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Validation du modèle MCNP de la cellule MEDINA
Introduction
Ce chapitre est dédié à la validation du modèle MCNPX de la cellule MEDINA, étape essentielle pour s’assurer de la vraisemblance des résultats de simulation par rapport aux résultats attendus expérimentalement.
La cellule MEDINA décrite précédemment permet de détecter des éléments non-radioactifs (toxiques chimiques) dans des fûts de 200 L. Etant donné que le béton est un matériau souvent utilisé pour l’enrobage des déchets radioactifs, les performances de la cellule MEDINA ont été étudiées expérimentalement sur un fût béton de 200 L [Mauerhofer14]. Cette étude a démontré la capacité à déterminer les concentrations des éléments contenus dans le béton par la mesure du rayonnement de capture des neutrons thermiques. Toutefois, les études de performances ne sont pas toujours facilement réalisables de manière expérimentale, ce qui est notamment le cas de l’étude réalisée pour les colis de déchets d’enrobés bitumineux, très radioactifs, au chapitre III, et un modèle numérique peut s’avérer très utile. De la même façon, les études d’optimisation impliquant des modifications lourdes de l’installation comme celles abordées dans le chapitre IV, ne peuvent être directement réalisées sans étude d’impact préalable. Un modèle MCNP de la cellule a donc été réalisé afin d’assister les programmes expérimentaux.
Avant les travaux développés ici [Nicol15], une première validation du modèle numérique de la cellule MEDINA a été effectuée [Mauerhofer13], tout d’abord axée sur le modèle du détecteur germanium, et consistant à comparer la mesure de sources ponctuelles (60Co, 137Cs et 152Eu) au résultat obtenu par simulation sans irradiation neutronique. La validation du modèle du détecteur construit à partir des indications du constructeur, a conduit à des résultats mesurés et calculés cohérents à ± 5 % sur la plage en énergie de 121 keV à 1408 keV. Cette même référence rapporte aussi une première validation de l’ensemble du modèle de MEDINA grâce à l’activation neutronique d’un échantillon de NaCl, révélant un accroissement régulier du rapport MCNP/mesure sur une plus large gamme en énergie (0,5 – 9 MeV) correspondant aux rayonnements de capture du chlore. Initialement, cet effet a été imputé en partie à la description géométrique du détecteur et à la modélisation de l’angle d’incidence des rayonnements de capture dans le cristal GeHP [Mauerhofer13], mais il est apparu ensuite que la dépendance du rapport MCNP/mesure était en fait principalement causée par l’utilisation du spectre de variance associée aux mesures, qui par erreur a été utilisé au lieu du spectre de mesure [ORTEC13]. Au-delà de ce biais systématique, ces premières mesures ne pouvaient néanmoins être reproduites qu’à un facteur deux près par la simulation. Une telle précision était alors suffisante pour commencer les études de performance de l’activation neutronique, mais elle devait être améliorée. Les travaux de thèse présentés dans ce chapitre ont donc consisté à reprendre la comparaison expérience-calcul sur une série de mesures de petits échantillons d’éléments purs sous forme métalliques, ou de composés chimiques sous forme de poudre. Les configurations expérimentales correspondantes ont été reproduites à l’aide du modèle MCNP de la cellule et les spectres gamma d’activation neutronique pulsé ont été estimés par simulation Monte Carlo à partir de différentes bases de données pour contrôler l’impact éventuel de celles-ci sur les résultats.
Dans ce chapitre, nous présenterons dans un premier temps les configurations expérimentales ainsi que les résultats de mesure. Ensuite, nous développerons les différentes méthodes permettant de simuler le spectre de gamma de capture neutronique. Finalement les résultats obtenus à l’aide d’une de ces méthodes sont comparés aux mesures en considérants quatre bases de données différentes.
Mesures d’échantillons simples
Lors d’une campagne de mesure effectuée en 2012 [Havenith15], sept échantillons de composés chimiques sous forme de poudre, ou d’éléments purs sous forme métallique, ont été irradiés dans la cellule MEDINA afin de mesurer le rayonnement gamma prompt de capture associé à certains isotopes représentant des éléments toxiques. Les caractéristiques de ces échantillons sont résumées dans le Tableau 3.
Les configurations expérimentales sont illustrées sur la Figure 19. Chaque échantillon est placé à 21 cm du détecteur (distance bord à bord) afin d’augmenter l’efficacité de détection, et des blocs de graphite sont utilisés comme support de manière à ce que l’échantillon se trouve à la hauteur du détecteur. On notera que pour de raisons de sécurité vis-à-vis de la toxicité du béryllium, cet échantillon a été enveloppé dans un plastique pour l’expérience. La géométrie particulière de ce dernier est toutefois visible en Figure 19h.
Chaque échantillon est soumis à une irradiation pulsée pendant 2000 s. La durée des impulsions neutroniques est fixée à 50 μs, avec une période de répétition de 1 ms comme illustré en Figure 20. La mesure des spectres gamma est réalisée entre chaque impulsion, en introduisant un délai de 20 μs après l’impulsion fin d’assurer l’absence d’émission de rayonnement gamma prompts induits par des neutrons de haute énergie.
La tension du générateur de neutron est fixée à 85 kV, et le courant à 40 μA, résultant en une émission neutronique moyenne de l’ordre de (7,18 ± 0,93) 107 s-1. Cette valeur a été estimée par la comparaison de mesures expérimentales des raies gamma de capture du fer dans le cas d’un fût vide de 200 L dans MEDINA, et de simulations MCNP [Mauerhofer12, Havenith15]. L’acquisition des spectres est effectuée en mode Zero Dead Time (ZDT) du logiciel GammaVision-32 (ORTEC), corrigeant ainsi les pertes par temps mort. Le temps total de comptage est alors égal au nombre d’impulsions multiplié par le temps de comptage tc, soit 1860 s pour tous les échantillons. Des parties de spectres comprenant des raies gamma d’intérêts pour chaque élément sont représentées sur la Figure 21.
Afin de vérifier la présence ou non d’interférences avec le bruit de fond de la cellule, une mesure a également été effectuée cellule vide. Une identification complète des raies gamma du bruit de fond est donnée en référence [Mauerhofer14]. Pour la suite, nous nous sommes focalisés sur les raies gamma ne présentant aucune interférence. Dans les cas particuliers des échantillons d’aluminium et de chlore, comme illustré sur les parties du spectre de bruit de fond représentées en Figure 22, la présence d’aluminium constituant le capot du détecteur, ou de chlore dans la fibre de carbone constituant le toit de la cellule, induit une interférence sur chacune des raies significatives de ces deux échantillons.
Les surfaces des raies gamma de capture sont extraites à l’aide du logiciel Gamma-W (Westmeier Gmbh), en soustrayant les aires nettes mesurées sur le spectre de bruit de fond pour les isotopes 35Cl et 27Al. On notera que cette soustraction est valide car la présence de l’échantillon, de petite taille par rapport à la cellule, influence peu le flux de neutron dans la chambre d’irradiation. Cette hypothèse a été vérifiée par comparaison des principales raies gamma propres aux matériaux de la cellule, présentes dans chacun des spectres :
la raie gamma prompte de capture de l’hydrogène à 2,223 MeV,
les raies gamma promptes de capture du carbone à 3,683 et 4,945 MeV,
les deux raies gamma retardées à 140 keV et 198 keV, provenant majoritairement des réactions (n,2n) induites par les neutrons rapides respectivement sur les isotopes 76Ge et 72Ge, conduisant aux états métastables 75mGe (T1/2 = 47,7 s) et 71mGe (T1/2 = 20,4 ms). Ces deux raies gamma d’activation du germanium serviront également de moniteur pour le flux de neutrons rapides dans le chapitre IV sur l’optimisation de la cellule MEDINA.
Concernant les variations de la raie de l’hydrogène, l’utilisation d’un support en bloc graphite pour les échantillons (voir Figure 19) écrante une partie de l’émission de rayonnement gamma de capture de l’hydrogène contenu dans la fibre de carbone constituant la table tournante. Ces blocs sont absents de la mesure de bruit de fond. De plus l’utilisation de boites pour les échantillons de poudres de SeO2, Sr(NO3)2, NaCl, ou de sac plastique pour le béryllium introduit une quantité d’hydrogène supplémentaire contribuant en partie au signal à 2,223 MeV. Les variations relativement limitées des intensités des autres raies gamma du bruit de fond répertoriées dans le Tableau 4 (10 à 20 %), émises en différents points de la cellule, et notamment au niveau du germanium qui est proche des échantillons, confirment l’absence d’impact significatif des échantillons sur le flux de neutron dans la cellule MEDINA.
Les aires nettes des raies gamma promptes spécifiques aux échantillons sont listées dans le Tableau 5. Certaines raies gamma sont très proches en énergie les unes des autres (e.g. 786 keV et 787 keV, 1162 keV et 1164 keV pour l’échantillon de NaCl), et la résolution du détecteur (LTMH de 3,15 keV à 100 keV jusque 12,54 keV à 9000 keV) ne permet pas de les séparer. Les aires nettes correspondantes incluent donc les 2 raies gamma.
Simulations MCNPX
Modèle numérique
Les configurations expérimentales décrites précédemment ont ensuite été modélisées avec MCNP en utilisant le modèle représenté en Figure 23 où l’on peut voir un échantillon, ainsi que les délimitations d’un fût de 225 L positionnés dans la cellule MEDINA (mais on notera l’absence de fût dans les simulations réalisées dans ce chapitre). La source de neutrons est définie comme ponctuelle, située à 15 cm du bord de la chambre d’irradiation et émettant sous 4π stéradian des neutrons de 14 MeV. Afin de prendre en compte les réactions D-D se produisant également dans le générateur de neutron, 5 % des neutrons sont émis avec une énergie de 2,5 MeV. Cette valeur a été fixée sur la base des données SODERN, indiquant que la part de neutrons de 2,5 MeV ne dépasse pas 5 %. Une carte temporelle a été ajoutée à l’élément source MCNP afin d’émettre les neutrons uniquement pendant une durée de 50 μs, correspondant à l’irradiation pulsée décrite en Figure 20. Le spectre gamma est obtenu en utilisant l’estimateur F8 permettant de calculer le dépôt d’énergie dans la cellule correspondante au cristal de germanium. Toutefois, l’utilisation de cet estimateur n’est pas fiable avec le transport neutronique qui est traité par MCNP de façon non analogue à la réalité [MCNP5]. Ceci est mentionné au travers d’un message d’avertissement (« warning ») lors des simulations. Les simulations doivent donc être réalisées en deux étapes, la première correspondant au calcul de la source de gamma de capture qui sera utilisée pour la seconde étape consistant à transporter uniquement des photons (“mode p” dans MCNP) pour pouvoir utiliser l’estimateur F8. Les calculs MCNP ont été effectués avec la version MCNPX2.4.0 [MCNPX240] en utilisant la bibliothèque de données ENDF/B-VII.0 [Chadwick06].
Pour l’étape d’estimation du dépôt d’énergie dans le cristal de germanium (F8), le détecteur est modélisé selon la description technique du fournisseur, en considérant que le trou à l’intérieur du cristal coaxial est en cuivre pour simuler le doigt froid, voir Figure 24. Il s’agit du modèle validé en utilisant des sources gamma de calibration (60Co , 137Cs et 152Eu) [Mauerhofer13].
Comme exposé dans les paragraphes suivants, deux approches différentes ont été étudiées pour modéliser l’émission du rayonnement gamma de capture, chacune basée sur une impulsion de neutrons du générateur d’une durée de 50 μs. Afin de prendre en compte la contribution de ces impulsions à la formation du flux de neutrons thermiques, le calcul des estimateurs MCNP est effectué dans la première étape sur un temps de 10 ms, correspondant à 10 cycles d’irradiation. En effet, le temps de vie des neutrons thermiques (Die Away Time) dans le graphite de la cellule, estimé expérimentalement de 2 à 5 ms [Mildenberger15], est plus long que la période d’irradiation (1 ms). Chaque impulsion introduit donc une nouvelle population de neutrons thermiques avant la disparition totale de celle induite par l’impulsion précédente. Ce phénomène est illustré en Figure 25 où l’on peut observer l’allure du flux de neutron thermique pendant les premières périodes d’irradiation. La décroissance exponentielle du flux thermique induit par une seule impulsion du générateur de neutron est représentée en pointillés. On constate alors que le flux de neutrons thermiques engendré par ce type d’irradiation est un cumul des différentes composantes provenant des impulsions précédentes.
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Table des matières
Introduction
Chapitre I : Etat de l’art
I. DECHETS RADIOACTIFS
I.1. Classification
I.2. Stockage
II. CARACTERISATION NON DESTRUCTIVE
II.1. Les différentes sources de neutrons
II.2. L’activation neutronique
II.3. La spectrométrie gamma
II.4. Seuil et limite de détection
III. LES APPLICATIONS DE L’ACTIVATION NEUTRONIQUE
III.1. La caractérisation élémentaire
III.2. La caractérisation des matières nucléaires
IV. OUTILS UTILISES POUR LA THESE
IV.1. Moyens expérimentaux
IV.2. Outils de simulation
Chapitre II : Validation du modèle MCNP de la cellule MEDINA
I. INTRODUCTION
II. MESURES D’ECHANTILLONS SIMPLES
III. SIMULATIONS MCNPX
III.1. Modèle numérique
III.2. Première approche basée sur l’estimateur de flux gamma F5
III.3. Seconde approche basée sur estimateur de flux neutron F4
IV. COMPARAISON ENTRE SIMULATIONS ET MESURES EXPERIMENTALES
V. CONCLUSION
Chapitre III : Caractérisation des matières nucléaires par la mesure du rayonnement gamma retardé de fission
I. INTRODUCTION
II. TAUX D’EMISSION DES RAYONNEMENTS GAMMA RETARDES
II.1. Mesure des rayonnements gamma retardés dans la cellule REGAIN
III. COMPARAISON DES TAUX D’EMISSION MESURES ET TABULES
IV. PERFORMANCES POUR DES FUTS DE DECHETS DANS LA CELLULE MEDINA
IV.1. Modèle numérique MCNP
IV.2. Calcul du taux de fission
IV.3. Calcul du signal des rayonnements gamma retardés
IV.4. Limites de détection
IV.5. Incertitude de répartition de la matière fissile
IV.6. Interférence de l’isotope 238U
V. CONCLUSION
Chapitre IV : Etude d’amélioration du blindage du détecteur de la cellule MEDINA
I. INTRODUCTION
II. AMELIORATION DU BLINDAGE DU DETECTEUR
III. VALIDATION EXPERIMENTALE DE L’EFFET DES ECRANS
III.1. Mesures dans la cellule MEDINA
III.2. Simulation MCNP et comparaison des résultats
IV. CONCLUSION
Conclusion
Perspectives
Références bibliographiques
Annexe 1 : Chaines de décroissance des isotopes émetteurs de rayonnements gamma retardés de fission
Annexe 2 : Calculs des produits de fission émetteurs des rayonnements gamma retardés
2.1. Calculs d’évolution pendant l’irradiation
2.2. Calculs d’évolution après l’irradiation
Annexe 3 : Méthode analytique de détermination des limites de détection des rayonnements gamma retardés de fission
Annexe 4 : Efficacité des blindages testés par simulation MCNP
Annexe 5 : Test de l’outil de traitement des spectres gamma SINBAD
Table des figures
Liste des tableaux
Abstract
Résumé
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