La population mondiale pourrait atteindre 9 milliards d’habitants en 2050, augmentant ainsi la pression sur les ressources alimentaires. Il est estimé qu’en 2050, la demande en blé, actuellement la troisième céréale la plus produite à l’échelle mondiale, pourrait subir une hausse de 39,7 % par rapport au niveau de consommation 2005–2007 (Alexandratos and Bruinsma, 2012). Dans le même temps, la hausse des surfaces cultivables sera très faible (1,35 %) (Alexandratos and Bruinsma, 2012), impliquant que le gain de production sera réalisé à travers une amélioration végétale. Par ailleurs, depuis les années 2000, les rendements du blé semblent stagner dans plusieurs régions du monde, notamment en Europe (Brisson et al., 2010). Le changement climatique pourrait en être la cause (Brisson et al., 2010), et les prévisions sur le futur climat de la zone Europe indiquent une forte variabilité des précipitations (Salzmann, 2016) et une augmentation des épisodes de sécheresse, principal facteur de stress et de perte de rendement, rendant les ressources en eau moins disponibles pour les cultures. De plus, la raréfaction des ressources fossiles et minérales, à partir desquelles sont produits les engrais, pourrait contraindre l’utilisation des fertilisants à moyen terme.
Ainsi la sélection variétale doit s’attacher à améliorer l’efficacité des plants de blé à la capture de l’eau et des nutriments présents dans le sol. Le système racinaire étant l’organe qui assure cette fonction, l’amélioration des rendements des futures variétés pourrait s’appuyer sur une sélection de systèmes racinaires aux traits adaptés aux futures conditions agroclimatiques. Différents traits racinaires sont adaptés à la résistance à la sécheresse, tel un enracinement profond pour extraire l’humidité des couches profondes du sol en période de sécheresse (Manschadi et al., 2006), ou une vigueur racinaire précoce (Bertholdsson and Brantestam, 2009).
Les défis à venir de l’agriculture
Assurer la sécurité alimentaire mondiale d’une population croissante
Si la croissance démographique annuelle est en train de ralentir actuellement (de 1,28 % en 2000 à 1,13 % en 2015) et pour le futur, avec des prévisions en 2050 aux alentours de 0,52 % (United Nations, Department of Economic and Social Affairs, Population Division, 2015), il n’en reste pas moins que la population mondiale pourrait atteindre 9,3 milliards d’êtres humains d’ici 2050, représentant ainsi un accroissement d’un tiers de la population actuelle (7,35 milliards en 2015).
Dans le même temps, la demande mondiale en production agricole augmentera nécessairement, représentant une hausse de 39,7 % de la production de céréales en 2050, par rapport à la production de 2005–2007, ce qui revient à une croissance annuelle de 0,83 % sur 40 ans (Alexandratos and Bruinsma, 2012). En ce qui concerne la production agricole totale, la hausse pourrait être plus élevée, de l’ordre de 60% (Alexandratos and Bruinsma, 2012), en tenant compte des changements de régimes alimentaires associés à la hausse du pouvoir économique des habitants des pays en voie de développement. Il est estimé que la demande en produit carnés sera plus importante de 76% en 2050 (Alexandratos and Bruinsma, 2012), induisant ainsi une hausse de la production de céréales fourragères.
De ce fait, l’équilibre entre demande et production de denrées alimentaires pourrait être plus précaire. Un pourcentage élevé de cette demande doit être satisfait par les principales cultures de base, le blé (Triticum aestivum L.), le riz (Oryza sativa L.), le maïs (Zea mays L.), et l’orge (Hordeum vulgare L.). L’augmentation de la production a deux sources : l’augmentation des surfaces cultivées et l’augmentation des rendements agricoles. La production mondiale a progressé ces quatre dernières décennies principalement grâce à l’augmentation des rendements (Figure 1), responsable de 85% de la hausse en production des céréales (blé, maïs, riz) et de 70% de celle du fourrage (en ajoutant donc la production de soja) (Fischer et al., 2014). De la même façon, la FAO prédit que la hausse des rendements devrait rester le premier facteur d’augmentation de la production jusqu’en 2050, l’agrandissement des surfaces cultivables étant marginal (Alexandratos and Bruinsma, 2012).
En parallèle, d’importantes régions agricoles dans le monde font face à une stagnation du rendement des cultures, en Chine (Ray et al., 2012), en Europe pour la production du blé (Brisson et al., 2010; Ray et al., 2012), imputée aux impacts du changement climatique et à des modifications des pratiques agronomiques . Par ailleurs, la concurrence des biocarburants face à la production alimentaire, la raréfaction des ressources hydriques, l’urbanisation des territoires, ainsi que la baisse de la qualité des ressources du sol (Carberry et al., 2013) sont des contraintes supplémentaires à l’augmentation de la production céréalière.
Perspectives climatiques
Depuis l’époque préindustrielle, la température mondiale moyenne a augmentée de 0.9°C . Cette hausse est significative par rapport à la variabilité sur des périodes comparables antérieures (Rummukainen, 2014). Les prédictions de changements climatiques pour le milieu du XXIème siècle sont assez variables selon les modèles climatiques et les scénarios d’émissions de gaz à effet de serre (Stocker et al., 2013). La température pourrait augmenter de 0,3 à 4,8°C d’ici la fin du XXIème siècle selon le cinquième rapport du GIEC (Stocker et al., 2013). D’après des simulations climatiques, une augmentation des précipitations mondiales accompagnera ce réchauffement climatique. Ces simulations indiquent une hausse d’environ 1% pour chaque hausse de 1°C de la température moyenne mondiale (Rummukainen, 2014).
Occurrence des évènements extrêmes
Le changement climatique provoquant une variabilité accrue des conditions météorologiques, ainsi qu’une recrudescence des phénomènes climatiques extrêmes, impacte négativement la production alimentaire et, par conséquent, la sécurité alimentaire (Coumou and Rahmstorf, 2012). L’augmentation de la fréquence des phénomènes extrêmes tels que les vagues de chaleur et les sécheresses prolongées est déjà observable (Christidis et al., 2014), entrainant des impacts négatifs majeurs sur la production agricole dans de nombreuses régions du monde. Ce fut le cas en 2007, 2010 et 2012 avec une occurrence simultanée de phénomènes météorologiques défavorables dans les régions agricoles importantes (Lobell and Gourdji, 2012). Les projections sur le climat futur prédisent une fréquence significativement plus élevée d’années très défavorables pour la production agricole, provoquant des retombées économiques désastreuses dans de nombreuses régions agricoles (Stocker et al., 2013).
Afin de faire face aux défis du changement climatique futur, caractérisé par l’augmentation des phénomènes météorologiques extrêmes, il est primordial d’adapter les systèmes de production agricole (Trnka et al., 2014). En outre, les incertitudes sur les projections des changements climatiques posent des défis particuliers aux obtenteurs variétaux et aux scientifiques du domaine de l’amélioration variétale (Semenov et al., 2014).
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Table des matières
Introduction
1. Cadre général
2. Les défis à venir de l’agriculture
1.1. Assurer la sécurité alimentaire mondiale d’une population croissante
1.2. Perspectives climatiques
1.3. Occurrence des évènements extrêmes
2. Caractères de sélections du blé moderne et futur
2.1. La révolution verte
2.2. Traits liés à la révolution verte
2.2.1. Nanisme
2.2.2. Changements phénologiques
2.2.3. Adaptation à l’apport d’azote
2.2.4. Tolérance aux stress hydriques
2.2.5. Changements dans la diversité génétique
2.3. Les traits racinaires adaptés aux futures conditions climatiques
2.3.1. Contexte
2.3.2. Généralités sur la croissance racinaire
2.3.3. Traits architecturaux d’intérêts dans les grandes cultures
2.3.4. Les traits morphologiques et anatomiques des racines
3. Méthodes de mesures des systèmes racinaires
3.1. Échelle d’observation pratiquée
3.2. Méthodes utilisées en milieux contrôlés
3.2.1. Aperçu global
3.2.2. Contraintes et limites des études en milieux contrôlés
3.3. Méthodes applicables au champ
3.3.1. Inadaptation des méthodes destructives aux exigences du phénotypage
3.3.2. Méthodes non destructives d’observation directe
3.3.3. Méthodes non destructives de caractérisation indirectes
4. Bases sur les techniques de mesures des racines employées dans cette thèse
4.1. Les minirhizotrons
4.1.1. Tubes d’observation
4.1.2. Systèmes de capture d’images des racines
4.1.3. Données issues des minirhizotrons
4.2. Mesures indirectes des systèmes racinaires par méthode électrique
4.2.1. Propriétés électriques des tissus biologiques
4.2.2. Application de la mesure de l’impédance aux systèmes racinaires
4.2.3. Implication pour les programmes de sélection variétale
Objectifs et résultats
Objectifs de la thèse
Chapitre 1 : Analyse comparative des méthodes électriques pour l’estimation rapide de la
biomasse racinaire
Chapitre 2 : Impact des systèmes racinaires de différentes variétés de blé en conditions multistressantes, mis en évidence à l’aide de minirhizotrons à scanner
Chapitre 3 : Un modèle étendu de l’impédance des plantes : détection in situ des racines
Conclusions
Annexes
Références
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