Biodiversité interspécifique et intraspécifique des extractibles nodaux

La forêt mondiale couvre un tiers des terres émergées (environ 4 milliards d’hectares) et constitue le principal réservoir de biodiversité de la planète (FAO 2014). Les services rendus par la forêt sont nombreux et continueront à être essentiels. Le principal service correspond à leur rôle dans l’atténuation du changement climatique. Le fonctionnement des forêts, essentiellement à travers les arbres qui les constituent, a un impact environnemental fondamental en participant et en régulant le cycle de l’eau et celui des éléments chimiques tels que l’azote, le phosphore et surtout le carbone (Suty, 2015). Créatrice d’emplois, la forêt joue également un rôle socio-économique et culturel important servant d’abris pour les populations, de lieux spirituels, de sources de nourriture, de matériaux et d’énergie. Les végétaux en général, et les arbres en particulier, sont des organismes vivants remarquables en ce sens qu’ils survivent dans leur environnement où ils doivent assurer eux-mêmes leur nutrition, leur défense et donc leur longévité. Ce caractère autotrophe les a contraints à mettre en place et faire évoluer des mécanismes sophistiqués de défense. Ce sont les métabolites secondaires qui remplissent ce rôle de protection qui sera détaillé par la suite. Par ailleurs, ces métabolites secondaires sont également responsables de l’attraction des pollinisateurs et des disperseurs de graines et de la communication entre les plantes ou avec leurs symbiotes. La communication entre les plantes a été mise en évidence par une expérimentation avec des peupliers (Baldwin and Schultz, 1983) montrant que ces derniers relarguaient environ 1/5 du CO2 fixé sous forme de volatiles pour la signalisation chimique (Baldwin, 2010). Plusieurs définitions existent pour définir un métabolite secondaire. Souvent ces définitions mettent les métabolites secondaires en opposition avec les métabolites primaires pour les désigner : Ce sont des molécules synthétisées dans un second temps après la mise en place de la structure primaire du végétal avec la matrice ligno-cellulosique. Ce sont des molécules simples de faible poids moléculaire par opposition aux polymères ligno-cellulosiques. Ce sont des molécules intervenant à un faible pourcentage dans la composition chimique du végétal (de l’ordre de 10 %) par opposition aux métabolites primaires qui représentent jusqu’à 90 % de la composition chimique. Ce sont des molécules appartenant à des familles chimiques très diverses et aux propriétés et rôles dans le végétal tout aussi vastes et non encore élucidés dans leur globalité.  Ce sont des molécules qui varient en nature et en quantité d’un genre à un autre, d’une espèce à une autre, et même à l’intérieur d’un même individu par opposition aux métabolites primaires qui sont présents chez tous les végétaux.

Formation des branches et des nœuds

Les nœuds sont définis comme le prolongement des branches dans le tronc, ils sont donc invisibles lorsque l’arbre est sur pied. La limite entre le nœud et la branche qui le prolonge est communément placée au niveau de l’écorce de l’arbre sous la forme d’un bourrelet d’insertion (Figure 1). Cette limite est virtuelle puisque la branche est la continuité du nœud. De manière générale, les résineux ont bénéficié de plus d’études sur leurs branches et nœuds que les feuillus, en raison de la forme plus simple de ces derniers et de l’importance économique des conifères.

Caractéristiques morphologiques des branches 

La ramification des plantes est le processus permettant la formation de rameaux latéraux. Dans la suite, seuls les branches et les nœuds séquentiels seront évoqués (les nœuds des gourmands et des épicormiques ne seront pas abordés). Une branche séquentielle a pour origine un bourgeon axillaire se trouvant à l’aisselle d’une feuille et qui s’est développé l’année suivant sa mise en place. La branche ainsi formée est une tige feuillée dont la moelle est directement liée à la moelle du tronc (Figure 1). Les branches et donc les nœuds qui sont distribués à peu près dans le même plan transversal et en cercle autour de la moelle constituent un pseudo verticille ou plus communément un verticille de branches/nœuds (Figures 2 et 3).

Les branches verticillaires sont celles qui ont été formées à partir des bourgeons déposés à la fin d’une unité de croissance (UC) ou d’une pousse annuelle (PA) par opposition aux branches interverticillaires formées à partir de bourgeons déposés entre deux limites de pousses annuelles.

L’ensemble des branches vivantes d’un arbre forme le houppier vert (ou la couronne verte). Les branches sont le support des organes photosynthétiques et reproducteurs des arbres, et assurent aussi les fonctions hydrauliques et mécaniques tout en étant en compétition avec les branches du même arbre et celles des voisins ; il n’est donc pas possible pour l’arbre de s’en passer pour sa croissance et sa survie. Ce sont les conditions de croissance qui déterminent les caractéristiques des branches. Ainsi, les besoins en lumière et espace créent des situations de compétition entre les houppiers d’arbres voisins et entre les branches d’un même arbre qui conditionnent leurs dimensions (longueur et largeur) et leur angle d’insertion dans le tronc (Hein et al., 2007, 2008; Lundqvist and Elfving, 2010; Spathelf, 2003). Par exemple, un arbre ayant poussé de manière isolée a de grosses branches surtout à la base du houppier qui est trapu (long et large) alors qu’un arbre issu d’un peuplement dense a un houppier réduit (court et étroit) avec des branches plus fines (Newton et al., 2012) (Figure 4). Ces caractéristiques morphologiques de la couronne reflètent l’acclimatation de l’arbre et de ses branches aux conditions environnementales.

Les caractéristiques des branches déterminent celles des nœuds, du moins celles de l’extrémité des nœuds. Les branches situées dans la cime des arbres sont fines et redressées (Figure 2). Par conséquent, les nœuds connectés à ces branches ont une forme linéaire et un faible angle d’inclinaison par rapport au tronc (Duchateau et al., 2013). Puis le diamètre des branches et des nœuds augmente en se dirigeant vers la base du houppier pour atteindre un maximum vers les 2/3 de la longueur de la couronne vivante. Le diamètre se stabilise ou décroit légèrement au niveau de la
base du houppier. Celle-ci est constituée par des branches âgées et plus chargées (rameaux, feuilles, fruits, vent, etc.) ; elles ont donc opéré un équilibrage de leur orientation pour satisfaire les fonctions hydraulique et mécanique. Ces branches sont plus rigides, les nœuds qui les maintiennent ont une forme courbée et sont orientés horizontalement (Courbet et al., 2012; Duchateau et al., 2013; Hein et al., 2007, 2008; Houllier et al., 1995; Kantola et al., 2007; Makinen et al., 2003). De plus, il semblerait que l’angle final qu’atteint une branche par rapport au tronc principal soit aussi contrôlé génétiquement (Fisher and Stevenson, 1981). Les branches en dessous du houppier déclinent soit naturellement par manque de lumière et de nutriments, soit parce qu’elles ont été coupées ou cassées (interventions sylvicoles, frottement avec les autres houppiers, vent, etc.). Dès lors, la branche ne croit plus et meurt peu de temps après. Des microorganismes déjà présents sur la branche la dégradent progressivement depuis son extrémité jusqu’à sa base. Elle finit par disparaitre plus ou moins rapidement, c’est le phénomène d’élagage naturel.

Croissance radiale du tronc et des branches

La croissance des arbres est possible grâce aux apex se trouvant aux extrémités des tiges (tronc, branches et racines). La croissance en diamètre est quant à elle assurée essentiellement par un méristème secondaire latéral appelé cambium et situé sous l’écorce (Figure 5). En effet, il existe une autre assise génératrice dans l’écorce appelée phellogène formant le suber vers l’extérieur et du phelloderme vers l’intérieur. Seuls les végétaux pérennes et possédant une assise cambiale peuvent former du bois, encore appelé xylème secondaire. Les plus anciennes traces de début de formation du bois ont été identifiées sur un spécimen retrouvé en France dont la datation remonte à environ 407 millions d’années. Les auteurs soutiennent que le bois a été mis en place par ces plantes d’abord dans le but d’augmenter la conduction hydraulique (Gerrienne et al., 2011).

Le cambium
A chaque saison de végétation, le cambium forme, par divisions périclinales, du xylème secondaire vers l’intérieur (en direction de la moelle) et du phloème secondaire (liber) vers l’écorce ; d’où l’appellation « assise génératrice libéro ligneuse » pour désigner le cambium (Figure 7). L’arbre possède un seul cambium durant toute sa vie. Les cellules initiales fusiformes, orientées longitudinalement, sont des cellules cambiales qui formeront le xylème (bois) ou le liber (phloème) par divisions cellulaires. Le cambium possède aussi des cellules initiales isodiamétriques, moins nombreuses que les précédentes, qui donneront naissance aux rayons ligneux ou libériens orientés radialement. La division cellulaire cambiale est initiée par des hormones (l’auxine, la cytokinine et les gibbérellines) qui contrôlent tout le cycle cellulaire. Les divisions périclinales permettent à l’arbre d’accroitre son diamètre alors que les divisions anticlinales lui permettent d’augmenter sa circonférence. C’est la croissance du xylème secondaire qui contribue le plus à la croissance radiale globale de l’arbre. En effet, les cellules de bois sont plus nombreuses et s’accumulent durant la vie de l’arbre contrairement aux cellules de phloème secondaire (Cuny and Rathgeber, 2014).

Formation d’un cerne d’accroissement
Lors de la division de la cellule cambiale fusiforme pour donner lieu à deux cellules filles, une cloison les séparant se met en place à partir de vésicules de l’appareil de Golgi, elle deviendra plus tard la membrane plasmique des cellules. Les vésicules continuent de fournir des précurseurs pour former la lamelle moyenne et la paroi primaire. Les cellules nouvellement formées dans la région cambiale entrent dans un processus de différentiation pour prendre leur forme finale (trachéides dans les résineux, fibres et vaisseaux dans les feuillus). D’abord la cellule subit un élargissement irréversible par entrée d’eau et grossissement de la vacuole qui se remplit d’eau et de solutés. S’en suit alors le dépôt de la paroi secondaire constituée de trois couches S1, S2 et S3 disposées de l’extérieur vers l’intérieur de la cellule (Figure 13). La lignification de l’ensemble (lamelle moyenne, parois primaire et secondaire) est l’ultime étape de cette différentiation cellulaire et qui confère à la paroi sa rigidité et son hydrophobicité (Figure 5). Finalement, la cellule se vide de son contenu lors de la mort cellulaire programmée et finit par former une cellule mature et fonctionnelle pour le soutien mécanique et le transport de la sève. L’ensemble des cellules formées lors d’une saison de végétation (du printemps à l’automne dans les régions tempérées) constitue un cerne annuel de croissance cylindrique qui s’accumule de manière concentrique. Pour les essences des régions tempérées, ces cernes sont visibles sur une coupe transversale (Figure 7).

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Table des matières

Remerciements
Table des matières
Liste des figures
Liste des productions scientifiques
Liste des articles
Liste des présentations orales et affichées
Introduction
Objectifs de la thèse
Chapitre 1 Etat de l’art
1 Formation des branches et des nœuds
1.1 Caractéristiques morphologiques des branches
1.2 Croissance radiale du tronc et des branches
1.2.1 Le cambium
1.2.2 Formation d’un cerne d’accroissement
1.2.3. La formation du nœud
1.2.4. L’aubier et le duramen dans le tronc et les branches
1.2.5 Constitution de la paroi d’une cellule de bois
1.2.5.1 La cellulose
1.2.5.2 Les hémicelluloses
1.2.5.3 La lignine
1.3 Les différents types de bois
1.3.1 Le bois de résineux
1.3.2 Le bois de feuillus
1.3.3 Le bois des branches et des nœuds
1.3.4 Le bois de réaction
1.3.4.1 Le bois de compression
1.3.4.2 Le bois de tension
1.3.4.3 Le bois de réaction des branches et des nœuds
1.3.4.3.1 La fonction de soutien mécanique
1.3.4.3.2 La fonction hydraulique
2 Les extractibles dans le bois du tronc
2.1 Les familles d’extractibles
2.1.1 Les terpènes
2.1.2 Les phénols
2.1.2.1 Les lignanes
2.1.2.2 Les stilbènes
2.1.2.3 Les flavonoïdes
2.1.2.4 Les tanins
2.1.3 Les autres composés extractibles
2.2 Rôles des extractibles du bois
2.2.1 Durabilité du bois
2.2.1.1 Formation des extractibles : les réserves et les enzymes
2.2.1.2 Localisation des extractibles
2.2.1.3 Durabilité du bois conférée par les extractibles
2.2.1.4 Contribution biomécanique des extractibles
2.2.2 Formation des extractibles en réponse à une blessure
3 Les extractibles dans les nœuds et les branches
3.1 Fonction de défense des nœuds
3.2 Mise en place de la zone de protection de la branche
3.3 Composition chimique des nœuds et des branches
3.3.1 Les extractibles dans le duramen des branches
3.3.2 Les extractibles dans le duramen des nœuds
3.3.2.1 Variabilité inter-genres des extractibles nodaux
3.3.2.2 Variabilité inter-espèces des extractibles nodaux
3.3.2.3 Variabilité intra-arbre, inter-nœuds des extractibles nodaux
3.3.2.4 Variabilité intra-nœud des extractibles nodaux
3.3.3 Propriétés des extractibles des nœuds
Chapitre 2 Biodiversité interspécifique des extractibles nodaux
1 Introduction
2 Protocole expérimental
2.1 Echantillonnage des nœuds
2.2 Extraction des molécules
2.3 Identification et quantification des molécules
3 Résultats et discussion
3.1 Première campagne d’échantillonnage
3.1.1 L’extraction avec quatre solvants
3.1.1.1 Taux massiques d’extractibles dans les bois
3.1.1.2 Identification et quantification relative des molécules extraites
3.1.1.2.1 Identification des extractibles au dichlorométhane dans les bois des résineux
3.1.1.2.2 Identification des extractibles à l’acétone dans les bois des résineux
3.1.1.2.3 Identification des extractibles au dichlorométhane dans les bois des feuillus
3.1.1.2.4 Identification des extractibles à l’acétone dans les bois des feuillus
Article 1: Quantification and characterization of knotwood extractives of 12 European
softwood and hardwood species
3.1.2 L’extraction avec un seul solvant
3.2 Seconde campagne d’échantillonnage
3.2.1 Cas des résineux
3.2.1.1 Taux massiques d’extractibles dans les bois
3.2.1.2 Identification des extractibles au dichlorométhane dans les bois des résineux
3.2.1.3 Identification des extractibles à l’acétone dans les bois des résineux
3.2.2 Cas des feuillus
3.2.2.1 Taux massiques d’extractibles dans les bois
3.2.2.2 Identification des extractibles au dichlorométhane dans les bois des feuillus
3.2.2.3 Identification des extractibles à l’acétone dans les bois des feuillus
Article 2: Knotwoods of different wood species as potential sources of valuable natural phenolic
compounds.
3.3 Effet de la variabilité interspécifique sur la toxicité des extractibles vis-à-vis de Trametes
versicolor
Article 3: The GSTome reflects the chemical environment of white-rot fungi
4 Synthèse du chapitre 2
Chapitre 3 Biodiversité intraspécifique des extractibles nodaux
Article 4: Abies alba knot extractives: Variability according to silviculture, social status and position within the crown.
1 Abstract
2 Introduction
3 Material and methods
3.1 Field experiments data
3.2 Tree sample
3.3 Wood Material
3.4 Wood extraction and chromatographic analysis
3.5 Display of results and statistical analysis
4 Results
4.1 Knot extractives determination
4.1.1 Knot extractives in the living crown
4.1.2 Extractive concentrations in loose knots
4.2 Modelling the knot extractives in the living crown
4.3 Identification of the knot extractives
5 Discussion
5.1 About our methodology
5.2 About the occurrence of lignans in the fir knot extractives
5.3 About the within-tree variation
5.3.1 A conspicuous vertical profile of knot extractives in the living crown
5.3.2 High extractives content in the loose knots
5.4 About the between-tree variation: a silvicultural influence on knot extractives
5.4.1 Lessons from modelling
5.4.2 Between-plot variability
5.4.3 Within-plot variability
6 Conclusion

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