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La vascularisation
Cette glande est très richement vascularisée. Au niveau artériel, on retrouve :
– Une artère thyroïdienne supérieure issue de la carotide externe
– Une artère thyroïdienne inférieure issue de l’artère subclavière
A cela s’ajoute le réseau veineux, séparé en trois niveaux : les veines thyroïdiennes supérieures, inférieures et moyennes qui se jettent dans la veine jugulaire interne. (Figure 1)
L’innervation
Le nerf récurrent (nerf laryngé récurrent ou nerf laryngé inférieur) est celui qui passe dans le thorax, il commande le mouvement du larynx et des cordes vocales donc la parole et la déglutition. Il est issu du nerf vague (Xème paire des nerfs crâniens). Un nerf récurrent passe au niveau de la face profonde de chacun des deux lobes de la thyroïde. Cette localisation explique les modifications de la voix, fausse route ou difficultés respiratoires à l’effort (le plus souvent transitoires) après une intervention au niveau de la thyroïde. [7]
Les glandes parathyroïdes
Il existe quatre glandes parathyroïdes, deux à droite et deux à gauche. Elles sont très petites, environ 3 mm de diamètre. Les P3 sont les parathyroïdes inférieures, situées au niveau inférieur et antérieur des lobes thyroïdiens (entre la trachée et l’artère carotide commune). Les P4 sont les parathyroïdes supérieures, en position plus haute et plus postérieures, à mi-hauteur du lobe. Ces localisations anatomiques peuvent varier. [8] Ces
glandes produisent la parathormone (PTH), hormone de régulation du calcium dans le sang (Figure 2).
Les cellules folliculaires et parafolliculaires (ou cellules C)
La thyroïde est composée de structures sphéroïdales appelées follicules thyroïdiens de hauteurs comprises entre 50 et 500 µm selon l’activité de la glande. Ils sont constitués de cellules folliculaires entourant la colloïde de la lumière folliculaire. (Figure 3)
*ECM :Extracellular matrix : Matrice extracellulaire
Les cellules folliculaires (ou thyréocytes) sont les éléments les plus nombreux dans les follicules thyroïdiens. Ces cellules sont spécifiquement polarisées pour permettre la sécrétion hormonale. Leur pôle basal est composé d’une lame qui fait face au stroma et leur pôle apical est recouvert de nombreuses villosités qui font face à la lumière folliculaire (Figure 4).
Les cellules parafolliculaires présentes dans la glande thyroïde constituent, avec les cellules folliculaires, l’épithélium du follicule. On les retrouve en contact, à l’extérieur des cellules folliculaires, mais en moins grande proportion que ces dernières. Elles sont dispersées dans la membrane basale mais n’atteignent jamais la lumière folliculaire (Figure 5). Bien qu’elles partagent une même localisation, la morphologie de ces dernières est totalement différente de celle des cellules folliculaires. Leurs origines le sont également : l’endoderme pour les cellules folliculaires et la crête neurale pour les autres. Ces cellules font partie intégrante du système neuroendocrinien en sécrétant la calcitonine qui participe au maintien de l’homéostasie du calcium.
Une étude publiée en juillet 2017 par Dass, Mishra et Kaul menée chez 10 fœtus avortés de New Delhi a montré que le développement des cellules parafolliculaires est en relation avec le développement des follicules thyroïdiens [10]. Ainsi, le développement des follicules thyroïdiens et donc des cellules parafolliculaires aurait un rôle important en début de grossesse, notamment dans la régulation de l’ossification du fœtus.
La colloïde
Littéralement, la colloïde est un fluide dans lequel sont en suspension des particules de diamètre inférieur à 0,2 µm. Dans le cas de la glande thyroïde, le colloïde est plus précisément une substance riche en thyroglobuline (90% de ses protéines), homogène et gélatineuse et située au centre des follicules thyroïdiens (Figure 5). Les cellules folliculaires entourent le colloïde dans la lumière pour former le follicule thyroïdien. Cette colloïde représente la plus grosse partie de la masse du tissu thyroïdien. C’est à son niveau que sont produites les hormones thyroïdiennes grâce à sa surface apicale riche en thyroglobuline. Cette protéine est synthétisée dans les cellules folliculaires puis transportée dans la colloïde. C’est une glycoprotéine homodimérique de 660 kDa, constituant majeur de la thyroïde et excrété en très faible quantité dans le sang où sa demi-vie est de 2 à 4 jours. C’est une protéine indispensable à la synthèse des hormones thyroïdiennes car elle est le précurseur de leur voie de synthèse.
Les hormones thyroïdiennes
La glande thyroïde s’active en lien avec les signaux hormonaux provenant de l’hypothalamus, chaque élément cité plus haut ayant un rôle dans la synthèse hormonale. Lorsque la glande est inactive, le follicule est plus gros, les cellules prennent une forme aplatie et la quantité de colloïde augmente.
Synthèse des hormones thyroïdiennes
Axe hypothalamo-hypophysaire et synthèse d’hormones
L’hypothalamus est une région du système nerveux central à l’origine de la cascade hormonale de la thyroïde. En effet, cette structure faite de plusieurs noyaux sécrète l’hormone thyréotrope (TRH, appelée aussi thyrolibérine ou protiréline) comme signal vers l’hypophyse (Figure 6).
Cette hormone peptidique induit la sécrétion de thyréostimuline (TSH) par les cellules thyréotropes de l’hypophyse antérieure (antéhypophyse). La TSH stimule les cellules folliculaires afin qu’elles libèrent les deux hormones majeures de la fonction thyroïdienne : la tétra-iodothyronine (ou thyroxine) (T4) et la tri-iodothyronine (T3) dans la colloïde (Figure 7).
*TRs : récepteurs aux hormones thyroïdiennes
La TSH atteint les cellules folliculaires par le réseau de capillaires sanguins se glissant entre les follicules au contact des cellules.
La T4 et la T3 peuvent exercer une rétroaction négative sur la sécrétion de TSH, c’est à dire qu’une concentration sérique basse d’hormones thyroïdiennes augmente la sécrétion de TSH de l’hypophyse antérieure et inversement si les concentrations d’hormones thyroïdiennes sont élevées. La T3 est l’inhibiteur majeur de la sécrétion de TSH.
En raison de son temps de demi-vie court (1h), la sécrétion de TSH est très sensible aux modifications, mêmes mineures des concentrations en hormones thyroïdiennes (temps de demi-vie respectivement de 6j et 2j pour la T4 et la T3).
Métabolisme de l’iode
Après absorption intestinale, les iodures (I-) plasmatiques sont captés par la thyroïde et éliminés par voie urinaire. Le métabolisme de l’iode se fait en trois grandes étapes :
– La première étape est la captation de l’ion iodure par les cellules folliculaires :
Les ions iodures sont absorbés dans les cellules thyroïdiennes par l’intermédiaire d’un système de transport actif.
Le symport Na/I (NIS) est une glycoprotéine transmembranaire située sur la membrane basolatérale des thyréocytes (Figure 8). Elle permet l’entrée de sodium et d’iodure de façon concomitante contre un gradient électrochimique [15]. Une fois pénétré, l’iodure migre jusqu’à la surface apicale puis dans la colloïde. L’augmentation du sodium intracellulaire est contrôlée par l’action de la Na+/K+ ATPase (située également sur la membrane basolatérale) (Figure 8)
L’iodure est transporté vers la colloïde par la pendrine, protéine échangeuse chlorure/iodure vers la lumière du follicule. Cette pendrine fonctionne en antiport Cl-/I-, c’est à dire qu’elle permet la pénétration de l’iodure à travers la membrane apicale des cellules folliculaires vers la colloïde, en échange d’un ion chlore. Une fois parvenu au sein de la lumière riche en colloïde, l’iodure est oxydé en di-iode (I2) par la thyroperoxydase en présence de peroxyde d’hydrogène H2O2.
– La deuxième étape est le couplage avec la thyroglobuline :
L’iode est ensuite couplé aux résidus tyrosine qui se trouvent sur la thyroglobuline en se substituant aux hydrogènes des noyaux phénols de cette dernière.
L’iode peut se substituer à un hydrogène (en position 3 du cycle) pour former la mono-iodotyrosine (MIT). Mais un deuxième atome d’iode peut également se fixer de manière covalente en position 5 du cycle afin de former la di-iodotyrosine (DIT). (Figures 9a et 9b).
La thyroperoxydase permet ensuite la condensation d’un MIT avec un DIT pour former la tri-iodothyronine (T3) mais aussi, la condensation de 2 DIT pour la formation de la thyroxine (T4) (Figure 10).
Enfin, la thyroglobuline est absorbée par le thyréocyte pour subir la dégradation lysosomale qui libère les hormones T3 et T4 libres dans la circulation sanguine. (Figures 11a et 11b)
Régulation de la synthèse des hormones thyroïdiennes (Figure 12) [14]
La thyrolibérine (TRH)
La thyrolibérine, tripeptide libéré dans le système porte hypothalamo-hypophysaire, agit sur les cellules thyréotropes de l’antéhypophyse qui possèdent des récepteurs couplés aux protéines G.
La thyrolibérine régule positivement la production de TSH. La libération de cette hormone est inhibée par le jeûne et stimulée par le froid.
La thyréostimuline (TSH)
La TSH (thyréostimuline) est une glycoprotéine produite par l’antéhypophyse, qui agit sur les récepteurs couplés aux protéines G des cellules folliculaires de la thyroïde en stimulant la production d’hormones. La sécrétion de cette hormone n’est pas constante, elle suit un rythme nycthéméral. La TSH augmente à vingt et une heure pour attendre un maximum de pic nocturne vers minuit ou 2h du matin et diminuer par la suite jusqu’à son nadir en milieu d’après-midi.
En moyenne, l’hypophyse envoie 12 pulses de 0,5 mU/L d’amplitude moyenne par 24h. Une étude du rythme circadien de la TSH a été publiée dans le journal « Endocrine Research » en Aout 2002 [16]. Vingt femmes hypothyroïdiennes et vingt-deux patientes sous L-thyroxine ont été incluses. Les mesures des concentrations sériques en TSH ont été effectués deux fois par jour, entre 8h et 9h et entre 14h et 16h. Les résultats ont montré que la valeur médiane de la TSH du matin chez les patientes hypothyroïdiennes était de 5,83 mU/L alors que dans l’après-midi ils étaient de 3,79 mU/L (p < 0,05). La plage de variabilité de la TSH selon l’heure peut atteindre 73%.
Environ 50% des cas d’hypothyroïdie n’auraient pas été diagnostiqués si l’analyse avait été faite uniquement dans l’après-midi. Le respect de ce cycle (sommeil et éveil) permet une production physiologique de la TSH.
La somatostatine produite par l’hypothalamus inhibe la sécrétion de TSH. La dopamine inhibe également la production de TSH.
Transport plasmatique des hormones thyroïdiennes
Dans la circulation sanguine, la T3 et la T4 sont transportées principalement par trois protéines plasmatiques vectrices : la thyroxin binding globulin (TBG), la transthyrétine (TTR) et l’albumine. La TBG est la protéine ayant la plus grande affinité pour les hormones thyroïdiennes, elle transporte 70% de la T4 et 65% de la T3. La TTR transporte 15 à 20% de la T4 et de la T3. L’albumine est la protéine la plus concentrée dans la circulation sanguine (60 % des protéines circulantes) et lie avec une faible affinité les hormones thyroïdiennes et d’autres molécules. Néanmoins, du fait de sa concentration élevée, l’albumine permet une large diffusion des hormones thyroïdiennes. L’affinité de la TBG pour la T4 est 50 et 7000 fois supérieure à celle de la transthyrétine et de l’albumine respectivement. Ces trois protéines lient la T4 avec une affinité supérieure à la T3. La fraction libre circulante de la T4 et de la T3 constitue la forme active des hormones thyroïdiennes.
Les récepteurs des hormones thyroïdiennes
Une fois parvenues dans le noyau des cellules cibles par l’intermédiaire des transporteurs monocarboxylates 8 et 10 (MCT 8 et MCT10) par exemple, les hormones se lient aux récepteurs des hormones thyroïdiennes qui fonctionnent comme des facteurs de transcription, ce qui leur permet de contrôler, à différents niveaux, des processus cellulaires physiologiques. Ils sont hormono-dépendants c’est à dire qu’en présence de la tri-iodothyronine (T3), ils stimulent la transcription du gène cible. Alors qu’en l’absence d’hormones ils répriment l’expression de ce dernier. Pour cela le complexe hormone-récepteur se fixe à l’ADN par des doigts de Zinc (domaines structuraux des protéines permettant d’interagir avec l’ADN) et modifie l’expression de certains gènes. Ce contrôle permet une régulation des processus physiologiques induits par l’axe thyroïdien. Les récepteurs des hormones thyroïdiennes sont des classes de récepteurs nucléaires. Il existe deux types de récepteurs codés par des gènes différents mais de grande homologie : les gènes Trα ou Trβ.
La T4 a beaucoup moins d’affinités pour les récepteurs, la T3 étant trois à cinq fois plus puissante. L’action de la T4 serait d’influencer certaines voies de transduction intracellulaire de signaux favorisant la phosphorylation d’une kinase. Cette action pourrait être relayée par un récepteur membranaire de la famille des récepteurs couplés aux protéines G.
Ces récepteurs thyroïdiens ont plusieurs isoformes qui sont répartis dans tous les tissus où agissent les hormones thyroïdiennes. Ils ont chacun leurs spécificités d’expression tissulaire et sont fonctionnels ou non (Tableau 1).
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Table des matières
Introduction
1ère partie : Physiologie de la glande thyroïde
1. Anatomie et histologie
1.1. Le cartilage thyroïde
1.2. La vascularisation
1.3. L’innervation
1.4. Les glandes parathyroïdes
1.5. Les cellules folliculaires et parafolliculaires (ou cellules C)
1.6. La colloïde
2. Les hormones thyroïdiennes
2.1. Synthèse des hormones thyroïdiennes
2.1.1. Axe hypothalamo-hypophysaire et synthèse d’hormones
2.1.2. Métabolisme de l’iode
2.2. Régulation de la synthèse des hormones thyroïdiennes
2.2.1. La thyrolibérine (TRH)
2.2.2. La thyréostimuline (TSH)
2.3. Transport plasmatique des hormones thyroïdiennes
2.4. Les récepteurs des hormones thyroïdiennes
2.4.1. Les différents isoformes des récepteurs
2.4.2. Résistance aux hormones thyroïdiennes (RHT)
2.4.3. Amiodarone et récepteurs aux hormones thyroïdiennes
2.5. Métabolisme des hormones thyroïdiennes
3. Effets physiologiques des hormones thyroïdiennes
3.1. Effets sur le métabolisme énergétique
3.1.1. Métabolisme de base
3.1.2. Métabolisme glucidique
3.1.3. Métabolisme lipidique
3.1.4. Métabolisme protéique
3.2. Effets sur le métabolisme des vitamines et des minéraux
3.2.1. Métabolisme hydro-minéral
3.2.2. Métabolisme des vitamines
3.3. Effets sur le système cardiovasculaire
3.4. Effets sur le système nerveux
3.5. Effets sur le tissu osseux
3.5.1. Action des hormones thyroïdiennes sur les os
3.5.2. Action sur la croissance et le développement
3.6. Effets sur l’érythropoïèse
4. Thyroïde et grossesse
4.1. Rôle du placenta
4.2. Fœtus et marqueurs thyroïdiens
2ème partie : Les dysthyroïdies chez la femme enceinte
1. Epidémiologie
2. Les hypothyroïdies chez la femme enceinte
2.1. Etiologies
2.2. Diagnostic
2.2.1. Tableau clinique de l’hypothyroïdie
2.2.2. Examens biologiques
2.2.3. Echographie
2.3. Facteurs de risque au cours de la grossesse
2.4. Prise en charge thérapeutique
2.4.1. Mise en place
2.4.2. Traitements
2.4.3. Précautions d’emploi
2.4.4. Surveillance du traitement
2.4.5. Interactions médicamenteuses des hormones thyroïdiennes
2.4.6. Fiche de pertinence hypothyroïdies
3. Les hyperthyroïdies chez la femme enceinte
3.1. Diagnostic
3.1.1. Tableau clinique de l’hyperthyroïdie
3.1.2. Examens biologiques
3.1.3. Imagerie
3.2. Définition
3.2.1. Maladie de Basedow
3.2.2. Thyroïdites
3.2.3. Hyperthyroïdie gestationnelle transitoire
3.3. Facteurs de risque
3.4. Prise en charge thérapeutique
3.4.1. Traitement symptomatique
3.4.2. Traitement chirurgical
3.4.3. Iode radioactif
3.4.4. Antithyroïdiens de synthèse
3.4.6. Surveillance
3.4.7. Interactions médicamenteuses
3ème partie : Intérêt de la couverture des besoins nutritionnels de la femme enceinte présentant une dysthyroïdie – Besoins particuliers en iode et sélénium
1. Recommandations nutritionnelles de la femme enceinte
1.1. Références nutritionnelles pour la femme enceinte.
1.2. Les compléments alimentaires
1.2.1. Législation
1.2.2. Composition
1.2.3. Consommation
2. Place des apports en iode chez la femme enceinte
2.1. Apports alimentaires en iode
2.1.1. Besoins
2.1.2. Sources d’iode
2.1.3. Couverture des besoins
2.2. Risques d’une carence en iode chez la femme enceinte
2.2.1. La carence iodée dans l’histoire
2.2.2. Les facteurs influençant la carence en iode
2.2.3. Les conséquences d’une carence iodée pendant la grossesse.
2.3. Risque d’un surdosage en iode
2.3.1. Facteurs influençant la surcharge en iode
2.3.2. Les conséquences de l’excès d’apport en iode : l’effet Wolff-Chaikoff 101
2.3.3. Cas de nutrivigilance
3. Place du sélénium chez la femme enceinte
3.1. Apports alimentaires en sélénium
3.1.1. Besoins
3.1.2. Sources
3.1.3. Couverture des besoins
3.2. Carence en sélénium
3.2.1. Facteurs influençant une carence en sélénium
3.2.2. Conséquence d’une carence en sélénium
3.2.3. Connaissances sur la supplémentation en sélénium à ce jour
3.3. Risque d’un surdosage en sélénium
4. Rôle de conseil du pharmacien
4.1. Délivrance des traitements des dysthyroïdies chez la femme enceinte
4.1.1. Précautions d’emploi
4.1.2. Conseils associés
4.2. Conseils nutritionnels chez la femme enceinte
4.2.1. Guides nutritions de la femme enceinte
4.2.2. Régimes particuliers
Conclusion
Bibliographie
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