Contexte et méthodologie
Toutes les données recueillies et exposées dans la première partie de ce mémoire ont permis de poser un cadre théorique. Je m’y suis appuyé pour transposer cette démarche « globale » au contexte plus particulier du public visé par cette étude.
Dans cette partie, je préciserai quelques éléments de ce contexte avant d’exposer la méthodologie appliquée pour mes recherches.
Contexte
Les recherches pour ce mémoire ont été menées dans la classe de petite et moyenne sections dans laquelle j’enseigne cette année. Dans cette partie, je présenterai l’école et l’équipe éducative y travaillant, ainsi que la classe en question.
L’école
L’école dans laquelle se sont déroulées ces recherches est une école maternelle se situant dans l’est de Montpellier. J’y exerce cette année en tant que Professeur des Ecoles Stagiaire (PES). L’une des particularités de cette école est sa proximité avec un CADA (Centre d’Accueil de Demandeurs d’Asile). De ce fait, nous accueillons des élèves issus de familles migrantes en attente du statut d’asile. Ces élèves sont pour la plupart allophones et requièrent une adaptation constante de la part des enseignants.
Les cent quarante élèves inscrits dans l’école sont répartis en cinq classes : trois classes de petite et moyenne sections, une classe de moyenne et grande sections et une classe de grande section.
L’équipe pédagogique est souvent renouvelée. En effet, sur les six enseignants la constituant, trois d’entre eux (dont moi-même) exercent pour la première année dans cette école à la rentrée 2018. De même, lors de discussions entre collègues, j’ai appris qu’en cinq ans, l’école avait connu trois directrices différentes. Ce constat montre bien l’instabilité de l’équipe, à laquelle s’ajoute l’accueil d’un PES chaque année. Ces changements récurrents entraînent une difficulté de créer un projet à long terme sur l’école. Cependant, la directrice en poste lors de mon arrivée s’efforce d’en proposer avec notamment la mise en place de « Math’Arts », projet dans lequel les élèves réalisent des productions mêlant arts et mathématiques.
Pour ma part, je partage ma classe avec une collègue TRS (Titulaire Régionale de Secteur) arrivée cette année sur l’école. Nous découvrons donc ensemble le fonctionnement de cet établissement et tentons de proposer à nos élèves un enseignement complémentaire mais toujours cohérent.
Enfin, pour clôturer cette présentation, il me semble important de préciser la place des langues étrangères dans les classes de cette école. Il se trouve qu’aucune de mes collègues ne les utilise dans son enseignement. La seule exception est ma collègue en charge de la classe de grande section : celle-ci recevait un élève allophone parlant uniquement anglais. Elle traduisait donc ses consignes afin qu’il puisse comprendre le travail demandé, ce qui permettait aux autres élèves d’entendre des mots dans une langue étrangère. Cet élève ayant quitté l’école en décembre, les élèves ne sont plus sensibilisés à des langues différentes du français.
La classe
J’exerce dans une classe de petite et moyenne sections regroupant seize élèves de petite section et dix élèves de moyenne section. Pour certains, il s’agit donc de la première année de scolarisation et de vie en groupe. Ils y découvrent la diversité et créent des relations avec d’autres enfants issus de milieux différents. Parmi ces élèves nous accueillons trois enfants en petite section issus du CADA : un élève d’origine nigériane, une élève d’origine guinéenne et une élève d’origine ivoirienne. L’élève d’origine nigériane ne parlait pas français en arrivant à l’école (et ne le parle aujourd’hui que très rarement, uniquement par répétition). Celle d’origine guinéenne le parlait déjà un peu malgré quelques approximations. Pour finir, l’élève d’origine ivoirienne ne parlait pas français en arrivant mais a acquis des compétences langagières satisfaisantes depuis son arrivée.
D’un point de vue général, le niveau des élèves de la classe est assez hétérogène. Si les moye ns ont un niveau de compétences et de connaissances homogène, les écarts sont assez conséquents entre les élèves de petite section.
Une élève de petite section nécessite la mise en place d’un PAI (Projet d’Accueil Individualisé).
L’équipe de suivi de cet enfant a décidé la mise en place d’un temps de scolarisation restreint : sur les deux journées où j’enseigne, elle n’est présente que deux demi -journées (jeudi après-midi et vendredi matin). Il est donc difficile d’évaluer les effets que pourraient avoir l ’éveil aux langues sur cette élève, étant donné qu’elle n’a pas participé à toutes les activités.
De plus, même si les préconisations ministérielles précisent que l’éveil à la diversité linguistique commence en moyenne section, j’ai proposé ces activités à l‘intégralité de mes élèves. En effet, je trouve intéressant d’observer également la motivation des élèves de petite section dans de telles activités.
En outre, cette année en « alternance » entre la formation suivie à la Faculté d’Education (les lundis, mardis et mercredis) et le travail à l’école (les jeudis et vendredis) posent quelques contraintes.
Parmi elles, la plus contraignante est le temps. En effet, il est difficile d’inclure des activités d’éveil aux langues dans l’emploi du temps sans sacrifier des contenus d’enseignement essentiels en travaillant deux jours par semaine. Le créneau horaire réservé à ces moments est forcément restreint. Pourtant, ils sont capitaux car les enfants ne sont en contact avec d’autres langues qu’en ma présence.
Tout de même, mesurant les bénéfices que pourraient avoir ces activités, j’ai tenté de multiplier le nombre de langues proposées à mes élèves dans un temps restreint. J’aimerais souligner que ces activités ont continué après l’écriture de ce mémoire.
Méthodologie
Le contexte de cette étude a nécessité la mise en place d’une méthodologie particulière. En effet, ayant choisi d’observer les élèves de ma propre classe, les rôles de chercheur et d’enseignant se sont chevauchés. Il a donc fallu que j’adapte mes outils pour pouvoir mener ces recherches avec la meilleure validité méthodologique possible.
Dans cette partie, je détaillerai d’abord le profil des élèves concernés par cette étude, puis je présenterai les activités qui leur ont été proposées et je terminerai par préciser les méthodes employées pour recueillir les données.
Profil des élèves
Comme évoqué précédemment, ces recherches ont été menées sur un échantillon de vingt -six élèves : seize de petite section et dix de moyenne section. Au cours de l’année, j ’ai pu apprendre à les connaître. Cela m’a permis de créer un tableau décrivant leur profil, utile pour l’analyse des données recueillies.
J’ai d’abord jugé pertinent de répertorier dans le tableau 1 le comportement que je peux observer au quotidien chez les élèves. Puis, j’y ai inséré le contact qu’ils peuvent avoir avec des langues différentes du français hors de l’école. Pour le connaître, j’ai fait remplir un questionnaire aux parents (voir annexe 1).
L’intérêt de ce tableau fut de le comparer avec leur comportement pendant les activités d’éveil aux langues. Cette comparaison m’a permis d’approfondir l’analyse des résultats obtenus.
Activités proposées
Une fois le profil de mes élèves dressé, il a fallu que je réfléchisse aux activités que j’allais proposer aux élèves. Je me suis servi des recherches évoquées précédemment , et notamment du programme EVLANG, du site ELODIL, des activités EOLE et des mémoires de Yaëlle Helmstetter, Pauline Bouissou et Gaëlle Callewaert.
La difficulté était de proposer des activités à la fois nouvelles et adaptées à l’âge des élèves. En effet, les activités décrites dans les recherches citées plus haut sont souvent inadaptées pour des élèves de maternelle (par exemple, l’écrit est impossible en cycle 1). Ne voulant pas imiter des programmes déjà mis en place, il était important pour moi de présenter l’éveil aux langues de façon différente. Evidemment, il est impossible de tout inventer et les séances que j’ai décidé de mener sont fortement inspirées de certaines activités proposées dans des recherches antérieures.
La première étape à la construction de ma séquence fut la sélection des langues qui allaient être présentées aux élèves. Deux choix s’offraient à moi : m’appuyer sur les langues parlées dans leur famille ou choisir moi-même les langues à découvrir. J’ai préféré opter pour la deuxième option.
Celle-ci me laissait plus de liberté sur le choix des langues à aborder ce qui m’a permis d’en choisir certaines dont la plupart des enfants ne connaissaient pas l’existence. C’est ainsi qu’après plusieurs modifications, j’ai choisi de proposer six langues dans l ’ordre suivant.
Les formules de salutations
Je me suis appuyé sur les formules de salutations pour créer ma première activité d’éveil aux langues (voir annexe 2). Même si la pratique de ces formules est un classique dans l’éveil aux langues, j’ai tenté d’adopter une approche plus originale. Pour cela, j’ai imaginé l’élément déclencheur suivant : chaque semaine, l’enseignant reçoit un colis destiné à la classe qu’il ouvre avec les élèves (voir annexe 3). Dans ces colis se trouvent une marionnette, une carte postale, des drapeaux du pays en couleur ainsi que des drapeaux à colorier. Ce sont en fait des colis envoyés par les marionnettes en question. Les cartes postales contiennent les informations suivantes :
• Bonjour et au revoir dans la langue de provenance du colis ;
• Nom de la marionnette ;
• Nom du pays de provenance et langue parlée dans ce pays ;
• Nom de la capitale.
Après un temps de lecture de la carte postale par l’enseignant, durant lequel les élèves sont dans une phase d’écoute, un temps de réflexion est proposé. L’enseignant demande : « La marionnette nous a-t-elle parlé exclusivement en français ? », « Quels sont les mots que nous n’avons pas compris ?», « Qu’est-ce qu’ils peuvent vouloir dire ? ». Les enfants sont amenés à comprendre petit à petit ces salutations puis à les apprendre en les répétant.
Une fois ce temps terminé, l’enseignant propose un temps de coloriage du drapeau se trouvant dans le colis. Pour cela, les élèves se servent des drapeaux en couleur comme modèle pour colorier les vierges avec les bonnes couleurs. Ce temps permet aux enfants d’assimiler chaque drapeau et de les différencier, ce qui m’a servi dans la collecte de certaines données.
C’est pendant le temps d’accueil que s’est déroulée l’activité avec les élèves de petite section (par groupe de cinq ou six élèves). Les enfants de moyenne section y ont quant à eux participé en début d’après-midi (tous les élèves de moyenne section en même temps). Le choix du partage en groupes restreints est un choix permettant de concerner tous les élèves. Ces élèves étant jeunes, ils sont facilement déconcentrés par l’effet de groupe lors d’activités demandant de l’attention.
Ce colis sert de prétexte pour introduire les langues et les marionnettes. Chaque jour, les élèves sont invités à saluer les marionnettes déjà reçues dans leur langue d’origine.
L’écoute de chants / comptines
Une fois le colis ouvert et les salutations apprises par tous les groupes d’élèves, un moment a été consacré à l’écoute de comptines ou chants dans la langue hebdomadaire.
Cette deuxième activité d’éveil aux langues s’est déroulée en classe entière au coin regroupement.
Celle-ci consiste en une écoute attentive d’une comptine dans une langue étrangère. L’idée est d’affiner leur écoute et découvrir les sonorités rattachées à la langue ciblée. Puis, l’enseignant laisse la parole aux enfants pour qu’ils puissent émettre leurs hypothèses sur ce qu’ils ont entendu, les émotions que la chanson leur a procurées etc… Cela permet d’avoir une réflexion sur la langue et un moment d’échange, guidé par l’enseignant. Ce moment se déroule en classe entière pour que les enfants soient rassurés et s’expriment plus librement.
L’apprentissage d’une comptine
La troisième activité mise en place dans le cadre de ces recherches est la découverte et l’apprentissage de la comptine « Frère Jacques » dans les différentes langues de l a séquence (voir annexe 4). L’objectif de cette situation est que les élèves entendent et répètent une même comptine dans plusieurs langues. Cela permet de comparer les adaptations et de s’exercer dans d’autres langues. Pour pouvoir leur apprendre les différentes versions , il fallait d’abord que je trouve les adaptations de cette comptine dans les langues souhaitées. Pour cela, j’ai pu m’appuyer sur le site «demonsaumonde.free.fr/frere.jacques/» qui propose les adaptations de « Frère Jacques » dans plus de soixante dialectes différents.
Cette situation s’est déroulée en groupe classe au coin regroupement. Dans un premier temps, les lèves ont appris cette comptine en français. Puis, chaque semaine, une fois le colis ouvert par tous, on a procédé à l’apprentissage de cette comptine dans la langue hebdomadaire. D’abord, j’ai chanté seul la comptine et les enfants écoutaient. Puis, pour rendre l‘apprentissage plus facile, j’ai découpé la comptine en isolant les phrases la constituant. Ainsi, je c hantais d’abord la première phrase seul, et les élèves la répétaient. Ce procédé a été réutilisé jusqu’à ce que la comptine soit reconstituée et apprise dans son intégralité. Ne maîtrisant pas assez les langues étudiées, j’ai l’accent français lorsque je chante. J’ai donc décidé de laisser aux élèves un moment d’écoute de cette comptine pour chaque langue. Celui-ci a servi à ce que les élèves entendent les bonnes sonorités et intonations de la langue à travers cette comptine.
Si pour chaque langue l’activité des salutations a été introduite en premier, l’ordre entre les deux suivantes n’a pas d’importance.
Les freins rencontrés
Durant la collecte des données, j’ai pu rencontrer certaines difficultés.
Tout d’abord, certains parents ne m’avaient pas rendu le questionnaire concernant le contact avec les langues avant le début de la séquence. Souhaitant tout de même m’appuyer sur cet outil, j’ai dû les relancer plusieurs fois afin de recueillir toutes les réponse s souhaitées. Finalement, je suis parvenu à collecter toutes les données nécessaires pour pouvoir dresser le profil des élèves.
Concernant le questionnaire post-séquence, je n’ai pas pu collecter toutes les réponses des parents.
Ces données sont donc incomplètes mais permettent tout de même de donner une tendance à la question posée.
De plus, l’utilisation du film de classe a été assez difficile à mettre en place. Ces films étant tournés dans ma classe pendant que je menais une activité avec les élèves, j’étais à la fois dans le rôle d’enseignant et de chercheur. Dans ce cas, il est difficile de réagir à certains imprévus (téléphone qui s’éteint, stockage limite atteint, cadrage approximatif) sans abandonner la posture d’enseignant.
Ne souhaitant pas laisser les enfants dans l’attente et l’incompréhension, j’ai préféré ne pas remédier à ces imprévus, au risque de perdre certaines données. Certains films ont donc été coupés trop tôt ou mal cadrés, ce qui rend les données plus difficiles à percevoir. Cependant, devant la multiplicité des activités et des séances, les données perdues représentaient une infime partie , comparées à toutes celles que j’ai pu recueillir.
Plus généralement, cette double posture a pu être un frein dans ces recherches. En effet, les imprévus font partie du quotidien d’un enseignant. En temps normal, nous les gérons sans difficulté.
Or, cela est plus difficile lorsqu’on mène des recherches. Plusieurs fois, j’ai été dérangé dans les séances (obligation de mettre en pause la séance pour avoir le calme dans la classe, intervention d’un autre adulte coupant la séance etc..). Ces dérangements sont à prendre en compte dans le comportement des élèves et l’analyse qu’on en fait. Ceux-ci ont pu changer de comportement durant la situation à cause de ces imprévus.
Enfin, l’absentéisme des élèves a posé un problème pour avoir un recueil des données complet.
Menant ces recherches au cycle 1, les élèves sont à un âge où ils for gent encore leur système immunitaire. Ils tombent souvent malades et sont absents de l’école. Ainsi, certains élèves n’ont pa s été en contact avec certaines langues. De même, une élève (Sama) a déménagé durant la séquence.
Je n’ai pas pu faire remplir le questionnaire post-activités à ses parents. Les données la concernantsont donc incomplètes.
Résultats et analyses
Dans cette partie, je présenterai les données que j’ai recueillies et les analyserai. Tout d’abord, je m’intéresserai à la motivation des élèves perçue dans les différentes activités proposées. Puis j’étudierai les données collectées dans les moments non consacrés à l’éveil aux langues et les questionnaires. Ensuite, je comparerai les comportements apparus avec les tableaux de profil des élèves dressés préalablement. Enfin, je terminerai par nuancer les analyses décrites en apportant des informations complémentaires qu’il est important d’aborder.
Analyse des résultats recueillis dans les activités d’éveil aux langues
Dans un premier temps, j’ai pu recueillir des données dans les différentes activités dédiées à l’éveil aux langues pendant ces six semaines.
Les salutations
La situation des salutations a été la première activité d’éveil aux langues proposée aux élèves. C’est grâce à celle-ci que j’ai récolté le plus de données car elle a sollicité le plus de séances. Premièrement, il est à souligner que l’ensemble des élèves ont fait preuve d’une grande curiosité aucours de cette activité puisqu’ils s’y sont intéressés et ont posé des questions (ex. « On va faire quoi ? » ; « C’est quoi ?? » ; « C’est quel pays ? »). J’ai aussi pu noter cette curiosité chez les élèves ne faisant pas partie du groupe choisi pour l’ouverture du colis. Plusieurs vidéos laissent apercevoir certains élèves, souvent de moyenne section, essayant de regarder et d’entendre le pays de provenance du colis alors qu’ils sont censés faire des activités d’accueil. Même si on pourrait penser que cela traduit un manque d’attention pour les activités de l’accueil, celles-ci sont ludiques et les élèves s’y épanouissent habituellement. Ce constat démontre donc un intérêt particulier porté à l ’éveil aux langues : alors même qu’ils ne sont pas dans la situation, ces élèves veulent savoir quelle langue ils vont découvrir cette semaine. On peut associer cette curiosité au plaisir pris dans la découverte des langues. Or, la notion de plaisir reflète une certaine motivation à faire l’activité . On peut alors affirmer que ces élèves ont é té motivés par cette situation.
« Frère Jacques »
Chaque semaine, les enfants ont appris la comptine « Frère Jacques » dans une nouvelle langue après l’avoir chantée dans les langues qu’ils connaissaient dé jà. Dans ces moments, j’ai récolté certaines informations.
D’abord, j’ai apprécié un fort engagement chez mes élèves. En effet, ils ont fait preuve de concentration et d’écoute pour apprendre cette comptine. L’apprentissage de comptines n’étant pas habituellement un moment dans lequel ils participent tous, j’ai été très surpris de voir que dans ces cas-là, la plupart des élèves ont chanté.
De même, ils ont fait preuve de persévérance dans ces activités. Tout comme dans la situation des salutations, les élèves ont redoublé d’efforts pour bien prononcer les différents mots de la comptine.
Alors que certaines adaptations sont difficiles à apprendre, les élèves se sont appliqués et ont essayé de prononcer les paroles correctement. Enfin, j’ai reconnu du plaisir chez les élèves puisque j’ai aperçu quelques sourires et que certains élèves m’ont demandé à chanter à la comptine dans d’autres langues étrangères. Néanmoins ce plaisir était moins apparent que dans l’activité des salutations. En effet, même si ces manifestations ainsi que leur participation plus active lors de l’apprentissage d’une comptine laisse nt penser que la situation leur procure du plaisir, les enfants ont montré moins d’enthousiasme et d’entrain que dans la première activité. Si j’ai pu observe r de la motivation par l’engagement et la persévérance des élèves, celle-ci relèverait donc plutôt de la motivation extrinsèque. Autrement dit, cela signifierait qu’ils ont plus participé pour me faire plaisir. On peut imaginer que l’introduction de la comptine n’était pas assez ludique, ou les élèves pas réceptifs aux comptines. Aussi, la simple répétition des paroles peut être un facteur ne suscitant pas de plaisir particulier chez les élèves.
A travers ces résultats, je constate que cette situation a motivé les élèves. Cependant, il semblerait que cette motivation soit plus extrinsèque qu’intrinsèque.
Les activités d’écoute
Cette activité était différente des deux autres. En effet, ici les élèves n’ont pas été amenés à parler une autre langue. L’objectif était plutôt qu’ils entendent d’autres sonorités, comparent les différentes langues et réfléchissent à ce qu‘ils ont entendu pour tenter de reconnaître la langue.
Durant l’écoute, j’ai aperçu différents types de comportement. Certains enfants ont fait preuve d’engagement dans l’activité, puisqu’ils ont écouté les comptines. D’autres au contraire ont profité de ce moment pour se dissiper entre camarades. Il semble donc qu’ils étaient peu engagés dans la situation. D’ailleurs, malgré mes tentatives pour avoir le silence, ceci a dérangé ceux qui voulaient écouter (en témoigne certaines interventions comme celle de Loan qui dit « J’ai rien entendu, ils n’ont fait que rigoler ! »).
Pendant les échanges, les élèves n’ont pas montré d’engagement. La réflexion et l’expression des ressentis sur les langues ont été quasi inexistants. A la question « à votre avis, dans quelle langue était cette chanson ? », les élèves s’empressaient de dire une langue qu’ils connaissaient, sans réfléchir aux sons entendus. Cependant, ce genre de situation est très difficile pour des élèves de maternelle, car elle est très abstraite et peu ludique. Il est donc normal que les échanges suivant l’activité d’écoute aient été des moments où les élèves étaient peu actifs et motivés.
Dans cette situation, la persévérance n’a pas pu être observé car les élèves n’ont pas été confronté à une difficulté quelconque. De plus, je n’ai pas ressenti un plaisir particulier chez les élèves lors de l’écoute.
Nuances
Si l’analyse des données recueillies me permet de porter des affirmations concernant la motivation des élèves dans les activités d’éveil aux langues, il convient tout de même de les nuancer. En effet, si les effets de cette démarche sont significatifs, certains points doivent être abordés.
Premièrement, l’âge des élèves peut remettre en cause les résultats obtenus lors des entretiens collectifs. En effet, il est difficile d’affirmer que les réponses fournies par des enfants âgés entre trois et cinq ans soient toutes sincères et réfléchies. L’envie de faire plaisir à l’adulte, la difficulté pour des enfants à énoncer leurs ressentis ou encore l’effet de groupe peuvent induire des réponses ne reflétant pas réellement ce qu’ils pensent. Si une certaine légitimité peut être donnée à leurs réponses, il ne faut quand même pas tenir pour vrai toutes leurs affirmations.
Ensuite, l’analyse du comportement non-verbal n’est pas une science exacte. Si elle est l’objet de multiples théories (par exemple les travaux de Paul Ekman), il est difficile d’en retenir une s’appliquant à des enfants en bas âge. De plus, la possible interprétation subjective du chercheur peut fausser les résultats. Il est donc possible que j’aie mal interprété certains gestes ou comportements des élèves. Cela ne remet pas en cause toutes mes conclusions, mais il est important de le souligner.
Puis, il est à noter que la motivation des élèves est aussi influençable par la préparation didactique de l’activité. En effet, l’aspect ludique des situations proposées joue un rôle déterminant dans l’engagement des élèves. Si les activités d’éveil aux langues ne sont pas ludiques et attrayantes pour l’enfant, il est probable que ses effets concernant la motivation soient amoindris. Cependant, j’essaie de rendre toutes les situations (d’éveil aux langues ou d’autres domaines) les plus ludiques possible. Les différences de motivation observées entre les autres activités et celles de ces recherches proviennent alors majoritairement de leur contenu.
Enfin, il est important de rappeler que plusieurs facteurs influent sur la motivation. Si l’activité en elle-même tient un rôle important, d’autres facteurs interviennent. Parmi eux, certains sont totalement indépendants de l’activité (la vie personnelle de l’élève, l’humeur, la vie sociale etc..).
Ceci représente une des limites de ces recherches.
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Table des matières
Introduction
Partie 1 : Cadre théorique et revue de littérature
A. L’éveil aux langues
1. La démarche
2. L’état de l’art
B. La motivation
C. Motivation et éveil aux langues
Partie 2 : Contexte et méthodologie
A. Contexte
1. L’école
2. La classe
B. Méthodologie
1. Profil des élèves
2. Activités proposées
a) Les formules de salutations
b) L’écoute de chants / comptines
c) L’apprentissage d’une comptine
3. Le recueil des données
a) Quelles données recueillir ?
b) Comment recueillir les données ?
c) Les freins rencontrés
Partie 3 : Résultats et analyses
A. Analyse des résultats recueillis dans les activités d’éveil aux langues
1. Les salutations
2. « Frère Jacques »
3. Les activités d’écoute
B. Analyse des résultats recueillis hors activités d’éveil aux langues
C. Comparaison des résultats avec le profil des élèves
D. Nuances
Conclusion
Bibliographie
Annexes
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