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Répartition
Selon l’âge et le sexe
Dans les pays en développement, la population jeune est la plus touchée par le tétanos. C’est ainsi que 50 et 70% des tétaniques ont respectivement moins de 10 et 20 ans [44, 51].
Chez le nouveau-né, l’indice est encore plus grand, allant de 1 à 100 pour 1000 naissances vivantes représentant ainsi plus de la moitié des cas de tétanos dans certaines régions où les méthodes d’accouchement restent traditionnelles [39].
En revanche, dans les pays développés, le tétanos est l’apanage des personnes âgées dont plus de la moitié des tétaniques ont dépassé la cinquantaine.
En France, plus de 90% des tétaniques déclarés en 1936 avaient plus de 60 ans [33].
Aux Etats-Unis, le tétanos touche habituellement les personnes âgées et les immigrés. Moins de 100 cas sont rapportés annuellement au CDC (Center for Disease Control) : 94% des cas chez les personnes de plus de 20 ans et 68% des cas chez les personnes de plus de 50 ans [1].
Le tétanos à porte d’entrée obstétrical concerne les femmes en âge de procréer (15 à 49 ans).
On note une nette prédominance de sexe masculin dans toutes les séries publiées [62,65].
Selon le niveau socio-économique
Le tétanos est caractérisé dans tous les pays comme étant une maladie de l’ignorance et de la pauvreté survenant sur les couches sociales défavorisées
[45]. Dans les pays développés, le tétanos est une pathologie des sujets vivant en milieu rural.
En général, les contraintes socio-économiques et le bas statut des femmes sont importants et déterminants dans le cadre des avortements provoqués et par conséquent dans le cadre du tétanos de la femme en âge de procréer.
Etude bactériologique
Classification
Le bacille de Nicolaier ou Clostridium tetani d’abord rattachée au Genre Bacillium est inclus dans le genre Clostidium par tous les auteurs, sauf PREVOT qui inclut dans le Plectridium (= plecte) proposé par FISCHER en 1895 pour grouper les anaérobies sporulés à spores terminales.
Habitat
Le Clostridium tetani est une bactérie ubiquitaire, tellurique largement répandue dans les sols, en particulier humides et calcaires.
Les animaux herbivores et omnivores peuvent être porteurs des germes ou des spores dans leurs intestins et les disséminer. Le bacille peut aussi être une bactérie commensale du tube digestif de l’homme. Ce bacille est retrouvé dans de nombreux sites : poussières de maisons et des rues, mais également en milieu chirurgical (air de salle d’opération à ventilation défectueuse, vêtements, matériels) [19]. L’appareil génital de la femme peut héberger le bacille tétanique [98].
Morphologie
Le Clostridium tetani se présente dans deux formes : une forme végétative et une forme sporulée.
Le bacille tétanique
Le bacille tétanique Clostridium tetani est un bâtonnet fin et rigide de 3 à 6 microns de long et 0,3 à 0,8 microns de large. C’est un bacille Gram positif non encapsulée, mobile par ciliature péritriche et produisant une spore terminale. Cette forme végétative est détruite par la chaleur et les antiseptiques.
La spore
C’est une structure de siège terminale, de forme ovalaire, incolore donnant au bacille une forme de raquette de tennis ou de baquette de tambour.
De part sa résistance à plusieurs facteurs parmi lesquels la chaleur et la désinfection par certains produits chimiques, elle permet une survie durable du Clostridium tetani dans un environnement défavorable [10,58].
Dans l’obscurité, les spores survivent plusieurs années, mais elles sont détruites par les rayons solaires [6].
Culture
Clostridium tetani est un germe anaérobie strict. Il peut être ainsi cultivé sur milieu artificiel en l’absence d’oxygène. Sa température optimale de croissance est de 37°C et son pH optimum est de 7,4 [98].
Plusieurs milieux de cultures peuvent être utilisés parmi lesquels : le gélose au sang, le bouillon VF (viande-Foie), le bouillon TGY :
− Sur gélose de sang : on observe une hémolyse discrète ;
− En gélose profonde : on note des colonies transparentes, rhizoïdes ou floconneuses ;
− En bouillon TGY : la croissance est optimale en 24 heures, les cultures ont une odeur en corne brûlée, par formation d’acroléine.
Biochimie
− Clostridium tetani est une espèce protéolytique : gélatinase (-), sérum albumine (-), peptidase (+)
− Clostridium tetani ne fermente aucun glucide : glucose (-), saccharose (-), lactose (-), esculine (-), amidon (-) ;
− Clostridium tetani ne produit ni sulfure d’hydrogène, ni indole ;
− Clostridium tetani est lipase (-), phospholipase (-)
Toxines élaborées
Clostridium tetani produit essentiellement deux exotoxines protéiques :
− La tétanolysine : hémolyse soluble oxygénolabile, antigénique, mais pouvoir pathogène.
− La tétanospanine (toxine tétanique) est responsable des symptômes et de la gravité de la maladie.
Portes d’entrée
Portes d’entrée tégumentaires
Plaies récentes
Elles revendiquent dans toutes les statistiques 40 à 60% des cas, et siègent deux fois sur trois aux membres inférieures. Ce sont presque toujours les plaies minimes ayant échappé à l’attitude préventive pour le tétanos et curative pour la plaie [6].
Dans les PED, particulièrement les statistiques dakaroises rapportées par M. GENTILLINI, les inoculations traumatiques et accidentelles occupent la première place avec 45%. C’est surtout les plaies des pieds dont la fréquence s’explique par la marche pieds nus ; ces plaies sont souvent négligées [51].
Plaies chroniques
Elles occupent le deuxième rang, avec en moyenne 10 à 30% des cas. Ce sont les plaies chroniques de jambes, troubles trophiques des artéritiques, fistules d’ostéomyélitiques, de dermatoses chroniques excoriées, de cancer ulcéré etc. [6]
Dans les pays développés, les plaies chroniques sont responsables dans 20% des cas de tétanos [21].
Portes d’entrée obstétricales
Rare chez la femme plus qui accouche en maternité, beaucoup plus fréquent chez celle qui accouche à domicile, selon la coutume.
Le tétanos du post abortum succède à des manœuvres abortives faites dans les conditions d’hygiène précaire et dans la clandestinité [98].
La porte d’entrée obstétricale est devenue exceptionnelle dans les pays développés ; le tétanos post partum a complètement disparu en France du fait de la généralisation des accouchements en maternité [78].
Portes d’entrée traditionnelles
Dans de nombreux pays, certaines pratiques coutumières peuvent être responsables de tétanos. Selon THIAM [30], elles représentent 19,20% des cas de tétanos hospitalisés aux Maladies Infectieuses du CHNU de Fann.
Le tétanos néonatal à porte d’entrée ombilicale est la porte d’entrée traditionnelle la plus fréquemment retrouvée suivi du tétanos post circoncision et du tétanos après percée d’oreilles.
Les tatouages péribuccaux et l’excision encore pratiqués chez certaines ethnies sont plus rarement en cause.
Portes d’entrée intramusculaire
Le tétanos succédant à une injection médicamenteuse est particulièrement en Afrique noire francophone, consécutif à des injections de quinine souvent dans n’importe quel état fébrile sans asepsie [6, 21].
Dans les statistiques dakaroises, la porte d’entrée intramusculaire a été retrouvée dans 4,70% des cas, elle a été consécutive à une injection intramusculaire de quinine dans 85% des cas [88]. D’autres produits peuvent être incriminés (Phenylbutazone, Noramidopyrine ou même la Pénicilline).
Il faut enfin mentionner les injections d’héroïne chez les drogués [6].
Portes d’entrée chirurgicales
Le tétanos post opératoire est grave ; en effet, sa mortalité est élevée et son mauvais pronostic est lié à plusieurs facteurs : la gravité propre de ce tétanos, le terrain de survenue et les difficultés de diagnostic précoce.
Le tétanos chirurgical survient le plus souvent après une intervention orthopédique (fracture ouverte, mycétome infecté) [51].
D’après une étude réalisée par DIA [37], le taux de prévalence est de 1,56%.
Son taux de létalité très élevé avec 67,4%.
Sa contamination peut être endogène ou exogène.
− La contamination endogène après une chirurgie abdominale, pelvienne, orthopédique.
− La contamination exogène :
• à partir de la peau ; l’existence d’un portage cutanée a été démontrée ;
• une reviviscence des spores tétaniques implantées après la première intervention ;
• les instruments chirurgicaux, les catguts mal stérilisés, les pansements sans aucune asepsie rigoureuse.
Portes d’entrée ORL et stomatologiques
Les otites chroniques sont la cause de 16 à 19% des cas de tétanos en Inde et en Iran, de 25% à Dakar. Dans bien des pays en voie de développement, elles représentent la principale porte d’entrée chez les enfants de 3 à 13 ans [6].
Le tétanos à porte d’entrée dentaire est peu décrit dans la littérature. Il peut s’agir d’une cellulite, d’un abcès dentaire ou carie dentaire.
Portes d’entrée ombilicales
Le tétanos à porte d’entrée ombilicale reste un véritable fléau en Afrique où il représente une cause importante de mortalité périnatale [51]. Bien qu’en diminution avec l’amélioration générale des structures sanitaires, son incidence était de 100/100 000 naissances au Sénégal en 1968, en Côte d’Ivoire en 1974.
A Dakar, à la Direction de la Prévention Médicale, le taux de létalité était de 55,9% pour les nouveau-nés âgés de moins de 8 jours, contre 37,8% chez ceux âgés de plus de 8 jours durant la période 2001-2004 [71].
Le tétanos à porte d’entrée ombilicale succède généralement à un accouchement à domicile, parfois à un accouchement à la maternité, car dès le retour du nouveau-né dans sa famille, les topiques traditionnelles sont pratiquées sur la plaie ombilicale [6, 51].
Le tétanos néonatal a pratiquement disparu dans les pays développés [6].
Portes d’entrée occultes
Elles représentent 13,3% d’après une étude récente faite par M. SEYDI [88]. Il s’agit le plus souvent des sujets vivant habituellement en milieu rural, exposés aux microtraumatismes [6].
Etude physiopathologique
L’infection débute par introduction de spores de Clostridium tetani dans l’organisme à la faveur d’une effraction cutanée ou muqueuse, puis, sous l’influence de facteurs favorisant, une diminution du potentiel d’oxydoréduction local (comme ischémie ou la nécrose tissulaire), les spores se trouvant dans les conditions d’anaérobiose stricte, vont germer et redonner la forme bactérienne produisant une toxine tétanique in situ. Parmi les exoprotéines produites, seule la tétanospasmine est responsable de tous les symptômes de la maladie [8, 32].
Elle a une action sur le système nerveux central et le système nerveux autonome responsable de la dysautonomie tétanique.
Action de la tétanospasmine sur le SNC
La toxine tétanique pénètre dans le système nerveux au niveau des jonctions neuromusculaires des motoneurones proches de la porte d’entrée grâce à une vésicule d’endocytose. Une fois internalisée dans la terminaison du nerf moteur, sensitif ou sympathique, la toxine, devenue inaccessible aux antitoxines, chemine par voie rétrograde pour gagner le corps cellulaire des motoneurones au niveau de la corne antérieure de la moelle et du tronc cérébral [32, 36]. Une fois fixée au tissu nerveux, la toxine n’est pas neutralisée par l’anatoxine tétanique.
La vitesse de transport de la toxine est la même dans tous les nerfs, expliquant l’atteinte initiale au niveau de l’extrémité céphalique où les nerfs moteurs sont les plus courts, alors que les muscles des membres sont atteints en dernier [32]. Arrivée dans le corps cellulaire, la toxine migre par voie trans-synaptique et gagne la terminaison présynaptique des neurones inhibiteurs de la moelle et du tronc cérébral, utilisant la glycine et l’acide gamma-amino-butyrique (GABA) comme neurotransmetteurs.
Elle va cliver par l’intermédiaire de la chaîne légère, la synaptobrévine nécessaire à l’exocytose des neurotransmetteurs, empêchant ainsi leur libération, ce qui provoque une désinhibition centrale des motoneurones alpha [32, 36, 79]. Les neurones sont anormalement excitables et il apparaît des contractions musculaires anarchiques. La levée de l’inhibition des motoneurones concerne également l’innervation réciproque. Cette levée de l’inhibition est à l’origine des contractures simultanées des muscles agonistes et antagonistes.
Action de la tétanospasmine sur le système nerveux autonome : la dysautonomie tétanique
La tétanospasmine n’épargne pas le système neurovégétatif, mais son action est encore mal connue. Elle pénètre dans les fibres synaptiques, franchit les ganglions synaptiques et par les fibres pré ganglionnaires, gagne les cornes latérales de la moelle [32, 38]. Le blocage des synapses inhibitrices dans le système synaptique par augmentation de la sécrétion de catécholamines expliquant la dysautonomie tétanique. Celle-ci se manifeste par des épisodes de tachycardie et d’hypertension artérielle.
En outre, certaines manifestations métaboliques sympatho-dépendantes telles qu’une hyperglycémie, un hypercatabolisme ou une hypersudation sont constatées [15, 32, 36, 43].
Il existe également une hyperactivité parasympathique liée à l’augmentation de la synthèse du stockage et de la libération d’acétylcholine dans les divers organes, combinée à une action cholinergique propre à la toxine. Ceci se traduit par des accès de bradycardie, d’hypertension artérielle voisine d’arrêt cardiaque brutal [15, 26, 32, 38].
Etude clinique
Type de description : Tétanos post abortif de la jeune femme non vaccinée
Incubation
C’est la période qui sépare la plaie d’inoculation et l’apparition du premier signe de la maladie, en général le trismus.
La durée est en moyenne de 3 à 15 jours avec des extrémités de 1 à 30 jours, silencieuse et d’autant plus brève que la maladie sera plus grave.
Début ou période d’invasion
C’est la période séparant l’apparition du premier signe de la maladie à la généralisation des contractures. Sa durée est en moyenne de 48 heures ; plus elle est courte, plus le tétanos est sévère.
Le maître symptôme est le trismus, constituant le grand signe d’alarme. Au début, il s’agit d’une simple limitation de l’ouverture buccale, gênant l’élocution et la mastication puis rapidement le trismus devient caractéristique avec des arcades dentaires serrées.
C’est une contracture des muscles masséters bilatérale et symétrique, visible et palpable, permanente avec des paroxysmes, irréductible et douloureuse, et retenant captif l’abaisse-langue introduit entre les arcades dentaires ; c’est le signe de l’abaisse-langue captif d’ARMANGAUD.
La fièvre est absente et la conscience parfaitement conservée.
Période d’état
En 48 à 72 heures, le tétanos se généralise. Les contractures s’étendent d’abord aux muscles de la face, de la nuque, du pharynx, puis à tout le corps.
Ces contractures sont permanentes, intenses, bilatérales, symétriques, douloureuses car le patient est conscient.
9 Au niveau de la face : les muscles peauciers de la face contractés donnent le «rictus sardonique» avec accentuation des rides. Mais la mobilité oculaire est conservée car les muscles extrinsèques des yeux sont respectés.
9 Au cou : on note une tension de la corde des sterno-cléido-mastoïdiens entraînant une raideur de la nuque ; la tête qui est rejetée en arrière : «tête qui creuse l’oreiller».
9 Au tronc : les muscles para vertébraux sont touchés et leur contraction accentue la lordose lombaire permettant classiquement de glisser la main entre le plan du lit et le dos du malade : c’est la position en Opisthotonos. L’abdomen est rétracté en bateau donnant le classique ventre de bois.
9 Aux membres : les membres supérieurs sont en flexion tandis que les membres inférieurs sont en extension avec les pieds en équin ; la démarche est dite guindée.
9 Les muscles viscéraux sont aussi atteints entraînant : constipation, rétention d’urines, dysphagie et dyspnée.
Sur ce fond de contractures généralisées surviennent des paroxysmes qui sont des crises brèves consistant en un renforcement de ces contractures. Ils sont toniques ou tonico-cloniques. Les paroxysmes sont déclenchés soit spontanément, soit par le bruit, la lumière, ou toute tentative d’examen, et s’accompagne d’une douleur et d’une angoisse extrême.
Sur le plan général, on peut noter : une polypnée, une tachycardie, des poussées hypertensives, des sueurs profuses, une baisse de la diurèse, une insomnie grave et parfois une légère ascension thermique.
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Table des matières
NTRODUCTION :
PREMIERE PARTIE : GENERALITES
2.1- Historique
2.2- Etude épidémiologique
2.3- Etude bactériologique
2.4- Portes d’entrée
2.5- Etude physiopathologique
2.6- Etude clinique
2.6.1- Type de description : Tétanos du post abortum de la jeune femme non vaccinée
2.6.1.1- Incubation
2.6.1.2- Début ou période d’invasion
2.6.1.3- Période d’état
2.6.1.4- Evolution – pronostic
2.6.2- Formes cliniques
2.7- Diagnostic
2.7.1- Diagnostic positif
2.7.2- Diagnostic différentiel
2.7.3- Diagnostic étiologique
2.8- Traitement du tétanos
2.8.1- Traitement curatif
2.8.1.1- Buts
2.8.1.2- Moyens
2.8.2- Traitement préventif
2.8.2.1- Prévention collective
2.8.2.2- Prévention individuelle
DEUXIEME PARTIE : TRAVAIL PERSONNEL
1- CADRE D’ETUDE, MALADES ET METHODES
1.1- Cadre D’étude
1.2- Malades et méthodes
2- RESULTATS
2.1- Etude descriptive
2.1.1- Aspects épidémiologiques
2.1.2- Aspects cliniques
2.1.3-Aspects pronostiques et évolutifs
2.2- Etude analytique
3- DISCUSSION
3.1- Aspects épidémiologiques
3.2- Aspects cliniques
3.3- Aspects évolutifs
3.4- Facteurs pronostiques
4- CONCLUSION ET RECOMMANDATIONS
5- REVUE BIBLIOGRAPHIQUE
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