« Durant les 50 dernières années, les êtres humains ont modifié les écosystèmes plus rapidement et de manière plus importante que dans n’importe quelle autre période de l’histoire humaine ». Le Jallé, Déssille, 2008 « Les sociétés humaines, en modifiant perpétuellement leur environnement, créent des conditions favorisant la disparition, le maintien ou l’émergence de certaines pathologies ». Salem, Jannée, 1989 ; Cadot et al, 1998 ; Sy et al, 2011 . Les besoins mondiaux en services d’assainissement de base (l’alimentation en eau potable, l’élimination des excrétas et des eaux usées) ont beaucoup augmenté du fait de ces changements intervenus au niveau de l’environnement (urbanisation, explosion démographique). L’urbanisation des villes constitue la conséquence d’une dynamique urbaine accélérée soustendue par les migrations incontrôlées, le coût élevé des terrains viabilisés et du logement, l’insuffisance de l’offre de logement et l’absence ou l’insuffisance de l’implication des schémas d’urbanisme. « Ces zones urbaines présentent alors des difficultés vis-à-vis de la planification des réseaux d’assainissement des eaux usées, des eaux pluviales et des ordures » DEFO F.P, 2012. On observe comme conséquence directe le rejet des eaux usées et des ordures dans la rue ou dans la nature, ce qui représente ainsi un risque de maladie pour la population et de pollution pour l’environnement. Tout cela a conduit les Nations Unies à l’instauration de la Décennie Internationale de l’eau potable et de l’assainissement de 1981 à 1990 (OMS, 1995). Puis, en 1992, à la conférence de Rio de Janeiro, dans le cadre de l’OMD (7e objectif, cible 10), les pays présents à ce rendez-vous, se sont fixées dans leur stratégie de lutte, de réduire entre 1990 et 2015, la proportion de personnes n’ayant pas accès à un approvisionnement en eau potable et à un assainissement de base, bref à un développement durable.
Les ministres de la santé et de l’environnement de 53 pays africains, ont signé la Déclaration de Libreville dans laquelle, ils s’allient pour réduire la mortalité causée par les risques environnementaux en Afrique. DEFO F.P, 2012 . Le Sénégal, membre des pays signataires des accords de rio et de la déclaration de Libreville reste toujours confronter à ces problèmes d’assainissement. Cette situation est vécue presque dans toutes les grandes villes du pays mais principalement à Dakar et plus particulièrement dans sa banlieue (Pikine et Guédiawaye). La commune de Malika, l’une des 16 communes du département de Pikine subit ce même problème.
C’est dans ce contexte, que ce travail est engagé, en partant du constat des nombreux problèmes préoccupants et complexes liés à l’assainissement dans la Commune de Malika. En effet, l’absence d’ouvrages d’assainissement collectifs, la proximité de la décharge publique de mbeubeuss, la nature du sol et le caractère irrégulier de certains quartiers font que les populations vivent dans des conditions d’insalubrité difficile. Ce qui laisse présager que les habitants de la Commune de Malika sont exposés à des risques sanitaires. Toutefois, les relations entre assainissement et santé sont modelées par une multitude de contraintes telles que des contraintes financières, logistiques et techniques, des contraintes institutionnelles, des contraintes sociologiques et l’inefficacité des programmes sanitaires. La compréhension des risques sanitaires liés aux problèmes d’assainissement dans la Commune de Malika, nécessite une approche globale et interdisciplinaire. Nous n’avons pas la prétention de traiter toutes les interactions concernant l’assainissement ainsi que leurs incidences sur la santé.
PROBLEMATIQUE GENERALE
OBJET DE LA RECHERCHE
La commune de Malika, qui n’échappe pas aux effets néfastes de l’urbanisation, présente un contexte propice à l’analyse du poids de l’assainissement sur le développement de maladies. En effet, peuplée de 32.130 habitants pour l’année 2013 (RGPHAE, 2013) , elle est caractérisée par de fortes densités humaines, des installations relativement irrégulières, l’assainissement déficitaire, l’insalubrité et l’environnement physique défavorable. Dans cette ville, l’insalubrité est le résultat de la présence de l’unique décharge d’ordures de la région de Dakar qui reçoit environ 475000 tonnes de déchets par an. En effet, depuis 1968, la décharge de Mbeubeuss, ancien lac asséché, accueille la totalité des déchets solides ménagers et industriels produits dans la région de Dakar. La décharge, constitue un dépotoir à ciel ouvert sans clôture, on se pratique une intense activité de récupération. La cohabitation de cette décharge sauvage avec les zones d’habitations, d’avicultures, d’élevage porcine et de maraichage est source de multiples difficultés pour les populations riveraines (Dubresson, 1978 ; CRDI-IAGU, 2011) .
Les risques infectieux demeurent importants pour les personnes au contact des déchets mais aussi pour toutes les populations riveraines de la décharge. L’insalubrité se traduise également par la présence d’ordures dans plusieurs quartiers de la commune et reste profondément liée à l’absence d’un système d’assainissement collectif. L’absence de réseaux d’assainissement et l’inefficacité du système de ramassage des ordures rendent impossible l’évacuation des eaux et des ordures. Cette situation crée un espace épidémiologique spécifique et dangereux qui potentialise les pathologies liées au manque d’hygiène. Dans ce contexte favorisant le développement de germes pathogènes, les enfants fragiles et vulnérables s’exposent de manière forte et permanente à divers risques sanitaires. Les causes de dégradation de la santé humaine sont à rechercher dans l’environnement familial et d’une manière générale dans le milieu de vie (Dillon, 2003).
On peut prendre pour cela l’exemple du rôle de l’environnement sur la pathologie infantile (Revault, Monjour, 2003 ; Sy et al, 2011) .
Cependant, face à la détérioration de la qualité de l’environnement, les habitants de certains quartiers s’organisent en apportant des solutions alternatives pour atténuer les effets du manque d’assainissement. Ces réalités doivent être prises en compte : elles peuvent expliquer pourquoi des quartiers disposant des mêmes paysages environnementaux ne se retrouvent pas dans les mêmes faciès épidémiologiques ou les mêmes niveaux de morbidité. Il s’agit de comprendre les soubassements sociaux et culturels des différences de morbidité observées des espaces ayant des caractéristiques similaires du point de vue des services d’assainissement.
CADRE CONCEPTUEL
Pour mieux cerner les contours de notre projet de recherche, il a été impératif de définir un certain nombre de concepts. Il s’agit principalement des mots suivants : assainissement, commune, risque, risques sanitaires, facteurs de risques, maladie, morbidité (diagnostiquée).
Assainissement
La notion d’assainissement reste très large dans sa définition, «On entend par assainissement l’ensemble des travaux que doivent effectuer en se conformant aux différents codes liés à l’assainissement, les particuliers, les collectivités et les pouvoirs publics pour faire disparaître dans les agglomérations toutes causes d’insalubrité». Selon cette définition reprise par le Comité d’experts de l’environnement (OMS) dans les années 50 l’assainissement implique donc le contrôle et l’approvisionnement public en eau, l’évacuation des excrétas et des eaux usées, l’élimination des déchets et des vecteurs de maladies, des conditions de logement, des aliments et de leur manipulation, des conditions atmosphériques et des conditions de sécurité sur les lieux de travail. Cette définition a le mérite de considérer les causes de l’insalubrité pour un environnement organisé selon des règles et des normes précises.
Entre temps, les besoins, en particulier des pays en voie de développement, en service d’assainissement de base ont beaucoup augmenté, en raison principalement de l’expansion démographique et de l’urbanisation croissante. Face à cette dramatique situation, les Nations Unies ont instauré la Décennie Internationale de l’Eau Potable et de l’Assainissement. Au cours de cette période, le terme «assainissement» défini comme se rapportant uniquement à l’élimination des excrétas et des eaux usées a été approuvé par le monde entier. Mais aujourd’hui, on doit s’orienter vers une approche environnementale qui se soucie de toute la chaîne: collecte, transport, épuration et rejet ou réutilisation des eaux épurées. Dans le cadre de notre étude, l’accent sera mis sur l’assainissement des déchets solides et des ordures de manières générales.
|
Table des matières
INTRODUCTION GENERALE
I.PROBLEMATIQUE GENERALE
II.APPROCHE MÉTHODOLOGIQUE
PREMIERE PARTIE : ENVIRONNEMENT ET DYNAMIQUE URBAINE
CHAPITRE I : CARACTERISATION DE L’ENVIRONNEMENT DE LA COMMUNE DE MALIKA
CHAPITRE II : EVOLUTION DEMOGRAPHIQUE ET SPATIALE
DEUXIEME PARTIE : ASSAINISSEMENT URBAIN ET MORBIDITE DIAGNOSTIQUEE
CHAPITRE III : ACCES DES POPULATIONS AUX SERVICES D’ASSAINISSEMENT
CHAPITRE IV : MORBIDITE DIAGNOSTIQUEE ET POPULATIONS A RISQUE
Conclusion partielle
TROIXIEME PARTIE : LES FACTEURS DE RISQUES SANITAIRES
CHAPITRE V : RISQUES SANITAIRES LIES AUX FACTEURS SOCIOENVIRONNEMENTAUX
CHAPITRE VI : LES RISQUES SANITAIRES LIES A LA DECHARGE PUBLIQUE DE MBEUBEUSS ET A LA DESSERTE DES SERVICES D’ASSAINISSEMENT
Conclusion partielle
CONCLUSION GENERALE