Athènes à l’urbanisation anarchique

Plus encore que les autres pays de l’Europe du Sud, la Grèce apparaît aujourd’hui comme une terre d’immigration : la communauté étrangère est estimée à 10% de la population totale. Depuis le dix-neuvième siècle et jusqu’à une dizaine d’année, le pays a reçu de nombreuses populations allogènes qui ont été plus ou moins bien intégrées. Cependant, ces derniers temps, le phénomène de l’immigration clandestine s’accélère. Aujourd’hui, 90% des immigrés arrivant en Europe et esperant atteindre les pays occidentaux passent par les frontières grecques.

Lieu de concentration des plus grandes activités du pays, mais aussi des meilleures connexions aux réseaux internationaux d’échanges, Athènes est logiquement devenue la principale destination des migrants sans ressources arrivant sur le territoire hellénique et la métropole s’est transformée le plus souvent en un piège qu’ils ne peuvent quitter. Cette ville européenne à l’urbanisation récente et au centre ville engorgé n’a jamais connu de véritable planification urbaine. Curieusement, la ségrégation spatiale y était jusqu’à aujourd’hui réduite, malgréd’incontestables polarités. Son schéma est en effet atypique pour une métropoleeuropéenne : si la capitale n’a jamais connu de véritables secteurs ségrégués, la paupérisation de certains quartiers du cœur de la ville semble aujourd’hui s’accroître rapidement, en parallèle avec l’afflux des migrants. C’est tout du moins la première impression qui apparaît au contact de la ville. La capitale aujourd’hui en grave crise économique et sociale, doit absorber ce flot toujours plus important d’étrangers qui modifie et accélère ses mutations. L’augmentation de la présence des immigrés est particulièrement visible dans l’espace public qui devient le lieu stratégique de recompositions et/ou de nouveaux conflits L’enjeu de ce mémoire va donc être de tenter de comprendre en partie, la complexité de ce phénomène contemporain qui bouleverse le visage de la ville mais aussi les représentations de ses habitants. De manière inductive, l’étude urbaine et anthropologique d’un quartier du cœur Athénien fortement marqué parl’immigration permettra peutêtre d’appréhender de manière localeces transformations plus que jamais d’actualité .

ATHENES A L’URBANISATION ANARCHIQUE

Athènes, mégalopole méditerranéenne de presque quatre millions d’habitants et capitale d’un pays de onze millions de résidents, est une ville au développement très récent pour une capitale européenne qui n’a jamais connu de véritable planification urbaine.

Suite à la période de gloire durant l’Antiquité qui a forgé sa réputation symbolique très forte, Athènes était en réalité une simple bourgade jusqu’en 1830 lorsqu’elle fut désignée capitale hellénique du fait de son passé. Des plans d’aménagement se sont alors succédés sans réussir à donner forme à la capitale. Les événements rencontrés durant le XXe siècle ont bouleversé son organisation et ont limité l’application de toutes tentatives d’aménagement du territoire : l’arrivée brutale de réfugiés d’Asie Mineure en 1922 (des expatriés grecs chassés par les Turcs de retour sur leur territoire d’origine), a marqué le début du développement anarchique de l’agglomération. Ce phénomène fut suivi jusqu’en 1970 d’un important exode rural. Durant cette période, la croissance de constructions sommaires fut encouragée par un laisser-faire de la part de l’Etat concernant l’initiative privée en matière foncière, ainsi que par l’inexistence de politique de logement social. Le gouvernement ne pouvant assumer une gestion du logement efficace, il a permis le développement de l’habitat en périphérie pour les plus démunis. L’extension de l’agglomération s’est donc poursuivi en dehors de tout plan d’aménagement des sols.

En parallèle de cette construction illégale, l’antiparokhi (contrepartie), est un système de financement de constructions qui s’adressait aux couches solvables de la population. Des promoteurs proposaient aux propriétaires, en compensation de leur terrain, la construction d’immeubles modernes avec plusieurs appartements ensuite partagés. Cette démarche a permis aux propriétaires fonciers d’acquérir un bien immobilier moderne et aux promoteurs d’acheter des terrains à bâtir à bon prix au mépris du patrimoine bâti existant. Ces deux systèmes officiels et officieux ont entraîné un bouleversement de l’organisation d’Athènes. Dans un premier temps, l’augmentation de densité lui fait perdre le caractère rural de l’entre deux guerres et a favorisé un meilleur fonctionnement des transports publics , améliorant les conditions de vie des Athéniens. En effet, la concentration des activités dans le centre et le développement radio centrique des transports ont limité les déplacements qui s’effectuaient alors à pied (la voiture étant encore un luxe). La ville assurait son rôle social en tant que point de rencontre entre les habitants issus de différentes couches sociales. Elle optimisait les interactions entre les différentes sphères de l’économie. La concentration de la surface urbanisée grâce à ce mode de fonctionnement respectait le cadre de vie et sa qualité.

Il a fallu attendre les années 70 pour que les aspects négatifs de l’antiparohki apparaissent. L’automobile est devenue un objet de consommation de masse qui a envahit les rues étroites d’Athènes. Très vite, le centre ville est congestionné, les moyens de transports en commun deviennent inefficaces suscitant ainsi des déplacements privés toujours plus nombreux. D’où des problèmes de pollution atmosphérique et de dégradation des conditions de vie en ville. Les couches les plus favorisées quittent alors le centre pour se rendre en banlieue et sur le littoral. Le cœur d’Athènes est ensuite investi par des ménages plus nombreux et moins aisés. Ce mouvement de décentralisation se fait de façon anarchique et renforce les problèmes de fonctionnement de la capitale grecque. Le centre ville ne remplit plus ses fonctions économiques, sociales et culturelles. Or, Athènes concentre 40% de la population grecque, la plupart de son industrie, de son administration et de ses commerces. Ainsi, lorsque la capitale hellénique entre en phase de crise, c’est tout le développement économique du pays qui en subit les conséquences. Aujourd’hui, la capitale possède donc un tissu bâti constitué de processus autonomes qui suivent des logiques privatives. L’agrégation spatiale de ces rationalités individuelles constitue une mixité intense de l’usage des sols mais aussi absence de programme de logement social, d’équipements publics… Bien que des éléments nouveaux, positifs, tels que l’augmentation des dépenses publiques dans le domaine de la construction et de l’urbanisme, les infrastructures routières, sportives, les espaces verts et l’image urbaine, notamment à travers des fonds européens, soient apparus dans les années 90, ils n’ont pas suffi à résoudre les problèmes urbains d’une ville qui débute dans le domaine de la planification urbaine. Durant la dernière décennie, une politique de grands travaux est menée, notamment dans le cadre de l’accueil des Jeux olympiques de 2004, utilisés comme un véritable outil d’organisation et d’aménagement du territoire, la véritable répercussion étant la réalisation du métro et d’un tramway permettant de faciliter l’accès au centre. Cependant la modernisation des infrastructures n’a pas été accompagnée par un projet global pour l’avenir de la ville. Athènes manque encore chroniquement de politique, de planification et d’urbanisme. Aujourd’hui, le projet de rénovation urbain de la capitale grecque fait les frais du plan d’austérité approuvé par le gouvernement pour remédier à l’état calamiteux des finances publiques. La capitale possède d’importants problèmes de gouvernement métropolitain que la crise économique vient démultiplier. Les réflexions urbaines ont toujours été à peine esquissées : les enjeux sociaux, environnementaux, de transport, de patrimoine, sont balbutiants. Les pouvoirs publics sont déconcentrés et sans réelle ressources techniques, financières mais aussi à la différence de l’Europe occidentale sans histoire et savoir faire au niveau urbain. Les entités administratives et les outils d’interventions sont obsolètes pour régler des choix stratégiques fondamentaux. La Grèce semble donc dans l’incapacité de se poser les questions d’organisation du territoire et des institutions en lien.

Pourtant comme le montre Guy Burgel dans « Athènes : une métropole contemporaine exemplaire? », avant la crise, la capitale grecque paraissait échapper à la fracture sociale des métropoles de l’Europe occidentale. Évidemment, les clivages sociaux entre riches et pauvres et les différenciations spatiales entre quartiers favorisés ou non y étaient parfois très visibles et existaient. Cependant la société grecque n’avait jamais attendu la solidarité d’un État indigent et faible pour résoudre ses problèmes de logement, d’éducation et d’accès à l’emploi. Les réseaux familiaux et une échelle sociale peu rigide et différenciée, ont toujours été à l’œuvre, et se révélaient efficaces globalement, en période de bouleversements économiques rapides et d’adaptation exigée des individus et des groupes. « La genèse de la croissance Athénienne s’est donc reposée davantage sur les ressources humaines que sur l’énergie ou les matières premières, sur la démographie que sur l’économie, sur la consommation que sur la production, sur le bâtiment, la construction et la spéculation immobilière, tous secteurs réputés parasitaires en stricte orthodoxie économique, que sur l’industrie lourde ou les infrastructures. Athènes s’est installée précocement, par nécessité, dans un système de croissance fragile qui la condamnait à avancer et à gagner de la marche incertaine mais fascinante du funambule » La manière dont l’espace Athénien s’est formé en suivant l’initiative privée s’oppose à toute exigenced’unification. D’où une impression du règne du fragmentaire, de l’incomplétude, de l’inachevé. Nait ainsi le sentiment de l’“anarchisme”, du “chaotique” de l’agencement d’un espace qui fonctionne pourtant par lui mêmemais pour combien de temps en ce contexte de crise économique et face au phénomène grandissant de l’immigration? En effet en parallèle de cette croissance urbaine anarchique, on observe récemment un autre phénomène, essentiel dans la compréhension du fonctionnement de la métropole, à savoir l’immigration .

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Table des matières

INTRODUCTION
I. COMPRENDRE LE CONTEXTE
A. Athènes à l’urbanisation anarchique
B. Une tradition de migration
C. Réaction urbaine à l’immigration
D. Regard grec vis à vis de l’Autre
II. ETUDE D’UN QUARTIER ETHNIQUE
Méthode
A. Habitants, Passants, question du visible et de l’invisible
B. Cohabitation ethnique en espace public, interactions
C. Identité et représentations
III. UN QUARTIER MIROIR DES BOULEVERSEMENTS D’UNE METROPOLE ET DU MONDE
A. Un quartier témoin des mutations d’une ville
B. Une immigration témoin d’une problématique mondiale
C. Quelle gouvernance?
Autres
CONCLUSION
BIBLIOGRAPHIE

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