Analyse syntaxique
Analyse énonciative
Introduction
Après avoir distingué dans le chapitre deux types de titres ; d’une part, le titre informatif qui coiffe les articles d’information ; d’autre part, le titre commentatif dont le cotexte est un article de commentaire ; et après avoir dégagé les structures syntaxiques qui se référent à chacun d’eux, nous essaierons dans ce présent chapitre d’apporter des éléments de réponse à notre dernier questionnement ; il s’agit en fait de confirmer notre hypothèse de recherche selon laquelle le titre de presse se concevrait en fonction des stratégies discursives.
Dans cette perspective, nous soumettrons notre corpus de titres à une analyse énonciative, une analyse au terme de laquelle nous cernerons, espérons-le, ces stratégies que l’instance médiatrice mettrait en spectacle afin de répondre aux multiples contraintes discursives régissant chacun des deux pôles génériques.
Avant toute chose, en abordant le discours de la presse écrite en termes de stratégies discursives, il nous semble impératif de ne pas limiter notre étude uniquement à la seule description du titre mais souhaitons y inclure ses protagonistes : l’instance de production et l’instance de réception ; quel type de liens tisseraient-elles ?
En fait, ces deux instances, acteurs de l’univers médiatique, entretiennent une relation interactionnelle régie par un contrat sous lequel le titre, objet d’interactivité donc, prend sens :
Le contrat de communication
Tout domaine de pratiques sociales tend à instaurer des régularités langagières qui le caractérisent et à travers lesquelles il se distingue ; Jakobson (1960 :213-260), s’intéressant à la fonction communicative du langage, propose un contrat selon lequel tout acte communicatif nécessite un émetteur, un message, un récepteur, un canal, un code et un référent ; voici comment nous imaginons ce contrat si nous voulons l’appliquer au titre
Si nous nous en tenons à ce schéma, le titre de presse est alors un message conçu par un scripteur-émetteur destiné à un lecteur-récepteur par la voie d’un canal-support qu’est le journal (Le Soir d’Algérie est pris comme exemple) ; par ailleurs, un code grâce auquel l’intercompréhension est possible, ici les signes graphiques ainsi que l’ensemble des règles linguistiques du français, est un autre facteur essentiel à ce contrat ; enfin, le titre porte en lui un contenu sémantique, c’est-à-dire un référent qui peut être réel ou supposé :
1) Le pourrissement gagne l’université
2) Batna au centre du crime organisé
3) L’Algérie sans tribunaux administratifs
Dans le même ordre d’idées, Jakobson (1960 : 213-260) distingue en tout six facteurs de communication auxquels correspondent six fonctions communicatives du langage que nous illustrons dans le tableau suivant :
Le titre, nous semble-t-il, est un énoncé régi par tous ces éléments qui constituent le contrat de communication mais au niveau des fonctions, il serait impertinent à notre sens de le concevoir comme un message gouverné par la seule fonction référentielle dans la mesure où toutes ces fonctions pourraient être véhiculées dans un seul titre; d’ailleurs, les fonctions expressive, conative et poétique, par exemple, pourraient être dans une certaine mesure décisives dans le titre commentatif :
4) En matière de main, tout est dans le coude !
5) Quand mon pays avait des moustaches
6) Si même les girouettes s’y mettent maintenant
D’ordre linguistique lorsque le message est un fait délibéré et psychologique lorsqu’il est involontaire, ces fonctions peuvent être toutes réunies ou du moins indiquées dans un seul message et non une seule fonction spéciale qui serait en dehors des autres ; ce sont en peu de termes quelques remises en question que l’on a faites au schéma Jakobsonien.
Par ailleurs, dans le cadre d’analyse qui est le nôtre, il est clair que ce contrat ne rend pas compte des fonctions pragmatiques du titre de presse, celles qui nous intéressent le plus ; ainsi par exemple, ce titre de chronique :
7) Cannes encore sans les algériens
qui fait allusion à l’absence du film algérien, une fois de plus, au festival cinématographique de Cannes, prendrait un autre sens s’il chapeaute un article d’information :
– CINEMA
Cannes encore sans les algériens
Dans les deux cas, la production et la réception du titre ne serait pas la même pour autant que l’orientation pragmatique de l’un, énoncé subjectivement, tendrait à supposer une opinion ; tandis que l’autre ne consisterait qu’à livrer de façon objective une information ; la signification du titre de presse dépend alors des conditions de son énonciation. Cependant, Kerbrat-Orecchioni (1980 :19) révise le schéma de Jakobson et propose un modèle plutôt centré sur les conditions d’énonciation, les compétences et les contraintes
liées à la situation de la communication :
Ces deux modèles de communication ; l’un, fortement cité et critiqué, est centré sur les facteurs et les fonctions du langage ainsi que dans une moindre mesure l’autre, qui est essentiellement basé sur le processus Production-Interprétation, ne peuvent en aucun cas satisfaire notre démarche ; d’autant plus qu’ils ciblent la communication dans son sens global et non pas un domaine particulier des activités communicatives, sans compter également le privilège de l’aspect oral sur lequel sont fondés ces contrats.
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Table des matières
Introduction générale
Chapitre I : Analyse syntaxique
Introduction
1. Dispositions formelles du titre
2. Procédures de construction
3. La ponctuation dans le titre
Bilan, Le titre de presse : une syntaxe spécifique
Chapitre II : Quelle structure pour quel titre ?
Introduction
1. Le titre dans les genres à énonciation objectivisée
2. Le titre dans les genres à énonciation subjectivisée
Bilan, Le titre de presse : une syntaxe déterminée par le genre discursif
Chapitre III : Analyse énonciative
Introduction
1. Le contrat de communication
2. Le contrat de l’information médiatique
3. La presse écrite, un dispositif de lisibilité
4. Les stratégies discursives dans le titre
Bilan, Le titre de presse : entre contraintes et stratégies discursives
Conclusion générale
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