partie, nous explorerons différentes méthodologies et outils de rétro-conception issues de projets de recherche. Cela nous donnera une image des systèmes de l’état de l’art qui nous permettra d’explorer les manques dont la rétro-conception souffre.
REFAB
REFAB est l’un des projets pionniers dans l’utilisation des entités de fabrication dans la rétro-conception de pièces mécaniques. Le projet avait pour but de développer une solution interactive (mieux adaptée et plus efficace qu’un processus automatique) qui permettrait à un utilisateur de procéder à la rétro-conception d’une pièce à partir d’un nuage de points. Dans le système REFAB, l’utilisateur met en place à partir d’une liste proposée, l’entité géométrique adéquate relative à un ensemble de points du nuage, et guide ainsi le processus de rétro-conception. L’ajustement de l’entité de fabrication est alors simplifié et sera fait automatiquement [Thompson & al.99].
REFAB est un système de rétro-conception qui utilise les entités de fabrication comme primitives géométriques [Thompson & al.99]. Dans ce projet, les auteurs ont noté deux principaux avantages dans l’utilisation des entités de fabrication dans la reconstruction des modèles CAO à travers la rétro-conception :
Les modèles résultants peuvent être directement exportés vers des systèmes CAO de modélisation par entités, sans perdre les sémantiques et les informations topologiques inhérentes aux représentations par entités.
Les méthodes sont capables de produire des modèles très précis, malgré les erreurs substantielles et les bruits présents dans la donnée 3D digitalisée.
Le projet REFAB propose une approche alternative pour la rétro-conception qui permet de créer des modèles CAO de pièces, avec un nombre important de ces entités de fabrication de manière efficiente. Cela est possible grâce à l’analyse des données scannées, basée sur les connaissances du processus de fabrication et des techniques de modélisation [Thompson & al.99].
L’apport principal de cette approche est donc la prise en compte des entités de fabrication associées à des opérations d’usinage comme primitives géométriques, dans le but de les ajuster aux données scannées plutôt que d’utiliser les techniques de triangulation et de maillage ou de modélisation surfacique en général. Le système utilise des entités de fabrication 2,5 D telles que des trous simples.
Cette approche repose sur la résolution de trois problèmes afin de fournir une modélisation précise d’une entité de fabrication :
La détermination du type d’entité : Cette étape est réalisée par l’utilisateur qui permet de sélectionner, à partir d’un ensemble d’entités proposées par REFAB, l’entité adéquate afin de l’utiliser dans l’étape d’ajustement. De ce fait, il n’y a pas besoin de reconnaitre automatiquement les entités de fabrication (figure 2.6 – C).
Les deux problèmes suivant sont résolus à travers des opérations automatiques qui utilisent un affinage itératif :
o La segmentation des points 3D pertinents : Les modèles d’entités sélectionnés par l’utilisateur sont utilisés afin de segmenter le nuage de points en un groupe de sous-ensembles de points qui, vraisemblablement, correspondent aux entités sélectionnées (figure 2.6 – D).
o Ajustement des modèles : Cette opération permet d’ajuster les modèles des entités au nuage de points en utilisant 2 types de contraintes ; une contrainte d’orientation des entités puis projection sur le plan pour simplifier l’ajustement, et une contrainte basée sur l’expression des géométries dans ces entités lors de la conception (figure 2.6 – E).
L’approche globale est une approche descendante (top-down) qui permet de générer des modèles précis puisque le système intègre les utilisateurs au processus de sélection des informations et connaissances représentées à des niveaux d’abstraction élevés, pour les utiliser dans la segmentation de données représentées à des niveaux d’abstraction bas (nuages de points), tout cela pour construire le modèle, plutôt que d’utiliser une approche ascendante (bottom-up) en commençant par le traitement de données brutes.
Le projet REFAB reste un projet qui caractérise la rétro-conception géométrique et topologique des produits, et ne s’affranchit en aucun cas de l’intégration d’informations outres que celles de la forme (géométrie) de ceux-ci.
Bien que le projet ait été développé dans le but de fournir un système d’aide à la rétro-conception en ayant automatisé une partie du processus, et que l’utilisation des entités de fabrication représente en soi, de l’utilisation des connaissances métier (métier de fabrication), il reste en désavantage quant à l’utilisation de types d’informations complémentaires à la géométrie, et ne permet pas de fournir une représentation à un haut niveau d’abstraction.
En effet, la solution proposée dans le projet permet de construire des représentations à des niveaux d’abstraction relativement bas, puisqu’on traite plus de la géométrie du produit, que de l’aspect fonctionnel. Même si cette approche permet d’intégrer des connaissances, elle reste cependant limitée à des connaissances spécifiques à un contexte d’application : la fabrication. Cette vision limite concrètement la rétro-conception à de la refabrication, ou bien rend la reconception ou le reengineering beaucoup plus difficiles à réaliser, puisqu’une nouvelle représentation à un plus haut niveau d’abstraction serait nécessaire dans les deux cas.
De plus, la limite du processus concernant les types de données traitées consolident ce manque avéré, ce qui donne comme résultat, une structuration de l’information assez basique (construction d’une représentation géométrique) bien qu’elle puisse être complexe dans sa réalisation.
VPERI
Le projet VPERI (Virtual Parts Engineering Research Initiative) est un projet initié par l’armée américaine qui avait pour but de réaliser des frameworks, outils, et technologies qui permettraient de rendre des systèmes durables et maintenables dans le temps [VPERI]. Le contexte d’émergence de ce projet a été l’indisponibilité des informations concernant la conception et la fabrication de certaines pièces dans des véhicules ou autres systèmes militaires, qui ont été conçus il y a longtemps et ayant de longues durées de vie. Dans le but de prolonger la durée de vie de ces systèmes, la refabrication des composants de remplacement pour ces systèmes est demandée.
Afin de pouvoir refabriquer ces composants de remplacement, plusieurs considérations devaient être faites [VPERI] :
Le système entier dans lequel se trouve le composant ne peut pas être entièrement remplacé, alors le composant devra s’interfacer avec les composants déjà existants.
La documentation concernant ces composants peut ne pas exister, sinon incomplète ou incompatible avec les systèmes CAO/FAO.
Les avancées en matière de technologies de matériaux, de méthodes de fabrication et d’outils d’analyse depuis la conception des composants.
La défaillance du composant peut avoir été causée par une erreur dans la conception initiale du composant, ou le système est sollicité de manière non anticipée par le bureau d’études.

Typologie de la connaissance

Dans la définition de [Labrousse, 04], on a introduit les notions de savoirs formels, savoirs formalisables, et savoirs tacites. Toutes ces notions sont relatives à des types de connaissances qui existent. Plusieurs travaux ont tenté d’expliciter les différents types de connaissance et les différences entre eux.
Dans [Nonaka & al. 98], on identifie deux dimensions dans la connaissance : La dimension tacite, et la dimension explicite. Dans la dimension tacite, la connaissance est ancrée profondément dans les actions et les expériences d’un individu, aussi bien que dans les valeurs, idéaux, ou émotions. Ce type de connaissance peut être décomposé en deux parties, la première partie est relative à la connaissance tacite technique qui englobe des compétences personnelles informelles, connues sous le nom de « savoir-faire », et la seconde partie est relative à la connaissance tacite cognitive qui englobe les croyances, idéaux, valeurs, etc.
Dans la dimension explicite, la connaissance est celle qui peut être exprimée en termes de mots et de nombres, et partagée sous forme de données, spécifications, manuels, etc.
Dans [Chandrasegaran & al. 12] on identifie les types de connaissance selon trois axes (figure 2.17). Chacun des trois axes est relatif à une classification qui a sa propre base.
Formel / Tacite : Cet axe se base sur les travaux cités précédemment [Nonaka & al. 98]. Les connaissances formelles sont intégrées aux documents du produit, description de la structure et des fonctions du produit, etc. Et les connaissances tacites sont les connaissances liées à l’expérience, règles implicites, intuition, et autres, qui sont ancrées dans la mémoire de l’acteur. Produit / Processus : Les connaissances produit prennent en compte les informations et connaissances relatives à l’évolution du produit tout au long de son cycle de vie. Les connaissances processus peuvent elles, être classées en : connaissances du processus de conception, connaissances projet, et connaissances du processus de fabrication.
Compilé / Dynamique : Les connaissances compilées sont essentiellement obtenues de l’expérience qui peut être compilée en règles, plans, scripts, etc. Les solutions sont explicites. La connaissance dynamique, utilise les connaissances qui peuvent être utilisées pour générer des structures de connaissances additionnelles, qui ne sont pas prises en compte par les connaissances compilées.
Dans [Zack, 99], en plus d’évoquer la connaissance comme étant tacite ou explicite, propose d’autres types de connaissances : la connaissance déclarative, qui représente la description de quelque chose, basée sur la compréhension explicite et partagée de concepts, catégories, et descripteurs pour une communication et un partage des connaissances efficaces dans une organisation. La connaissance procédurale concerne les procédures, ou comment effectuer un processus ou une opération. La connaissance causale, quant à elle, concerne la relation de causalité entre une cause et une conséquence.
Le tableau suivant permet de synthétiser les différents types de connaissance issus de l’état de l’art (tableau 2.2).
Dans notre contexte, nous tentons de développer un système d’aide à la rétro-conception qui prend en compte des informations formelles relatives à la description du produit. Ces informations peuvent être issues d’un scan 3D du produit analysé, comme elles peuvent être issues de dossiers techniques contenants des informations sous formes picturales ou textuelles, relatives à la fonction ou au comportement du produit. Dans ce cas, nous considérons dans notre travail les connaissances formelles.
Les connaissances formelles peuvent être représentées de plusieurs formes différentes, et il est pertinent d’explorer les différentes formes de représentation possibles. Cela nous permettra d’explorer d’un côté la représentation des connaissances d’un côté, et les formes que peuvent prendre les données hétérogènes en entrée du processus de rétro-conception.

La représentation des connaissances

On retrouve dans la littérature scientifique plusieurs significations relatives à la représentation des connaissances. L’une d’entre elles est relative à la structuration des informations et connaissances dans le but de construire une description formelle d’un objet ou produit. Dans [Szykman & al. 01], on parle de représentation des connaissances produit, où celle-ci est utilisée dans le but d’identifier et de structurer les connaissances et informations relatives au produit, en prenant en compte les aspects principaux qui permettent de le décrire (fonctions, comportements, structures). Tout cela afin de construire une représentation du produit qui permet de supporter la conception très tôt dans la phase de développement. Cette vision de la représentation de la connaissance est donc relative à la structuration des connaissances, que nous aborderons plus tard avec la modélisation des connaissances.
Dans [Davis & al. 93], la représentation des connaissances est décrite comme ayant 5 rôles :
1) La substitution d’une entité externe (monde réel) qui est réalisée par un processus interne.
2) C’est un ensemble d’engagements ontologiques.
3) C’est une théorie fragmentaire (vision partielle) d’un raisonnement intelligent.
4) Un moyen de raisonnement efficace (en intelligence artificielle).
5) Un moyen d’expression humaine (communication).
Une autre définition [Horváth & al.02] est relative à l’externalisation de la connaissance et sa communication. Elle identifie les différentes formes de représentation suivant lesquelles, les connaissances (ou informations) peuvent être communiquées. La représentation applicable pour chaque connaissance est indiquée par la nature et les caractéristiques de celle-ci. Quel que soit la représentation considérée, elle doit faciliter le traitement de la connaissance décrite.
Toujours dans [Horváth & al.02] on définit la représentation des connaissances comme étant un filtre qui crée un modèle de connaissance simplifié, extrait ou obtenu des êtres humains. Cette simplification est accompagnée d’une décontextualisation, qui crée une rupture entre les connaissances représentées, et les connaissances qui représentent le contexte dans lequel elles s’intègrent, contraignant ainsi l’interprétation de celle-ci, qui ne peut se faire qu’à l’aide d’une vérification intellectuelle.

Formes de représentation des connaissances

La représentation de connaissances peut être classifiée selon différentes formes. Dans [Horváth
& al.02], on propose 5 catégories de représentation des connaissances :
1. La représentation picturale, qui est relative aux connaissances qui sont communiquées à travers des photos, vidéos, tableaux, dessins, etc.
2. La représentation symbolique, qui permet de représenter des connaissances relatives à l’aspect logique, tels que des diagrammes, des tables de décision, des graphiques, etc.
3. La représentation linguistique, qui est relative aux différentes connaissances communiquées à travers le langage, tel que dans les communications verbales enregistrées, des textes interactifs, des textes, etc.
4. La représentation virtuelle, qui permet de représenter les connaissances à travers des modèles virtuels tels que la CAO, les modèles de réalité virtuelle, les animations, etc.
5. La représentation algorithmique, qui est relative aux différentes expressions mathématiques, aux algorithmes informatiques, aux procédures de calcul, etc.
Dans la figure 2.18, nous pouvons voir le lien entre certains livrables qu’on peut retrouver dans l’écosystème de l’entreprise, en relation avec les différentes formes de représentation telles que présentées précédemment.
Dans [Chandrasegaran & al. 12], se basant sur les catégories de représentation précédentes, on met en relation les différentes formes de représentation des connaissances avec les différentes phases du cycle de développement du produit. On voit dans la figure 2.19 la correspondance des différents outils mis en place aux différentes phases du cycle de développement d’un produit, avec les formes de représentation correspondantes.
Cette figure nous permet de voir l’évolution de la représentation du produit dans son cycle de vie. Nous pouvons observer la concordance entre les représentations des informations et connaissances triées selon un ordre chronologique, et la diminution de l’abstraction relative au produit jusqu’à son élaboration physique. Cela permet de mettre en évidence le niveau de détail relatif à chaque forme de représentation et la facilité avec laquelle elle communique l’information: linguistique, puis picturale, puis symbolique et/ou algorithmique, puis virtuelle (de la plus abstraite à la plus concrète). Cela aura un impact sur le processus de traitement des informations quant à la sélection des données pertinentes.

Difficulté d’utilisation

Une des difficultés rencontrées lors de la mise en place d’une classification des livrables sur la base de ces formes de connaissances est relative aux limites entre ces différentes formes. En effet, il est possible de classer certains livrables selon différentes formes de représentation adéquates. Par exemple, plusieurs livrables considérés comme étant de forme symbolique peuvent être aussi considérés comme étant de forme picturale (les diagrammes par exemple). Cela suppose que la classification actuelle tend à être inefficace, puisqu’elle ne permet pas de statuer de manière sûre à quelle forme appartient tel ou tel livrable.
De notre point-de-vue, cela est dû à la considération des formes de représentation des connaissances à un niveau d’abstraction élevé, et un manque de formalisation de la classification. En effet, chaque livrable représente plutôt une collection d’éléments de connaissances, ce qui rend la tâche de classification délicate, puisqu’on peut trouver différents types d’éléments d’informations qui peuvent être représentés différemment. De ce fait, l’utilisation de cette classification serait plus efficace si elle était utilisée au niveau des éléments d’informations et de connaissances.
Finalement, cette classification serait plutôt utilisée pour identifier les différentes informations élémentaires (structure d’une pièce – piston par exemple) en correspondance avec la forme de représentation la plus adéquate (forme virtuelle). Donc, une adaptation du concept doit être faite dans le but de mettre en évidence cette relation. Nous verrons plus tard dans la proposition comment ce concept peut être utilisé dans l’intégration des connaissances et comment il sera adapté.

Modélisation des connaissances

L’avènement de l’ingénierie des connaissances a vu évoluer en même temps des techniques et méthodes issues du génie informatique dans le but de formaliser des approches basées sur des connaissances, et ainsi développer des outils à base de connaissances [Sowa, 99], [Baral, 03], [Gelfond & al. 02]. Ce développement consiste en l’élaboration de systèmes qui formalisent les connaissances selon une certaine structure afin de la réutiliser. L’élaboration de la structure des connaissances revient à construire des modèles de connaissances qui seront intégrés dans le modèle de données global de ces systèmes.
La modélisation est une activité qui consiste en la capture ou l’extraction d’informations dans le but de les réutiliser à travers l’élaboration d’un modèle relatif à un contexte d’utilisation. Candlot [Candlot & al. 06] définit la notion de modèle comme étant « un consensus sur une représentation partielle de la réalité ». Le modèle est alors une représentation simplifiée de la réalité, ce qui implique une abstraction d’un ensemble d’informations qui permettent d’établir cette représentation. En d’autres termes, la modélisation permet d’élaborer des descriptions abstraites des contextes qu’elle doit représenter.
La modélisation des connaissances consiste alors en l’élaboration de représentations (dans le sens de structuration) schématiques de connaissances. Modéliser des connaissances revient à décrire les différents éléments de connaissances, « de manière à pouvoir les utiliser pour le raisonnement ou le calcul [Ammar-Khodja, 07]. Cette description peut être faite à l’aide de représentations graphiques visant à permettre une manipulation de ces objets – (éléments de connaissances) –, essentiellement par des systèmes informatiques. Cependant cette représentation graphique doit respecter des formalismes et des règles de modélisation ». En conséquence, dans le but d’externaliser la connaissance à travers sa modélisation, il faudra s’attacher à une représentation formelle qui facilite la compréhension du modèle.
L’activité de modélisation des connaissances vise donc à établir des représentations selon le contexte d’utilisation. Dans l’écosystème de l’entreprise, il y a différents contextes où les modèles de connaissances peuvent être utilisés. Ces contextes dépendent des types de connaissances spécifiques dans cette phase de modélisation, et plus précisément les types de connaissances relatifs aux artéfacts d’entreprise : on peut trouver des modèles de connaissances relatifs aux produits, d’autres relatifs aux processus, des modèles combinant les deux (produit-processus), etc. Dans [Ammar-Khodja, 07] on identifie deux grandes familles de travaux qui ont porté sur les modèles de connaissances :
1. La première famille propose un (des) cadre(s) méthodologique(s) structuré(s) et structurant(s) pour construire des modèles de connaissances en vue de développer des systèmes informatiques.
2. La seconde famille est relative à la modélisation des connaissances selon l’objet sur lequel elles portent et prend en compte les connaissances dans le cycle de conception du produit.
Ces deux familles se distinguent d’un point-de-vue méthodologique et opérationnel, cependant, elles restent complémentaires au regard de l’activité de modélisation. En fait, la première famille qui propose un cadre méthodologique permet de formaliser l’activité de modélisation des connaissances depuis la capture ou l’extraction des connaissances, jusqu’à la création du modèle à implémenter, et optionnellement, la modélisation de celle-ci. Dans la deuxième famille cette activité d’extraction ou de capture y est implicite, tout en étant indépendante d’un formalisme visible pour ce faire.
Finalement, nous pouvons dire que l’activité de modélisation de connaissances est composée de deux parties distinctes : la première partie concerne la capitalisation des connaissances à travers l’extraction et la capture des connaissances dans le but de les réutiliser, et la deuxième partie concerne la réutilisation de ces connaissances dans le but d’élaborer des modèles selon les objectifs d’utilisation visés (mémoire d’entreprise, système d’information, etc.). Nous allons détailler dans la suite ces deux parties en présentant différents outils et méthodes issues des travaux de recherche.

La capitalisation des connaissances

La phase de capitalisation des connaissances est une phase cruciale dans l’élaboration des modèles de connaissances. Cette phase se caractérise par l’identification des différents éléments de connaissances qui seront utilisés plus tard dans l’élaboration du modèle.
La capitalisation des connaissances a été le sujet de plusieurs travaux de recherche qui ont abouti à des outils et méthodes dans le but de modéliser les connaissances. La norme sur le Record Management est une norme qui a été élaborée dans le but de proposer une méthodologie générique (figure 2.20) pour capitaliser les connaissances de l’entreprise à travers la capitalisation de ses documents [ISO 15489]. A l’issue du processus implémentant cette méthodologie, les documents sont considérés comme des archives.
Dans [Laroche, 07] on stipule que « la généricité de cette méthode ne peut tenir compte de la diversité des sources à prendre en compte. Plusieurs finalités peuvent être appliquées aux connaissances capitalisées ». En conséquence, il est possible d’utiliser cette méthodologie de plusieurs façons différentes, et pour atteindre des objectifs divers. Pour cela, on trouve des méthodologies de capitalisation de connaissances qui sont spécifiques à un contexte donné.
Ces méthodes et outils de capitalisation des connaissances sont plus intéressants dans un contexte où les connaissances considérées sont de natures tacite et/ou explicite. Compte tenu de notre contexte d’utilisation relatif à des connaissances formelles (explicites), nous nous tournons vers des solutions de modélisation plus adaptées telles que les modèles-produit. Pour cette raison, nous avons choisi de ne pas détailler cette partie de capitalisation des connaissances avec les différentes méthodes développées, et qu’on retrouve dans l’état de l’art. Nous détaillerons quelques-unes de ces méthodologies de capitalisation des connaissances dans la section annexe. Nous les regroupons dans un tableau de synthèse qui permettra de les comparer selon leurs objectifs et leurs contextes d’utilisation.

L’élaboration des modèles

La phase d’élaboration de modèles a pour but principal de mettre en place une cartographie des connaissances capitalisées de manière formelle (à travers l’utilisation des méthodes et outils précédents) ou de manière informelle (en proposant systématiquement des modèles permettant de décrire un objet, une situation, etc.).
Dans cette partie, nous verrons les différents modèles de connaissances élaborés dans le but de décrire différents objets d’entreprise tels que les produits, les processus, ou les ressources. Pour la majorité, il s’agira de modèles produit (méta-modèles « produit ») qui permettent de décrire le produit selon différents aspects tels que l’aspect fonctionnel ou l’aspect structurel. Ces modèles sont souvent décrits selon le formalisme UML (Unified Modelling Language) dans le but de fournir une structure formelle qui peut être implémentée, aux différentes applications informatiques qui se basent sur ceux-là.
Modèle FBS
Le modèle FBS est à la base de plusieurs modèles produit développés dans le but de décrire la structure globale d’un produit. Dans [Gero, 90], on a considéré le processus de conception comme étant un processus de transformation des informations fonctionnelles du produit, en description conceptuelles d’un artéfact qui permet de réaliser ces fonctions. Cette transformation n’est pas directe, elle passe par plusieurs états intermédiaires où plusieurs autres aspects du produit sont explorés, comme par exemple le comportement de celui-ci [Dorst & al. 05].
Les trois aspects permettant de caractériser un produit sont donc : la fonction, qui décrit les résultats attendus par les comportements de l’artéfact, le comportement, qui décrit les actions ou processus de l’artéfact selon le contexte et la nature de l’environnement, et enfin, la structure, qui décrit les éléments de l’artéfact, leurs arrangements et leurs connectivités [Rosenman & al. 98]. Ces trois aspects sont utilisés dans le but d’élaborer une description du produit et de le caractériser durant les différentes phases de conception et de développement de celui-ci.

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Table des matières

Glossaire
Chapitre I – Introduction au contexte général de la thèse
I. Introduction générale
II. Présentation du contexte général de la thèse
III. Plan de la thèse
Chapitre II – Problématique et état de l’art : La rétro-conception et l’ingénierie des connaissances
Problématique et contexte spécifique de notre étude
I. Motivations
1. Contexte industriel
2. Projet ANR METIS
3. Contexte scientifique
II. Problématique
III. Hypothèses et objectifs
Introduction à l’état de l’art
Rétro-conception : Concepts, méthodes et techniques
I. Débuts de la rétro-conception
II. Rétro-conception : Définitions
1. Définitions de la rétro-conception
2. Proposition d’une nouvelle définition pour la rétro-conception dans notre contexte
a. Niveaux d’abstraction et degrés d’abstraction
b. Informations et connaissances
c. Nouvelle définition de la rétro-conception
III. Finalités de la rétro-conception
1. Refabrication
2. Reengineering
3. Reconception
IV. Travaux sur la rétro-conception
1. La rétro-conception conventionnelle
2. Méthodologies
a. REFAB
b. VPERI
c. MERGE
d. PHENIX
e. DHRM : Rétro-conception d’objets industriels à caractère patrimonial
V. Conclusion de la partie
Ingénierie des connaissances : Concepts, outils, et méthodes
I. Définitions de la connaissance
II. Typologie de la connaissance
III. La représentation des connaissances
1. Formes de représentation des connaissances
2. Difficulté d’utilisation
IV. Modélisation des connaissances
1. La capitalisation des connaissances
2. L’élaboration des modèles
a. Modèle FBS
b. CPM et OAM
c. Modèle holonique
d. Modèle PPO
e. Modèle FBS-PPRE
f. Modèle MOKA
g. Synthèse
V. Conclusion de la partie
Conclusion du chapitre II : Evolution de la rétro-conception
I. Manques relatifs à la rétro-conception
1. Prise en compte des données hétérogènes
2. Intégration des connaissances
II. Evolution du point de vue conceptuel
III. Evolution du point de vue opérationnel
1. Caractérisation du sous-système de traitement des données hétérogènes :
2. Caractérisation du sous-système de gestion des connaissances :
3. Intégration des systèmes
IV. Formalisation de la nouvelle méthodologie de rétro-conception
Chapitre III – Proposition d’une nouvelle méthodologie de rétro-conception intégrée
Introduction au chapitre III
Intégration des données hétérogènes pour la rétro-conception
I. La représentation de l’information et des connaissances
1. La représentation conceptuelle
2. La représentation formelle (opérationnelle)
II. Intégration des données hétérogènes
1. Définition de l’intégration des données hétérogènes
2. Informations à extraire des données hétérogènes
3. Lien entre les données hétérogènes, et le modèle-produit
4. Exploitation du lien dans le cadre de la rétro-conception
III. Processus d’analyse des données hétérogènes
1. Modèle de données pour l’analyse des données hétérogènes
2. Analyse des représentations formelles
a. Identification du type de la donnée à analyser
b. Prétraitement de la donnée à analyser
3. Analyse des représentations conceptuelles
a. Identification des types d’informations prétraitées
b. Analyse des informations
IV. Conclusion de la partie
Rôle des connaissances dans la nouvelle méthodologie de rétro-conception
I. Les niveaux d’abstraction des représentations du produit
II. Formalisation du produit dans le contexte de rétro-conception
1. Le processus de conception classique
2. Différences entre la rétro-conception et la conception
a. Approche ascendante contre approche descendante
b. Différences entre les concepts initiaux utilisés dans les deux processus
3. Différences entre les représentations du produit dans la conception et la rétro-conception
III. Représentation du produit dans la rétro-conception
1. Représentation absolue du produit (informations intrinsèques)
a. Description de la représentation absolue
b. Modèle-produit : représentation intrinsèque
2. Représentation relative du produit
a. Description de la représentation relative
b. Modèle-produit : représentation relative pour la conception
3. Lien entre la représentation absolue et les représentations relatives
IV. Conclusion de la partie
Concept de facettes d’informations pour l’organisation des représentations
I. Le besoin de gérer un ensemble d’informations contextuelles dans l’élaboration du produit
II. L’élaboration du contexte de développement du produit
III. Le concept de facettes d’informations
1. Définition du concept
a. Le cycle de vie du produit
b. Les modèles-produit
c. Les modèles métier
d. La représentation systémique des produits
2. Objectif du concept
IV. Formalisation du concept et son utilisation
V. Modélisation du concept de facettes d’informations
VI. Conclusion de la partie
Le concept Ki4D pour l’organisation du processus de rétro-conception
I. Formaliser le processus de rétro-conception
1. Formalisation relative au produit
2. Formalisation relative au processus
II. Le concept Ki4D
1. Définition du concept Ki4D
2. Objectif du concept Ki4D
III. Les concepts relatifs à la démarche de Ki4D
1. Eléments de produit (statiques)
2. Eléments de processus (dynamiques)
3. L’espace 4D
a. Définition de l’espace 4D
a. Objectif de l’espace 4D
b. Utilisation de l’espace 4D
c. Travail du moteur de workflow
IV. Modélisation du concept Ki4D
1. Modélisation du processus (Gestion de la rétro-conception)
2. Modèle global
V. Conclusion de la partie
1. Apport du modèle global pour la rétro-conception
a. Prise en compte de différentes formes d’information en entrée
b. Intégration des connaissances produit plus complète
c. Structuration du processus de rétro-conception de façon modulaire
2. Conclusion
Chapitre IV – Cas d’étude – Démonstrateur
I. Présentation du démonstrateur
1. Architecture du démonstrateur
2. Interface du démonstrateur
II. Premier cas d’étude : reconception d’un stylo 4 couleurs
1. Objet étudié
2. Données hétérogènes pour l’analyse
3. Objectif de la rétro-conception du stylo 4 couleurs
a. Objectif
b. Facette de sortie du processus
4. Méthodologie de rétro-conception – Rétro-Conception Assistée par Ordinateur
a. Etapes du processus de rétro-conception
b. Données hétérogènes
c. Prétraitement des données hétérogènes
d. Extraction des informations et connaissances
e. Intégration des données hétérogènes
f. Recherche de correspondances
III. Deuxième cas d’étude : reengineering de l’attelage mobile d’un moteur monocylindre
1. Objet étudié
2. Données hétérogènes pour l’analyse
3. Objectif de la rétro-conception de l’attelage mobile
a. Objectif
b. Facette de sortie du processus
4. Méthodologie de rétro-conception
a. Etapes du processus de rétro-conception
b. Données hétérogènes
c. Prétraitement des données hétérogènes
d. Extraction des informations et connaissances et intégration des données hétérogènes
IV. Synthèse
V. Conclusion
Chapitre V – Discussions et conclusion
I. Conclusion
II. Discussions
1. Liens des données hétérogènes et du modèle-produit
2. Modélisation des connaissances
3. Concept de facettes d’informations
4. Concept Ki4D
Références bibliographiques

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