BACLOFENE ET CONDUITE SUICIDAIRE
DISCUSSION
Les objectifs de notre étude étaient de mettre en évidence les effets toxiques du baclofène et de décrire les caractéristiques des patients dans les cas d’ingestion volontaire de baclofène recensés au CAPTV d’Angers de janvier 2008 à décembre 2013.Notre étude montrait une augmentation significative du nombre d’ingestion volontaire de baclofène depuis 2008. Parallèlement, dans les CAPTV, le nombre de cas d’intoxication par baclofène recensé, n’a cessé d’augmenter. En effet, le nombre d’ingestion volontaire au baclofène en 2008 représentait 0.3/1000 cas d’intoxication volontaire tous agents confondus alors qu’en 2013 il représentait 15/1000 cas. Le rapport des CAPTV de juin 2012 (34) concernant les années 2009 et 2010, concluait que le nombre de cas d’exposition dans lesquels le baclofène était impliqué, était plus important que les années précédentes. Il insistait également sur l’augmentation des cas de gravité forte. L’ANSM reconnait que la majorité des prescriptions se font hors RTU malgré sa volonté d’encadrer cette dernière par la mise en place de la RTU et des études prospectives Bacloville et Alpadir. En mars 2015, l’ANSM publie une synthèse concernant les six premiers mois de la RTU; 3570 patients étaient recensés et 45% des prescripteurs étaient des médecins généralistes (36). Une étude prospective nationale des CAPTV est en cours de réalisation. Il s’agit d’une enquête concernant tous les cas enregistrés sur la base de données SICAP pour un surdosage en baclofène, intéressant en plus de l’aspect descriptif des intoxications, les caractéristiques des patients, le contexte de prescription, le contexte psycho-social.
Dans cette étude, les intoxications volontaires au baclofène prédominaient chez les hommes (sex-ratio H/F de 1,3) et la médiane d’âge était de 39 ans. Une étude de 2008, dont le but était de définir les populations à risque face à la consommation d’alcool, retrouvait les mêmes tendances. Les hommes étaient les principaux consommateurs entre 25 et 64 ans (37).L’indication du baclofène pour le maintien du sevrage alcoolique était bien supérieure à l’indication neurologique initiale.
Par ailleurs, un tiers des patients présentait des antécédents psychiatriques. Dans la littérature, des études ont montré un lien étroit entre addictions et troubles psychiatriques; 37% des personnes alcooliques ont une comorbidité psychiatrique selon l’étude ECA (38), 52% selon l’étude NCS (39). Selon l’étude américaine NESARC, l’alcool entraînerait notamment un risque de troubles paniques et de troubles bipolaires (40). Le profil particulier du patient alcoolo-dépendant peut favoriser le surdosage volontaire et doit ainsi amener le prescripteur à être vigilant. Le traitement prescrit nécessite une réévaluation régulière afin de détecter à la fois les effets toxiques mais aussi les mésusages. Actuellement, l’adjonction de traitement antidépresseur est recommandée devant la persistance de symptômes de dépression au-delà d’un mois de sevrage (41).
Dans notre série, pour les intoxications de gravité forte, la DSI moyenne de baclofène était de 725 mg allant jusqu’à 2200 mg. Or certains auteurs décrivaient des intoxications graves à des doses de baclofène pourtant autorisées par la RTU (20, 21, 23, 25). De plus, avec les posologies autorisées par la RTU allant jusqu’à 300 mg/jour (8), soit 1 boîte par jour de 30 comprimés ou 9 grammes de baclofène par mois, le patient dispose d’une quantité potentiellement importante de comprimés de baclofène dont une ingestion massive peut être grave voire létale comme nous l’avons montré dans notre étude. Un statut du médicament à délivrance spécifique, similaire à celle des stupéfiants ou des anxiolytiques serait peut-être intéressant pour diminuer les risques (délivrance fractionnée, autorisation de déconditionnement).Dans notre série, le baclofène était ingéré seul ou associé à de l’alcool dans près de la moitié des cas (21 sur 46 cas) alors que la plupart des intoxications volontaires médicamenteuses intéressent plusieurs agents médicamenteux (42). Lorsque d’autres médicaments étaient retrouvés: c’était principalement des anxiolytiques en grande quantité. Il est évidemment important que ces co ingestions soient portées à la connaissance du prescripteur lors de la prise en charge du patient car elles peuvent aggraver le tableau clinique présenté.Les intoxications de gravité faible et modérée entraînaient des symptômes psychiatriques de type agitation, hallucination ainsi que des signes neurologiques de type dépression du SNC.Notre série présentait une proportion très importante de cas de graves (41%). Les symptômes neurologiques (45%) et cardio-vasculaires (27%) retrouvés en majorité dans notre étude étaient similaires à ceux décrits dans la littérature (20-30). Lors d’intoxication au baclofène, le pronostic vital peut être notamment engagé par les effets toxiques neurologiques du baclofène. Les convulsions observées dans ces intoxications semblaient majoritairement dues au surdosage en baclofène; elles pourraient s’expliquer dans certains cas par un syndrome de sevrage alcoolique. L’hypothèse d’un sevrage au baclofène à l’origine de convulsions nécessiterait des confirmations analytiques par un dosage de la baclofènémie. Dans notre étude, les convulsions, souvent associées à un coma profond, étaient survenues précocement dans la prise en charge confirmant l’effet convulsivant du baclofène à dose élevée.Dans notre étude, 4 décès étaient décrits. A ce jour, très peu de décès sont rapportés dans la littérature (31, 32). Pour ces cas rapportés, les DSI n’étaient pas connues et les concentrations létales s’étendaient de 6 à 17 mg/L (31) pour une concentration thérapeutique inférieure à 0,6 mg/L. Pour deux décès de notre série, les DSI étaient de 500 mg et 2100 mg. Pour un cas, la concentration sanguine de baclofène était de 2,7 mg/L ce qui est inférieure aux concentrations retrouvées dans la littérature. Ce cas était imputable au balcofène devant l’absence d’autre toxique retrouvé lors de l’expertise analytique. On constate que la majorité des décès de l’étude sont survenus en pré-hospitalier. Une prise en charge médicale suffisamment précoce permet donc de limiter voir quasiment de supprimer le risque de décès.Dans notre série, 8 cas ont bénéficié d’un dosage quantitatif de baclofène. L’analyse clinicoanalytique est difficile à établir car peu de dosages sont réalisés en pratique clinique actuelle.De plus, la DSI n’est pas toujours connue et le délai entre la prise de baclofène et le dosage est parfois long car l’intoxication est peu spécifique. L’intérêt du dosage peut être sous évalué par le clinicien car il ne modifie pas l’attitude thérapeutique. Ce dosage est important dans le diagnostic d’un coma inexpliqué, notamment chez les patients alcoolo-dépendants. Ne faisant pas parti du screening toxique classique, sa demande doit être précisée au laboratoire de toxicologie spécialisé. Encore peu de laboratoires de toxicologie réalisent le dosage mais la technique de détection se développe sur le territoire français. C’est pourquoi, la collaboration entre clinicien, toxicologue et biologiste est essentielle afin de documenter les intoxications et ainsi d’améliorer les connaissances clinico-analytiques et la veille sanitaire. Devant l’absence d’antidote, la prise en charge d’une intoxication au baclofène est purement symptomatique. Au vu de son élimination urinaire, le maintien d’une bonne diurèse dans ces intoxications est raisonnable. L’indication de l’hémodialyse n’est pas recommandée actuellement même si au vu des cas cliniques déjà publiés, elle semble efficace (43-45). L’étude de l’hémodialyse sur une série de cas paraît nécessaire afin de valider ce traitement dans ces intoxications. Le dosage de la baclofènémie a un intérêt dans l’évaluation de l’hémodialyse en permettant une analyse de la cinétique du baclofène au cours des différentes séances de traitement.
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Introduction
Matériel & Méthode
Résultats
Discussion
Conclusion
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