Bénéfice du travail sur la consommation de soins de personnes en situation de handicap psychique

Bénéfice du travail sur la consommation de soins de personnes en situation de handicap psychique travaillant au sein d’un ESAT

INTRODUCTION

Nous avons effectué l’un de nos stages d’interne dans un service de psychiatrie générale dont l’orientation clinique se focalisait sur les objectifs et les méthodes de la réhabilitation psychosociale.
L’équipe des professionnels s’interrogeait sur les rapports de la santé et du travail et avait réalisé une petite étude pilote sur l’évolution de la consommation de soins des personnes en situation de handicap psychique (PSHP) après intégration dans un établissement d’aide et de service par le travail (ESAT).
Cette recherche s’intéresse à la consommation de soins des PSHP exerçant une activité professionnelle et a permis de dégager quelques résultats apparaissant suffisamment significatifs pour justifier un approfondissement de la question. Dans ce travail, nous exposerons les résultats de cette étude, nous les discuterons, et prolongerons notre réflexion sur la place du travail et de l’emploi dans les parcours de vie et de santé des personnes présentant ce type de troubles. La plupart du temps, nous emploierons par commodité de rédaction le terme de PSHP pour désigner les personnes en situation de handicap psychique.
En partant des réflexions que nous a inspiré cette étude, nous effectuerons un survol de l’état des lieux des données aujourd’hui disponibles sur la question de l’insertion professionnelle de ces personnes.

Contexte et problématique concernant le handicap psychique

En 1946, l’organisation mondiale de la santé (OMS) établit la définition suivante : « La santé est un état de complet bien-être physique, mental et social, et ne consiste pas seulement en une absence de maladie ou d’infirmité ». Cette même institution propose en 2005 une définition de la santé mentale qui stipule qu’une « personne en bonne santé mentale est une personne capable de s’adapter aux diverses situations de la vie, faites de frustrations et de joies, de moments difficiles à traverser ou de problèmes à résoudre ».
Les troubles psychiques deviennent un véritable enjeu de santé publique, notamment de par leur prévalence, leur gravité, leurs coûts (directs et indirects) engendrés mais aussi de par les difficultés rencontrées lorsque l’on parle d’insertion professionnelle et de maintien dans l’emploi des personnes atteintes.
Le handicap psychique est la conséquence directe des troubles psychiques. Il parait d’ores et déjà important de distinguer le handicap psychique et le handicap mental. Le « handicap psychique », toujours associé à des pathologies psychiatriques, présente une certaine variabilité et nécessite une médicalisation alors que le handicap mental est lié à une déficience intellectuelle, à un état stable, et ne nécessite pas de médicalisation continue.
Dans ce travail sera abordé et développé exclusivement le thème du handicap psychique Sur le plan historique, le mot « handicap » vient du terme anglais « hand in cap » qui signifie « main dans le chapeau », expression qui découle d’un jeu d’échanges d’objets personnels qui se pratiquait en Grande Bretagne au 16ème siècle. Un arbitre évaluait les objets et s’assurait de l’équivalence des lots pour garantir l’égalité des chances des joueurs. Le handicap était la situation défavorable de celui qui avait tiré un mauvais lot. Ce terme, que ce soit dans les mythes de l’antiquité, le Moyen Age, la Première guerre mondiale, les représentations (cinématographiques ou artistiques) du 20ème siècle entre autres, a toujours été synonyme d’exclusion, de pauvreté, d’incapacité, d’infirmité, etc. Puis il a été utilisé dans certains sports (courses hippiques où le handicap été attribué aux chevaux), dans les jeux, dans les représentations artistiques puis dans la société (trisomie, invalides de la guerre, etc.) La législation n’a commencé à favoriser ceux qui étaient considérés comme infirmes et exclus de la société qu’à partir de la première moitié du 20ème siècle avec parution des premières lois et création des premières associations pour la défense des personnes handicapées et en situation de handicap.
Au niveau mondial, la schizophrénie, les troubles bipolaires, les addictions, la dépression et les troubles obsessionnels compulsifs (TOC) sont, selon l’OMS, les cinq des dix pathologies mentales les plus préoccupantes du 21ème siècle.
D’après l’union nationale de familles et amis de personnes malades handicapées psychiques (Unafam), au moins 2 millions de personnes souffrent de troubles psychiques sévères, soit 3% de la population française. Mais plus de 3 millions de Français sont concernés directement par les troubles psychiques sévères d’un proche (environ 4% de la population). Au total, pas moins de 5 millions de personnes sont concernées par les conséquences des maladies psychiques en France (8% de la population). Selon les prévisions de l’OMS, en 2020, 33 % de la population française sera touchée, au moins une fois dans sa vie, par un trouble de santé mentale.
Les problèmes rencontrés dans les situations de handicap dit psychique (anciennement dénommé handicap consécutif à des troubles psychiatriques) sont d’ordre relationnel, des difficultés de concentration, une grande variabilité dans la possibilité d’utilisation des capacités alors que la personne garde des facultés intellectuelles normales.
Sur le plan professionnel, les maladies psychiques constituent en France la première cause de reconnaissance d’invalidité professionnelle et le deuxième motif d’arrêt de travail. Elles ont une répercussion économique considérable avec en particulier 22% des invalidités dues aux maladies.
L’insertion professionnelle des personnes en situation de handicap psychique (PSHP) est un sujet d’actualité ainsi qu’une préoccupation au premier plan pour de nombreuses raisons. Au cours de ces dernières années, les soins psychiatriques ont évolué (progrès pharmacologiques et psychothérapeutiques, sectorisation et expansion des structures alternatives, raccourcissement des prises en charges hospitalières) et les pratiques de réhabilitation psychosociale (RPS) se sont développées, en France notamment. La RPS est un processus facilitant le rétablissement d’un individu à un niveau optimal de fonctionnement autonome dans la communauté. Elle met l’accent sur l’intégrité et les forces de l’individu plutôt que sur sa maladie. Les principes qui fondent cette réhabilitation sont la priorité donnée au développement et à l’optimisation des capacités de l’individu, l’apprentissage d’habilités élémentaires et l’autodétermination.

Déterminants du retentissement fonctionnel et de la réintégration

au travail des personnes souffrant de troubles psychiques La maladie a un retentissement fonctionnel sur la personne en situation de handicap psychique. Pour l’apprécier, différents aspects sont à prendre en compte :
 La qualité de vie subjective,
 L’insertion professionnelle,
 L’étendue et la qualité des relations sociales (ou de la vie relationnelle),
 L’autonomie ou l’indépendance dans la vie quotidienne.
Les manifestations symptomatiques de ces dimensions nécessitent d’avoir une approche quantitative et qualitative. On doit pouvoir quantifier la symptomatologie, le déficit cognitif et le retentissement fonctionnel. Et contrairement à ce que l’on pourrait penser, il n’existe qu’une faible corrélation entre ces trois dimensions.(10) De plus, les troubles cognitifs n’expliquent pas les symptômes, que ces derniers soient positifs ou négatifs.
Les symptômes positifs peuvent être les phénomènes hallucinatoires, les idées délirantes, la désorganisation de la pensée et du discours, etc. Ils n’expliquent pas le retentissement fonctionnel. Les symptômes négatifs sont pour partie le ralentissement, l’altération de la motivation voire de la volonté, l’appauvrissement de l’activité. Ils sont en partie corrélés au retentissement fonctionnel.
Les troubles cognitifs sont, pour certains d’entre eux, corrélés au retentissement fonctionnel également. Nous pouvons citer les troubles des fonctions exécutives, les troubles de la mémoire verbale. On relève que la symptomatologie négative et certains troubles cognitifs constituent des facteurs prédictifs de l’aptitude au travail de ces personnes malades. D’autres facteurs, qui ne sont ni des symptômes, ni des déficits cognitifs, se révèlent des déterminants importants des possibilités de réinsertion professionnelle.

MÉTHODE

Population

L’étude a porté sur la consommation de soins de santé des personnes souffrant d’un handicap d’origine psychique travaillant en milieu protégé de travail depuis plus de deux ans. Ont été exclusivement inclus les travailleurs de l’ESAT des Bords de Loire (49130) également suivis par des professionnels de santé du Centre de Santé Mentale Angevin (CESAME).
Cet ESAT a été créé en 1992 et propose des activités soit internes soit externes permettant de répondre aux attentes des usagers qui sont de quatre ordres : les espaces verts, la restauration, la sous-traitance industrielle et la sous-traitance horticole. La vocation des ESAT est d’accompagner par le travail et de dispenser des actions de soutien à caractère professionnel ou médico-social requises par l’intéressé. Elles conditionnent pour lui toute activité professionnelle. Les données recueillies et exploitées ont été extraites de la base du CESAME, fournies par le département d’information médicale (DIM) et s’étalent sur une durée allant de 1994 à 2012. Le DIM gère l’information de santé des patients, y compris les données personnelles dans un centre hospitalier ou dans un établissement privé. Sur la période étudiée, 117 personnes sont employées par cet ESAT, mais seulement 63 personnes sont suivies en parallèle par des médecins psychiatres ou psychologues exerçant au CESAME. Il s’agit donc d’un échantillon représentant une population restreinte de travailleurs au sein de l’ESAT des Bords de Loire ayant une consommation de soins hétérogène car certaines personnes ont consommé des soins avant leur entrée en ESAT alors que d’autres non. Une fois l’échantillon constitué, les données ont été anonymisées. 47 hommes et 16 femmes avec un âge moyen de 44 ans (maximal de 63 ans et minimal de 23 ans) sont inclus. La répartition de l’âge est hétérogène avec 4 personnes ayant un âge compris entre 20 et 30 ans, 13 entre 30 et 40 ans, 27 entre 40 et 50 ans, 16 entre 50 et 60 ans et 3 personnes ont plus de 60 ans.

Mesures

La consommation de soins a été évaluée de manière quantitative sur une période de quatre ans qui correspond aux deux années précédant l’entrée en ESAT et aux deux années qui la suivent permettant ainsi d’explorer les consommations de soins des personnes lorsqu’elles n’ont pas d’emploi (correspondant aux deux années précédant l’entrée en ESAT) avec celles où au contraire elles sont employées (deux années après leur entrée en ESAT).
Cette étude met ainsi en variables le travail en milieu protégé d’un côté et le nombre de recours aux soins de l’autre. Concernant la variable « consommation de soins », elle s’attache à deux domaines distincts qui sont :

 Les prises en charge en ambulatoire (en nombre d’actes) correspondant aux consultations médicales psychiatriques avec ou sans soins psychiques, les participations à des groupes thérapeutiques comme les centres médico psychologique (CMP), les centres d’activité thérapeutique à temps partiel (CATTP), les hôpitaux de jour (HDJ) etc, et,
 Les hospitalisations à temps plein (HTP) dans un service du CESAME (en nombre de jours).

Nous allons nous interroger sur l’existence d’une différence entre la consommation de soins des travailleurs avant et après leur entrée en ESAT. Avec un premier axe « positif » pour savoir si les personnes qui consommaient des soins avant leur entrée en ESAT en consomment moins ou plus du tout après leur entrée en ESAT et si les patients qui n’en consommaient pas avant leur entrée en ESAT n’en consomment toujours pas après l’inclusion en milieu professionnel. Tout cela nous permettra de mettre en évidence d’éventuels bénéfices associés à une activité professionnelle sur la consommation de soins. Puis, avec un deuxième axe « négatif » en essayant de voir si les personnes qui consommaient ou non des soins avant leur entrée en ESAT en consomment davantage une fois en milieu protégé professionnel. Cet axe cherche à détecter les détériorations  éventuelles associées à l’exercice d’une activité professionnelle.
L’objectif de l’étude est donc de déterminer si le travail a un côté positif sur les personnes en permettant de diminuer la quantité de consommation de soins psychiatriques.

RÉSULTATS

La question que nous allons explorer est : existe-t-il un lien entre le travail et le niveau de consommation de soins ?
Par hypothèse, on posera que l’un des indicateurs les plus robustes de la santé est la consommation de soins spécialisés de psychiatrie.
En ce qui concerne les maladies psychiatriques durables et invalidantes, dont l’exemple princeps est la schizophrénie, les soins dispensés par les secteurs de psychiatrie peuvent aussi bien concerner les prises en charges en ambulatoire que les hospitalisations.
Parmi ces différents types de soins pouvant être délivrés, on va considérer que l’hospitalisation complète est l’indicateur le plus fiable, le plus solide et sur lequel nous allons nous appesantir.
En effet, si l’on se réfère à la pratique, quand une personne est hospitalisée, il est hautement probable que son état psychique se soit nettement dégradé. Elle nécessite des soins plus intensifs et a besoin d’une prise en charge en institution.
Le besoin de soins parait indispensable et nécessaire pour ces personnes éprouvant des difficultés dans la vie quotidienne et notamment en emploi du fait de la détérioration de leur état de santé.
A contrario, concernant les prises en charges en ambulatoire, il est plus ambigu d’affirmer qu’une dégradation ou une amélioration de la consommation de soins des sujets est significative. Nous pouvons donner les exemples suivant : quand une personne est employée en ESAT, avec un emploi du temps fixe et des horaires définis, il est plus complexe pour cette dernière de se rendre en HDJ ou en CATTP. Le fait de diminuer le nombre de prises en charge en ambulatoire ne signifie donc pas forcément que ces personnes se sont améliorées sur le plan psychique mais tout simplement qu’elles ont une activité professionnelle occupant leurs journées. De plus, les PSHP nécessitent d’avoir un suivi régulier par un spécialiste, que leur état psychique soit stable ou non, car il s’agit tout simplement d’un suivi médical recommandé et qui fait partie des règles médicales de bonnes pratiques. La nécessité de consultations régulières pour les sujets ayant intégrés un ESAT est une condition indispensable pour réaliser une évaluation médico- sociale et éducative au fur et à mesure de leur avancée dans le monde professionnel. Cela amène doucement à exclure cette variable « prise en charge en ambulatoire » peu significative et se concentrer sur l’hospitalisation complète.

Comparaison de la consommation globale de soins avant/après

l’ESAT pour la population totale Sur l’ensemble de la population étudiée (63 personnes) et dans le cas d’une approche classique de test de comparaison de moyenne, nous observons une différence significative sur le nombre de jours d’HTP.
On note qu’en moyenne et au total, cette population consomme 26 jours d’HTP en moins entre les deux années qui ont précédé leur entrée en ESAT et les deux années qui ont suivi  22 individus (35% de l’échantillon) voient leur nombre de jours d’hospitalisation diminuer avec en moyenne 99 jours d’HTP en moins en moyenne sur les deux dernières années .
En contrepartie, pour 7 individus (11% de l’échantillon), on observe un nombre de jours d’hospitalisation croître avec une augmentation de 73 jours d’HTP supplémentaires en moyenne sur les deux ans suivant l’inclusion en milieu protégé.
Pour 34 individus (54% de l’échantillon), la situation reste inchangée, avec autant de jours d’hospitalisation en comparant la situation avant et après l’admission en ESAT .

Concernant les PSHP ayant eu recours à l’HTP avant l’ESAT

Sur la population des personnes qui, au cours des 4 ans, a été hospitalisée, les résultats sont les suivants :
Avant leur entrée en ESAT et d’après nos données, 24 personnes ont eu recours à des HTP avec 123 jours en moyenne.
Parmi ces 24 personnes, 22 consomment moins de soins hospitaliers après leur entrée en ESAT avec un nombre de 99 jours en moins en moyenne sur les 2 ans suivant l’activité professionnelle. 12 de ces personnes n’ont plus été hospitalisées une fois entrée en ESAT alors qu’elles consommaient 62 jours en moyenne sur les deux ans précédant l’entrée en milieu protégé. Par contre, 2 en consomment davantage avec un nombre de 172 jours en moyenne en plus sur les 2 dernières années de suivi.
D’après ces résultats, on peut dire que le fait de travailler est contemporain d’une diminution de la consommation de soins des PSHP car 50% ne sont plus hospitalisées.
De plus, pour 92 % des personnes ayant été hospitalisées avant leur entrée en ESAT, leur nombre de jours d’hospitalisation se voit diminué.

Concernant les PSHP n’ayant pas eu d’HTP avant l’ESAT

En revanche, avant leur entrée en ESAT, 39 patients n’ont jamais eu d’HTP. 34 d’entre elles n’en ont toujours pas eu après l’ESAT et au contraire 5 personnes en ont consommé avec un nombre en plus de 34 jours en moyenne.
Le fait d’exercer un travail semble, une fois de plus, stabiliser l’état de santé des personnes une fois entrées en ESAT car 87% des personnes ont un nombre de jours d’hospitalisation toujours nul dans les deux années suivant l’admission en ESAT.

DISCUSSION

Résultats observés de l’étude

Cette étude semble montrer qu’exercer une activité professionnelle pour les personnes souffrant de troubles d’origine psychique procure un bénéfice sur la consommation de soins hospitaliers avec une diminution notable du nombre de jours d’HTP.
Pour les « faibles consommateurs » de soins avant leur entrée en ESAT, la consommation de soins reste en moyenne stable pour les deux ans suivants le début de cette activité professionnelle témoignant d’une réelle stabilisation de leur état de santé. Par nature, il paraît plus difficile de diminuer ce qui est déjà faible. Pour les « forts consommateurs » de soins, presque toutes les personnes voient une amélioration significative de leur état de santé avec une diminution de consommation d’HTP, cette dernière étant divisée par quatre dans les deux dernières années de suivi. Ces résultats bruts suggèrent ainsi qu’une activité à caractère professionnel agirait positivement sur la consommation de soins de ces personnes. Le travail en ESAT semble donc bénéfique car non seulement il stabilise l’état de santé mais aussi contribue à son amélioration. Ceci nous renforce dans l’idée que le travail conforte et que son accès doit être recommandé et accompagné pour les personnes en situation de handicap.

Biais et limites méthodologiques

Ces résultats sont néanmoins à considérer avec une certaine prudence du fait d’importants biais et limites méthodologiques.

a. Absence de groupe témoin

Tout d’abord, les conditions de réalisation de l’étude ne permettaient pas la mise en place d’un groupe témoin. Nous avons étudié des PSHP et suivies en parallèle au CESAME deux ans avant et
deux ans après leur insertion au sein de l’ESAT des Bords de Loire afin d’objectiver l’évolution de leur 27 consommation de soins. Différents éléments eussent été nécessaires afin d’évaluer l’impact d’une activité professionnelle en ESAT. Inclure les sujets de façon prospective, puis, comparer des données quantitatives à des personnes présentant également des troubles psychiques n’ayant pas été inclus en ESAT au cours des quatre ans, avec randomisation lors de l’inclusion eut été plus rigoureux. Mais mener à bien une étude prospective sur quatre ans est long, et comparer à des personnes ne travaillant pas pendant ces années peut être éthiquement critiquable. Des opportunités d’exercer une activité professionnelle pourraient s’offrir à ces personnes « témoins » pendant la période de l’étude mais elles ne pourraient s’en saisir dans l’intérêt de cette dernière. Une étude ultérieure serait possible en confrontant des séries rétrospectives comparables de sujets n’ayant pas travaillé. On pourrait aussi imaginer, sur d’autres thématiques, de comparer deux groupes de sujets ayant travaillé dans deux ESAT différents par leur type d’activité, ou dans un autre type de milieu protégé (de type entreprises adaptées) ou encore en milieu ordinaire.

b. La question du diagnostic et de la nature de la pathologie

Aucun diagnostic précis n’est posé pour les sujets de l’étude. Nous savons que ces derniers sont atteints de troubles d’origine psychique mais nous n’avons choisi de recueillir aucune précision concernant la nature de la pathologie, les symptômes résiduels, les troubles cognitifs, etc. Les troubles psychiques sont variés et leurs manifestations également ce qui confère une très grande variabilité clinique aux personnes en situation de « handicap psychique ».
Les données fournies par le DIM s’étalant de 1994 à 2012, auraient peut-être permis un recueil plus exhaustif. On aurait également pu imaginer des entretiens téléphoniques ou l’envoi d’un questionnaire aux personnes concernées par l’étude pour fournir des éléments complémentaires. Mais ces démarches arrivant a posteriori auraient peut-être été incomprises par les usagers.

c. Absence d’information sur les antécédents socio-professionnels

Le caractère rétrospectif de la présente étude induit d’autres limites avec tout particulièrement des imprécisions concernant les données relatives à l’insertion professionnelle et au parcours des personnes. Il se peut tout à fait que les personnes inclues aient déjà travaillé antérieurement pendant une certaine durée. Nous ne connaissons pas les démarches effectuées pour rechercher un emploi ainsi que les aides possiblement reçues. Les motifs d’arrêts de travail s’ils ont eu lieu, ou encore leur durée, n’ont pas été pris en compte non plus.
Des événements intercurrents ont pu intervenir, aussi bien professionnels que personnels, dans l’intervalle des quatre ans de l’étude et modifier l’influence de l’accès au travail. Un changement de conditions de vie, des difficultés familiales, la maladie, l’évolution de la motivation à retravailler sont par exemple des événements pouvant interférer avec l’influence potentiellement favorable d’une activité professionnelle. Une étude prospective de type suivi de cohorte permettrait d’éviter ces biais à condition qu’elle relève toutes les variations sur les paramètres évoqués. Pour autant, ces variables peuvent être considérées comme neutres pour une population, et les recenser n’aurait pas forcément d’impact sur l’interprétation des résultats, sauf à supposer que ces variables sont liées aux chances d’avoir accès à l’emploi.

d. Taille de l’échantillon

Cette étude concerne une petite population de sujets atteints de troubles d’origine psychique ce qui implique qu’il faut garder une certaine prudence quant à l’interprétation de ces résultats statistiques.
Elle exclut les personnes n’ayant pas été suivies par des professionnels de santé appartenant au CESAME mais qui ont pu bénéficier, tout de même, d’autres services de soins ou d’accompagnement différents de ceux proposés par le CESAME. Sur les 117 personnes employées au sein de l’ESAT des Bords de Loire pendant la période donnée, seulement 63 personnes ont bénéficié d’un suivi en parallèle par le CESAME. Les 54 autres individus auraient donc pu bénéficier de soins spécialisés en dehors du CESAME. Mais cette non exhaustivité n’a pas d’impact sur la significativité de l’étude.
Par ailleurs ces personnes sont exclusivement des sujets travaillant au sein de cet ESAT. La question de la représentativité se pose car ces sujets souffrant de troubles psychiques pourraient ne pas être représentatifs de l’ensemble des sujets en situation de handicap psychique sur le territoire Français.
Les données du DIM pourraient être comparées à celles obtenues avec d’autres populations de PSHP, ou dans d’autres milieux professionnels.

Le handicap psychique

a. Quelques chiffres

Les troubles psychiques génèrent le plus souvent des troubles du comportement ainsi que des troubles affectifs perturbant l’adaptation sociale des personnes touchées. Les modalités d’expression du handicap psychique compliquent les relations à l’autre et par conséquent l’insertion sociale.
Environ 600.000 personnes seraient en situation de handicap d’origine psychique, en France, selon les données disponibles, ce qui représente un lourd poids médico socio-économique. 16% des personnes en situation de handicap relèvent du handicap psychique. Selon l’OMS, ces maladies affectant la personnalité et la vie relationnelle touchent une personne sur quatre dans le monde à une période de sa vie. Les troubles psychiques sont à l’origine d’environ 20% des motifs de consultation de la clientèle des médecins généralistes. 30% des français sont concernés par un problème grave de santé mentale à un moment de leur vie. 2 à 3% de la population est touchée par des troubles psychotiques, 1% par la schizophrénie, 8% par la dépression, 14% par l’anxiété généralisée. 1,4 million d’adultes sont suivis par la psychiatrie publique, principalement en soins ambulatoires.
L’OMS estime qu’en 2020, un tiers de la population française sera touchée au moins une fois au cours de son existence par des troubles d’origine psychique. Les troubles psychiques sévères induisant un handicap psychique se situent au troisième rang des maladies les plus fréquentes en France après le cancer et les maladies cardiovasculaires.

b. Caractéristiques et conséquences du handicap psychique

Les pathologies en cause dans le processus d’émergence de la situation de handicap psychique se manifestent par un déficit fonctionnel durable ou épisodique avec des périodes de rémissions, avec ou sans altération des facultés mentales. Les manifestations sont variables dans le temps et la notion de soin est, de ce fait, nécessairement impliquée.
Les conséquences au quotidien peuvent se traduire par :

 Des troubles de la mémoire et de la concentration qui entraînent des difficultés d’apprentissage, des difficultés à suivre une conversation,
 Des attitudes et des comportements inadaptés dans la vie quotidienne dus à une mauvaise interprétation du message venant de l’extérieur. Une fatigue, des troubles du sommeil ou de la somnolence peuvent encore se rencontrer,
 Une incompréhension de l’entourage ignorant de la pathologie qui développe chez la personne présentant des troubles psychiques une certaine irritabilité, voire une agressivité. Cela accentue le phénomène d’indifférence et de rejet de la société,
 Un discours ambivalent et/ou discordant,
 Des variations importantes du comportement, etc.

c. Travail et handicap psychique
Avant de penser « travail », il faut au préalable une stabilisation de l’état de santé. Le handicap psychique n’est pas figé, il est fluctuant donc cette stabilisation passe en partie par un bon suivi médical, la prise régulière de traitement et un soutien social. Confrontées à leurs propres limites, beaucoup de PSHP n’auront jamais accès au monde du travail, même protégé. Les incapacités sociales qui provoquent ce handicap affectent directement leur autonomie et leurs capacités à faire valoir leurs droits.
En situation de travail, d’autres éléments sont observés, avec par exemple, les effets indésirables des traitements qui peuvent interférer sur les déplacements des personnes d’où la nécessité d’être extrêmement vigilant quant à la prescription médicamenteuse. On peut également retrouver une lenteur dans l’exécution des tâches, une peur d’effectuer certains gestes, une incapacité à agir dans des moments stressants, une répétition incontrôlée de certains gestes techniques ou encore des difficultés d’attention, d’organisation et de mémorisation. Toutes ces répercussions incitent à être attentif. La communication peut, elle aussi, devenir problématique pour ces personnes et le monde environnant s’assimile à une véritable « jungle ». L’organisation et la structuration peuvent poser problème dans la mesure où l’atteinte psychique entame la mémoire à court ou moyen terme.
La nature même du handicap psychique complique les relations à autrui et par conséquent les modalités d’accès à l’insertion sociale et professionnelle. Il faut décoder toutes les difficultés rencontrées dans les actes de la vie sociale et professionnelle afin de trouver les adaptations, si elles existent, sans pour autant compliquer davantage la vie de la personne malade, et les mettre en place. Malgré tout cela, des progrès, et notamment médicamenteux, leur permettent de plus en plus d’avoir une vie professionnelle convenable avec des adaptations et des aménagements de poste qui sont tout de même souhaitables et souvent inévitables.

Difficultés soulevées et réponses proposées

a. Résistances dans le monde du travail

La situation de handicap psychique n’est pas définitive. Elle sort aujourd’hui de ces différentes formes d’enfermement pour s’ouvrir à la société. Si le sujet semble d’actualité, l’insertion sociale et professionnelle des PSHP elle, ne l’est pas encore tout à fait.
Depuis la loi de 2005 qui renforce l’obligation d’employer 6% de personnes handicapées, on note une évolution. Aujourd’hui 58% des entreprises ont employé directement un travailleur handicapé, pourcentage en légère amélioration certes, mais insuffisant.
Dépression, angoisse, anxiété, les entreprises gèrent déjà des salariés atteints de troubles psychiques, qui sont une cause importante d’arrêts-maladies. Ces arrêts constituent une « pause » indispensable pour ces personnes afin de se remettre en état mais cela engendre des problèmes dans le long terme.
La réinsertion professionnelle des PSHP est un parcours parsemé d’obstacles. Une enquête a été réalisée sur 750 petites et moyennes entreprises (Baer et al.) sur leur volonté d’engager des personnes handicapées. La conclusion évidente est que l’un des barrages à la réinsertion est la stigmatisation ainsi que le stress causé par l’attente de l’employeur. Ces entreprises seraient 44 davantage engagées dans ce processus si elles bénéficiaient de plus d’aides et de soutien. Ce sont les personnes en situation de handicap psychique qui pâtissent le plus du manque d’offre de soutien.
D’autres obstacles existent comme l’auto stigmatisation et les craintes nourries par les entreprises vis à vis des PSHP d’où la réelle nécessité de programmes adaptés et spécifiques pour ces personnes. Il faut trouver le bon parcours de soins, le bon accompagnement pour qu’un retour et maintien au travail soit possible.
Dans le monde du travail, le handicap psychique est un véritable tabou et les mentalités peinent à évoluer. Il y a beaucoup de freins au sein des entreprises et les préjugés sont nombreux car les pathologies sont mal connues. Les freins majeurs pour ces personnes et/ou pour l’employeur peuvent être la faible autonomie, le manque de polyvalence, le fort taux d’absentéisme, les difficultés d’intégration dans l’équipe, etc. La présence d’un salarié souffrant de troubles psychiques génère parfois des inquiétudes auprès des professionnels, craignant l’imprévisibilité du trouble. Le caractère imprévisible inquiète les recruteurs et le handicap psychique fait peur. C’est l’une des raisons pour laquelle la grande majorité des handicapés psychiques sont inactifs. Mais certaines expressions de la maladie peuvent être des atouts pour les entreprises. Par exemple des personnes souffrant de troubles de l’humeur ont souvent une grande force de travail et une créativité méconnue.
La stigmatisation et les stéréotypes discriminatoires nourris par les médias souvent importants sont de véritables freins pour les PSHP générant ainsi des incompréhensions, des exclusions, des rejets voire un isolement. Et plus encore, la stigmatisation peut être un facteur favorisant le suicide de la personne concernée.
Les stéréotypes les plus répandus sont : pour 75% des français, un malade psychique est une personne dangereuse. Plus d’une personne sur deux est gênée à l’idée de partager son toit avec un individu affecté par un handicap psychique. Un tiers des français est incommodé à l’idée de travailler dans la même équipe et de partager des repas avec des PSHP. La réalité est tout autre: les PSHP ne commettent pas davantage de crimes ou délits que la population générale quand elles évoluent dans le même contexte relationnel et social, et il n’y a pas de corrélation entre le diagnostic et un passage à l’acte violent, même si certains facteurs favorisant (abus de substances, sexe masculin, âge, etc.) peuvent également agir sur la fréquence des passages à l’acte.(25) En milieu de travail, lorsque les personnes ne vont pas bien, elles ont plutôt tendance à s’isoler et à s’absenter.

Accompagnement et insertion professionnelle

a. Mesures d’accompagnement des PSHP

La réinsertion professionnelle des PHSP est une préoccupation d’actualité et un enjeu décisif. L’amélioration des traitements devenus plus respectueux des fonctions cognitives et la diminution des durées d’hospitalisation ont participé à une meilleure réinsertion sociale et professionnelle de ces personnes.
L’emploi est une préoccupation majeure pour les PSHP. Le soutien à l’emploi répond donc aux attentes du patient, le plaçant au centre de la prise en charge avec une attention portée sur ses choix et préférences dans une démarche valorisante. Dans les débuts de la réinsertion professionnelle des PSHP, des études ont confirmé que l’on pouvait améliorer les prises charges individuelles si l’on avait comme objectif la réinsertion : travail de certaines fonctions cognitives, de la motivation, etc. Depuis, d’autres types d’interventions plus novatrices sont apparues telles que l’emploi accompagné.
Des valeurs éthiques tentent à guider « l’emploi accompagné » et aident à contribuer à son efficacité :

o Volonté de prioriser l’inclusion sociale des personnes en situation de handicap,
o Personnalisation du mode d’accompagnement et de proximité, continu et capable de s’adapter aux besoins spécifiques de chaque personne,
o Un mode d’organisation du soutien pour promouvoir l’autonomie et le destin propre.

Depuis la loi de 2005, des mesures de soutien à la réinsertion professionnelle se sont développées, notamment dans le monde anglo-saxon et sont actuellement en cours de progression en France. Les sociétés Anglo-Saxonnes se sont énormément investies sur la question de la réinsertion professionnelle qui constitue pour elles une thématique majeure. De nombreux résultats se dégagent et remettent en question nos pratiques comme par exemple le préjugé médical que la réduction des troubles serait une condition à la reprise d’une activité professionnelle. Il s’avère que c’est une idée reçue car l’évolution symptomatique est peu corrélée aux capacités de travail, pour citer le cas de la schizophrénie.
Les dispositifs de soutien vers et dans l’emploi et plus particulièrement les dispositifs de Job Coaching ont commencé à être évoqués en 2010 en France.
Force est de constater que le contexte français en matière d’aide à la réinsertion professionnelle subit un singulier retard : retard au plan des pratiques de recherche dans ce domaine, retard dans l’évaluation des performances ou résultats des pratiques, retard à l’expérimentation des pratiques innovantes (comme le Job Coaching). Il y a certes des pratiques de « préparation », d’accompagnement vers l’emploi de ce public mais ces pratiques relèvent des approches traditionnelles et sont de deux ordres : milieu protégé, activité de travail et pratiques issues ou proches du monde des soins.
Les taux d’activité professionnelle restent faibles, en particulier en milieu ordinaire : moins de 20% au niveau français, européen ou américain.
Le système français montre plusieurs faiblesses : discontinuité de l’accompagnement, multiples intervenants, attente trop longue avant la remise en emploi, étapes intermédiaires, etc. Ce système
est différent du Job Coaching car ce dernier préconise une remise au travail rapide avec un accompagnement individualisé par un intervenant unique, maintenu dans la durée.

b. Méthodes de réinsertion professionnelle des PSHP

L’emploi accompagné est fondé sur le principe du « place and train ». Un coach accompagne l’employé tout en apportant aussi un soutien à l’employeur.
Une étude a été réalisée par la clinique psychiatrique universitaire de Zurich durant la période de 2003 à 2005. Celle-ci a examiné l’emploi accompagné sous l’angle de son efficacité. Sur les 25 participants, 11 ont trouvé et conservé un emploi par ce moyen. Par contre dans un groupe contrôle qui suivait la procédure d’insertion traditionnelle « train and place », personne n’a été engagé sur le marché primaire de l’emploi. La méthode étudiée est moins onéreuse car elle ne finance que le seul coach. Cette étude est cependant à prendre avec du recul car peu de personnes y ont été incluses et les raisons de l’échec des 14 autres personnes ne sont pas explicitées.
L’emploi protégé est une autre méthode d’insertion professionnelle. Certains professionnels pensent que le fait de passer par une phase de réadaptation dans un « environnement protégé » avant d’être placé sur le marché du travail en milieu ordinaire est nécessaire. Le milieu protégé a moins d’exigences en termes de performances et a pour but d’encourager et de stabiliser les aptitudes professionnelles des travailleurs handicapés. L’accompagnement a pour but de réengager dans une vie active, satisfaisante et dotée de sens pour la personne.
Les établissements de travail protégé ou adapté ne constituent pas obligatoirement des impasses pour ces personnes. Lorsque l’impression d’être enfermées l’emporte sur la nécessité d’échapper aux rigueurs du marché ordinaire du travail, elles décident en général de partir. Il reste certes le piège de l’assistance pour certains d’entre eux, mais ceux-là, pour la plupart, la vivraient tout autant dans l’inactivité. Cette dernière option demeure d’ailleurs la solution pour une grande majorité des
PSHP. Il existe également les entreprises sociales (solution de « rechange » aux entreprises adaptées) et des mesures institutionnelles mais il faut reconnaître la difficulté récurrente à positionner des PSHP vers ces structures.

c. Différence entre approche traditionnelle et l’emploi accompagné

Un réel contraste existe entre la pratique de l’emploi accompagné de type IPS et les pratiques traditionnelles d’évaluation et de préparation/réadaptation au travail amenant peu à peu à privilégier l’emploi accompagné.
Le développement des recherches dans ce domaine montre que cette réinsertion est possible dans un grand nombre de cas, voire dans la majorité des cas si ces personnes bénéficient d’un soutien approprié dans leur démarche d’insertion. Cela nécessite un changement de regard avec un changement de pratiques : l’activité professionnelle n’est plus simplement qu’un complément facultatif de la stabilisation clinique. Cette dernière n’est plus le but mais un moyen pour l’objectif plus global de rétablissement, c’est à dire de réengagement dans une vie sociale et active. Le modèle traditionnel met l’accent sur une évaluation préalable qui doit guider une stratégie progressive de réadaptation au travail, et préparer un retour à l’emploi. Il est centré sur l’objectif de rémission ou de stabilisation clinique et de la prévention des rechutes. La reprise d’une activité professionnelle est envisagée comme une possibilité, certes souhaitable mais considérée comme le complément de la stabilisation. Plusieurs intervenants sont nécessaires, exerçant des fonctions d’experts pour une série de tâches d’évaluation puis de réadaptation. Il faut donc une organisation hiérarchique pour assurer la coordination des intervenants et superviser l’organisation.

CONCLUSION

« Nous voulons être perçus comme différents des autres par rapport à la notion de singularité et comme leur semblable par rapport à la notion de personne faisant partie d’un groupe » (Frédérique Ibarrart). Il fait aujourd’hui consensus que le travail, en règle générale, représente pour les Hommes une irremplaçable valeur existentielle, même s’il est impossible d’en mesurer pour chacun l’importance intime. Source de lien social, d’épanouissement dans la réalisation d’une tâche qui prend du sens dans le grand tout de la communauté humaine, source de rencontres, de plaisir, espace de vie affective, d’ambition, de promotion personnelle, de succès, le travail est l’une des dimensions cardinales de la vie.
Notre recherche, modeste, abonde ce constat : le travail est un socle pour le rétablissement, il diminue le besoin de soin, d’assistance, il est vecteur d’autonomie.
Dans la population générale cependant, le travail peut aussi être source de souffrance, d’angoisse, de mal-être. Les conditions qui sont parfois faites aux collaborateurs d’une entreprise, la multiplication des contraintes, peuvent induire de la souffrance, de la perte de sens, qui deviennent elles-mêmes pourvoyeuses de pathologies. Ces conditions peuvent être identifiées, et des approches préventives peuvent être développées.
L’emploi des PSHP obéit aux mêmes réalités et aux mêmes fondamentaux : il est possible, chacun y a le droit, il soutient le rétablissement, mais peut-être, -et est souvent- exposé à des conditions défavorables. L’intégration de personnes en difficulté relationnelle les rend vulnérables aux tensions d’équipe, aux particularités de caractère des membres du collectif de travail, aux dysfonctionnements managériaux, aux aberrations organisationnelles. En cela ces démarches d’intégration sont contributives à la réflexion sur la psychodynamique du travail. Ici comme dans d’autres registres, les personnes handicapées, en révélant ce qui est pour elles difficile, douloureux, pesant, interviennent comme les vigies de nos organisations et de nos dynamiques collectives. C’est, entre autres, un enseignement de notre exploration de cette problématique.
Depuis la loi d’orientation en faveur des personnes handicapées du 30 juin 19758, en France, s’opère un double mécanisme d’incitation à l’embauche avec d’une part l’octroi d’aides spécifiques et d’autre part, une pénalisation financière des entreprises qui ne recrutent pas.
La loi du 10 juillet 1987 en faveur de l’emploi des personnes en situation de handicap9 a instauré l’obligation d’emploi des travailleurs handicapés (OETH) pour tous les employeurs, y compris publics, ayant vingt salariés ou plus dans la proportion de 6% de l’effectif total.
La loi du 11 février 2005 promeut l’intégration des personnes handicapées avec un changement  radical de philosophie : partir de l’évaluation des capacités de la PSHP et non des incapacités. Cela passe en partie par l’obligation d’aménagement des postes de travail, l’obligation de négocier sur l’insertion professionnelle des travailleurs handicapés ou encore la rénovation du dispositif d’obligation d’emploi.
Avec la loi de 2005, la prise en compte de la subjectivité des PSHP fait reposer en partie l’insertion des personnes concernées sur la façon dont celles-ci parviennent à mobiliser leurs droits, à les faire reconnaître et à les négocier.
Une enquête sur les représentations sociales de la santé mentale en population générale (SMPG) a été réalisée par le centre collaborateur de l’organisation mondiale de la santé (CCOMS) et la direction de la recherche, des études, de l’évaluation et des statistiques (Drees) auprès de 36.000 personnes âgées de 18 ans et plus en France métropolitaine entre 1999 et 2003. Selon celle-ci, 55% des individus interrogés estiment qu’il serait impossible de guérir un « malade mental » et près de 80% qu’il serait impossible de le guérir totalement. Loi n° 75-534 du 30 juin 1975 d’orientation en faveur des personnes handicapées Loi n° 87-517 du 10 juillet 1987 en faveur de l’emploi des travailleurs handicapés.
On peut donc comprendre les personnes qui cherchent à échapper à une catégorisation qui, non seulement génère de la peur sociale, mais encore leur imposerait le statut d’incurable. Les porteurs de stigmates visibles (déficience physique, fonctionnelle, etc.) peuvent parfois, au prix d’importants efforts, valoriser un stigmate qu’ils ne peuvent cacher pour gagner une reconnaissance sociale. La déficience, dans le cas du handicap psychique, n’apparait pas au grand jour alors qu’elle est potentiellement très discréditée. Il peut donc y avoir plus à perdre qu’à gagner à laisser transparaître ses incapacités.
Du fait des multiples difficultés rencontrées par les personnes souffrant de handicap psychique à s’intégrer dans le monde social et professionnel, c’est souvent « à bas bruit » qu’elles tentent de se frayer un chemin dans l’insertion sociale et professionnelle ce qui rend particulièrement problématique la reconnaissance du handicap psychique qui pourtant est considérée comme l’une des pierres angulaires de la loi de 2005.
L’absence de partage avec autrui, par les personnes qui souffrent de leurs problèmes de santé psychique entrave leur identification et l’amélioration des politiques. Ignorant parfois leur propre état ou craignant la stigmatisation ou la discrimination, les personnes atteintes choisissent fréquemment, par tabou, de ne pas l’évoquer même si elles osent de plus en plus parler de leurs difficultés et leurs réussites.
Près de 100.000 établissements de 20 salariés ou plus du secteur privé et des établissements publics à caractère industriel ou commercial sont assujettis à l’OETH en 2013. L’emploi peut se faire de façon directe ou indirecte par le biais de contrats de sous-traitance ou encore par l’accueil de stagiaires. Il est également possible de signer un accord relatif à l’emploi de travailleurs handicapés et/ou payer une contribution financière à l’Agefiph.
26% des établissements assujettis à l’OETH atteignent le seuil légal par l’emploi direct de travailleurs handicapés. En 2013, près de 323.000 salariés (4%) ont été employés et comptabilisés « en unités bénéficiaires » c’est à dire en équivalents temps plein.
Encore trop peu de personnes malades psychiques ont accès au travail, que ce soit en milieu ordinaire ou en milieu protégé. Le bilan actuel est en demi-teinte, l’emploi de personnes handicapées progresse mais demeure en-deçà de l’objectif affiché. Avec la création et le développement progressif de dispositifs personnalisés, ce pourcentage pourrait être plus élevé. Il parait plus facile et moins coûteux de réinsérer des personnes concernées par d’autres formes de handicap quand il ne s’agit par exemple que de l’adaptation de locaux d’entreprise pour un fauteuil roulant ou celle d’une machine-outil dans un atelier.
La prise en compte du handicap psychique dans une politique d’emploi de travailleurs handicapés soulève quantités de questions. Encore souvent considérée comme une prise de risque, l’insertion d’une personne en situation de handicap psychique induit de nombreuses craintes. Accepter d’intégrer et maintenir une PSHP dans un emploi, c’est accepter une part d’incertitude. Face à ces craintes, le meilleur des outils est le réseau de partenaires et d’acteurs travaillant résolument dans la pluridisciplinarité et pour un même objectif.
Le chômage est préjudiciable à la santé psychique. Des données révèlent que les personnes souffrant de troubles psychiques qui trouvent un emploi, enregistrent une nette amélioration de leur état. Cette observation cadre avec des résultats cliniques qui montrent que l’emploi peut-être un élément important dans le rétablissement qui rejaillit aussi dans la sphère non professionnelle. On dispose de plus en plus de notions qui indiquent que l’emploi est associé à une meilleure santé psychique. Le travail joue un rôle essentiel dans la guérison. Néanmoins, des emplois de mauvaise qualité peuvent être néfastes. Les PSHP sont davantage susceptibles que les autres d’occuper un emploi qui cadre mal avec leurs compétences ou encore, elles ont une plus grande probabilité d’exercer un emploi peu qualifié. Mais des variables essentielles au travail peuvent contribuer à prévenir la détérioration de la santé psychique comme un encadrement professionnel de qualité par exemple.

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INTRODUCTION
MÉTHODES
RÉSULTATS
DISCUSSION
CONCLUSION

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