CANCER DU SEIN
Introduction
Cancer : « Maladie provoquée par la transformation de cellules qui deviennent anormales et prolifèrent de façon excessive. Ces cellules finissent par former une masse que l’on appelle tumeur maligne. Les cellules cancéreuses ont tendance à envahir les tissus voisins et à se détacher de la tumeur.
Elles migrent alors par les vaisseaux sanguins et les vaisseaux lymphatiques pour aller former une autre tumeur (métastases) » (1) Avec plus de 50 000 nouveaux cas par an en France, les cancers du sein sont les premiers cancers féminins. (2) En effet, une femme sur huit en développera un au cours de sa vie.
Néanmoins, grâce au dépistage précoce et à l’amélioration des thérapeutiques, le taux global de survie relative à 5 ans post-diagnostic atteint près de 87% et 76% à 10 ans. (3) En effet on observe une diminution moyenne du taux de mortalité de près de 1,5% entre 2005 et 2012.
La caractérisation des tumeurs et le développement de thérapies ciblées permettent aujourd’hui une meilleure prise en charge tout en limitant les effets indésirables liés aux traitements du cancer. Le traitement de base du cancer est la chirurgie avec ablation de la tumeur avant qu’il n’y ait invasion des tissus voisins.
Cela est possible lorsque le diagnostic est précoce et que le cancer est à un stade localisé. Cette intervention est souvent associée à une radiothérapie afin de supprimer toute trace de cellules cancéreuses et donc la potentielle progression du cancer.
Dans le cas de cancers plus avancés, une chimiothérapie néo-adjuvante sera proposée afin de diminuer le volume de la tumeur. A la suite de l’opération, une chimiothérapie adjuvante pourra être administrée afin de prévenir des récidives avant d’être relayée par une hormonothérapie.
Si ce risque de récidive est faible, l’hormonothérapie pourra être utilisée seule. Tous les éléments de prises en charges seront déterminés à l’hôpital lors d’une réunion de concertation pluridisciplinaire et dépendront des différents facteurs de pronostic de la maladie. Parmi ces facteurs, les principaux pris en compte sont l’âge de la patiente, la taille de la tumeur, le statut ganglionnaire ainsi que le statut des différents récepteurs hormonaux (oestrogènes et progestérone) et du récepteur HER2 (Human epidermal growth factor Receptor 2).
Tous ces points sont essentiels pour cibler et optimiser le traitement afin d’assurer la guérison. A ces facteurs généraux s’ajoutent d’autres facteurs moléculaires. Leur séquençage permet d’identifier les gènes impliqués dans la prolifération tumorale, d’évaluer les risques de récidives et l’agressivité du cancer et ainsi permet d’instaurer un traitement personnalisé pour chaque patiente.
Cancer du sein et mastectomie
Le sein et le développement de cellules tumorales
Anatomie du sein
Comme le montre la Figure 1, le sein est composé de la glande mammaire. Cette glande est composée de lobules. Chaque lobule est constitué d’acini.
Ces acini sont bordés par les cellules luminales en charge de la fabrication du lait lors de la lactation. Par la suite, les canaux transportent le lait vers le mamelon. Cette glande est entourée de graisse et de tissus de soutien comprenant de nombreux vaisseaux sanguins et lymphatiques.
Elle est drainée par les ganglions de la chaine mammaire interne, les ganglions sous et susclaviculaire ainsi ceux du creux axillaire (les principaux). A partir de la puberté, le sein se développe et évolue selon les taux d’oestrogènes et de progestérones produits par les ovaires mais également selon l’influence de facteurs de croissance et de différenciation. Tous ces éléments rendent le sein sujet aux processus de cancérisation. (6,8) Image (9)
Processus de cancérogenèse
Le cancer est une maladie génétique auto-adaptative. Génétique car elle résulte de modifications génomiques (mutation, translocation, amplification) causées par un carcinogène. Les cellules cancéreuses deviennent pérennes et prolifèrent de façon anarchique. Auto-adaptative car elle régule l’angiogenèse afin de privilégier la survie des cellules cancéreuses.
Facteurs pronostics
Les facteurs pronostics permettent d’apprécier l’évolution de la maladie. Le traitement de la patiente se basera fortement sur ces facteurs.
Parmi ces facteurs, on retrouve l’expression des récepteurs hormonaux. Les récepteurs à l’oestrogène sont exprimés dans 85% des cancers du sein et ceux à la progestérone dans 67%. Ces cancers seront donc sensibles à l’hormonothérapie. 15% des cancers du sein sont dits « triples négatifs » (c’est à dire non liés à l’expression des récepteurs oestro progestatifs ni à la surexpression des récepteurs HER2) et ne seront donc pas sensibles à ces thérapies.
HER2 est un récepteur transmembranaire des facteurs de croissances. Cette protéine est surexprimée dans 10 à 15% des cancers des seins et favorise la prolifération des cellules tumorales. Les cancers HER2 positifs sont de plus mauvais pronostic mais les thérapies ciblées anti-HER2 ont été développées et se montrent très efficaces. Ainsi, tout cancer HER2 positifs doivent bénéficier d’un traitement adjuvant par trastuzumab.
Certaines tumeurs n’exprimant aucun de ces récepteurs sont dites « triples négatives » et sont souvent de mauvais pronostic car plus difficiles à prendre en charge.
L’enzalutamide ou l’acétate d’abiratérone ainsi que de nombreuses associations thérapeutiques entre les inhibiteurs PI3K/AKT/mTOR ou encore CDK sont testés et permettraient une alternative pour traiter ce type de tumeur.
La mastectomie
Aujourd’hui les techniques chirurgicales en France se veulent de plus en plus conservatrices, il s’agit de tumorectomies. Néanmoins une mastectomie totale (Figure 3 (9)) peut être nécessaire pour certains cas (tumeur trop volumineuse, infection multi tumorale du sein, mutation BRCA1 et 2, récidive). (10,18) Cela consiste à retirer l’intégralité du sein malade, le mamelon, l’aréole, ainsi que le fascia pectoral.
Cette intervention est plus ou moins accompagnée d’un curage axillaire afin de diminuer le risque de propagation et de récidive de la maladie, il s’agira alors d’une mastectomie radicale modifiée.
Afin de limiter les complications de lymphoedèmes (Cf page 56) et les curages axillaires inutiles, la technique « des ganglions sentinelles » est fréquemment utilisée. Elle consiste à analyser le(s) premier(s) ganglion(s) de l’aisselle drainant le sein. La chaine ganglionnaire sera retirée dans un second temps uniquement si ce(s) dernier(s) est/sont atteint(s). On notera que tous les ganglions de l’aisselle ne sont pas retirés. En effet cela n’augmenterait pas les chances de survie et entrainerait des effets secondaires trop importants (lymphoedème). (3,9,19) L’exérèse des tissus malades est essentielle à la guérison mais n’est pas anodine. Toutes ses conséquences seront développées par la suite.
Le recours à une reconstruction qu’elle soit immédiate ou différée doit être évoquée avant l’intervention. Elle sera d’autant plus adoptée que la femme est jeune ou que la mastectomie est perçue comme négative pour l’image corporelle. Elle permet aux femmes de se sentir plus à l’aise dans leur corps, d’avoir un plus ample choix au niveau vestimentaire mais surtout d’oublier ce qui représente leur maladie. Une reconstruction immédiate se réalise à la suite de la mastectomie, lors de la même intervention, le chirurgien aura alors les compétences nécessaires en chirurgie plastie. Cela n’est possible que pour les cancers in situ. En effet lorsqu’une radiothérapie et/ou une chimiothérapie sont prévues, une chirurgie différée est privilégiée et sera réalisée à la fin du traitement ou tout simplement quand la patiente se sentira prête.
La chimiothérapie
Une chimiothérapie adjuvante a pour but de limiter les récidives en détruisant les éventuelles cellules cancéreuses subsistantes ou à localisation « périphérique », c’est à dire hors de la région mammaire. L’association des molécules cytotoxiques est étudiée pour obtenir l’effet le plus efficace en combinant des mécanismes d’action complémentaires afin de limiter les résistances tout en modérant les effets secondaires. La majorité des protocoles sont réservés à l’hôpital mais certaines molécules sont désormais disponibles à l’officine (exemple : la capécitabine et le cyclophosphamide). (24) La chimiothérapie est débutée environ 3 à 6 semaines après la mammectomie.
Les schémas « classiques » se composent de 6 à 8 cures de taxanes (paclitaxel et docétaxel), et d’anthracyclines (Épirubicine, doxorubicine) en séquentiel pour limiter la toxicité.
Elles sont espacées de 21 jours. Si le cancer est HER2 positif, le trastuzumab pourra être indiqué dès l’instauration du taxane pour 18 cures espacées de 21 jours. (27) Cela est réalisé avant la radiothérapie qui débutera dans les 5 semaines suivant la fin de la chimiothérapie. (16,17) D’autres protocoles peuvent être proposés :
– Docétaxel, adriamycine, cyclophosphamide (TAC) pour une cure de 6 cycles
– Adriamycine, cyclophosphamide pour 4 cycles puis paclitaxel en une injection hebdomadaire sur 12 semaines.
– Docétaxel, cyclophosphamide pour une cure de 4 cycles (4TC), ce protocole peut être utilisé en cas de contre-indication aux anthracyclines.
La mise en place d’un dispositif veineux implantable peut être nécessaire pendant les cures afin de faciliter l’administration des produits et préserver le capital veineux de la patiente. Il sera inséré au-dessus de la clavicule opposée au sein opéré en sous-cutané. Le retrait de la chambre se fait à la fin du traitement ou quelques mois plus tard. Le risque infectieux et thrombo-embolique n’est pas à négliger, un entretien correct de ce dispositif par les infirmiers est primordial. (18)
Les anthracyclines
(doxorubicine, epirubicine) et les anthracyclines liposomale (doxorubicine) présentent une double activité. Elles inhibent l’activité des topoisomérases II, et s’intercalent dans les brins d’ADN pour favoriser une position despiralée de l’ADN. Ces topoisomérases sont essentielles dans la réplication de l’ADN. Elles permettent le désenroulement de l’ADN et le ré-enroulement de l’ADN néoformé en créant une coupure nécessaire à la rotation et en refermant cette dernière pour restituer l’intégrité de l’ADN. Leur inhibition empêche de déspiraler la configuration de l’ADN et provoque donc un arrêt de la réplication ce qui mène à la mort de la cellule. (30) Les antracyclines sont indiquées comme traitement adjuvant ou néoadjuvant dans les carcinomes du sein en première ligne.
La thérapie ciblée : Les inhibiteurs de HER2
Dans les cancers où une surexpression de HER2 est identifiée, une thérapie ciblée par trastuzumab est indiquée comme traitement adjuvant en association avec la chimiothérapie. Il sera poursuivi environ 1 an après la fin de la chimiothérapie (Figure 7) (16). Il permet de diminuer de 40% le risque de rechute et de 20% celui de mort spécifique.
(9) Deux schémas d’administration existent, un hebdomadaire, l’autre sur 21 jours.
Aujourd’hui des études conduisent à administrer ce médicament le plus précocement possible, dès l’instauration du taxane afin d’obtenir une meilleure efficacité. (16) Il est également administré en association dans les thérapies néo-adjuvantes mais en aucun cas il ne doit se substituer à une chimiothérapie. (27)
L’hormonothérapie
Suite aux différents traitements, les patientes atteintes de cancers hormonaux dépendants devront suivre une hormonothérapie pendant 5 ans afin de prévenir tous risques de récidives de ce type de cancer. L’hormonothérapie est un traitement « antihormones » et a pour objectif d’inhiber le signal de prolifération cellulaire induit par les hormones sexuelles endogènes (oestrogènes et progestérone).
Dans les cancers du sein, les oestrogènes sont les principaux responsables. La prise en charge sera différente en fonction du statut gynécologique de la patiente. En effet, avant la ménopause, la synthèse endogène de ces hormones se fait par deux voies distinctes :
– La synthèse primordiale se fait par les ovaires qui les sécrètent directement. Cette production est stimulée et régulée par le rétrocontrôle exercé sur l’axe hypothalamo-hypophysaire. (Figure 9)
– Les glandes surrénales transforment les androgènes en oestrogènes grâce à une enzyme, l’aromatase.
Les conséquences de l’opération
Bien qu’indispensable, la chirurgie n’est pas sans conséquence. Trois points principaux sont à prendre en compte et à surveiller pour limiter l’éventuelle survenue d’effets indésirables : la cicatrisation, le curage ganglionnaire s’il existe et ses complications éventuelles (raideurs de l’épaule et lymphoedème) et la douleur.
Suite à la perte d’un sein, les douleurs physiques et psychologiques doivent aussi être prises en considération car elles peuvent altérer la vie de la patiente de façon importante. Comme pour toute intervention chirurgicale, les risques d’accident thrombo-embolique, d’infection, ou d’hématome sont également retrouvés et ne sont pas à négliger.
Une prise en charge pluridisciplinaire avec les médecins, infirmiers et kinésithérapeutes est essentielle pour aider le patient à surmonter cette épreuve et en limiter les séquelles. Le pharmacien a un rôle d’accompagnement, d’écoute et d’orientation.
Les cicatrices
La peau a un rôle de barrière et de protection vis à vis des attaques extérieures (virus, bactéries, allergènes, soleil etc), de thermorégulation et transmet également toutes les informations sensitives. Outre son aspect technique, la peau porte une grande place dans la dimension psychique de l’individu, dans son intégrité, sa jeunesse, elle reflète les étapes de notre vie, l’âge, les épreuves. Tous ces changements ne sont pas toujours acceptés par la personne et peuvent avoir des répercussions négatives sur le moral.
Suite à une mastectomie, une bonne cicatrisation est nécessaire pour conserver l’intégrité du corps afin qu’il garde son rôle de défense mais elle doit également être le plus esthétique possible pour limiter l’impact psychique d’une telle intervention.
Lors de la chirurgie, les incisions et les sutures seront réalisées avec soin afin de restreindre au maximum les complications et espérer un résultat esthétique optimal. Il faudra limiter les tensions, affronter correctement les berges de la plaie en évitant le décalage et si possible dans le même plan anatomique pour un résultat le plus discret possible.
Sur la peau, les points seront réalisés à l’aide d’un fil non résorbable. Ces points seront enlevés une dizaine de jours après par un infirmier ou un médecin. Les points plus profonds seront réalisés avec un fil résorbable.
Physiologie de la peau
La peau est constituée de 3 couches : l’épiderme, le derme et l’hypoderme.
L’épiderme
Composé principalement de kératinocytes, l’épiderme n’est pas vascularisé. On retrouve également les mélanocytes, les cellules de Langerhans ainsi que les cellules de Merkel. La jonction dermo-épidermique permet la fixation de l’épiderme avec le derme.
Les kératinocytes assurent la cohésion de l’épiderme par le cytosquelette et les desmosomes afin de créer une barrière protectrice entre le milieu extérieur et le milieu intérieur mais aussi contre les radiations lumineuses. Ils se renouvellent tous les 20 jours.
Les mélanocytes élaborent la mélanine. L’eumélanine (pigments noirs protecteurs) et la phéomélanine (pigments jaunes/rouges non protecteurs) sont synthétisées dans les mélanosomes avant d’être transférées vers les kératinocytes.
Les cellules de Langerhans sont des cellules de l’immunité et présentent les antigènes aux lymphocytes T CD4 afin de permettre la défense de l’organisme face aux intrusions.
Les cellules de Merkel sont des mécanorécepteurs, c’est à dire qu’ils perçoivent les mouvements de la peau et induisent un signal vers les terminaisons nerveuses présentes dans le derme.
Le derme
Le derme regroupe des fibres de collagènes assurant la stabilité du tissu ainsi que des fibres élastiques pour la souplesse. Ces fibres sont synthétisées par les fibroblastes.
De nombreuses cellules immunitaires sont présentes dans ce tissu. On retrouve également les muscles érecteurs de poils, les follicules pilo-sébacés, des vaisseaux sanguins et lymphatiques ainsi que de nombreuses terminaisons nerveuses.
Le processus de cicatrisation
La réparation cutanée peut se séparer en 4 étapes : la phase vasculaire, la phase inflammatoire, la phase de prolifération tissulaire et la phase de remodelage. Ces différents phénomènes sont étroitement intriqués afin de restituer l’intégrité de la peau. S’ensuit le remodelage et la maturité de la cicatrice qui s’étend sur plusieurs années (2 ans en général).
La cicatrisation physiologique
La phase vasculaire se détermine par l’efficacité de la coagulation. Suite à une plaie, une vasoconstriction apparaît pour favoriser l’hémostase.
En complément, le facteur de Willebrand entraine l’adhésion plaquettaire afin de former un thrombus. Une fois activées, les plaquettes libèrent différents facteurs et protéines (fibrinogène, thrombines, thrombospondines etc) et le sang apporte d’autres protéines comme la fibronectine afin de former un caillot de fibrine et stopper le saignement.
Ce réseau forme un réservoir pour les facteurs de croissances et de ce fait favorise la migration et l’activation des polynucléaires neutrophiles qui seront associés aux macrophages et lymphocytes lors de la phase inflammatoire.
Altération de fonction et cicatrices rétractiles
Souvent retrouvées suite à des brûlures, les cicatrices rétractiles ont une surface de tissu cicatriciel inférieure à la lésion de la peau provoquant ainsi des cordons fibreux liés à la tension présente dans la zone. Le phénomène physiologique de rétractation devient excessif et tire sur les tissus sains adjacents. Au niveau d’une articulation, elles peuvent limiter le mouvement. Une chirurgie peut être nécessaire si le phénomène est trop important et limite le patient dans ses mouvements ou se traduit par des tensions douloureuses.
Le lymphoedème
En France, les lymphoedèmes les plus retrouvés sont ceux du membre supérieur secondaire à un traitement du cancer du sein. On estime une fréquence d’apparition* de 15 à 20% suite à un curage axillaire contre 6-8% après la technique de ganglion sentinelle. (*si l’on définit le lymphoedème avec une différence volumétrique d’au moins 10% entre les deux bras). (56) D’où le développement de cette technique afin de limiter les complications.
Néanmoins d’autres facteurs de risques existent tels que l’obésité, la radiothérapie (au niveau axillaire notamment), les infections post-opératoires mais aussi la mastectomie à elle seule et la sédentarité après l’intervention. (57) Un vrai travail d’éducation thérapeutique devra être effectué avec l’ensemble du corps médical et la patiente afin qu’elle maîtrise les gestes à éviter et/ou à effectuer afin de limiter sa survenue, les complications et la chronicisation de la pathologie.
En effet, une prise en charge tardive peut conduire à un phénomène irréversible lorsque le lymphoedème devient trop important. Il faudra également être vigilant car ce dernier peut apparaître plusieurs années après l’intervention sans qu’il n’y ait eu de complications ultérieures souvent à la suite d’un choc thermique ou un traumatisme.
Prise en charge des séquelles de la mammectomie par l’équipe officinale
L’équipe officinale est à une place clé dans la prise en charge des patientes opérées du sein. La pharmacie est un lieu de transition entre tous les professionnels de santé, le pharmacien a donc un rôle d’écoute mais également d’orientation, de conseil. Par son expertise, il saura trouver des solutions et prendre en charge la patiente sur certains aspects de sa maladie dans le but d’améliorer sa qualité de vie et surmonter cette étape.
Place de l’équipe officinale dans la surveillance et la prise en charge des cicatrices post-mastectomie
Pour le pharmacien, il est important de bien avoir en tête toutes les étapes nécessaires au processus de cicatrisation.
Cela est nécessaire pour comprendre les prescriptions de pansements, de soins infirmiers et de kinésithérapeutes mais également pour être alerté en cas de complications et donc pouvoir orienter le patient vers le professionnel compétent afin d’assurer une cicatrisation optimale.
En effet, le bon déroulement de ce processus est important. Il y a bien évidement le côté esthétique et l’impact psychologique que cela peut avoir mais une mauvaise cicatrisation peut allonger les délais de prise en charge du cancer car repousse l’initiation d’une radiothérapie ou de la chimiothérapie.
Par la suite, une cicatrice douloureuse et/ou inesthétique pourra également compliquer le port de prothèses mammaires externes ce qui peut avoir de fortes répercutions sur le moral de la patiente.
Soulager et limiter la raideur de l’épaule
Comme expliqué précédemment (Cf page 50), lutter contre la raideur de l’épaule est un facteur important, tant au niveau de la qualité de vie que pour la suite du traitement si une radiothérapie est nécessaire. De manière générale, le pharmacien devra promouvoir un bon équilibre alimentaire, une bonne hydratation et l’arrêt du tabac pour restituer une souplesse des fibres musculaires optimale. Il pourra également fournir une fiche d’exercices destiné à la rééducation de l’épaule (ANNEXE 5). Le pharmacien accompagnera également le patient dans la prise d’antalgiques si le patient en ressent le besoin.
Aromathérapie et phytothérapie
L’Harpagophytum est traditionnellement utilisé pour soulager les douleurs articulaires.
Les spécialités Dolosoft® (1 comprimé 3 fois par jour) et Harpadol® (2 comprimés 3 fois par jour) sont des phytomédicaments correspondant aux recommandations de l’HMPC. (132) L’harpagophytum comporte des principes actifs amers, il sera déconseillé chez les personnes présentant un ulcère gastro-duodénal.
La gestion de la douleur
Comme toujours, le pharmacien a un rôle important d’écoute et de compréhension du patient. Il faut sensibiliser le patient à évaluer sa douleur grâce aux différentes échelles afin d’optimiser la prise en charge. Pour une même intervention, les douleurs seront tolérables pour l’un et insoutenables pour l’autre.
Il faut, grâce à cette évaluation et l’origine des maux, réaliser un bilan et un traitement personnalisé pour chaque patient. (86) Le pharmacien peut également trouver sa place en rappelant quelques points essentiels de la prise des antalgiques pour leur assurer une efficacité maximale.
On recommandera de prendre la dose de médicament à l’heure donnée avant que la douleur n’apparaisse et ne s’installe. Il faut anticiper la douleur et réaliser un schéma similaire à une perfusion continue.
Devant un premier échec, il faudra persister 24-48h avec cette posologie avant d’augmenter sur avis médical. Il est également nécessaire de rester vigilant face à la délivrance des coanalgésies notamment avec le croisement des multiples spécialités à base de paracétamol.
Il sera nécessaire de s’assurer que le patient a bien compris qu’il ne faut jamais dépasser 1 gramme de paracétamol par prise toutes les 4 heures maximum et 4 grammes par jour. On aidera la patiente a bien comprendre la stratégie thérapeutique effectuée par le médecin pour qu’il y ait une meilleure adhésion, donc une meilleure observance qui mènera à une meilleure efficacité.
Un échec avec une molécule ne signifie pas une prise en charge impossible. Il sera également judicieux de prévenir des effets indésirables les plus communs et donner des solutions pour les limiter (Il faudra proposer d’augmenter les fibres dans l’alimentation, de bien boire, bouger etc pour les médicaments contenant e l’opium ou de la codéine pour lutter contre la constipation iatrogène).
Conclusion
La prise en charge de la femme opérée du sein à l’officine est très complexe et unique pour chaque patiente, que ce soit au niveau thérapeutique mais surtout psychique. En effet, le ressenti et le vécu de la maladie sont différents pour chaque femme et ce à chaque étape de la prise en charge de la maladie.
Aux premiers stades, le cancer est une maladie silencieuse, non visible, son évolution se fait « à l’aveugle », ce qui s’associe souvent à une angoisse constante des patientes, augmentée lors des examens. Certaines ne voudront pas en parler, d’autre sentiront le besoin de s’exprimer à la terre entière. A l’officine, il sera plus simple de proposer un entretien dans un espace de confidentialité pour les patientes nécessitant une prothèse, un manchon ou encore pour lesquelles une chimiothérapie orale est instaurée mais il ne faudra pas oublier les autres, montrer que les portes sont ouvertes même si la patiente n’est pas encore prête pour en parler, ou en a simplement assez du corps médical. En aucun cas il ne faudra la forcer à parler et à se livrer mais il sera nécessaire de s’adapter à son vécu, ses besoins, ses demandes, rester empathique et ne pas s’immiscer à son encontre dans sa vie personnelle.
Bien que souvent oublié, le pharmacien, par sa proximité, a un rôle charnière dans le système de soin. Il se doit d’être à l’écoute pour identifier les besoins et les interrogations
de la patiente pour optimiser l’efficacité des traitements, augmenter l’observance, améliorer son bien-être au quotidien mais également l’orienter vers les bons professionnels lorsque la situation l’exige.
Il ne devra pas oublier l’entourage touché aussi par la maladie et sera le premier protagoniste pour promouvoir la prévention et le dépistage qui porte un enjeux de santé publique majeur dans cette pathologie.
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Table des matières
INTRODUCTION
CHAPITRE 1 : CANCER DU SEIN ET MASTECTOMIE
1. LE SEIN ET LE DEVELOPPEMENT DE CELLULES TUMORALES
1.1. Anatomie du sein
1.2. Processus de cancérogenèse
1.3. Facteurs de risques
1.4. Facteurs pronostics
2. STRATEGIES THERAPEUTIQUES DU CANCER DU SEIN
2.1. La mastectomie
2.2. Les traitements adjuvants
2.3. L’hormonothérapie
CHAPITRE 2 : LES CONSEQUENCES DE L’OPERATION
1. LES CICATRICES
1.1. Physiologie de la peau
1.2. Le processus de cicatrisation
1.3. La prise en charge des cicatrices de la mammectomie
1.4. Les massages
2. LA RAIDEUR DE L’EPAULE
3. LE LYMPHOEDEME
3.1. Définitions et physiopathologie
3.2. Evolution et complications du lymphoedème.
3.3. Traitements du lymphoedème
4. LA DOULEUR
4.1. Physiopathologie de la douleur
4.2. La douleur post-mastectomie
5. LES PROTHESES MAMMAIRES EXTERNES
5.1. Se retrouver dans les nomenclatures
5.2. Les prothèses transitoires
5.3. Les prothèses standards
5.4. Les prothèses techniques
BOULIN Emilie | Le cancer du sein et sa prise en charge globale par le pharmacien
Id’officine : Focus sur les femmes mastectomisées
5.5. La lingerie et les accessoires
5.6. Les ennemis des prothèses
CHAPITRE 3 : PRISE EN CHARGE DES SEQUELLES DE LA MAMMECTOMIE PAR L’EQUIPE OFFICINALE.
1. PLACE DE L’EQUIPE OFFICINALE DANS LA SURVEILLANCE ET LA PRISE EN CHARGE DES CICATRICES POSTMASTECTOMIE.
1.1. Conseils en aromathérapie
1.2. Précautions de la vie quotidienne
1.3. Le conseil homéopathique
1.4. Et l’apithérapie ?
1.5. Evaluation de l’évolution de la cicatrice
2. SOULAGER ET LIMITER LA RAIDEUR DE L’EPAULE
2.1. Aromathérapie et phytothérapie
2.2. Le conseil homéopathique
3. ROLE DU PHARMACIEN DANS LE TRAITEMENT ET LES MESURES DE PREVENTION DU LYMPHOEDEME
3.1. Le conseil homéopathique
4. LA GESTION DE LA DOULEUR
4.1. Le conseil homéopathique
4.2. Phytothérapie et aromathérapie
5. LES PROTHESES MAMMAIRES EXTERNES
5.1. Les étapes nécessaires à une bonne délivrance
5.2. Trouver la bonne prothèse pour ma patiente
5.3. Les points à développer à l’officine
CHAPITRE 4 : AU COMPTOIR : CONSEILS ASSOCIES AUX TRAITEMENTS ADJUVANTS A L’OPERATION.
1. CONSEILS GENERAUX APPLICABLES TOUT AU LONG DE LA PRISE EN CHARGE
1.1. Protéger sa peau
1.2. Lutter contre le tabagisme
1.3. Limiter la fatigue
1.4. Calmer l’anxiété
1.5. Les médicaments à éviter
2. LA RADIOTHERAPIE
2.1. Conseils en aromathérapie
2.2. Le conseil homéopathique
BOULIN Emilie | Le cancer du sein et sa prise en charge globale par le pharmacien
Id’officine : Focus sur les femmes mastectomisées
3. LA CHIMIOTHERAPIE
3.1. Conseils et précautions concernant le traitement
3.2. Limiter les effets secondaires
4. L’HORMONOTHERAPIE
4.1. Conseils généraux
4.2. Conseils spécifiques pour les femmes traitées par tamoxifène
4.3. Conseils spécifiques pour les femmes traitées par un inhibiteur de l’aromatase
CHAPITRE 5 : AIDER A LA RECONSTRUCTION DE SOI
CHAPITRE 6 : OUTILS A DESTINATION DU PHARMACIEN D’OFFICINE
1. LA DISPENSATION D’UNE PROTHESE MAMMAIRE EXTERNE
2. DISPENSATION D’UN MANCHON DE COMPRESSION
CONCLUSION
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