Télécharger le fichier pdf d’un mémoire de fin d’études
Recueil des données
Les entretiens ont été réalisés d’août 2020 à février 2021. L’étude ayant lieu en pleine crise sanitaire de la Covid-19, il a été choisi de réaliser les entretiens par appels vidéo à l’aide de messageries type Skype / WhatsApp, ce qui a également permis de faciliter le dialogue avec les collégiens pour un sujet si intime.
Ils débutaient par un rappel du but de l’entretien et des conditions éthiques présentées auparavant dans la lettre explicative, puis par la possibilité pour le collégien de poser des questions. Etaient ensuite recueillies les caractéristiques de l’adolescent (âge, fratrie…), puis l’enregistrement audio débutait après son accord oral, abordant en première partie ses expériences antérieures en matière d’éducation sexuelle, et ses représentations de la sexualité, puis ses attentes pour une éducation sexuelle par le médecin traitant, et ses modalités.
Analyse des données
L’audio des entretiens était enregistré, puis effacé après retranscription intégrale des verbatims. Tous les entretiens étaient anonymisés dès retranscription. Ils ont fait l’objet d’une analyse inductive inspirée de la théorisation ancrée. Ainsi, après un premier codage thématique, les étiquettes expérientielles de chaque entretien étaient dégagées (codage longitudinal). Elles étaient ensuite regroupées progressivement au sein de catégories (éléments de sens définis par plusieurs étiquettes) (codage transversal). Des réajustements ont été réalisés tout au long de l’étude, par comparaison continue avec les précédents entretiens. Tous les entretiens ont été analysés par l’investigateur au fil de leur réalisation ; ils ont pu bénéficier d’une triangulation de l’analyse avec un autre médecin puis discussion avec un troisième médecin spécialisé en études qualitatives. Les entretiens ont continué jusqu’à saturation des données.
Réglementation et Ethique
L’étude a été approuvée par le Comité d’Ethique d’Aix-Marseille. Les entretiens ont été anonymisés. L’information donnée aux parents et adolescents était double, orale et écrite : une lettre d’information et des consentements leur ont été remis avant chaque entretien. Les adolescents devaient être volontaires pour participer à l’étude, mais avaient la possibilité de se retirer à tout moment, ou de refuser de répondre à certaines questions, sans jugement ni répercussion. Les questions ont été travaillées de manière à être adaptées à une population de collégiens, et les thèmes abordés justifiés auprès du Comité d’Ethique.
Sources d’information des collégiens en matière de sexualité : une information majoritairement reçue par l’entourage
Au collège, les adolescents avaient la plupart du temps déjà eu des informations en matière de sexualité.
Le plus souvent, ces informations provenaient de l’entourage du collégien :
– En milieu scolaire, avec comme principal interlocuteur le professeur, particulièrement en SVT, mais aussi parfois un intervenant en sexualité, ou bien l’infirmière scolaire.
« Oui ça on a parlé … avec l’école je crois ».
« Y a des affiches en classe de SVT ».
« En CM2, on a eu des intervenants qui sont venus ».
« L’infirmière scolaire nous a parlé des moyens de contraception ».
Ce milieu pouvait être avantageux par la spécificité de l’éducation disponible, mais restait très limité par de nombreux obstacles, comme la gêne face au professeur et en présence des camarades de classe, particulièrement de l’autre sexe, ou la pertinence des informations et explications données, parfois jugées incomplètes ou superflues par les collégiens. De plus, l’éducation sexuelle scolaire a été très affectée par la crise sanitaire et le confinement, rendant l’information encore plus difficile à délivrer.
« C’est dans le programme, tout ça, ça c’est bien ».
« C’était… gênant, très gênant… fin d’en parler avec le prof ».
« On se regardait avec mes copains… On rigolait quoi. ».
« Les garçons sont un peu bêtes… Il se sentent pas concernés… ».
« Fin ils rentrent pas dans les détails, à l’école ».
« J’ai pas trouvé ça … extrêmement utile ».
« Ben en fait au moment où on a parlé du corps humain, il y a eu le confinement alors… (rires) c’était raté… donc bon. ».
– En milieu familial : la famille restait une source d’information prioritaire en matière d’éducation sexuelle, grâce à un lien de confiance solide, et la notion de transmission par les parents et la fratrie. La familiarité de l’interlocuteur rassurait et facilitait l’échange. Cependant, l’éducation sexuelle restait malgré tout limitée dans certaines familles, par une gêne à aborder un sujet considéré comme tabou, la manque de formation des parents dans ce domaine, ou bien l’absence de contrôle d’une information obtenue « par hasard ».
« Mes parents m’ont toujours dit… Ils m’ont toujours un peu expliqué ».
« Comme elle l’a déjà fait avec papa, ben… Je me dis qu’elle saura bien m’expliquer. ».
« On les connait mieux donc c’est plus rassurant ».
« Avec mon père on en rigole un peu… ».
« Parce qu’il y a aussi la gêne, dans les familles ».
« Pour les enfants c’est plus compliqué d’en parler à leurs parents que d’en parler à des personnes extérieures »
« C’est pas que mes parents ils savent pas, mais … le médecin on lui a peut-être enseigné comment expliquer à des plus jeunes personnes ».
« A 7 ans […] Mais ils parlaient surtout à mon frère et ma soeur […] Ben, j’ai écouté ».
– Cercle amical : bien que les amis soient une source d’information très accessible, elle était plutôt limitée pour les collégiens, avec un sujet qui restait difficile à aborder si jeune, et un manque d’informations fiables à donner.
« J’en avais parlé un peu avec mes copines et tout ».
« Je sais pas vraiment comment aborder le sujet avec mes amis ».
« En fait, elles vont souvent poser des questions, mais elles savent pas trop la réponse ».
– Recherche autonome : Certains adolescents avaient également pu recevoir l’information en la cherchant par eux-mêmes, grâce à internet ou aux livres : jugées plus complètes et exhaustives, ces sources restaient une solution de repli à cet âge-là, par le manque d’explications disponibles, un intérêt limité et parfois la notion de danger dans la recherche non supervisée de l’information. « Beeeeen… Je m’étais posé la question à un repas, et le soir j’ai regardé comment ça se faisait »
« C’était bien pour expliquer comment ça se passait. ».
« J’aurais préféré qu’on m’explique ».
« Je me dis que ça peut être dangereux ».
Des connaissances limitées sur la sexualité au collège
Entre 12 et 15 ans, les adolescents avaient la plupart du temps déjà entendu parler de sexualité. Selon les cas, ils avaient quelques notions sur différents sujets, surtout concernant la reproduction ou la protection, mais aussi sur la puberté et les règles, le consentement, ou l’image du corps. Cependant, ils avouaient surtout manquer d’informations à ce sujet.
« On a regardé comment étaient les appareils reproducteurs des hommes et des femmes. »
« Un peu de comment les bébés ils se formaient »
« Euh, oui, la pilule, euh, c’est seulement… Pour ne pas avoir d’enfants. Et après, le préservatif, c’est pour, euh… protéger contre le SIDA, fin, tout ça. »
« La puberté c’est quand nous on a les seins qui commencent à pousser, les règles et tout, et que les hommes ben ils ont la barbe etc. »
« Le cycle des règles, ça dure à peu près 28 jours, et en gros, eeeeuh… c’est là ou… (réfléchit)… C’est le moment où le papa, il peut envoyer ses spermatozoïdes pour qu’il aille rencontrer l’ovule pour faire un bébé. Y a une petite pause entre chaque cycle, il faut faire pendant le cycle sinon ça marche pas. »
« A l’école, au CDI, on avait parlé du consentement. »
« Qu’il fallait pas prendre de photo, avec les copines, etcetera. »
« Euh… J’crois pas qu’on m’ait vraiment parlé de sexualité… (réfléchit)… Fin… Pas que je sache. »
« Ben, si je connais, mais euh… je sais pas euh… précisément, ce que c’est, tout ça. »
Des représentations multiples de la sexualité
Chez une population jeune et ayant eu accès à très peu d’information en matière de sexualité, leurs représentations dans ce domaine étaient pourtant multiples et variées, attachées à différents thèmes.
Certains adolescents n’avaient aucune représentation particulière en matière de sexualité, peu concernés jusque-là.
« J’sais pas trop comment y penser… »
D’autres abordaient plutôt les aspects physiques de la sexualité, comme la reproduction, les organes génitaux, l’acte sexuel, la puberté et les règles.
« Comment faire un bébé, tout ça »
« L’anatomie euh, sexuelle »
« C’est quand un homme et une femme ils font un rapport… »
Pour certains collégiens, la sexualité avait plutôt une dimension relationnelle : ils pensaient en premier à la famille, au couple, à l’amour, la tendresse.
« On peut créer une famille. »
« C’est une fille et un garçon qui… Font un gros câlin »
« Ah, ben l’amour oui, (d’un air évident), c’est quand quelqu’un aime quelqu’un d’autre »
Beaucoup d’entre eux pensaient en priorité aux aspects négatifs : le risque de grossesse ou d’infection sexuellement transmissible, l’infertilité, les relations sans consentement, mais aussi les difficultés techniques lors de l’acte sexuel, la douleur et le contrôle partiel de l’acte.
« Apparemment, la première fois elle fait mal »
« Il y a certains couples qui n’y arrivent pas, pour certaines raisons. »
« Quand y a quelqu’un qui dit non, ben c’est non quoi. »
« Quand je vois qu’il y a des gamines de 14 ans qui sont enceintes, voilà quoi. »
« Sans faire exprès, le sexe de l’homme rentre dans le sexe de la fille, dans le vagin. »
« Si le mec il bande pas et tout ça va être compliqué pour la pénétration… »
Un aspect abordé régulièrement au fil des entretiens était plutôt axé sur la dimension comportementale de la sexualité : pour certains adolescents, la sexualité était un rite de passage, où les notions de libre arbitre et de responsabilité étaient au centre des préoccupations, avec l’importance de prendre son temps et d’avoir accès aux bonnes informations.
« Ben faire un choix quoi. Que si… T’es pas trop sûr de toi, ben… Vaut mieux pas le faire quoi. »
« Ben c’est ce moment où… on va tous le faire… voilà »
« Quelle responsabilité c’est. Fin… Y a une grosse responsabilité »
« Prendre bien le temps… Par exemple, à mon âge, de bien réfléchir »
« Ben… ça m’intéresse, ça va m’être utile pour la vie »
En matière de sexualité, les collégiens étaient finalement très peu informés. Si la plupart avait eu quelques informations en milieu familial ou scolaire, ils exprimaient surtout un manque de connaissances dans ce domaine, et étaient plutôt demandeurs d’explications. Pour autant, les collégiens abordaient des représentations très différentes de la sexualité, qu’elle soit vue sous un angle positif ou négatif.
Avis sur l’éducation sexuelle par leur médecin traitant : une idée plutôt bien accueillie
Le médecin, source préférentielle d’information des collégiens pour parler de sexualité
De manière générale, les adolescents voyaient leur médecin traitant comme une source d’information privilégiée.
« Ben, moi je pense que je préfèrerais que ce soit mon médecin qui commence à m’en parler »
La relation médecin-patient occupait une place centrale dans l’accès à l’information en matière de sexualité. Au coeur de cette relation : la confiance qu’inspirait le médecin aux collégiens.
« Je lui fais confiance… Fiiiiin… Normal quoi, c’est un médecin »
« Je lui fais trop confiance !! »
Pour aborder un sujet si intime, la confidentialité de l’échange et le secret médical, y compris vis-à-vis des parents, étaient d’une importance non négligeable.
« Je sais que tout reste secret, parce qu’il y a le secret médical. »
« Ça reste entre lui et moi quoi. »
« Au moins ça passe pas par les parents, et les parents sont pas au courant »
Pour les collégiens, parler de sexualité avec leur médecin permettait de pouvoir s’exprimer librement sur n’importe quel sujet. A la différence des autres sources d’information, l’éducation sexuelle par le médecin était pour eux la seule exempte de tout jugement.
« Je pense que je pourrais lui parler de tout. »
« Je crois pas qu’il y ait de sujet qui soit compliqué »
« C’est mieux, parce que quand […] y a plusieurs personnes autour, euh du coup tu peux pas réagir et parler »
« Au collège fin souvent, j’trouve que c’est paaaas… j’trouve que c’est pas vraiment un sujet à aborder parce que… après y a tout le monde qui se met à rigoler et tout »
En plus de cette relation privilégiée, la formation et les connaissances médicales de leur médecin rassuraient, plaçant le médecin comme la source la plus fiable en matière d’éducation à la sexualité.
« Euh, ben le médecin je pense qu’il en saura plus que les autres. »
« Lui […] on lui a peut-être enseigné comment expliquer à des plus jeunes personnes, comment ça se passe… Donc ça sera plus simple pour lui d’expliquer. »
« Je pense que c’est bien que ce soit quelqu’un qui ait fait des études de médecine parce qu’il peut nous expliquer les maladies. »
L’éducation sexuelle par le médecin traitant permettait également d’avoir accès à l’information même lorsqu’elle n’était pas disponible ailleurs : pas tous les adolescents n’avaient la possibilité, ou bien le désir, d’être informés ailleurs, et voyaient leur médecin comme un interlocuteur à privilégier dans cette éducation.
« Ben, j’pense que c’est bien, car il faut que quelqu’un nous en parle, et y a pas grand monde qui peut nous en parler »
« Parce que si on n’en parle pas à l’école, et qu’on se pose des questions et que personne n’y répond, ben… comme ça il peut nous dire, quoi »
« Après j’pense que pour les enfants c’est plus compliqué d’en parler à leurs parents que d’en parler à des personnes extérieures, donc c’est bien d’en parler avec le médecin plutôt »
« Je sais pas vraiment comment aborder le sujet avec mes amis »
A travers les multiples aspects de la relation médecin/patient, et la fiabilité de l’information délivrée grâce à sa formation médicale, le médecin était souvent vu par les collégiens comme un intervenant préférentiel en matière d’éducation à la sexualité.
Une relation privilégiée mais qui présente certaines limites
Bien que le médecin puisse apparaitre comme étant un interlocuteur à privilégier pour aborder la sexualité avec les collégiens, cette éducation sexuelle par le médecin traitant présentait malgré tout certaines limites.
Une partie des réticences était liée à la nature même du sujet : un thème aussi intime que la sexualité était souvent considéré comme difficile à aborder, que ce soit par gène devant le médecin, ou par manque de familiarité vis-à-vis du sujet.
« Parce que j’ai pas trop l’habitude de parler de ça. »
« Euh, parce que moi, si je devais poser la question, je pense que je serais un peu gêné »
D’autres réticences étaient plutôt liées au médecin lui-même. En effet, alors qu’il aspirait la confiance grâce à son métier, le médecin restait un interlocuteur « étranger », ce qui semblait être un frein pour certains collégiens.
« C’est un peu gênant, d’en parler avec quelqu’un que tu connais pas »
« T’as des enfants qui n’oseront jamais en parler à leur médecin traitant »
Par ailleurs, malgré l’étendue de ses connaissances médicales, le médecin traitant n’est pas un spécialiste en sexualité : un détail à ne pas négliger pour un adolescent interrogé.
« Il saurait moins que quelqu’un qui travaille vraiment dedans »
Le sexe du médecin a régulièrement été mis en avant, à travers des avis divergents : si certains accordaient peu d’importance à cette caractéristique de leur médecin, plusieurs préféraient une femme pour parler de sexualité, quel que soit le sexe du collégien, alors que d’autres auraient aimé avoir une éducation sexuelle par un médecin du même sexe qu’eux.
« Non, pour moi non c’est pareil ».
« Pour la sexualité ou quoi je préférerais quand même que ce soit une femme. J’sais pas, je pense que je serais plus à l’aise. »
« Après, moi j’me dis, peut-être une femme pour tout le monde. Je sais pas, je trouve que une femme parle mieux entre guillemets de la sexualité que les hommes. »
« Je ne me sentirais pas à l’aise d’en parler avec un homme »
« Je pense qu’on devrait en parler avec quelqu’un du même sexe que nous. »
Si certains voyaient le médecin comme une source d’information indispensable dans l’éducation à la sexualité, d’autres n’éprouvaient pas forcément la nécessité d’être informés par leur médecin traitant, ayant d’autres sources disponibles pour recevoir cette éducation sexuelle, que ce soit auprès de l’entourage et la famille, ou en milieu scolaire.
« Non, j’ai les informations ailleurs, donc ça va »
« Parce que j’ai plus confiance en mes parents qu’en mon médecin. »
« Les parents… On les connait mieux donc c’est plus rassurant »
« L’école a un maitre qui fait des cours sur ça… »
« En 4e on a TeenStar, c’est quelque chose où ils nous expliquent un peu la sexualité »
Pour les adolescents, le médecin occupait donc une place centrale dans leur éducation sexuelle, par une relation privilégiée médecin/patient et la fiabilité de ses connaissances. Mais certaines limites restaient malgré tout à prendre en compte, pour une information touchant un sujet intime et gênant, parfois plus abordable avec des personnes familières.
Quand débuter l’éducation sexuelle ? Trouver le juste moment entre une information trop précoce et trop tardive
Un état d’esprit idéal à favoriser plutôt qu’un âge idéal
L’âge de début de l’éducation sexuelle est au centre des interrogations sur ses modalités d’organisation. A ce sujet, les adolescents interrogés s’accordaient sur le fait que cette éducation ne doit pas être débutée n’importe quand : il s’agissait d’en parler « au bon moment ».
« Ben moi, attendre un petit peu, parce que je pense que c’est pas le moment pour moi »
Pour autant, il n’est pas particulièrement ressorti d’âge clé pour commencer à parler de sexualité.
« Franchement, en 5° ça serait bien ! »
« 16 ans, 17 ans, ça aurait été moins gênant, déjà »
« Moi, j’pense, à peu près vers l’âge de 7-8 ans… »
Si un âge théorique ne semblait pas à privilégier, il s’agissait plutôt d’évaluer l’état d’esprit des adolescents et leurs dispositions à recevoir l’information, à travers différents points :
– Leur degré de maturité :
« Quand on est plus ouvert on va dire ? »
« Un peu moins coincé ? »
– Leur intérêt pour le sujet, afin de pouvoir répondre à leurs interrogations :
« Ben… à partir du moment où… On se pose des questions ? Ou on se demande comment on fait »
« A aucun âge particulier, juste quand on a des questions. »
– Leur degré de compréhension du sujet :
« Moi, j’pense, dès le plus jeune âge, fin dès que les enfants comprennent »
Un âge trop précoce à éviter
Délivrer une information suffisamment tôt avant le début de la vie sexuelle semblait essentiel. Pour autant, les adolescents interrogés s’accordaient sur le fait qu’une éducation sexuelle trop précoce était à proscrire.
En effet, il en est ressorti qu’un jeune adolescent non préparé pourrait être réticent à parler trop tôt d’un tel sujet, par gêne, voire même par dégoût.
« Mais moi je sais que si on m’avait parlé de ça en sixième, j’aurais été hyper gênée, j’aurais pas parlé »
« CE2 j’crois. Je connaissais un peu mais… voilà. Pour moi, c’était… dégoutant. »
Chez un enfant n’ayant jamais eu la moindre information préalable sur le sujet, le médecin risquerait par ailleurs de se heurter à l’incompréhension de l’adolescent.
« Plus jeune, on sait pas encore grand-chose »
« Non… non c’est trop tôt hein, en sixième quand on nous a parlé de ça euh… Je comprenais que dalle. »
« La prof nous avait parlé de ça d’un coup, on était tous perdus, on ne savait même pas pourquoi elle nous parlait de ça »
De plus, l’idée de la sexualité étant encore lointaine pour eux, certains adolescents éprouvaient un manque d’intérêt pour le sujet au plus jeune âge : jugée inutile, l’information apportée trop tôt n’était pas fixée.
« Mais moi je sais que si on m’avait parlé de ça en sixième, … ça m’aurait pas concerné du tout… »
« J’y avais jamais pensé »
« Bah en parler […] je pense plus tôt, c’est pas utile »
« Mais j’me rappelle plus trop »
Comment parler de sexualité aux collégiens ? Pour une éducation personnalisée
La forme de la discussion : une éducation sexuelle progressive guidée par le médecin, tout en restant à l’écoute de l’adolescent
Les collégiens s’accordaient sur un point : c’était au médecin de commencer à en parler, la première fois. Un sujet tel que la sexualité était jugé trop gênant pour que l’adolescent ose l’aborder lui-même. Il s’agissait donc d’introduire d’abord le sujet, pour donner ensuite la possibilité à l’adolescent, plus rassuré, de revenir par lui-même. En effet, une fois le premier échange en sexualité passé, la plupart se sentaient capables d’en parler spontanément ensuite.
« Je serais peut-être un peu plus à l’aise si c’est lui qui aborde le sujet ? »
« Euh, parce que moi, si je devais poser la question, je pense que je serais un peu gêné »
« Je pense que c’est plutôt l’initiative du médecin traitant, à venir et à dire par exemple, bon ben, leur expliquer, ça, ça et ça quoi. »
« Je suis timide donc je pense que je n’oserais pas poser certaines questions, mais ça ne me gênerait pas que ce soit mon médecin qui m’en parle. »
« Euh, ben la première fois c’est lui qui le fait, et après, ben… un peu des deux… pas TOUJOURS lui. »
« Je pense qu’une fois qu’il a enclenché la discussion je pourrais en parler. »
Avant d’aborder le sujet, il apparaissait important, pour de nombreux adolescents, de s’assurer qu’ils soient prêts à en parler, en leur posant simplement la question.
« Ben… Je leur demanderais si ils ont envie de parler de ça maintenant… »
Ensuite, ils préféraient recevoir une information très progressive, pas à pas. Certains même aimeraient être prévenus avant que le sujet soit abordé, afin de leur laisser le temps d’accepter cette idée.
« Ouais, c’est mieux de prévenir, et après d’en parler, plutôt que d’en parler directement comme ça. »
« Aborder le sujet doucement, et après rentrer dans le vif du sujet, plutôt que d’aborder le sujet direct. »
En cas de réticence de l’adolescent, ils recommandaient de ne pas insister, mais au contraire lui laisser le temps d’avancer, et aborder le sujet de nouveau plus tard quand il serait prêt, sans urgence.
« Si ils ont pas envie, ben qu’ils prennent le temps, qu’ils voient quand c’est qu’ils veulent en parler. »
« Si on voit que l’enfant par exemple ne veut pas, ben on arrête. »
Une fois la discussion lancée, il apparaissait important pour les adolescents que le médecin reste à l’écoute de leurs besoins tout au long de cette éducation sexuelle.
« Ecouter l’enfant, ce qu’il pense »
Ceux-ci aimeraient qu’il s’appuie sur leurs propres connaissances, leurs expériences, en leur donnant la parole régulièrement, afin d’adapter au mieux l’éducation sexuelle à leur vécu et leurs à priori.
« Euh, ben, je commencerais par leur demander si ils ont des choses à dire à propos de la sexualité »
« D’abord je leur demanderais ce qu’ils savent, pour voir ce que je peux leur apprendre, du coup, après. »
« Ben, j’poserais des questions… Si ils ont déjà fait quelque chose, ou… Des trucs comme ça. »
« Juste, librement, écouter l’enfant, ce qu’il pense, et lui expliquer »
Il semblait important pour les adolescents que le médecin leur donne la possibilité de poser régulièrement des questions, afin de répondre au mieux à leurs attentes.
« Si j’ai des questions, je pense que ce serait bien de faire une consultation pour que je puisse les poser. »
« En leur parlant de l’essentiel et en répondant à leurs questions »
Les adolescents interrogés étaient également très demandeurs d’explications : ils ne souhaitaient pas simplement recevoir une information brute, mais comprendre cette information, avec des explications supplémentaires pour certains points.
« Lui expliquer, les pours et les contres. »
« Ben… Il m’explique un peu tout, et après, si j’ai envie d’approfondir un sujet, euh, on peut parler… de ce sujet. »
En plus d’une éducation théorique, ce serait également l’occasion d’aborder les problèmes rencontrés par l’enfant si besoin :
« Ben on se pose, on parle, moi si j’ai des problèmes tout ça, je lui en parle, et il me dit comment les gérer… »
En cas de gène de l’adolescent, le médecin pourrait également envisager l’aide de supports pour faciliter le dialogue :
« Les brochures, ça pourrait… ça pourrait m’aider un peu aussi. »
« Ben… Peut être pour les personnes qui sont timides et qui osent pas demander ? »
« Ben, moi j’pense que c’est bien les brochures, comme ça ben, on peut déjà réfléchir aux questions »
Le médecin semblait donc devoir être l’initiateur de l’éducation sexuelle de l’adolescent. Cependant, cette éducation devait se dérouler sous la forme d’un réel échange, durant lequel l’adolescent pourrait guider le médecin au fil de ses expériences et interrogations.
|
Table des matières
RESULTATS
Population étudiée
Analyse des entretiens
PARTIE 1 : Expériences Antérieures En Education Sexuelle
A. Sources d’information des collégiens en matière de sexualité : une information majoritairement reçue par l’entourage
B. Des connaissances limitées sur la sexualité au collège
C. Des représentations multiples de la sexualité
PARTIE 2 : Attentes Des Collégiens En Matière D’Education Sexuelle Par Leur Médecin Traitant
A. Avis sur l’éducation sexuelle par leur médecin traitant : une idée plutôt bien accueillie
I. Le médecin, source préférentielle d’information des collégiens pour parler de sexualité
II. Une relation privilégiée mais qui présente certaines limites
B. Organisation de l’éducation sexuelle par le médecin traitant : Une information à délivrer au bon moment, de la bonne façon ; des thèmes variés à aborder
I. Quand débuter l’éducation sexuelle ? Trouver le juste moment entre une information trop précoce et trop tardive
a) Un état d’esprit idéal à favoriser plutôt qu’un âge idéal
b) Un âge trop précoce à éviter
c) Ne pas trop tarder non plus
II. Comment parler de sexualité aux collégiens ? Pour une éducation personnalisée
a) La forme de la discussion : une éducation sexuelle progressive guidée par le médecin, tout en restant à l’écoute de l’adolescent
b) Modalités organisationnelles : plusieurs consultations en tête à tête avec l’adolescent, différentes idées
III. Quels thèmes aborder ? Des centres d’intérêts variés chez les collégiens
IV. Quelles sont les attentes des adolescents en matière d’éducation sexuelle par leur médecin traitant ? Schéma récapitulatif
DISCUSSION
CONCLUSION
BIBLIOGRAPHIE
Télécharger le rapport complet