Capacité de résilience de la forêt de transition et de la forêt humide

A une échelle régionale, des changements climatiques ont déjà été observés dans de nombreuses parties du globe et ont déjà eu une influence sur un large éventail de systèmes physiques et biologiques (GIEC, 2001). Les changements des précipitations ne sont pas uniformes, une humidification des régions tropicales et subtropicales et une diminution des précipitations en Afrique Australe ont été constatées (Tadross et al., 2008). Cela aura un impact sur les cycles des saisons (Bauza et Leger, 2010) et provoque des bouleversements sur le monde vivant : régression de certaines populations végétales et animales ou précocité de la floraison des arbres (GIEC, 2001).

A Madagascar, au cours des 100 dernières années, le niveau des précipitations a connu une grande variabilité. Le niveau de réchauffement de la partie Sud est plus important que celui du Nord. En l‟an 2000, la température moyenne de cette région a augmenté approximativement de 0,2°C par rapport aux observations de 1950 (Tadross et al., 2008). La tendance de la précipitation à partir des années 1980 dans le Sud est à la baisse (WWF, 2010). Pourtant, Madagascar est un des pays tropicaux et insulaires de l’hémisphère Sud où la diversité biologique est particulièrement importante. La diversité spécifique y est représentée par différentes adaptations évolutives et écologiques des espèces (animales et végétales) aux particularités de l’environnement. Les forêts sèches, les forêts de transition et les forêts humides de la partie Sud de la Région Anosy sont des écosystèmes recelant autant de diversités surtout sur les formes d‟adaptation aux conditions stationnelles comme l‟altitude ou la précipitation. A l‟instar du Parc National d’Andohahela ces forêts jouent un rôle très important dans la vie économique de la région de Fort Dauphin et d’Amboasary Sud grâce à l‟importance de son réseau hydrographique. En effet, plusieurs rivières y prennent naissance dont la plupart sont permanentes. Plusieurs zones de culture en dépendent. Même l’alimentation en eau de la population d’Ambovombe dépend de la rivière de Mandrare qui sort du parc.

Ainsi, les bouleversements subis par ces différents types de forêts à cause du changement climatique surtout au niveau du paramètre précipitation constituent des enjeux écologiques et économiques importants. A cet effet, cette étude contribuera à la mise en lumière du niveau d‟adaptation de ces forêts face aux variabilités de la précipitation. Ces variabilités se manifestent à deux échelles différentes : à l‟échelle interannuelle et à l‟échelle intraannuelle.

Problématique et Hypothèses

Problématique

La végétation est un des éléments naturels très sensibles aux changements environnementaux mais qui, réciproquement via le cycle de l‟eau et le bilan radiatif, peut aussi influencer ces changements (IoanaToroimac et al., 2006). Les précipitations et la température sont les principaux facteurs déterminants du climat de la planète. Elles déterminent la distribution possible de la végétation terrestre et constituent les facteurs premiers de la genèse et de l‟évolution des sols. Ressource indispensable à la croissance des plantes, l’eau est un élément constitutif majeur de la matière végétale, mais aussi une source d’hydrogène et d’oxygène pour la photosynthèse notamment lors de l‟hydrolyse. Si la quantité d’eau disponible dans le sol est limitée, la plante souffrira de stress hydrique. Elle réduira alors son activité photosynthétique et biologique et sa consommation en eau (Gaume, 2000). Ainsi, il existe une étroite corrélation entre les précipitations et la biomasse (OMM, 2005).

De même que le climat répartit le type de végétation dans le monde, ses changements peuvent également avoir des impacts sur le comportement de celle-ci. Le facteur hydroclimatique est responsable des principales variations dans la constitution des paysages (organisation, constituants, relations, diversité, etc.), aux échelles saisonnières et interannuelles. Les précipitations expliquent notamment la majeure partie de la variance de la phénologie régionale (Bigot, 1997). En Afrique tropicale, la variabilité de la phénologie végétale est très souvent mise en relation avec les éléments du cycle de l‟eau (Prince et al., 1998 ; Tucker et al., 2005 ; Diallo et al., 2005).

Sur une grande superficie de forêts, l‟analyse des états de la végétation (phénologie et biomasse) peut être effectuée par les observations par satellite et les outils de télédétection. L‟analyse des séries chronologiques de données issues de la télédétection et les calculs d’indice s’avèrent être de puissantes techniques autorisant la surveillance des changements des états des forêts et de leur modélisation (modélisation de l’évolution des proportions d’état de surface élémentaires détectées au cours du temps) (OSS, 2005). Le calcul de ces indices part du principe sur les capacités des chlorophylles, la substance qui produit la couleur verte de la majorité des plantes, à agir face aux rayonnements de longueur d‟onde situés entre 0,5 et 0,7 µm. Dans la partie du spectre électromagnétique située entre 0,5 et 0,7 µm, la végétation verte absorbe fortement le rayonnement, alors qu‟entre 0,7 et 1,1 µm, les épidermes foliaires ont l‟effet inverse de réflexion (Tucker et Sellers, 1986). La végétation en santé contient une grande quantité de chlorophylle. Les plantes reflètent très peu le rayonnement rouge (0,6 à 0,7 μm) et bleu (0,4 à 0,500 μm) car la chlorophylle les absorbe, cependant elles réfléchissent beaucoup le vert (0,500 à 0,6 μm) et l’infrarouge (s’étend approximativement de 0,7 à 15 μm (Bonn et Rochon, 1993)). La réduction en chlorophylle réduit la quantité de rayonnement vert réfléchi, tandis que les changements de la structure interne des plantes réduisent la quantité de rayonnement proche infrarouge (PIR (0,73-1,10µm)) réfléchi. Ces réductions permettent donc une détection rapide du stress au niveau de la végétation. L’analyse de la proportion d’infrarouge réfléchi par rapport au rouge donne une excellente mesure de la santé de celle-ci. Ce rapport sert de principe de base pour certains indices de végétation : PVI (Perpendicular Vegetation Index), SAVI (Soil-Adjusted Vegetation Index), NCPI (Normalised Pigment Chlorophyll Ration Index), CCPI (Canopy Chlorophyll Ration Index), VI (Vegetation Index) ou le NDVI (Normalized Difference Vegetation Index). Le plus utilisé est l‟indice de végétation normalisé ou NDVI (Lafrance et al., 1990).

Mis au point par Rouse et al. en 1973, l’indice de végétation NDVI est très utilisé car il est facile à mettre en œuvre et fonctionne dans la majorité des cas. Le NDVI donne des informations sur l’état du couvert végétal ainsi que sur la biomasse. Le stade phénologique et la santé des plantes sont les facteurs majeurs qui influencent la valeur du NDVI. Des plantes en santé possèdent une valeur NDVI élevée, car elles réfléchissent beaucoup de lumière infrarouge et ne réfléchissent presque pas de lumière rouge. Une diminution du NDVI correspond à une activité photosynthétique réduite et une biomasse verte faible. En revanche, une végétation dense se caractérise par un NDVI fort (Pouchin et al., 2002) traduisant une activité chlorophyllienne développée.

A Madagascar, ces caractéristiques du NDVI ont été exploitées par Jacquin en 2010 en étudiant la dynamique de végétation dans les savanes en lien avec l‟usage des feux dans la région de Marovoay. Ces résultats ont été évalués par comparaison avec ceux issus de techniques de détection des changements basées sur l‟analyse diachronique d‟images à haute résolution spatiale. Deux approches de détection des changements, basées sur le traitement de série temporelle de NDVI, ont été testées. La première repose sur l‟analyse des variations inter annuelles d‟un indicateur phénologique traduisant l‟activité végétale pendant la phase de croissance des savanes. La deuxième utilise une technique de décomposition temporelle pour extraire la tendance d‟une série de NDVI.

En revanche, dans le contexte de changement climatique et ses impacts sur la végétation, une autre analyse de séries de NDVI sur 18 ans depuis 1982 à 1999 mensuellement via les images satellites National Oceanographic and Atmospheric Administration’s (NOAA), Advanced Very High Resolution Radiometer (AVHRR) sur l‟ensemble des forêts malgaches a été effectuée par Ingram et Terence en 2004. Sur une échèlle interannuelle et saisonnière, ils ont discerné une dynamique des végétations sur toute l‟île. Ces deux scientifiques ont trouvé une corrélation forte entre le phénomène ENSO (El Ni˜no Souther Oscillation), un phénomène climatique qui se produit dans l‟océan Indien et qui peut être attribué à des phénomènes de sècheresse, et les valeurs de NDVI.

Quant à la présente étude, elle essaie de mettre en évidence la tendance temporelle et spatiale des états de végétation dans la partie Sud de la région Anosy en utilisant des valeurs NDVI obtenues à partir des traitements d‟images Landsat. Pour mieux expliquer la liaison de cette tendance avec les variabilités climatiques, la corrélation entre NDVI et la précipitation est étudiée. Le choix de cette zone d‟étude est dû à la diversité de la végétation et du climat. En effet, cette zone présente des contrastes d‟origines naturelles du paysage forestier, une forêt dense humide sempervirente est rencontrée à l‟Est tandis qu‟à l‟Ouest une forêt sèche constitue l‟écosystème. Entre les deux types de forêts existent une forêt de transition ayant à la fois les caractéristiques des forêts sèches ainsi que celles des forêts humides. Les précipitations y sont également variées dues principalement aux chaines Anosyennes. Enfin, par rapport à la population de la région, ces écosystèmes jouent un rôle important dans l‟approvisionnement en eau des Communes alentours.

Géologie et géomorphologie

L‟Anosy (Taolagnaro) est formé de roches granitiques avec des sols ferralitiques. Le granite migmatite et migmatite granitoïde sont les plus rencontrés. Le soubassement cristallin est constitué par des roches plus tendres (schistes, paragneiss recouverts par des épandages de matériaux sableux).

Les différentes sortes de formations rocheuses rencontrées dans cette partie de l‟île sont :
• Roches volcaniques (bassin du Mandrare) ;
• Des dérivées de roches : Sables le long du littoral Androyen, alluvions le long des fleuves Mandrare et Menarandra, concrétions et cuirasses, dans les massifs de l‟Ivakoana et les chaînes anosyennes.

Quant aux reliefs, ils peuvent être assimilés au profil transversal de Madagascar qui est marqué par une forte dissymétrie entre les versants Est et Ouest. Les massifs montagneux qui divisent longitudinalement la grande île en deux versants (Est et Ouest) se terminent par les chaînes Anosyennes à Taolagnaro, et par le massif de l‟Ivakoana, au niveau de Tsivory. A l‟Est, l‟altitude s‟élève rapidement et les régions centrales se caractérisent par une falaise escarpée. De ce fait, les plaines côtières sont très étroites. Vers l‟Ouest par contre, le relief s‟abaisse de façon beaucoup plus progressive vers des régions basses infiniment plus étendues. Cette opposition entre les régions orientales et centrales d‟une part, occidentales d‟autre part est la conséquence directe de la structure tectonique et géologique de Madagascar (Koechlin et al., 1997).

Climat

D‟une façon générale, l‟Est fait partie de la région climatique orientale de Madagascar qui est chaude et humide. Par contre l‟Ouest subit un climat chaud et aride. Pour les zones de Taolagnaro et d‟Amboasary, les variations de pluviosité et de températures sur les versants, en face et opposés au vent, des chaînes Anosyennes sont expliquées par l‟effet de fœhn dû à ces chaînes. En escaladant un versant, les vents se déchargent de la quasi-totalité de leur humidité et provoquent des précipitations abondantes sur ces versants sous le vent appelés «adrets». Les effets de la continentalité jouent également un rôle non négligeable dans la répartition des régions thermiques à travers la diminution de l‟influence régulatrice et modératrice des vents humides au fur et à mesure que l‟on se déplace à l‟intérieur du continent.

Répartition spatiale du climat
Une diminution rapide des précipitations de l‟Est vers l‟Ouest est remarquée, avec 1 527 mm de pluie annuelle à Taolagnaro contre moins de 547 mm à Behara situé à l‟Ouest (Hervieu, 1960). La distance séparant les pentes Est des montagnes anosyennes aux cotes sont relativement courte. Ces montagnes bloquent le mouvement des nuages porteurs de pluies venant de l‟Est (Paulian et al., 1973). Le coté Ouest reçoit beaucoup moins de précipitations. À 60km à vol d‟oiseau à partir des cotes, il existe une transition (Donque, 1972). La modification des précipitations est beaucoup plus abrupte que celle décrite par Donque, mais faute de stations pluviométriques dans cette aire de transition, il est impossible d‟être plus précis (Paulian et al., 1973. Donque, 1975; Goodman et al., 1997).

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Table des matières

Introduction
I. Problématique et Hypothèses
I.1 Problématique
I.2 Hypothèses
I.3 Objectifs
II. Matériels et Méthodes
II.1 Dispositif du milieu d‟étude
II.1.1 Géologie et géomorphologie
II.1.2 Climat
II.1.2.1 Répartition spatiale du climat
II.1.2.2 Répartition temporelle du climat
II.1.2.3 Changements observés ces dernières années
II.1.3 Types de sols dans la région
II.1.4 Ecosystèmes et biodiversité spécifiques
II.1.4.1 Forêts denses humides
II.1.4.2 Forêts sèches
II.1.4.3 Forêts de transition
II.2 Données météorologiques et géographiques de base
II.2.1 Rappels des objectifs de l‟étude
II.2.2 Données météorologiques
II.2.3 Images LANDSAT
II.2.4 Cartes topographiques
II.3 Méthodes
II.3.1 Prétraitements des images satellites
II.3.1.1 Corrections radiométriques
II.3.1.2 Correction atmosphérique
II.3.1.3 Correction géométrique
II.3.2 Cartographie des occupations du sol
II.3.3 Théories et utilisations pratiques des indices de végétation
II.3.3.1 Comportements spectraux des cibles
II.3.3.2 Formule et interprétations de NDVI
II.3.4 Cartographie de l‟évolution des valeurs du NDVI
II.3.4.1 Création d‟une matrice d‟échantillonnage des images NDVI
II.3.4.2 Validation de la classification
II.3.5 Analyse des corrélations entre la pluviométrie et les valeurs NDVI
II.3.6 Etablissement d‟un modèle théorique de valeurs de NDVI
II.3.7 Cadre opératoire
III. Résultats et Interprétations
III.1 Cartographie des types de forêts en 2009
III.2 Valeurs moyennes de NDVI et états des forêts
III.3 Formation des images NDVI, extraction des valeurs et vérification de la classification
III.4 Influence de la précipitation sur les forêts
III.5 Evolution spatiale et temporelle des valeurs de NDVI
III.6 Capacité de résilience de la forêt de transition et de la forêt humide
III.6.1 Etablissement du modèle théorique
III.6.2 Tendance de l‟état de la végétation
IV. Discussions et recommandations
IV.1 Discussions
IV.1.1 Sur les méthodes
IV.1.2 Sur les résultats
IV.1.3 Sur les hypothèses
IV.2 Recommandations
IV.2.1 Améliorer la qualité des données météorologiques
IV.2.2 Renforcer les mesures d‟adaptations face aux changements climatiques
IV.2.3 Renforcer les mesures d‟anticipation de lutte contre la sècheresse et la désertification
Conclusion

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