Présentation des caractéristiques des EPLE
Dans le cadre de notre projet de recherche, nous souhaitons étudier différents contextes. Pour ce faire, nous décidons de travailler dans quatre collèges aux caractéristiques singulières, ce qui nous permet de diversifier nos approches et d’envisager une exploitation plus globale. Nous pouvons également comparer les établissements en identifiant des ressemblances et/ou des différences. Nous avons donc sélectionné quatre établissements en fonction de leurs caractéristiques. Le collège Jean Lurçat est un collège appartenant à un Réseau d’Éducation Prioritaire Renforcée (REP+). La mixité sociale est quasi inexistante et le quartier est marqué d’une très grande pauvreté. Les données d’Aide au Pilotage et à l’Auto-évaluation des Établissements(APEA) révèlent les catégories socioprofessionnelles (CSP) des parents d’élèves avec environ5% de cadres supérieurs et moyens, 11% d’employés et artisans, 80% ouvriers et inactifs.Le collège François Rabelais est un collège urbain marqué par une mixité sociale. Malgré une sortie du collège de l’appellation Réseau d’Éducation Prioritaire (REP), nous observons encore une forte mixité sociale avec un tiers des parents d’élèves appartenant à des CSP défavorisée et habitant dans le quartier. Les autres élèves viennent des communes pavillonnaires aux CSP plus favorisées. Le collège Frida Kahlo est un collège rural marqué par une mixité sociale. Les CSP des parents d’élèves révèlent 44% d’ouvriers ou d’inactifs, 21% d’employés, d’agriculteurs ou de commerçants, 17% de cadres moyens et 15% de cadres supérieurs ou enseignants. Enfin, le collège Jean Rostand est un collège urbain marqué par des élèves issues de familles favorisées. Les CSP des parents d’élèves révèlent que 74% des élèves sont issus de CSP favorisées, et 26% des élèves issus de CSP défavorisées. Une présentation plus détaillée de ces établissements est fournie en annexe (cf. annexe : tableau n°6, p.78).
Méthode de catégorisation des autorités
Dans un premier temps, nous faisons un état des recherches actuelles sur le concept d’autorité en pédagogie. Nous analysons différentes catégorisations existantes en en tirant les traits caractéristiques autour d’avantages et d’inconvénients servant notre projet de recherche. Dans un deuxième temps, nous croisons les différentes catégorisations que nous avons énoncées pour en extraire des lignes directrices communes nous permettant de construire notre propre catégorisation. Toutefois, avant de démarrer notre travail de catégorisation, nous ciblons notre propos avec les travaux de Prairat E. (2003). Ce professeur des Sciences de l’Éducation a étudié les thèmes associés à l’autorité et distingue le « potestas » de « l’auctoritas ». Le « potestas » se caractérise par le pouvoir donné par l’institution. Pour l’enseignant c’est le pouvoir que lui a transmis l’institution scolaire. L’« l’auctoritas » est « l’art d’obtenir l’adhésion sans recours à la menace ou à la contrainte, elle recommande plus qu’elle ne commande ». Nous focalisons notre travail autour de « l’auctoritas ».
Proposition de catégorisation
Dans le cadre de notre recherche, nous avons besoin de définir nos propres catégories d’autorités. Nous prenons en compte deux variables : d’’une part l’enseignant, en fonction de ce qu’il impose dans la classe, son activité au sein de celle-ci, et d’autre part l’élève et en particulier son degré de liberté au sein de la classe. Ces deux variables vont constituer deux pôles d’un continuum et en variant le curseur sur ce continuum nous pouvons définir trois formes d’autorités : l’autorité dirigiste, l’autorité coopérative et l’autorité libertaire.
Autorité dirigiste L’autorité dirigiste est une autorité qui se situe au niveau du pôle de l’enseignant et très éloigné du pôle de l’élève. Elle est caractérisée par un enseignant qui veut tout maîtriser et pour qui l’ordre et la discipline permettent les apprentissages. Le degré de liberté de l’élève est ainsi très limité. En effet, l’élève est invité à se mouvoir et à apprendre dans un espace très normé et très strict. Quand un élève sort de ce cadre, il est directement soumis à une régulation ou une sanction. L’enseignant dispense les savoirs et sans ses interventions l’élève ne peut pas apprendre. La réussite de l’élève dépend de la qualité de l’intervention de l’enseignant.
Autorité coopérative L’autorité coopérative est une autorité qui se situe à égale distance du pôle de l’enseignant et de l’élève. Cette autorité est construite sur un cadre plus souple. Elle cherche à augmenter l’action des élèves et leurs espaces de décision tout en plaçant des lignes strictes qui délimitent un cadre. Nous avons employé le terme de coopératif car c’est un apprentissage simultané entre l’enseignant et l’élève. C’est seulement par leur coopération que les apprentissages sont permis. C’est dans cette autorité que des espaces de discussion peuvent être mis en place notamment en début d’année pour dégager le cadre de la classe qui, se construit ensemble dans l’optique de pouvoir plus facilement fonctionner car les deux parties l’ont accepté. L’enseignant occupe une place de guide laissant une autonomie contrôlée à ses élèves. La réussite de l’élève est envisagée par ce lien de complémentarité enseignant – élève. Autorités, élèves et situations : quelles combinaisons pour apprendre ? 20
Autorité libertaire L’autorité libertaire est une autorité qui se place au niveau du pôle de l’élève et à l’opposé du pôle de l’enseignant. C’est ainsi l’inverse de « l’autorité dirigiste ». La liberté de l’élève est ici prépondérante. L’enseignant choisit de laisser les élèves construire leur propre cadre ou du moins agir dans la classe avec un degré de liberté très important. C’est une autorité où l’expérimentation de l’élève est au cœur de l’apprentissage et où l’action de l’enseignant est très limitée. Il régit le cadre seulement dans une optique de sécurité. C’est la découverte qui permet la réussite de l’élève. Nous pouvons penser que notre catégorisation se rapproche de celle de Robbes B. (2007). Cependant, elle ne met pas en avant une seule autorité mais définit bien les trois autorités comme étant susceptibles d’agir efficacement sur l’apprentissage des élèves contrairement aux travaux de Robbes B. qui définissent « l’autorité éducative » comme la plus favorable. Par ailleurs, notre catégorisation interroge l’action de l’enseignant, en reprenant les travaux d’Allec S. et Jorro A. (2003), comme celui de l’élève. L’intérêt est d’interroger l’autorité en prenant en compte l’enseignant et l’élève afin de mieux appréhender le contrat didactique mis en place.
L’élève « social » : une dominante coopérative avec des tendances libertaire et dirigiste
Cet élève a un rapport négatif à l’École mais entretient un rapport médian voir positif avec le savoir. Il n’est pas en échec et est capable d’entretenir de bonnes relations avec l’enseignant. L’une des catégories d’autorité envisagée pour le « social » est l’autorité libertaire. En effet, ce type d’élève a besoin d’avoir un degré de liberté, d’une part pour trouver une certaine forme de motivation et d’autre part pour maintenir sa place dans la sphère sociale de la classe. Nous pensons que l’autorité dirigiste n’est pas la plus favorable pour lui puisqu’il a tendance à privilégier les interactions avec le groupe classe et moins avec l’enseignant. L’autorité dirigiste est tout de même souhaitée dans les situations fermées car même si le « social » n’aime pas l’École, il sait que l’enseignant peut l’aider à réussir et donc à préserver son statut social dans la classe. L’autorité coopérative est aussi favorable pour lui et nous l’envisageons dans trois types de situations pour l’élève « social » : les situations intermédiaires, sécuritaires et affectives. En effet, l’élève « social » sait que dans ce genre de situation, le nombre de solutions pour réussir est faible. Il ne peut pas tout faire tout seul. C’est donc un consensus qui est recherché dans ces situations entre les règles de l’enseignant qui permettent la réussite et un certain degré de liberté. Pour l’autorité libertaire, elle nous semble privilégiée par l’élève « social » dans les situations ouvertes car il sait que l’apport de l’enseignant n’est pas obligatoire pour réussir, il va donc vouloir utiliser sa propre liberté pour trouver de lui-même les solutions en s’appuyant sur le travail de groupe.
Un besoin de partage et de discussion dans les situations affectives
Nous pensons que les situations affectives nécessitent, pour la plupart des profils à l’exception de l’élève « timoré » qui a besoin de beaucoup de reconnaissance, une autorité coopérative. En effet, la discussion avec l’enseignant et le partage de sentiments et d’émotions permettent aux élèves de passer la barrière affective. Par une mise en confiance et une proximité avec l’enseignant, les élèves s’engagent. Nous pouvons parler d’expériences vicariantes.
Un rapport à l’autorité variant selon le contexte social
D’un point de vue sociologique, nous nous attendons à obtenir des résultats différents d’un établissement à un autre en fonction des zones de recrutement. En effet, le rapport à l’autorité des élèves va différer selon l’origine sociale, la localité géographique, la culture, la religion… Nous nous attendons à avoir des rapports plus conflictuels avec l’autorité dans des établissements où le recrutement se fait dans des zones plus défavorisées avec des élèves qui n’ont pas acquis l’habitus scolaire attendu par l’École. Bourdieu P. et Passeron J-C. (1964) parlent de « violence symbolique » avec des élèves qui ne possèdent pas le capital culturel nécessaire pour s’intégrer au mieux dans l’École. Un changement de regard doit s’opérer, c’est l’École qui doit s’adapter au public concerné. A l’inverse, pour des établissements recrutant dans des zones plus favorisées, nous pouvons nous attendre à rencontrer des élèves qui se soumettent plus facilement à l’autorité de l’enseignant.
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Table des matières
1. INTRODUCTION
1.1 Objet du mémoire
1.2 Une orientation didactique
1.3 Présentation des caractéristiques des EPLE
1.4 Des classes de troisièmes mises à l’étude
2. DEFINITIONS
2.1 Autorités
2.2 Situations
2.3 Élèves
3. PROBLEMATIQUE
4. CADRE THEORIQUE
5. CATEGORISATIONS
5.1 Catégorisation des autorités
5.1.1 Méthodes de catégorisation des autorités
5.1.2 Analyse des recherches actuelles
5.1.3 Proposition de catégorisation
5.2 Catégorisation des situations en EPS
5.2.1 Méthode de catégorisation des situations
5.2.2 Analyse des recherches actuelles
5.2.3 Proposition de catégorisation
5.3 Catégorisation des élèves en EPS
5.3.1 Méthode de catégorisation des élèves
5.3.2 Analyse des recherches actuelles
5.3.3 Proposition de catégorisation
6 HYPOTHESES
6.1 Des hypothèses en fonction des catégories d’élèves
6.1.1 L’élève « social » : une dominante coopérative avec des tendances libertaire et dirigiste
6.1.2 L’élève « timoré » : vers une autorité dirigiste
6.1.3 L’élève « intégré » : partagé entre une autorité coopérative et dirigiste
6.1.4 L’élève « ermite » : une autorité libertaire
6.2 Des hypothèses plus générales sur les tendances d’autorités
6.2.1 L’autorité dirigiste est appréciée pour les situations fermées
6.2.2 Les élèves ayant un rapport positif au savoir ont tendance à préférer le guidage à la dévolution
6.2.3 Un besoin de partage et de discussion dans les situations affectives
6.2.4 Une autorité libertaire et/ou coopérative dans les situations ouvertes
6.3 Des hypothèses et selon une approche sociogéographique
6.3.1 Des formes d’autorités fluctuantes au regard du contexte
6.3.2 Un rapport à l’autorité variant selon le contexte social
7 METHODE
7.1 Méthode globale de traitement des données
7.2 Explication du questionnaire élève
7.2.1 Analyse et explication du questionnaire
7.2.2 Modifications du questionnaire
7.2.3 La distribution des questionnaires
7.3 Catégorisation des réponses
7.3.1 Identification des catégories d’élèves
7.3.2 Identification des catégories d’autorité
7.3.3 Identification des catégories d’autorité en fonction de la situation
7.4 Méthode de traitement statistique des données du questionnaire élèves
7.4.1 Saisie des données et classification des sujets en catégorie d’élèves
7.4.2 Traitement des données
8 ANALYSE DES DONNEES
8.1 Analyses des réponses des élèves
8.1.1 Les élèves « social » (72 élèves)
8.1.2 Les élèves « timoré » (12 élèves)
8.1.3 Les élèves « intégré » (33 élèves)
8.1.4 Les élèves « ermite » (21 élèves)
8.1.5 Analyse des hypothèses globales sur les tendances d’autorité les plus favorables aux apprentissages dans une situation donnée
8.2 Analyse sociogéographique des questionnaires élèves
8.2.1 Les sujets « social » (72)
8.2.2 Les sujets « timoré » (12)
8.2.3 Les sujets « intégré » (33)
8.2.4 Les sujets « ermite » (21)
8.2.5 Conclusion de cette analyse sociogéographique
8.3 Analyse des réponses des enseignants
8.3.1 Explication du questionnaire
8.3.2 Analyse de la conception de l’autorité par les enseignants
8.3.3 Autorité et catégories d’élèves
8.3.4 Autorité et catégories de situations d’apprentissage
8.3.5 Les liens entre l’autorité souhaitée par les élèves et celle préconisée par les enseignants selon les catégories d’élèves
8.3.6 Les liens entre l’autorité souhaitée par les élèves et celle préconisée par les enseignants selon les catégories de situations
8.3.7 Conclusion
9 DISCUSSION
9.1 Les « situations intermédiaires » non analysées
9.2 L’analyse statistique du questionnaire élève
9.3 L’approfondissement de l’analyse sociogéographique
10 CONLUSION
11 PERSPECTIVES
12 BILIOGRAPHIE
13 ANNEXES
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