Burnout des étudiants à l’enseignement

Burnout des étudiants à l’enseignement

Le burnout n’est pas un phénomène réservé aux professionnels. Il touche en effet aussi les étudiants et il est causé non pas par le travail ou les relations sociales au travail, mais par les études. Dans ce cas, l’épuisement émotionnel se réfère au fait qu’un étudiant se sent vidé à cause des nombreuses exigences de ses études. Le cynisme implique un développement d’attitudes cyniques face à ses études et la réduction d’accomplissement personnel se traduit par le fait de se sentir incompétent en tant qu’étudiant (Schaufeli, Martínez, Marques Pinto, Salanova, & Baker, 2002). Contrairement au burnout des enseignants (Curchod-Ruedi, Doudin, & Peter, 2009), le burnout des étudiants en général et des étudiants à l’enseignement en particulier est un phénomène peu étudié (Jacobs & Dodd, 2003 ; Schorn & Buchwald, 2007). Ainsi, peu de facteurs de risque et de protection du burnout ont pu être mis en évidence.

Quelques études (e.g., Chan 2003 ; Fimian & Blanton, 1987 ; Frey, 2014) démontrent que le degré de stress perçu représente un facteur de risque du burnout. Fimian et Blanton (1987) relèvent une corrélation positive entre ce facteur et le score total de burnout, tandis que Chan (2003) et Frey (2014) relèvent une relation entre le stress et l’épuisement émotionnel, d’une part, et le cynisme, d’autre part. Ce stress est provoqué par différents facteurs, comme la discipline et la motivation des élèves (Fimian & Blanton, 1987), la charge de travail, le comportement des élèves, les relations avec les collègues, la direction ou les formateurs (Chan, 2003 ; Frey, 2014). A ce sujet, Schorn et Buchwald (2007) s’intéressent aux stratégies de gestion du stress et démontrent que certaines stratégies, comme le fait de se montrer bienveillant envers autrui et l’évitement, entre autres, augmentent le risque dans certaines dimensions du burnout, tandis que d’autres stratégies réduisent ce risque. De plus, Jacobs et Dodd (2003) et Frey (2014) démontrent que la charge subjective de travail, c’est-à-dire la quantité de travail perçue corrèle positivement avec l’épuisement émotionnel (Jacobs & Dodd, 2003; Frey, 2014), le cynisme (Jacobs & Dodd, 2003 ; Frey, 2014), et la réduction de l’accomplissement personnel (Frey, 2014), alors que la charge objective de travail (nombre d’heures enseignées, type de stage effectué, par exemple) n’est pas liée au burnout (Jacobs & Dodd, 2003) ou liée dans une moindre mesure (uniquement par les dimensions « type de stage » et dans un seul cas « présence d’enfants ») à l’épuisement émotionnel et au cynisme (Frey, 2014).

Les résultats concernant le facteur « genre » sont variables. Selon Schorn et Buchwald (2007), le genre n’est pas lié au burnout, tandis que l’étude de Frey (2014) démontre que les femmes présentent un risque plus élevé d’épuisement émotionnel que les hommes. En ce qui concerne les facteurs de protection, quelques recherches ont analysé le lien entre le burnout et le soutien social. Ce dernier est défini comme « le réseau d’aide qu’une personne peut solliciter lorsqu’elle est confrontée à des situations professionnelles problématiques » (Doudin et al., 2011, p. 22). On distingue plusieurs types de soutien: le soutien instrumental (Hobfoll, 1988, cité par Doudin et al. 2011, p. 23) donne une assistance pour résoudre une situation problématique dans le cadre professionnel (conseils « techniques » ou feedback en lien avec la situation problématique) et il est généralement prodigué par des professionnels (dans le cas des étudiants à l’enseignement, il s’agit par exemple de collègues enseignants ou de formateurs dans l’institution de formation) ; le soutien émotionnel (Hobfoll, 1988, cité par Doudin et al. 2011, p. 23) permet d’aider dans la régulation émotionnelle (par des manifestations d’empathie, de bienveillance ou d’amour) et il a généralement pour source les proches (famille, conjoint, amis).

A cette taxonomie, Curchod-Ruedi et ses collègues (2009) ont ajouté un troisième type de soutien, à savoir le soutien mixte qui permet à la fois une assistance technique et un soutien dans la régulation des émotions. Ce type de soutien est fourni par des professionnels de la branche qui entretiennent des liens d’amitié avec la personne ayant besoin de soutien (dans le cas des étudiants, il s’agira par exemple de collègues enseignants amis ou d’étudiants amis). Les recherches portant sur le burnout des étudiants à l’enseignement démontrent que le soutien social représente un facteur de protection du burnout. En effet, le soutien perçu corrèle négativement avec le cynisme (Fives, Hamman, & Olivarez, 2006 ; Jacobs & Dodd, 2003) et positivement avec le sentiment d’accomplissement personnel (Jacobs & Dodd, 2003). Selon Frey (2014), c’est plutôt le degré de satisfaction du soutien reçu qui est important. En effet, plus les étudiants interrogés sont satisfaits du soutien reçu, moins leur risque de cynisme est élevé.

Burnout des étudiants à l’enseignement : nouvelles pistes et cadres théoriques

Les études décrites précédemment sont un très bon point de départ pour une nouvelle recherche, car elles mettent en évidence l’importance de certains facteurs, tels que le stress et le soutien social, et elles offrent quelques pistes pour identifier de nouveaux facteurs de risque et de protection du burnout. Il s’agit donc de s’intéresser à quelques facteurs qui n’ont pas ou peu été étudiés et de s’appuyer sur certaines théories déjà existantes pour élargir le champ de recherche. Le stress apparaît comme étant un facteur important de risque. Rappelons cependant que le stress est subjectif : l’apparition du stress dépend « de la perception subjective des conditions aversives et des capacités d’adaptation qu’a le sujet » (Janot-Bergugnat & Rascle, 2008, p. 19). Ainsi, non seulement, les individus ne considèrent pas tous les mêmes situations comme stressantes, mais aussi leurs manières de gérer ce stress diffèrent et peuvent avoir une influence sur l’apparition du burnout, comme Schorn et Buchwald (2007) l’ont démontré.

Au vu de l’importance du facteur stress, il nous semble pertinent de nous intéresser de plus près aux stratégies de gestion de stress. Selon Lazarus et Folkman (1984), le « coping » ou gestion du stress se définit comme les efforts cognitifs et comportementaux qu’un individu met en place pour gérer les demandes externes ou internes qui sont considérées comme allant au-delà des ressources de ce dernier. Les stratégies de coping sont nombreuses et il existe plusieurs classifications de ces stratégies, mais il est fréquent de les classer dans deux catégories principales : les stratégies centrées sur le problème et les stratégies centrées sur l’émotion (Folkman, Lazarus, Dunkel-Schetter, DeLongis, & Gruen, 1986 ; Bruchon-Schweitzer, 2001). Ces deux catégories sont liées aux deux fonctions principales du coping: agir sur la relation individu-environnement qui est à l’origine du stress (stratégies centrées sur le problème) et réguler les émotions stressantes (stratégies centrées sur l’émotion) (Folkman et al., 1986).

Les stratégies centrées sur le problème ont donc pour but de réduire les exigences de la situation ou augmenter ses propres ressources pour mieux faire face au problème. Elles comprennent deux dimensions : l’une concerne la résolution du problème et l’autre, l’affrontement du problème (Bruchon-Schweitzer, 2001). Les stratégies liées à la première dimension sont par exemple l’organisation hiérarchique des choses à faire, la recherche d’informations (dans la littérature par exemple), la recherche de soutien instrumental (de conseils de professionnels de la branche pour résoudre le problème) et celles liées à la deuxième dimension sont toutes les stratégies qui visent directement à affronter une situation stressante (se mettre au travail pour terminer ses dossiers à temps ou réussir un examen, dialoguer avec l’élève pour gérer son mauvais comportement en classe, donner du travail à un élève pour garantir une meilleure gestion de classe) (Bruchon-Schweitzer, 2001). Les stratégies centrées sur l’émotion visent toutes à gérer les réponses émotionnelles induites par la situation.

On retrouve la recherche de soutien émotionnel (dialoguer avec ses proches, par exemple), l’expression de ses émotions (pleurer, exprimer sa colère, son anxiété), la distraction (activité de substitution comportementale ou cognitive comme le sport ou la musique), l’évitement (fuir le problème en séchant un cours par exemple), l’acceptation (accepter la situation), la relativisation (considérer tout le contexte dans lequel se situe le problème), la réévaluation positive (considérer l’aspect positif de la situation), l’humour (rire de la situation) et la consommation de substances (Bruchon-Schweitzer, 2001 ; Montgomery, 2010 ; Paulhan, 1992).2 Il n’est pas possible de dire qu’une stratégie de coping est efficace en elle-même, car son efficacité dépend des caractéristiques de la situation vécue (durée et contrôlabilité du stresseur). Ainsi, une stratégie de gestion centrée sur le problème sera efficace dans une situation perçue comme contrôlable, tandis qu’une stratégie centrée sur l’émotion sera plutôt efficace dans une situation perçue comme incontrôlable (Bruchon-Schweiter, 2001). Cependant, Truchot (2004) conclut de sa revue des études sur ces stratégies de coping qu’en général, les stratégies centrées sur le problème sont plus efficaces que celles centrées sur l’émotion. Une étude d’Anderson (2000) sur les stratégies de coping de travailleurs sociaux (dans le domaine de la protection de l’enfance) montre que des stratégies d’engagement, telles que la résolution du problème, la restructuration cognitive, la recherche de soutien social et l’expression des émotions corrèlent avec une diminution du cynisme et une augmentation du sentiment d’accomplissement personnel. Par contre, des stratégies de désengagement, telles que l’évitement, le fait de souhaiter que la situation soit différente, le retrait social et l’auto-critique sont liées à une réduction de l’accomplissement personnel.

Procédure et instruments de mesure

La récolte des informations auprès des participantes a eu lieu entre le 2 et le 17 décembre 2014. Elle a duré à chaque fois entre trente minutes et une heure et s’est déroulée en deux temps : chaque participante a d’abord rempli un questionnaire récoltant des informations démographiques et des données sur le risque de burnout (voir annexe 1). Puis, elle a pris part à une interview semi-guidée, lors de laquelle elle a répondu à des questions sur les différentes variables à étudier, à savoir les stratégies de gestion du stress, les activités de loisirs, le soutien social, les émotions agréables et désagréables et la régulation de ces émotions désagréables (voir annexe 2). Voici une courte description des informations récoltées. Données démographiques : âge, nombre de semestres effectués dans l’institution de formation, nombre de périodes enseignées à l’école, nombre de périodes hebdomadaires suivies dans l’institution de formation, autres activités professionnelles et présence d’enfants. Burnout : les trois dimensions du burnout ont été mesurées au moyen de l’échelle de burnout MBI-SS pour étudiants (Schaufeli et al. 2002, version traduite en français), qui a été adaptée aux étudiants à l’enseignement. Cette échelle comprend seize items : cinq pour l’épuisement émotionnel, cinq pour le cynisme et six pour l’accomplissement personnel. Les étudiantes interrogées doivent estimer la fréquence de ces items selon une échelle de six degrés, allant de 0 (« jamais») à 6 (« chaque jour » ; voir questionnaire, annexe 1).

En nous basant sur une classification des scores de burnout élaborée par Kalimo et al. 2006 (cité par Toppinen-Tanner 20115), nous avons catégorisé les participantes selon leur degré d’épuisement émotionnel, de cynisme et de réduction d’accomplissement personnel. Stratégies de gestion du stress : chaque étudiante a expliqué la manière dont elle gère son stress. Ces stratégies ont ensuite été classées dans les catégories décrites par Bruchon-Schweitzer (2001), Lazarus et Folkman (1986) et Montgomery (2010), qui peuvent être résumées par la dichotomie des stratégies centrées « sur le problème » ou « sur l’émotion ». Activités de loisirs : chaque étudiante a évoqué ses activités de loisirs. Celles-ci ont ensuite été classées selon les catégories suivantes : activités sportives (pratiquées seule ou avec interaction), activités sociales, activités créatives ou productrices (pratiquées seule ou avec interaction), activités à tendance culturelle (pratiquées seule ou avec interaction). Soutien social : chaque étudiante a évoqué le soutien social dont elle peut bénéficier dans des situations problématiques à l’école ou dans l’institution de formation. Ce questionnement sur le soutien social a été adapté du questionnaire utilisé par Doudin et al. (2011) dans le cadre de leur étude sur le soutien social des enseignants. Indice de satisfaction : chaque étudiante a dû indiquer à quel point les stratégies de gestion de stress, les activités de loisirs et le soutien social reçu la satisfont. Selon la réponse de l’étudiante, des points lui ont été attribués.

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Table des matières

Introduction
1. Burnout : revue de la littérature
1.1Le burnout des professionnels
1.2 Burnout des étudiants à lenseignemen
1.3 Burnout des étudiants à lenseignement : nouvelles pistes et cadres théoriques
2. Problématique
3. Etude exploratoire auprès détudiantes à lenseignement : méthodologie
3.1Population
3.2 Procédure et instruments de mesure
3.3 Plan danalyse
4. Résultats
5. Discussion
6. Conclusion
7. Références bibliographiques
Annexes

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