Pouvoir solvant
En raison d’une densité élevée, les fluides supercritiques favorisent la solubilisation d’une solution de par les interactions solvant-soluté dues à la proximité des molécules. Ainsi, en influant sur les conditions de pression et de température, on parvient à adapter le pouvoir solvant des fluides supercritiques en fonction de l’opération envisagée. De plus, le pouvoir solvant dépend également de la nature chimique du soluté, caractérisée par la polarité, l’acidité, la volatilité et d’autres propriétés physico-chimiques. Dans le cas par exemple du CO2, en ajoutant un cosolvant polaire (acétone, méthanol, éthanol…), on parvient à modifier le pouvoir solvant du fluide supercritique et à améliorer la solubilité d’un soluté polaire (liquide ou solide) en phase supercritique. Cette technique est donc moins « propre » du fait que certains fluides supercritiques comme le CO2 perdent partiellement leur non-toxicité mais il s’avère que certains de ces co-solvants comme l’éthanol présentent une toxicité réduite.
Le CO2 supercritique
Le dioxyde de carbone est le fluide supercritique le plus couramment utilisé aussi bien à l’échelle industrielle qu’à l’échelle laboratoire. Son utilisation dans les procédés supercritiques est intéressante pour diverses raisons :
– Propriétés thermodynamiques : les coordonnées critiques sont facilement accessibles (Tc= 304,2 K ; Pc=7,38 MPa). Par ailleurs, le CO2 est à l’état gazeux dans les conditions ambiantes de pression et de température, permettant ainsi d’être récupéré et recyclé en fin de procédé.
– Hygiène et Sécurité : Le CO2 est non toxique et non cancérigène. D’autre part, il est non explosif, non inflammable et inodore. La valeur limite d’exposition (VLE) est de 3 % sur une durée de 15 minutes. Au-delà de cette valeur, l’exposition au gaz peut provoquer des troubles visuels, des tremblements, des sueurs (VLE=10 %), la perte de connaissance (VLE=15 %), des détresses respiratoires et cardiaques pouvant entraîner la mort (VLE=25 %).
– Economique : Le CO2 est un sous produit de la synthèse de l’ammoniac. Ce gaz étant produit en très grande quantité, il est ainsi peu onéreux : 0.15 €/kg pour une utilisation à l’échelle industrielle et 1 €/kg pour utilisation à l’échelle laboratoire. Le CO2 supercritique est apolaire, permettant ainsi de solubiliser des composés apolaires ou peu polaires et pouvant jouer le rôle de solvant, d’anti-solvant et même de soluté. Par ailleurs, voici quelques règles concernant la solubilité dans le CO2 supercritique [Nunes da Ponte, 2003]:
– la solubilité des molécules dans le CO2 supercritique est généralement basse,
– la solubilité dans le CO2 supercritique diminue lorsque la masse molaire du composé augmente,
– les chaînes carbonées aliphatiques sont plus solubles que les composés aromatiques,
– les doubles liaisons d’une molécule augmentent la solubilité dans le CO2 supercritique,
– les hydrocarbures comportant plusieurs ramifications, sont plus solubles que les chaînes linéaires,
– les groupements fonctionnels polaires diminuent la solubilité comme par exemple un groupement –COOH qui affectera plus la solubilité d’un composé dans le CO2 supercritique qu’un groupement –OH,
– les composés fluorés sont très solubles dans le CO2 supercritique, tout comme les groupements fluorés qui favorisent leur solubilité,
– les polymères ayant une faible cohésion intermoléculaire, comme par exemple les silicones, sont très solubles dans le CO2 supercritique.
Enfin, la tension de surface du CO2 est plus faible que celle des solvants organiques usuels, en revanche la diffusivité des solutés en milieu supercritique y est très favorisée de par la faible viscosité du CO2. Ainsi, le CO2 possède une forte capacité à circuler dans les milieux poreux.
Les corps gras
Historique Les corps gras sont consommés par l’homme depuis des siècles et leurs utilisations n’ont pas cessé d’évoluer. Jusqu’au 14ème siècle, les graisses animales, comme le suif, étaient largement utilisées comme corps gras. Le beurre se trouve ainsi délaissé du point de vue culinaire. Ce n’est qu’à partir du 15ème siècle que le beurre et l’huile sont réellement utilisés et appréciés, la cuisine dite « grasse » étant devenu synonyme de richesse. Peu à peu, ils sont ainsi considérés comme des aliments et contribuent à l’amélioration de la qualité des repas à cette époque. En 1866, Napoléon III organise un concours national très original pour la mise au point d’un corps gras « sain, économique et de bonne conservation » destiné à être utilisé par toutes les classes sociales notamment les plus pauvres où le beurre était un luxe mais également pour l’armée française qui éprouvait certaines difficultés à conserver le beurre en temps de guerre. En 1869, le français Hippolyte Mège-Mouriès est primé pour l’invention de la margarine et dépose le brevet du procédé de fabrication de celle-ci, qui sera racheté par la suite par un important négociant de beurre hollandais. Malgré des débuts modestes, la production de margarine ne cessera d’augmenter par rapport à la production du beurre à partir de 1970, le beurre étant jugé nocif à la cuisson, source de cholestérol et diététiquement mauvais. De plus, quelques oléagineux comme l’huile de ricin et l’huile de lin, ont vu leur utilisation devenir incontournable dans l’industrie de production des lubrifiants, des peintures et vernis. Il existe également quelques oléagineux pharmaceutiques et cosmétiques comme le ricin, le beurre de karité et de cacao qui sont utilisés comme excipient ou comme source de substance active.
Arrangements longitudinaux de chaînes grasses
D’une manière générale, les chaînes grasses comportent à leur extrémité une tête polaire leur conférant un caractère amphiphile. Il peut ainsi se produire des interactions moléculaires entre ces groupements polaires indépendamment de celles générées entre les chaînes hydrocarbonées évoquées précédemment. Par ailleurs, lorsque l’on différencie les têtes polaires et les autres têtes composées des groupes méthyl terminaux, on définit l’épaisseur des strates correspondant ainsi à une double longueur de chaîne. L’analyse par diffraction des rayons X permet de révéler ce type d’assemblage et de déterminer l’encombrement longitudinal de ces groupes terminaux. Enfin, elle permet également de pouvoir déterminer l’angle d’inclinaison car il s’avère que les chaînes grasses ne sont pas obligatoirement perpendiculaires aux plans de strates mais généralement inclinées comme c’est le cas pour les variétés cristallines de la première classe (cf. paragraphe 1.2.3.4).
Origine et description du cacao
Le beurre de cacao (BC) est une matière grasse obtenue à partir des fèves de cacao (les graines du cacaoyer). Le cacaoyer, Theobroma cacao L., est un arbre principalement cultivé dans toute la ceinture équatoriale et quelques régions tropicales car sa culture nécessite une pluviométrie abondante et bien répartie tout au long de l’année. Les principaux pays producteurs sont : la Côte d’Ivoire, le Brésil, le Ghana, la Malaisie, le Nigéria et le Cameroun. Ils représentent à eux seuls près de 80% de la production mondiale. Il existe principalement trois grandes variétés de cacaoyers (Figure 1.20.):
– les Caracas (ou Griollo) est une espèce peu cultivée dont la cabosse a une peau fine et facile à ouvrir. Les graines sont très grasses, donnant un cacao fin, chaud et long en bouche. Principalement produite au Mexique et au Venezuela, cette variété est destinée à une production de luxe.
– Les Forasteros est la variété qui domine le marché avec près de 80 % de la production mondiale. Originaire de la forêt amazonienne mais également produite en Afrique, ses cabosses sont jaunes avec des sillons peu profonds. Elles ont une peau lisse et fine mais difficile à ouvrir. Les graines sont de couleur violette voire même brune, donnant un goût amer et court en bouche du cacao.
– Les Trinitarios est une variété hybride entre le Caracas et le Forastero, principalement cultivée aux Antilles et qui donne au cacao un goût corsé et long en bouche.
L’arbre mesure généralement entre 4 et 8 mètres de hauteur et peut donner jusqu’à deux récoltes par an. La cabosse, qui représente le fruit et qui pousse directement sur le tronc, peut se comparer à un melon de forme plus ou moins ovale et régulière selon les variétés et d’une longueur moyenne de 20 cm. Les graines (ou fèves) sont réparties en cinq rangées dont le nombre varie entre 40 et 50 par fruit (Figure 1.21.). Celles-ci sont extraites après ouverture du péricarpe des cabosses cueillies à maturité et soumises à la fermentation. Cette étape est importante pour les qualités organoleptiques du chocolat mais n’influe en rien sur la matière grasse. On obtient ainsi une fève fermentée et séchée que l’on dénomme « cacao marchand », qui pèse environ 1 g dont 48 à 58 % de matière grasse concrète qui donnera le « beurre de cacao », de couleur jaune clair et dont l’odeur et les saveurs sont caractéristiques. Après décorticage et torréfaction, ce grain est soumis au broyage et donne ainsi la masse de cacao dont une fraction est utilisée en l’état pour la fabrication du chocolat. L’autre fraction est introduite dans des presses discontinues afin d’obtenir le beurre de cacao de pression et le tourteau destinés à la production des produits à base de cacao. D’une manière générale, le beurre de cacao est considéré comme une graisse vierge dont une partie est utilisée directement dans l’état après une simple filtration ; la plus grande partie subit juste une désodorisation dans des conditions douces et éventuellement précédée d’un dégommage visant à éliminer les acides gras libres, les protéines, les phospholipides et autres substances qui contribuent à l’instabilité du produit.
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Table des matières
INTRODUCTION GENERALE
CHAPITRE 1 – SYNTHESE BIBLIOGRAPHIQUE
INTRODUCTION
1.1 LES FLUIDES SUPERCRITIQUES
1.1.1 HISTORIQUE
1.1.2 DEFINITION
1.1.3 PROPRIETES PHYSICO-CHIMIQUES
1.1.3.1 Masse volumique
1.1.3.2 Viscosité
1.1.3.3 Diffusivité
1.1.3.4 Pouvoir solvant
1.1.3.4.1 Influence de la pression et de la température
1.1.3.4.2 Influence de l’ajout d’un cosolvant
1.1.4 LE CO2 SUPERCRITIQUE
1.1.5 EQUILIBRES DE PHASES
1.1.5.1 Les corps purs
1.1.5.2 Mélanges binaires
1.1.5.3 Modélisation des équilibres de phases : les équations d’état
1.1.5.3.1 Les équations cubiques dans le cas des corps purs
1.1.5.3.2 Les équations cubiques dans le cas des mélanges
1.1.6 APPLICATIONS
1.2 LES CORPS GRAS
1.2.1 HISTORIQUE
1.2.2 ORIGINE ET CLASSIFICATION DES CORPS GRAS
1.2.2.1 Les acides gras
1.2.2.2 Les glycérides
1.2.3 PROPRIETES GENERALES DES CHAINES HYDROCARBONEES
1.2.3.1 Polymorphisme et polytypisme
1.2.3.2 Transitions de phases
1.2.3.3 L’état solide de la chaîne aliphatique
1.2.3.4 Arrangements latéraux de chaînes grasses
1.2.3.5 Arrangements longitudinaux de chaînes grasses
1.2.3.6 Isostructuralité des chaînes grasses
1.2.3.7 Les états liquides et mésomorphes des lipides
1.2.4 LE BEURRE DE CACAO
1.2.4.1 Origine et description du cacao
1.2.4.2 Composition du beurre de cacao
1.2.4.3 Propriétés physico-chimiques du beurre de cacao
1.2.4.4 Polymorphisme du beurre de cacao
1.2.5 COMPORTEMENT DES CORPS GRAS EN MILIEU CO2 SUPERCRITIQUE
1.2.5.1 Solubilité des lipides dans le CO2 et du CO2 dans les lipides
1.2.5.2 La dépression du point de fusion
1.2.5.3 Autres propriétés
1.3 ETAT DE L’ART DES TECHNIQUES DE CARACTERISATION DE PROPRIETES THERMODYNAMIQUES ET PHYSIQUES SOUS PRESSION
1.3.1 METHODES DE MESURES D’EQUILIBRES DE PHASE
1.3.1.1 Méthodes synthétiques
1.3.1.2 Méthodes analytiques
1.3.1.3 Comparaisons et analyse critique des méthodes
1.3.2 METHODES DE MESURES DE PROPRIETES VOLUMETRIQUES
1.3.2.1 Méthodes directes
1.3.2.2 Méthodes indirectes
1.3.3 METHODES DE MESURES DE LA VISCOSITE
1.3.3.1 Rappels
1.3.3.2 Viscosimètres à tube capillaire
1.3.3.3 Viscosimètres à corps chutant
1.3.3.4 Viscosimètres à corps vibrants
1.3.3.5 Viscosimètres rotationnels
CONCLUSION
REFERENCES
CHAPITRE 2 – MISE AU POINT ET VALIDATION DES METHODES
INTRODUCTION
2.1 PRODUITS
2.2 DESCRIPTION ET MISE EN ŒUVRE DES TECHNIQUES DE CARACTERISATION
2.2.1 MESURE DE L’EXPANSION VOLUMIQUE
2.2.1.1 Principe
2.2.1.2 Description du dispositif et procédure expérimentale
2.2.1.3 Mise au point de la méthode
2.2.1.4 Résultats et discussions
2.2.2 MESURE DE SOLUBILITE
2.2.2.1 Description des techniques de mesure et procédures expérimentales
2.2.2.1.1 Méthode statique analytique « par échantillonnage »
2.2.2.1.2 Méthode statique analytique « in situ »
2.2.2.2 Résultats et discussions
2.2.3 MESURE DE LA MASSE VOLUMIQUE
2.2.3.1 Description du dispositif et procédure expérimentale
2.2.3.2 Mise au point de la méthode
2.2.3.3 Résultats et discussions
2.2.4 MESURE DE LA VISCOSITE
2.2.4.1 Principe
2.2.4.2 Description du dispositif expérimental
2.2.4.3 Procédure expérimentale
2.2.4.4 Méthode de mesure de la vitesse de chute de bille
2.2.4.5 Méthode de calcul de la viscosité
2.2.4.5.1 Modèle d’initialisation
2.2.4.5.2 Modèle CFD
2.2.4.6 Validation du dispositif expérimental à pression atmosphérique
2.2.4.7 Résultats et discussions
2.2.4.8 Limitations de la technique
CONCLUSION
REFERENCES
CHAPITRE 3 – CARACTERISATION DU MELANGE BEURRE DE CACAO-CO2
INTRODUCTION
3.1 PRODUITS
3.2 MESURES DE LA MASSE VOLUMIQUE ET DE LA SOLUBILITE DU CO2
3.2.1 DESCRIPTION DU DISPOSITIF ET PROCEDURE EXPERIMENTALE
3.2.2 RESULTATS ET DISCUSSIONS
3.2.2.1 Solubilité du CO2
3.2.2.1.1 Résultats expérimentaux
3.2.2.1.2 Modélisation
3.2.2.2 Masse volumique
3.2.2.2.1 Résultats expérimentaux
3.2.2.2.2 Modélisation
3.3 MESURES DE L’EXPANSION VOLUMIQUE
3.4 MESURES DE LA VISCOSITE
3.2.1 RESULTATS EXPERIMENTAUX
3.2.1 MODELISATION
CONCLUSION
REFERENCES
CHAPITRE 4 – CARACTERISATION DU MELANGE POLYETHYLENE 400-CO2
REMARQUE LIMINAIRE
INTRODUCTION
4.1 PRODUITS
4.2 MESURES D’EQUILIBRES DE PHASE ET DES PROPRIETES VOLUMETRIQUES
4.2.1 PRINCIPE
4.2.2 DESCRIPTION DU DISPOSITIF ET PROCEDURE EXPERIMENTALE
4.2.3 DETERMINATION DE L’EXPANSION VOLUMIQUE
4.2.4 DETERMINATION DE LA SOLUBILITE DU CO2
4.2.5 DETERMINATION DE LA MASSE VOLUMIQUE
4.2.6 RESULTATS ET DISCUSIONS
4.2 MESURES DE LA VISCOSITE
CONCLUSION
REFERENCES
CONCLUSION GENERALE ET PERSPECTIVES
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