Caractérisation des milieux mous par optoélastographie transitoire

Caractérisation mécanique des tissus mous

     L’exploration des propriétés mécaniques des tissus biologiques dans la médicine est pratiquée depuis plusieurs siècles. Par exemple, une des premières approches pour évaluer la dureté d’un tissu consiste en la palpation manuelle des organes, qui permet un diagnostic qualitatif de pathologie qui se manifeste par un changement de dureté dans le milieu. Dans ce geste, le médecin évalue le degré de résistance au changement de forme. Le remplacement de ce geste par des techniques permettant des diagnostiques précoces et quantitatifs est un sujet de recherche très actif. Les techniques visant à caractériser mécaniquement les tissus sont basées sur l’utilisation de deux familles d’onde : les ondes de compression (par exemple les ultrasons de l’ordre de MHz) et les ondes de cisaillement (par exemple les ondes transverses de basse fréquence de 20 à 500 Hz). Dans cette partie, nous allons recenser les techniques développées dans ce sens, après avoir introduit quelques propriétés mécaniques fondamentales des tissus biologiques.

Elastographie statique

   Le principe de base de l’élastographie statique a été décrit par Ophir et al. [89]. Il suggère que l’utilisation d’un échographe seul est suffisante pour déterminer l’élasticité des tissus biologiques. La technique repose sur une comparaison du milieu étudié par une prise d’images avant et après l’application d’une contrainte statique. La contrainte entraîne une déformation inversement proportionnelle au module de Young. En effet, les zones molles se déforment plus que les zones dures. On peut ainsi analyser l’effet de la compression sur le milieu et détecter d’éventuelles variations de module de Young. Le principe de mesure est le suivant : la première acquisition est faite avant la compression, alors que la deuxième est faite sur l’échantillon comprimé d’une longueur dz. Le deuxième signal a donc une durée plus courte de 2dz/c, c étant la vitesse du son des ondes de compression dans le milieu, supposée constante. Le décalage temporel se répartit le long du trajet de l’onde ultrasonore selon l’élasticité des milieux traversés. En effet, les zones les plus dures seront moins comprimées que le reste et donc les trajets sont plus rapides. Si l’élastographie statique permet une meilleure détection des lésions, elle est difficile à mettre en œuvre pour les organes profond ou difficile d’accès. Sa performance dépend de la qualité et de l’homogénéité de la contrainte appliquée. Cette approche a l’inconvénient de ne fournir qu’une carte de déformation et non une estimation d’un paramètre physique du milieu comme le module de Young. Pour obtenir un paramètre quantitatif, il faut supposer le champ de contrainte uniforme ou bien le connaître, ce qui est le plus souvent impossible dans la pratique. Plusieurs groupes [87, 113] ont travaillé sur des algorithmes d’inversion pour remonter au module de Young à partir du champ de déformation, sans résultats pleinement satisfaisants.

« Shear Wave Elasticity Imaging » et « AcousticRadiation Force Impulse Imaging »

   La première méthode à avoir utilisé une force de radiation ultrasonore comme source localisée de vibration mécanique est la SWEI (Shear Wave Elasticity Imaging). Elle a été proposée pour la première fois par le groupe de Sarvazyan [104]. Cette méthode utilise comme excitation la force de radiation produite par la focalisation d’un faisceau ultrasonore intense pendant une durée brève, de l’ordre de la centaine de microsecondes. Le but est d’analyser la réponse mécanique du tissu à cette sollicitation impulsionnelle pour évaluer les propriétés viscoélastiques du tissu. La détection du déplacement induit au voisinage du foyer peut se faire avec le transducteur utilisé pour l’excitation, ou à l’aide d’un autre transducteur. L’approche proposée par Sarvazyan est différente des précédentes en ce qu’elle utilise une excitation impulsionnelle de courte durée, donc d’un large spectre fréquentiel. En plus du déplacement transitoire au foyer, cette excitation engendre des ondes de compression et de cisaillement transitoire qui se propagent dans le milieu. Sarvazyan et al. ont proposé un modèle mathématique pour décrire les oscillations de cisaillement dans les tissus biologiques créées par la force de radiation [102],[104], et ont formulé une expression analytique pour relier l’amplitude des déplacements créés au voisinage du foyer par la force de radiation d’un faisceau gaussien à l’élasticité et la viscosité locales. Par rapport aux méthodes présentées précédemment, cette technique à l’avantage d’être utilisée en profondeur en connaissant l’endroit de l’application de la force. La méthode tire aussi bénéfice de la forte atténuation des ondes de cisaillement dans les tissus, qui permet d’induire des oscillations mécaniques dans des zones limitées autour de la zone focale. Un des premiers groupes qui a mis en œuvre cette idée pour en faire une technique de diagnostic médical fut celui de Duke University[86]. En utilisant un même transducteur pour suivre le déplacement créé, la réponse des tissus à la force est obtenue spatialement et temporellement. La deuxième méthode baptisée ARFI (Acoustic Radiation Force Impulse) se base sur l’intercorrélation des signaux ultrasonores détectés par le transducteur, qui permet de déduire le déplacement engendré par la sollicitation en fonction du temps.

La diffusion et son origine biologique

   Lors de sa propagation dans les tissus, la lumière rencontre plusieurs structures de différentes formes et tailles allant de 10 nm à quelques µm pour les cellules. Sous l’effet de l’onde incidente, les charges de la particule se mettent à osciller, se transformant ainsi en un dipôle oscillant qui rayonne des ondes secondaires à la même fréquence que l’onde incidente. Chaque structure se comporte ainsi comme source de lumière secondaire. Ce processus permet d’expliquer le ralentissement du front d’onde à l’intérieur du milieu. Il justifie l’introduction de l’indice de réfraction n, qui caractérise la variation de la vitesse de phase de l’onde dans le milieu par rapport au vide. Il est de 1.4 dans les tissus [20]. Il est possible de montrer qu’en raison de la présence d’interférences destructives, dans un milieu homogène, la lumière se propage uniquement en avant. La présence d’irrégularité au sein d’un milieu réel provoque l’émission de lumière dans d’autres directions. Par contre, les nombreuses irrégularités de densité ou de composition à l’intérieur des tissus biologiques expliquent la forte diffusion de la lumière dans ces milieux. Il existe plusieurs régimes de diffusion qui dépendent des tailles des diffuseurs par rapport à la longueur d’onde. La diffusion de Rayleigh intervient quand l’onde rencontre une particule de taille plus petite que la longueur d’onde incidente. Dans ce cas, le rayonnement est isotrope. Pour des particules de tailles comparables à la longueur d’onde, on décrit la diffusion avec la théorie de Mie [81]. La rediffusion a lieu préférentiellement vers l’avant au fur et à mesure que la taille de la particule augmente. Pour des structures encore plus grandes, l’optique géométrique suffit pour décrire la diffusion.

La tomographie optique cohérente (OCT)

   L’une des approches qui s’est le plus développée récemment est la sélection par cohérence temporelle, qui a donnée naissance à la tomographie optique cohérente plus connue sous l’acronyme anglais d’OCT (optical coherence tomography). Son principe a été proposé par Fujimoto et al. en 1991[61] comme technique d’imagerie optique non invasive. Elle repose sur l’interférence de deux trains d’onde de photons balistiques ayant parcouru séparément un chemin optique identique à la longueur de cohérence de la source, qui fixe ainsi la résolution axiale et la performance de l’étude. En effet la profondeur est résolue par le biais du phénomène d’interférence entre le signal d’intérêt et la référence, dicté par la durée de cohérence de la source. Avec un échantillon diffusant, et donc susceptible de rétrodiffuser de la lumière balistique provenant de différentes profondeurs, on peut parvenir à l’imagerie de couches enfouies à partir des informations de contraste des mesures interférométriques. La résolution axiale est donnée par 2 cL n avec cL la longueur de cohérence de la source et n l’indice de réfraction. Les couches sont repérées par la position du bras référence. En pratique, pour filtrer les photons diffusés de toute part, le signal d’interférence de faible cohérence est modulé grâce au déplacement sur l’axe du miroir de référence (miroir de référence Figure 1.15). En utilisant la technique hétérodyne le signal cohérent est récupéré. La résolution atteignable in vivo est de l’ordre du micron [61], et la profondeur est de l’ordre de 10 fois le libre parcours moyen [34]. Une variante de la technique est l’OCT dans le domaine de Fourier, basée sur une détection spectrale permettant d’éviter de moduler le champ référence [70]. Ces techniques de détection nécessitent un balayage point par point de l’échantillon. Les méthodes dites d’OCT plein champ permettent de s’affranchir de ce balayage et réduire le temps d’acquisition [9].

Le rapport de stage ou le pfe est un document d’analyse, de synthèse et d’évaluation de votre apprentissage, c’est pour cela chatpfe.com propose le téléchargement des modèles complet de projet de fin d’étude, rapport de stage, mémoire, pfe, thèse, pour connaître la méthodologie à avoir et savoir comment construire les parties d’un projet de fin d’étude.

Table des matières

INTRODUCTION
1.1 CARACTERISATION MECANIQUE DES TISSUS MOUS
1.1.1 Propriétés mécaniques des tissus mous
1.1.2 Echographie
1.1.3 Elastographie
1.1.3.1 Elastographie statique
1.1.3.2 Elastographie dynamique
1.2 CARACTERISATION OPTIQUE DES TISSUS BIOLOGIQUES
1.2.1 Propriétés optiques
1.2.2 Les techniques de caractérisation purement optique
1.3 APPROCHES COMBINANT OPTIQUE ET ACOUSTIQUE
1.3.1 Imagerie photoacoustique
1.3.2 Imagerie acousto-optique
1.3.3 Optoélastographie de surface
1.4 CONTENU DU TRAVAIL DE THESE
1.4.1 Optoélastographie transitoire
1.4.2 Structure du manuscrit de thèse
OPTOELASTOGRAPHIE TRANSITOIRE
2.1 PRINCIPE ET BASES PHYSIQUES
2.1.1 Principe de l’expérience
2.1.2 Speckle optique
2.1.2.1 Définition
2.1.2.2 Quelques propriétés du speckle
2.1.3 Génération de cisaillement localisé dans les tissus mous
2.1.3.1 Force de radiation ultrasonore dans les tissus mous
2.1.3.2 Réponse des milieux mous à une force de radiation
2.2 MATERIEL ET METHODES
2.2.1 Dispositif expérimental
2.2.1.1 Schéma général de l’expérience
2.2.1.2 Echantillons
2.2.1.3 Déroulement de l’expérience
2.2.2 Traitement des données
2.3 RESULTATS EXPERIMENTAUX
2.3.1 Détection optique de la force de radiation à travers un gel homogène
2.3.1.1 Courbe type
2.3.1.2 Interprétation du phénomène observé
2.3.1.3 Influence de quelques paramètres expérimentaux
2.3.2 Détection optique de la force de radiation à travers un gel hétérogène
2.3.2.1 Détection des contrastes d’absorption optique
2.3.2.2 Détection d’inclusions dures
2.3.2.3 Gel avec deux contrastes de nature différente
2.3.2.4 Effet de la profondeur de foyer
2.3.3 Expérience sur des tissus biologiques in vitro (blanc de poulet)
2.3.4 Conclusion
MODELISATION
3.1 ETAPES DE LA MODELISATION
3.1.1 Simulation du speckle optique
3.1.2 Modélisation de la propagation de la lumière par simulation de Monte-Carlo
3.1.3 Modélisation du champ Acoustique avec Field II
3.1.4 Déplacement généré par la force de radiation
3.1.5 Combinaison des différentes simulation
3.2 RESULTATS ET COMPARAISON AVEC LES RESULTATS EXPERIMENTAUX
3.2.1 Validation de l’approche de modélisation
3.2.1.1 Courbe de corrélation dans les gels homogènes
3.2.1.2 Effet de la durée de l’onde de compression
3.2.1.3 Courbe de corrélation à des différentes module de Young
3.2.1.4 Courbe de corrélation en présence d’absorbeur
3.2.2 Quelques prédictions ou interprétations de la modélisation
3.2.2.1 Effet de l’amplitude de l’onde de cisaillement
3.2.2.2 Effet de la taille des absorbeurs optiques suivant l’axe acoustique (axe Y)
3.2.2.3 Résolution suivant les axes transverses pour des inclusions absorbantes
3.2.2.4 Résolution suivant l’axe acoustique pour des inclusions absorbantes
3.3 CONCLUSION
QUELQUES PERFORMANCES DE LA METHODE
4.1 COURBES DE CORRELATION A FAIBLE INTENSITE LUMINEUSE
4.1.1 Limite de la détection « directe »
4.1.2 Détection par interférométrie à deux phases
4.1.2.1 Principe de l’interférométrie à deux phases
4.1.2.2 Mise en œuvre expérimentale
4.1.2.3 Validation de l’approche deux phases
4.1.2.4 Phénomène de décorrélation totale
4.1.3 Limite de détection in vitro
4.1.3.1 Etude expérimentale
4.1.3.2 Simulation avec prise en compte du bruit de photon et du bruit caméra
4.1.3.3 Comparaison simulation/expérience
4.2 COMPARAISON ENTRE OPTOELASTOGRAPHIE TRANSITOIRE ET ACOUSTO-OPTIQUE : SENSIBILITE A LA QUANTITE DE LUMIERE
4.2.1 Protocole expérimental
4.2.2 Résultats de la comparaison dans les gels
4.2.3 Résultats de la comparaison dans le poulet
4.2.4 Discussion
4.3 CONCLUSION
CONCLUSION
REFERENCES BIBLIOGRAPHIQUES

Rapport PFE, mémoire et thèse PDFTélécharger le rapport complet

Télécharger aussi :

Laisser un commentaire

Votre adresse e-mail ne sera pas publiée. Les champs obligatoires sont indiqués avec *