Captage du CO2 par formation d’hydrates appliqué aux fumées de postcombustion

Le captage du CO2 en postcombustion

        Nous présentons dans cette partie un état de l’art des technologies de captage du CO2 en postcombustion dont l’industrialisation est la plus avancée. Le lavage aux amines sera abordé en premier, car il s’agit d’un procédé type quasiment mature et très répandu, notamment dans le domaine de traitement de gaz. Nous verrons que certains inconvénients majeurs pénalisent ce procédé, dit de 1ère génération, ce qui a incité au développement de procédés novateurs de 2ème et 3ème générations. Le captage de CO2 par formation d’hydrates fait partie des technologies nouvelles, ayant fait l’objet de plusieurs brevets et publications. Une description exhaustive de ce procédé sera donnée dans cette section. Sur la base de cette présentation et des besoins scientifiques et industriels identifiés, nous formulerons les objectifs que nous nous sommes fixés pour ce travail de thèse. Ces objectifs seront explicités à la fin de ce chapitre. Les technologies de captage de CO2 en postcombustion sont particulièrement adaptées aux sources grandes émettrices de CO2, telles que les centrales électriques, les cimenteries ou les raffineries. Les centrales électriques sont à elles seules responsables de plus de 40 % des émissions de CO2 chaque année, dans le monde (Agence Nationale de l’Énergie). Outre le coût d’investissement lié à la technologie elle-même, le procédé de captage est grand consommateur d’énergie. D’après Chakma et al., 1995, le rendement d’une centrale thermique équipée d’une technologie de captage peut diminuer jusqu’à 38 %. Le captage à lui seul, compte pour 75 % du coût total de la chaîne Captage Stockage du CO2 (CSC) (Feron et Hendriks, 2005). Une autre difficulté liée au procédé de captage en postcombustion réside dans le fait que les fumées de postcombustion sont diluées dans l’azote, leur composition en CO2 varie selon certains auteurs (Adeyemo et al., 2010, Linga et al., 2007) de 5 à 15 % mol. Les teneurs en O2 ne dépassent pas les 5 % mol. Une caractéristique des fumées de postcombustion, est qu’elles sont émises à des conditions de température et pression voisines de 70 °C et 0,1 MPa. Le captage en postcombustion demeure le mode de captage le plus industrialisé, présentant l’avantage de pouvoir être mis en place dans les installations existantes. Il peut donc être intégré à toute unité dans le cadre d’un revamping. Une technologie très bien maîtrisée consiste à extraire le CO2 des fumées de postcombustion par un solvant chimique. Ce solvant est une solution aqueuse d’amine, d’où l’appellation de « lavage aux amines » donnée à ce type de procédé.

Conditions d’équilibre thermodynamique : État de l’art

        La conception d’un procédé de captage de CO2 en postcombustion requiert une bonne connaissance des conditions de stabilité des hydrates de CO2/N2. A chaque composition de la charge, il existe une zone de stabilité où les hydrates de gaz se forment. C’est dans cette zone que nous devons nous situer dans le réacteur de formation. Pour une composition donnée de la charge, une courbe dite « courbe d’équilibre », délimite les domaines de formation et de dissociation des hydrates de gaz simples ou mixtes, comme le montre très schématiquement la figure 17. La construction de cette courbe se fait à partir des points P, T mesurés à l’équilibre thermodynamique, P étant la pression d’équilibre de formation d’hydrates à une température T donnée. Nous trouvons dans la littérature une large palette de techniques expérimentales adoptées pour la mesure des conditions d’équilibre. L’essentiel de ces méthodes sera exposé plus loin dans ce chapitre. A la sortie des grandes installations industrielles, les fumées de postcombustion sont essentiellement composées de CO2, N2 et O2 aux proportions suivantes (Kang et al., 2000), (Linga et al., 2007b) :
15-20 % mol pour le CO2 ;
5-9 % mol pour le dioxygène ;
70 – 80 % mol N2.
Si on se propose de rassembler les données d’équilibre thermodynamique relatives à la formation d’hydrates mixtes à partir de ces constituants on constate : L’absence de données d’équilibre pour des mélanges incluant le dioxygène. Les auteurs (Linga et al., 2007 a), ( Linga et al. 2007 b) et (Kang et al., 2000) se justifient par le fait que N2 et O2 forment des hydrates à des conditions voisines. L’intérêt particulier porté au mélange CO2(17 % mol)/N2. Cette composition a été qualifiée comme caractéristique des fumées de postcombustion Linga et al. (2007), Kang et Lee. (2000). Le manque de données pour des fumées dont la concentration en CO2 est inférieure à 16,9 % mol. Ces données d’équilibre représentées graphiquement sous la forme de P = f (T), permettent d’obtenir les courbes de dissociation (cf. figure 17). Nous allons présenter dans ce qui suit une revue exhaustive des données d’équilibre en présence d’hydrates des binaires CO2 / eau (cf. Tableau 4), N2 / eau (cf. Tableau 5), puis du ternaire CO2 / N2 / eau (cf. Tableau 6). Ces tableaux seront accompagnés des courbes de dissociation (Figure 18, Figure 19 et Figure 20). Celles-ci délimitent la présence des phases hydrate (H), aqueuse (LW pour la phase aqueuse liquide) et vapeur (V). Notons qu’une quatrième phase liquide non aqueuse peut aussi se former dans le cas du CO2 (LCO2). Les données en présence d’une phase aqueuse solide (formation de glace) ne font pas partie de cet inventaire.

Conditions opératoires, notion de force motrice

       Dans un procédé de captage de CO2 par formation d’hydrates, les conditions opératoires de la colonne de formation doivent obligatoirement se situer dans la zone de stabilité des hydrates. Linga et al. (2007) définissent la force motrice Fm, comme étant l’écart entre la pression opératoire du procédé et la pression d’équilibre (point de la courbe). Cet écart doit être positif pour la pression (Pop > Peq5), négatif pour la température. La formation d’hydrates ne se fera pas si la force motrice appliquée est faible. C’est ce qu’ont observé Linga et al. (2007) qui, en appliquant au système CO2 16,9 %mol/N2 une Fm de 1,3 MPa à une température T = 273,7 K, n’ont pas observé de nucléation pendant 2 jours. Par ailleurs, se placer à des pressions très élevées par rapport à la pression d’équilibre n’est pas non plus recommandé. En effet, la sélectivité du système sera affectée, comme l’explique le même auteur dans une étude où il teste l’efficacité de son procédé de séparation à 10 et 11 MPa. La pression d’équilibre du système étudié à 273,15 K est 7,7 MPa. Les résultats d’analyse de la phase hydrate sont résumés dans le tableau 7. Une baisse de rendement, en termes de concentration de CO2 dans la phase hydrate est constatée quand on passe d’une pression opératoire de 10 à 11 MPa. Ceci s’explique par le fait que les hydrates de N2 se forment à des niveaux de pression plus élevés que les hydrates de CO2. Ainsi, augmenter la pression opératoire conduit à enclathrer davantage de molécules de N2. Si en revanche on définit la force motrice à partir de la variable température, celle-ci doit être choisie de telle sorte que la température opératoire soit inférieure à la température d’équilibre. Cette variante est utilisée dans le procédé de Kang et al., (2001). Les auteurs, en opérant d’une manière isotherme, à 274, 277 et 280 K, constatent un meilleur rendement du procédé à la plus faible température (274 K). Descendre plus bas en température aurait exposé l’auteur au problème de formation de glace. Une conclusion quant à la sensibilité du procédé aux conditions opératoires peut être dressée à ce stade. Le rendement du procédé ainsi que sa consommation énergétique dépendent fortement des paramètres température et pression opératoires.

Mesure des conditions d’équilibre d’hydrates de CO2 / N2 en présence de TBAB

       Le TBAB représente un candidat intéressant en tant que composé promoteur dans un procédé de captage de CO2 en post combustion. En effet, ajouté à de faibles quantités, le TBAB permet de rendre plus douces les conditions de formation des hydrates de CO2 / N2. De part sa non toxicicité et s’agissant d’un sel, il présente l’avantage d’être non volatil. Le risque de perte de promoteur à l’étape de régénération, est donc négligeable. Les avantages que présentent les sels d’ammonium quaternaires (TBAX) en général, ont fait que les équipes travaillant sur la valorisation des hydrates en tant que moyen de séparation, s’intéressent de plus en plus à ce type de molécules. Nous trouvons en effet dans la littérature des travaux portant sur la mesure des conditions d’équilibre d’hydrates simples et mixtes en présence des molécules TBAB, TBAC ou TBAF (cf. chapitre 2). Certaines équipes se sont intéressées à la mesure de la sélectivité des hydrates en présence de promoteurs de type TBAX. La quantité de données d’équilibre d’hydrates de CO2 / N2 en présence de promoteurs de type TBAX, reste insuffisante pour paramétrer ou valider des modèles thermodynamiques. Nous nous sommes intéressés, dans le cadre de ce travail de recherche, à la mesure des conditions d’équilibres des hydrates relatifs aux systèmes suivants :
– CO2 / N2, 15 % mol CO2 en présence de 5 % massique de TBAB dans l’eau
– CO2 / N2, 15 % mol CO2 en présence de 9 % massique de TBAB dans l’eau
– CO2 / N2, 30 % mol CO2 en présence de 5 % massique de TBAB dans l’eau
Un exemple de tracé de suivi de température et pression en fonction du temps obtenu, est représenté en figure 52. Il correspond à la phase de formation d’hydrates de CO2 / N2 / TBAB aux proportions : 15 % mol CO2 et 9 % massique de TBAB dans la phase aqueuse. Nous observons un début de formation à une température de 275 K. La consommation de gaz durant l’étape de formation reste faible, la diminution de pression observée n’excède pas les 0,3 MPa. Cette faible consommation de gaz observée aussi bien en présence de THF que de TBAB, peut traduire un faible taux de conversion de l’eau en hydrate. Il y aurait auquel cas, une grande quantité d’eau libre n’ayant pas participé à la formation des hydrates, un système d’agitation inapproprié peut être à l’origine d’un tel phénomène.

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Table des matières

1 INTRODUCTION
2 CONTEXTE & OBJECTIFS
2.1 CONTEXTE
2.2 LE CAPTAGE DU CO2EN POSTCOMBUSTION
2.3 LE PROCÉDÉ AMINE
2.4 PROCÉDÉ DE CAPTAGE PAR FORMATION D’HYDRATES
2.4.1 PRINCIPE
2.4.2 LE PROCÉDÉ ENVISAGÉ
2.5 UNE NOUVELLE GÉNÉRATION DE PROCÉDÉS
2.6 OBJECTIFS
3 REVUE DES DONNÉES D’ÉQUILIBRE THERMODYNAMIQUE
3.1 GÉNÉRALITÉS
3.2 IMPACT INDUSTRIEL DES HYDRATES
3.3 CONDITIONS D’ÉQUILIBRE THERMODYNAMIQUE: ÉTAT DE L’ART
3.3.1 HYDRATES DE CO2
3.3.2 HYDRATES DE N2
3.3.3 HYDRATES MIXTES DE CO2 / N2
3.4 CONDITIONS OPÉRATOIRES, NOTION DE FORCE MOTRICE
3.5 LES PROMOTEURS D’HYDRATE : CAPTAGE PAR FORMATION D’HYDRATE À PRESSION MODÉRÉE
3.5.1 LE THF ET AUTRES ÉTHERS CYCLIQUES
3.5.2 LES PROMOTEURS DE TYPE SELS D’AMMONIUM QUATERNAIRES
3.6 LIMITATIONS LIÉES À L’AJOUT DES PROMOTEURS
3.6.1 BAISSE DE SÉLECTIVITÉ DU PROCÉDÉ
3.6.2 LIMITATION DUE À LA CONCENTRATION
3.6.3 LIMITATION CINÉTIQUE
3.6.4 LES ALCOOLS : PROMOTEURS DE SII, INHIBITEURS DE SI
3.7 MESURE DES CONDITIONS D’ÉQUILIBRE DES HYDRATES DE GAZ
3.7.1 MÉTHODE CELLULE
3.7.2 MÉTHODES CALORIMÉTRIQUES
3.8 QUANTIFICATION DE L’ENTHALPIE DE DISSOCIATION DES HYDRATES
3.8.1 PAR CALORIMÉTRIE
3.8.2 MÉTHODES DIRECTES DE MESURE D’ENTHALPIE
4 TRAVAIL EXPÉRIMENTAL
4.1 DESCRIPTION DES ÉQUIPEMENTS
4.1.1 LA CELLULE T314
4.1.2 CALORIMÈTRE BT-215
4.1.3 LA CELLULE HYDRATE DE BOUE (HDB), CF. FIGURE 45
4.1.4 MICRO DSC VII
4.2 MÉTHODES EXPÉRIMENTALES
4.3 MESURE DES CONDITIONS D’ÉQUILIBRE D’HYDRATES DE CO2 / N2 EN PRÉSENCE DE TBAB 
4.4 MESURE DES CONDITIONS D’ÉQUILIBRE D’HYDRATES DE CO2 / N2 EN PRÉSENCE DE TBAF 
4.5 CALORIMÉTRIE
4.5.1 VALIDATION CORPS PURS
4.5.2 VALIDATION SUR LE BINAIRE EAU – THF
4.6 APPLICATION DE LA CALORIMÉTRIE DANS LA MESURES DES CONDITIONS D’ÉQUILIBRES DES HYDRATES
5 MODÉLISATION
5.1 MODÉLISATION DES PHASES FLUIDES
5.1.1 APPROCHE CLASSIQUE
5.1.2 CUBIC PLUS ASSOCIATION CPA : PRISE EN COMPTE DE L’ASSOCIATION
5.2 MODÉLISATION DE LA PHASE HYDRATE
5.2.1 CALCUL DE LA CONSTANTE DE LANGMUIR
5.2.2 POTENTIEL THERMODYNAMIQUE ET FUGACITÉ DE L’EAU DANS L’HYDRATE VIDE
5.3 PARAMÉTRAGE DU MODÈLE CPA
5.3.1 SOLUBILITÉ DES GAZ DANS L’EAU
5.3.2 SOLUBILITÉ DES GAZ DANS LE THF
5.3.3 LE BINAIRE EAU – THF : PRISE EN COMPTE DE L’ASSOCIATION CROISÉE
5.3.4 ÉVALUATION SUR DES TERNAIRES
5.4 PARAMÉTRAGE DU MODÈLE HYDRATE ET CALCUL DES COURBES D’ÉQUILIBRE « HYDRATE – LIQUIDE – VAPEUR » D’HYDRATES SIMPLES
5.4.1 PARAMÉTRAGE DU CO2
5.4.2 PARAMÉTRAGE DU N2
5.4.3 PARAMÉTRAGE DU CH4
5.5 CALCUL D’ÉQUILIBRES D’HYDRATES MIXTES DE CO2/N2
5.5.1 CALCUL DES DONNÉES DE FAN ET AL. (1999)
5.5.2 CONFRONTATION DU MODÈLE AVEC LES DONNÉES DE V. BELANDRIA
5.5.3 CONFRONTATION DU MODÈLE AVEC LES DONNÉES DE KANG ET AL.(2001)
5.6 CALCUL D’ÉQUILIBRES D’HYDRATES MIXTES DE CO2/CH4
5.7 CALCUL D’ÉQUILIBRES D’HYDRATES MIXTES DE CO2/N2ET DE CH4 EN PRÉSENCE DE PROMOTEUR
5.7.1 PARAMÉTRAGE DU THF
5.7.2 CALCULS DES COURBES D’ÉQUILIBRES D’HYDRATES DE CO2/N2/THF
5.7.3 CALCULS DES COURBES D’ÉQUILIBRES D’HYDRATES DE CH4/THF
6 CONCLUSIONS & PERSPECTIVES
RÉFÉRENCES BIBLIOGRAPHIQUES

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