Caractérisation de la rhéologie des matrices cimentaires à partir d’essais empiriques courants

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L’indice de réfraction

Dans certains cas, qui seront discutés plus loin (§ 3.4), il est préférable d’utiliser la théorie de Mie, plutôt que l’approximation de Fraunhofer. Or, la théorie de Mie nécessite, pour l’interprétation des mesures d’intensités de la lumière diffractée, la connaissance de l’indice de réfraction complexe du matériau. Rappelons que cet indice est formé d’une partie réelle, représentant le rapport des vitesses de la lumière entre le matériau composant la particule traversée et le vide, et d’une partie imaginaire, caractéristique de l’absorption du faisceau de lumière par la particule traversée.
La détermination de l’indice du matériau peut être, comme nous le verrons plus loin, une opération simple ou complexe, dépendant de la nature et de l’hétérogénéité du matériau (§ 4.1.2). Elle représente néanmoins une étape importante puisque de cet indice dépend la validité de la courbe granulaire calculée. Ainsi, comme l’ont relevé certains auteurs, l’utilisation d’une valeur erronée de l’indice de réfraction peut s’avérer aussi catastrophique que peut l’être celle du modèle de Fraunhofer (§ 3.4). De Leeuw et al (1987) ont observé des différences non négligeables sur les intensités diffusées aux grands angles (caractéristiques des particules fines) en fonction de la variation des indices de réfraction, parties réelle et complexe. Roy et al (1990) et Kusters et al (1991) ont obtenu le même type de résultats, en faisant varier l’indice réel entre m=1,1 et m=1,3 (m=ns/nf). Enfin, Zhang et al (1992) ont obtenu des erreurs de 10% et plus sur le diamètre moyen calculé lorsqu’ils ont fait varier la partie réelle de l’indice de réfraction.

Cas de la fumée de silice

L’exemple précédent traite d’un matériau de laboratoire (billes de verre). Nous proposons un deuxième exemple, concernant un produit souvent utilisé dans les bétons : la fumée de silice. La figure 3.14 illustre l’effet de l’évolution des parties réelles et imaginaires de l’indice de réfraction pour le calcul de la granularité d’un slurry de fumée de silice, dont la majorité des particules sont désagglomérées. Des variations importantes sont observées quant àL ’allure générale des courbes, ce qui montre encore une fois les conséquences liées au choix des paramètres optiques. La figure 3.15 illustre de façon quantitative les effets des différents indices, l’augmentation de l’un et l’autre ayant tendance à entraîner une sous-évaluation des fines particules (en quantité et en diamètre moyen). L’utilisation du modèle de Fraunhofer produit le même résultat, mais de façon beaucoup plus importante.
On remarque également qu’une faible variation de la partie réelle autour de sa valeur réaliste (1,53) conduit à des modifications importantes de la courbe et de ses paramètres caractéristiques (figure 3.15 et figure 3.16a). Il devient ainsi difficile de sortir de la fourchette d’indices 1,50-1,55 sans modifier significativement la granularité calculée.
L’effet de la partie imaginaire reste, pour cet exemple, beaucoup moins important. En effet, il semble qu’un choix d’indice compris entre 0 et 0,003 (matériau transparent ou presque transparent) donne des résultats semblables, autant du point de vue de l’allure des courbes (figure 3.14 et figure 3.16b) que de leurs paramètres caractéristiques (figure 3.15, où d50 = 0,30 ± 0,01 mm et V<1mm = 84 ± 1%). Par contre, les indices supérieurs à 0,01 (se rapprochant de l’opacité) modifient grandement les granularités calculées. Pour le cas de la fumée de silice, une faible absorption est représentative de la réalité physique.
Le choix des indices est donc une opération délicate et il peut mener à des erreurs importantes d’interprétation lorsqu’il n’est pas fait correctement. La difficulté pour la plupart des matériaux réels est d’évaluer de façon réaliste leurs paramètres optiques. En effet, dans le cas des matériaux vitreux comme la fumée de silice, les données de la littérature donnent une plage d’indices réels compris entre 1,47 et 1,62 (voir l’annexe à la fin de ce chapitre), ce qui représente une précision nettement insuffisante pour ce matériau (figure 3.14).
L’évaluation des propriétés optiques des matériaux sera traitée plus en détails plus loin (§ 4.1.2).

L’hétérogénéité du matériau

Comme pour toutes les techniques utilisant la diffusion de la lumière, la granulométrie laser suppose que toutes les particules composant l’échantillon sont homogènes (forme, absorption, indice de réfraction, compositions chimiques et minéralogiques). Or, c’est rarement le cas des matériaux utilisés en génie civil, qui présentent une ou plusieurs caractéristiques variables pour un même échantillon.
Les cendres volantes, issues de la combustion du charbon dans les centrales thermiques, représentent un exemple typique où l’hétérogénéité est importante.

Hétérogénéités intergranulaires

Les compositions chimique et minéralogique sont variables d’une particule à l’autre. On note ainsi la présence de mullite, de quartz, d’oxydes métalliques (hématite et magnétite), de verre et de charbon (figure 3.17) : ceci explique, partiellement, pourquoi les cendres volantes présentent des granularités multimodales (figure 3.18).

Matériaux polyphasiques : effet d’un indice moyen

En granulométrie laser, le principal problème lié à l’hétérogénéité des matériaux réside dans la difficulté de déterminer un indice de réfraction complexe du matériau, utilisable dans les calculs de la granularité, sans créer de biais.
Les différentes phases d’un matériau complexe possèdent des propriétés optiques qui lui sont propres et l’utilisation d’une valeur unique moyenne n’est pas toujours satisfaisante. En effet, plusieurs auteurs ont affirmé que cette pratique mène à des erreurs de calcul de la granularité du matériau car elle est incompatible avec la théorie de Mie, qui considère un échantillon comme étant composé de particules monophasiques et sphériques [Lindberg et al (1977), Gillespie et al (1978), De Leeuw et al (1987)].
Mais, comme il est difficile de séparer des lots homogènes de particules, voire impossible pour certains matériaux tels les cendres volantes (figure 3.19), il est quand même admis que l’évaluation de propriétés optiques moyennes peut être un compromis acceptable dans bien des cas, à condition de choisir judicieusement les valeurs moyennes des indices. La difficulté réside alors dans la façon de calculer ces propriétés optiques moyennes.

La concentration de matériau utilisée

En granulométrie laser, un phénomène important à éviter est la diffraction multiple du faisceau lumineux. En effet, les hypothèses de calcul reposent sur la diffraction simple de la lumière, c’est-à-dire que les particules en suspension diffractent, indépendamment l’une de l’autre, une portion de la lumière incidente. En pratique, cette condition est respectée en gardant la fraction solide en concentration relativement faible, en-dessous de 1‰ en volume : si les mesures sont effectuées avec une grande concentration de particules, l’interprétation des résultats est faussée par la diffraction multiple [Frock (1987)].
Le paramètre permettant de régler la concentration à un niveau acceptable est l’obscuration (Obs). Il est défini par le calcul de la quantité relative de lumière déviée par les particules en suspension (relation (3.5)). Cette dernière comprend la lumière diffusée, par diffraction, réflexion et réfraction, mais également la lumière absorbée par les particules. Il s’agit en fait d’une mesure d’atténuation du faisceau lumineux et, d’une façon générale, sca abs I = I + I + I 0 (3.4) et 0 1 I IObs = – (3.5) où I0 et I sont les intensités lumineuses mesurées au détecteur central, respectivement lorsque l’échantillon est absent (fluide porteur seulement) et présent (fluide porteur et matériau) de  la cellule. Ces mesures correspondent à la fraction de la lumière qui n’a pas été déviée par des particules. Isca et Iabs sont les intensités lumineuses diffusées et absorbées par les particules. Ces deux paramètres représentent les phénomènes d’extinction du faisceau lumineux. Notons que dans le cas des particules transparentes, Iabs = 0.
Une obscuration trop faible rendra le bruit de fond, qui est imputable aux impuretés et au signal électrique, non négligeable et entraînera l’apparition de populations de particules virtuelles n’appartenant pas à l’échantillon étudié. Dans le cas inverse, une obscuration trop forte conduira au phénomène de diffusion multiple, se produisant lorsque la lumière diffusée par une particule l’est de nouveau par une autre, et qui provoque généralement une surestimation de la quantité de fines particules, suite à l’augmentation de l’angle de déviation (figure 3.20) [Roy et al (1990), Hitchen (1992)].

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Table des matières

Partie I – Caractérisation des fines minérales
Chapitre 1 – Les matériaux et leur caractérisation
1. INTRODUCTION
2. CHOIX DES MATÉRIAUX
3. CARACTÉRISATION DES FINES MINÉRALES
4. RÉFÉRENCES
Chapitre 2 – Détermination, par diffraction des rayons X, de la teneur en phase amorphe des fines minérales
1. INTRODUCTION
2. STRUCTURE DES MINÉRAUX ET DIFFRACTION DES RAYONS X (DRX)
3. MÉTHODES GÉNÉRALES DE DOSAGE (DRX QUANTITATIVE)
4. ANALYSE PAR DRX QUANTITATIVE DES MATÉRIAUX AMORPHES
5. RÉSULTATS EXPÉRIMENTAUX ET DISCUSSION
6. CONCLUSION
7. RÉFÉRENCES
ANNEXE 1 – COEFFICIENTS MASSIQUES D’ABSORPTION
ANNEXE 2 – PRINCIPALES MÉTHODES DE QUANTIFICATION DES MINÉRAUX CRISTALLISÉS
ANNEXE 3 – EXEMPLES DE CALCUL DES TENEURS EN VERRE
Chapitre 3 – Mesure de la granularité des fines minérales par granulométrie laser
1. INTRODUCTION
2. CONSIDÉRATIONS THÉORIQUES
3. ERREURS ET IMPRÉCISIONS AFFECTANT LES COURBES GRANULAIRES
4. COMMENT RÉDUIRE (OU ANNULER) LES ERREURS ET IMPRÉCISIONS
5. CONCLUSION
6. RÉFÉRENCES
ANNEXE – INDICES DE RÉFRACTION (PARTIE RÉELLE)
Conclusion – La fumée de titane
Partie II – Rhéologie des matériaux à matrice cimentaire
Chapitre 4 – Études rhéologiques : introduction et rappels
1. INTRODUCTION GÉNÉRALE
2. DÉFINITIONS
3. TYPES DE COMPORTEMENTS RHÉOLOGIQUES
4. FORCES ET INTERACTIONS ENTRE PARTICULES SOLIDES DANS UNE SUSPENSION
5. RÉFÉRENCES
Chapitre 5 – Choix expérimentaux pour les études rhéologiques
1. POURQUOI ÉTUDIER LES PÂTES DE CIMENT?
2. CHOIX DE L’APPAREILLAGE ET MÉTROLOGIE (MOBILE À AILETTES)
3. RÉFÉRENCES
ANNEXE – COURBE D’ÉTALONNAGE DU VISCOSIMÈTRE
Chapitre 6 – Caractérisation de la rhéologie des matrices cimentaires à partir d’essais empiriques courants
1. INTRODUCTION
2. TECHNIQUES EMPIRIQUES UTILISÉES
3. RÉSULTATS EXPÉRIMENTAUX ET DISCUSSION
4. CONCLUSION
5. RÉFÉRENCES
Chapitre 7 – Influence des fines minérales et des adjuvants sur les caractéristiques rhéologiques des pâtes de ciment 
1. INTRODUCTION
2. LES GRANDEURS RHÉOLOGIQUES
3. QUELQUES DONNÉES BIBLIOGRAPHIQUES SUR LES FINES MINÉRALES DANS LES MATRICES CIMENTAIRES
4. RÉSULTATS EXPÉRIMENTAUX ET DISCUSSION
5. CONCLUSION
6. RÉFÉRENCES
Chapitre 8 – Influence des fines minérales et des adjuvants sur le comportement rhéologique des pâtes de ciment
1. INTRODUCTION
2. LE COMPORTEMENT RHÉOÉPAISSISSANT
3. RÉSULTATS EXPÉRIMENTAUX
4. DISCUSSION
5. CONCLUSION
6. RÉFÉRENCES
ANNEXE 1 – COMPORTEMENT RHÉOÉPAISSISSANT
ANNEXE 2 – RÉSULTATS EXPÉRIMENTAUX
Chapitre 9 – Essais sur les bétons 
1. INTRODUCTION
2. APPAREILLAGE ET MATÉRIAUX UTILISÉS
3. RÉSULTATS EXPÉRIMENTAUX
4. LIMITE DES APPAREILS DE MESURE POUR BÉTON
5. RÉFÉRENCES
Conclusion – Démarche expérimentale proposée pour la poursuite de l’étude
Conclusion générale

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