Atteintes infectieuses du système nerveux (SN) en milieu tropical

GENERALITES

Les affections neurologiques comportent des pathologies, rencontrées dans toutes les régions du globe, mais dont la fréquence est beaucoup plus importante dans les pays tropicaux comme le Sénégal. Des facteurs écologiques, socioculturels, carentiels, toxiques en sont entre autres les raisons. Ainsi, une affection comme l’épilepsie qui atteint environ cinq pour 1000 de la population générale dans les pays occidentaux est observée avec une prévalence moyenne de 15 pour 1000 en zone tropicale [76]. La particularité clinique des affections neurologiques est liée en grande partie au retard de la première consultation les patients étant souvent vus au stade de complications. Leur prise en charge est fortement influencée par leurs conditions économiques, par le manque de moyens d’investigations (absence de neuroimagerie dans plusieurs pays) et par le faible nombre des médecins spécialistes. Outre les affections ubiquitaires, il existe des pathologies exclusivement tropicales. Elles sont essentiellement infectieuses. Le développement des agents responsables ou de leurs vecteurs ne pouvant se faire que dans les conditions climatiques des pays tropicaux. Elles peuvent être également liées à certaines spécificités génétiques de populations. Parmi les maladies infectieuses, les parasitoses et les mycoses sont très répandues. Elles sont fréquentes chez le sujet immunocompétent, mais le syndrome d’immunodéficience acquise (SIDA) a favorisé la réémergence de leurs complications neurologiques (toxoplasmose et cryptococcose), il en est de même pour la tuberculose et la syphilis. Nous parlerons des atteintes bactériennes, parasitaires, mycosiques, virales, des accidents vasculaires cérébraux (AVC), des neuromyélopathies tropicales et des manifestations neurologiques en rapport avec les carences vitaminiques.

Atteintes infectieuses du système nerveux (SN) en milieu tropical

Les infections bactériennes 

Abcès du cerveau

a) Définition :
L’abcès est une collection de pus qui peut se former n’importe où dans le corps après une infection locale ou septicémique. Les abcès se trouvent autour du système nerveux (abcès extra dural et abcès sous dural). Ils peuvent être intracrâniens ou intra rachidiens [55]. L’abcès bactérien du cerveau est une collection purulente localisée dans la substance cérébrale [13].
b) Epidémiologie :
Elle reste une pathologie rare mais dont la mortalité et la morbidité demeurent préoccupantes [31]. Un taux de mortalité de 17,1% a été enregistré à l’hôpital Henri Mondor entre 1975 et 1983 au cours d’une étude de 35 cas [31]. Au Mali une étude réalisée de janvier 2000 à décembre 2005 par MAIGA F. [30] dans le service de maladies infectieuses, a révélé un taux de prévalence de 0,20%.
c) Clinique :
– Symptômes généraux : il y a des formes aiguës et d’autres chroniques et insidieuses à tel point que l’abcès peut passer inaperçu. On peut observer de la fièvre et des vomissements. Dans les formes chroniques, la fièvre manque souvent et l’amaigrissement rapide peut être la seule manifestation [31].
– Signes d’hypertension intracranien (HTIC) et/ou méningés : constitués par des céphalées, des nausées et vomissements, un œdème papillaire, une bradycardie relative et une raideur de la nuque [31].
– Symptômes neurologiques de localisation: comme dans la tumeur cérébrale, ils sont peu nets dans l’abcès épidural.
● Le lobe frontal : il s’agit de céphalées, d’un manque d’attention ; d’une hémiparésie, de crises convulsives unilatérales.
● Le lobe temporal : les céphalées sont unilatérales, une aphasie est notée si l’abcès est du côté dominant.
● Le cervelet : les céphalées sont sous-occipitales, il existe un nystagmus, une difficulté à fixer le regard, une faiblesse homo latérale du bras et de la jambe [31].
– Les crises épileptiques : sont généralisées ou focales, elles peuvent aboutir à un état de mal épileptique [31].
– Les symptômes psychiques : de fatigabilité, de bradypsychie, de somnolence ou au contraire une agitation, la confusion mentale, une aphasie, une atteinte de l’hémisphère dominant souvent à gauche [31].
– L’examen ORL : va rechercher une otite, une mastoïdite, une sinusite [31].
d) Les examens complémentaires :
– Examens biologiques
La numération de la formule sanguine : montre une hyperleucocytose plus nette dans les formes aiguës, une VS augmentée. Le LCR peut être normal ou avec une légère augmentation des cellules et des protéines lorsque l’infection n’atteint pas l’espace sous arachnoïdien. Si l’abcès touche l’espace sous arachnoïdien, le liquide est trouble et le germe peut être identifié par culture ; cependant, dans la plupart des cas le traitement est commencé sans attendre la confirmation bactériologique. En outre la ponction lombaire (PL) doit être évitée en cas d’hypertension intracrânienne dans la plupart des cas à cause du risque d’engagement cérébral. L’hémoculture doit être systématique, elle est parfois positive. Le germe peut être isolé sur biopsie prélevée par ponction stéréotaxique dirigée par scanner [31].
– Imagerie médicale :
La tomodensitométrie (TDM) cérébrale est l’examen de base pour le dépistage de la lésion. Il détermine le siège, la taille et le nombre des abcès. L’image typique comporte une zone centrale de nécrose hypodense cerclée d’un anneau plus ou moins épais prenant le contraste ; entourée d’un halo hypodense correspondant à l’œdème péri-lésionnel. Le caractère multiple, le siège corticosous-cortical sont en faveur de l’abcès. L’imagerie par résonnance magnétique (IRM), permet de détecter de petites localisations et de mettre en évidence une atteinte méningée ou une thrombophlébite des sinus. Les radiographies du crâne peuvent montrer une sinusite, une mastoïdite, ou une fracture de crane. La radiographie thoracique permet de mettre en évidence une infection pulmonaire qui constitue le plus souvent la porte d’entrée.
e) Traitement :
– Traitement médical
L’antibiothérapie doit répondre aux impératifs de spectre et de pharmacocinétique. Les posologies sont élevées, similaires aux posologies des infections méningées. C’est une urgence thérapeutique et le traitement médical repose sur une antibiothérapie de longue durée avec des antibiotiques actifs sur la plupart des espèces bactériennes habituellement isolées et qui diffusent dans le parenchyme cérébral. Le traitement de première intention des abcès par contiguïté repose sur l’utilisation des céphalosporines de 3ème génération à fortes doses par voie parentérale associée aux imidazolés ou aux phenicolés. Les antibiotiques doivent être prescrits à forte posologie pour assurer une diffusion optimale, par voie parentérale pendant au moins les 10-21 premiers jours puis par voie orale pendant 3 à 6 mois. A ce traitement antibiotique, il convient d’adjoindre un traitement anticonvulsivant systématique. Les corticoïdes ont des indications très réduites car ils empêcheraient la formation de la coque et pourraient favoriser la diffusion de l’infection. Ils ne sont donc utilisés qu’à la phase aigüe, pendant quelques jours pour diminuer l’œdème cérébral.

Traitement chirurgical 

Actuellement, deux techniques sont possibles pour le traitement des abcès cérébraux : la ponction aspiration en condition stéréotaxique et l’excision. Le plus souvent, ces deux techniques ne s’opposent pas mais se complètent.

Les indications thérapeutiques 

Les indications thérapeutiques ont été définies dès 1980 en fonction de l’état neurologique du patient à l’admission :
❖ Chez les malades admis comateux (stades III et IV) ou présentant des signes d’hypertension intracrânienne avec gros effet de masse au scanner, la chirurgie s’impose d’emblée par ponction aspiration.

Le traitement antibiotique est instauré en même temps. Une surveillance scannographique tous les 10 jours permet de suivre l’évolution et de poser l’indication de nouvelles ponctions en cas de non amélioration.
❖ Chez les patients non comateux ou simplement obnubilés (stade I), l’antibiothérapie probabiliste est commencée et poursuivie pendant deux semaines, et le patient est constamment surveillé.

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Table des matières

INTRODUCTION
PREMIERE PARTIE
1. GENERALITES
2. Atteintes infectieuses du système nerveux (SN) en milieu tropical
2.1. Les infections bactériennes
2.1.1. Abcès du cerveau
2.1.2. Méningites et encéphalites à germes banals
2.1.3. Tuberculose du SN
2.1.4. Listériose neuro-méningée
2.1.5. Neurosyphilis
2.1.6. Manifestations neurologiques de la lèpre
2.2. Les infections parasitaires du SN
2.2.1. Toxoplasmose cérébrale
2.2.2. Helminthoses
2.2.3. Bilharzioses en phase toxémique
2.2.4. Trypanosomiases
2.2.5. Filariose : Loa loa ou loase
2.2.6. Cysticercose : Tænia solium
2.2.7. Hydatidose
2.2.8. Echinococcose alvéolaire
2.2.9. Trichinellose
2.3. Les atteintes fongiques : Mycoses du SN en milieu tropical
2.3.1. Cryptococcose neuro-méningée
2.3.2. Histoplasmose
2.3.3. Blastomycose
2.4. Les infections virales ubiquitaires du SN
2.5. Atteintes cérébrales directement liées au VIH
3. Particularités tropicales de certaines pathologies neurologiques non infectieuses
4. Neuromyélopathies tropicales
5. Manifestations neurologiques en rapport avec les carences vitaminiques
6. Autres atteintes cérébro-vasculaires
7. TUMEURS OPPORTUNISTES DU SN
DEUXIEME PARTIE
1. CADRE D’ETUDE
1.1. Description des lieux
1.2. Personnel
1.3. Organisation des activités de soins
2. MALADES ET METHODES
2.1. Le type et la période d’étude
2.2. La population d’étude
2.3. Recueil des données
2.4. Saisie et exploitation des données
2.5. Limites de l’étude
3. RESULTATS
4. COMMENTAIRE ET DISCUSSION
CONCLUSION
REFERENCES
ANNEXES

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