L’accident vasculaire cérébral (AVC) est « le développement rapide de signes cliniques localisés ou globaux de dysfonction cérébrale avec des symptômes durant plus de 24 heures, pouvant conduire à la mort, sans autre cause apparente qu’une origine vasculaire ’’ selon l’OMS [45]. C’est donc la survenue d’un évènement brutal lié á l’interruption de la circulation sanguine dans le cerveau, consécutif à un spasme vasculaire, une occlusion, ou une rupture des vaisseaux sanguins [32]. Les accidents vasculaires cérébraux (AVC) peuvent survenir à tous les âges, des premiers jours de vie à l’âge adulte. En pédiatrie on distingue l’AVC de l’enfant encore appelé AVC infantile (de 29 jours à 18 ans) de celui du nouveau-né. En 2006, l’AVC a été défini par l’institut de santé américaine en période périnatale comme étant « un ensemble de conditions hétérogènes causées par une interruption focale du flux sanguin cérébral survenant entre 20 SA et 28 jours de vie postnatale et confirmées par une imagerie cérébrale ou un examen anatomo-pathologique » [4,32] Cet institut la classe en 3 types d’AVC :
– AVC fœtal : le diagnostic est effectué avant la naissance sur l’imagerie fœtale ou l’examen anatomo-pathologique ;
– AVC néonatal : le diagnostic est porté après la naissance et avant le vingthuitième jour de vie.
– L’AVC périnatal présumé : le diagnostic est effectué chez un enfant âgé de plus de 28 jours relié à un AVC étant survenu entre 20 SA et J28, devant des arguments radiologiques et cliniques.
Les AVC sont subdivisés en 2 groupes : les accidents hémorragiques (AVCH) et les accidents ischémiques (AVCI) eux même subdivisés en AVCI artériel et en thrombose veineuse cérébrale (TVC). Cette TVC peut survenir seule ou en association avec un infarctus veineux ou une hémorragie [48]. Chez l’enfant les AVCH sont formés d’hémorragies intra parenchymateuses spontanées avec ou sans inondation ventriculaire, des hémorragies intra-ventriculaires et des hémorragies sous-arachnoïdiennes non traumatiques [1,48]. L’incidence de l’AVC chez les enfants et le nouveau-né est comparativement beaucoup plus faible par rapport à celle de l’adulte. Elle reste cependant une entité redoutable à mortalité élevée surtout en période néonatale et dans les pathologies chroniques [45]. C’est une urgence pédiatrique qui nécessite une prise en charge précoce afin de minimiser les conséquences vitales et les séquelles neurologiques. Au Sénégal peu d’études ont été réalisées sur les AVC de l’enfant et du nouveau-né d’où le peu d’information sur sa prévalence. Fort de cela il a été mis en place depuis 2009 un ≪ registre multicentrique des AVC de l’enfant ≫ à Dakar. Toutefois ceux répertoriés à l’HED n’étaient pas inclus dans ce registre. La symptomatologie est très variée et le diagnostic clinique difficile surtout chez les nouveau-nés et les nourrissons en âge d’apprentissage de la langue. En effet les signes cliniques tels que la léthargie, les maux de tête, les crises convulsives ou encore des troubles de la conscience sont rarement associés à des accidents vasculaires aigus par les cliniciens à l’origine d’un retard diagnostic considérable [48]. De plus le déficit moteur principal symptôme de cette affection chez l’adulte est largement rencontré en pathologie pédiatrique d’où la nécessité d’une imagerie médicale adéquate, seul examen permettant de confirmer l’AVC. L’imagerie constitue ainsi une aide cruciale dans le diagnostic positif permettant d’orienter le diagnostic étiologique et le pronostic. L’Imagerie par Résonance Magnétique (IRM), examen non irradiant, est l’imagerie la plus pertinente pour le diagnostic des AVC en phase aiguë surtout chez le nouveau-né du fait d’une plus grande résolution en contraste notamment pour l’étude des cerveaux immatures [35]. Elle offre de meilleurs résultats dans les lésions cérébrales de petite taille ou siégeant dans la fosse postérieure.
Devant des signes neurologiques non spécifiques chez le nouveau-né, une exploration échographique par voie transfontanellaire est souvent demandée pour une première orientation [13]. Peu sensible en phase aiguë, elle peut permettre cependant le diagnostic et le suivi de thrombose du sinus longitudinal, la détection de foyers hémorragiques et ischémiques [13]. Chez les enfants drépanocytaires le doppler transcranien (DTC) permet le diagnostic de sténoses des principales artères de la base du crâne et la prédiction de survenue d’AVC chez ses enfants. Beaucoup plus sensible que l’échographie, le scanner cérébral est l’examen réalisé en urgence devant une suspicion d’AVC [35]. Dans nos régions où le coût de l’IRM est élevé, son accessibilité et sa disponibilité restant encore difficile, c’est ainsi que nous avons choisi de mener une étude sur les aspects scanographiques des AVC de l’enfant et du nouveau-né à HED avec comme but : Déterminer les aspects scanographiques des accidents vasculaires cérébraux de l’enfant à l’hôpital pour enfant de Diamniadio.
Données épidémiologiques et cliniques
Prévalence des AVC
L’AVC est une pathologie relativement rare en pédiatrie, ayant intéressée peu d’études épidémiologiques surtout chez le nouveau-né. En effet la plupart des études effectuées sur les AVC de l’enfant n’ont pas inclus les nouveau-nés d’où le peu d’information disponible sur les données concernant l’incidence des AVC du nouveau-né [8]. Durant les deux années d’étude, nous avons recensé cinq cas AVC de nouveau-né sur les 37 patients soit 13,5%. À ce jour aucune étude sur les AVC du nouveau-né n’a été effectuée au Sénégal permettant une comparaison de nos résultats. Les incidences rapportées par les différentes études réalisées ailleurs divergent. Ainsi Lynch et al. [43] observaient une incidence de 26,4/100 000 naissances vivantes durant la période de 1980 à 1998 sur les données hospitalières américaines de la National Hospital Discharge Survey (NHDS). Une incidence beaucoup plus élevée est rapportée sur l’étude réalisée en 2007 par Laugesaar et al., en Estonie [39], sur les AVC du nouveau-né avec 63/100 000 naissances vivantes [7]. De même, Plus récemment Béjot et al. [8] donnent une incidence de ces AVC comprise entre 20 et 65 cas pour 100 000 naissances vivantes. Il a été décrit dans la littérature que l’accident vasculaire cérébral (AVC) est 17 fois plus fréquent à la période néonatale que chez l’enfant de plus 1 ans [32,65]. En effet Perez et al. [57] ayant effectué une étude sur une période de 9 ans des AVC de l’enfant et du nouveau-né avait trouvé cette prédominance avec 93 cas d’AVC périnataux sur les 161 patients contrairement à notre étude. Le faible taux d’AVC néonatal enregistré pourrait être expliqué par la non spécificité et la variabilité des signes cliniques néonataux ainsi qu’un faible niveau de suspicion de la part des cliniciens qui peuvent être trompeur, à l’origine d’un défaut de reconnaissance de la pathologie à la phase aiguë d’où un diagnostic tardif. De plus l’ETF et le scanner sont les seuls moyens diagnostiques des AVC à HED à défaut de l’IRM qui est de l’examen de référence [38]. Cependant l’ETF reste limitée dans les lésions corticales ou dans le territoire de l’artère cérébrale postérieure [35] ; dans les lésions ischémiques on note une apparition différée des anomalies d’échostructure objectivées le plus souvent après le jour 4e [18,47]. La faible résolution en contraste du scanner rend difficile la détection scanographique en phase aiguë des lésions de petite taille, des lésions siégeant dans la fosse postérieure ou chez les nouveau-nés avec des cerveaux immatures [35,38]. Chez l’enfant de 29 jours à 18 ans, on estime en général l’incidence des AVC entre 1,3 et 4,3 pour 100 000 naissances par an [8]. Au Sénégal nous ne disposons pas de données épidémiologiques précises de cette affection chez les enfants. Toutefois quelques études ont été réalisées à Dakar dont deux études multicentriques ayant rapportées de 2003 à 2013 soit en 10 ans et de 2009 à 2014 soit en 5 ans, respectivement 75 et 84 cas [5,52]. Dans notre série nous avons colligé 37 patients en 2 ans. Cette hausse pourrait s’expliquer par la disponibilité et l’accessibilité des moyens de diagnostic notamment le scanner cérébral à l’HED mais également une augmentation de l’espérance de vie de nos jours des enfants présentant des facteurs de risque d’accident vasculaire cérébral, tels qu’une cardiopathie congénitale, une drépanocytose.
Age et genre
Nous avons trouvé un âge moyen de survenue des AVC infantiles de 3 ans 10 mois et 10 jours avec l’apparition pour les ischémies vers 4 ans 2 mois et 10 jours et pour les formes hémorragiques autour de 1 an 7 mois et 27 jours. Les différentes études réalisées au Sénégal rapportent un âge moyen beaucoup plus élevé : 5,9 ans [50] et 7,44 ans [51] dans les AVCI infantiles et 9.85 ans pour les AVCH [23]. Dans son étude sur les AVC pédiatriques au CHU d’Angers et de Rennes, Fayçal D. [27] avait observé 22 cas d’AVC ischémiques et 6 cas d’AVC hémorragiques pour les enfants de moins de 5 ans. En ce qui concerne les patients de plus de 5 ans, il avait observé 15 cas d’AVC ischémique et 27 cas d’AVC hémorragique. La répartition des patients en différentes catégories d’âge selon le type d’AVC chez les enfants nous a permis de constater conformément à la littérature que les accidents vasculaires ischémiques étaient plus fréquents chez l’enfant de moins de 5 ans avec des valeurs significatives (44%dans notre série) concernant les enfants âgés de 28jours à 2ans [4,27]. Concernant les AVCH il a été rapporté dans la littérature une fréquence plus élevée des accidents hémorragiques chez l’enfant de plus de 5 ans [27] ce qui n’était pas le cas dans notre étude ou les AVCH prédominaient avant l’âge de 5 ans. Toutefois les AVCH ne représentaient que16,2 %. Pour les AVCnn l’âge moyen des nouveau-nés tout AVC confondu était de 19 jours. Il a été rapporté une apparition des symptômes plus précoces dans une série de 100 AVC néonataux colligés par Chabrier et al. [12] dans la première semaine de vie dont 90 % des enfants dans les trois premiers jours. Nous avons dans notre cohorte une nette prédominance masculine dans les AVC de l’enfant aussi hémorragique qu’ischémique avec un genre ratio de 3 pour les AVCI chez l’enfant. Ces résultats sont confirmés par les différentes études réalisées au Sénégal par Ndiaye M.et Basse AM [5,52] mais également ailleurs par d’autres auteurs [4,12,38,63]. Plusieurs explications ont été données pour étayer cette prédominance masculine : des niveaux élevés de testostérone sont associés à un risque accru d’accident vasculaire cérébral chez l’enfant selon Normann et al. [54], un effet présumé protecteur des œstrogènes sur l’ischémie cérébrale (effets œstrogèniques sur le système vasculaire) mais aussi la sensibilité innée des cellules masculines aux situations hypoxie-ischémiques [4]. Par contre nous rapportons une prédominance féminine dans les AVCnn contrairement à la littérature qui retrouve une prédominance masculine [30]. La sensibilité accrue du fœtus masculin à la dysfonction placentaire, ses mensurations plus larges à la naissance et son statut hormonal expliquent partiellement cette prédominance [32]. Dans notre série cette prédominance féminine chez les nouveau-nés pourrait être expliquée par le faible nombre de cas observé dans cette tranche d’âge. Le sexe masculin représentait 76,92% des AVCI et 60% des AVCH.
Présentation clinique des AVC
En fonction de l’âge de diagnostic de l’AVC, la symptomatologie clinique est variable [8,32]. Le diagnostic est également non spécifique pouvant être confondu avec d’autres causes [63]. Chez le nouveau-né la présentation clinique de l’AVC est assez stéréotypée mais peu spécifique avec une plus grande susceptibilité de présenter initialement des crises convulsives [58]. Ces crises convulsives étaient le signe clinique essentiellement observé dans notre série conformément à plusieurs autres auteurs [8,10,62]. On estime entre 41et 91 % sa survenue dans les AVCnn [7,12]. D’autre signes non spécifiques que nous n’avons pas retrouvés dans notre étude sont également décrits tels que l’apnée, la détresse respiratoire, la bradycardie et l’hypotonie [7]. Les signes neurologiques déficitaires tel que l’hémiplégie patente ne sont généralement pas observés chez le nouveau- né [12,2558,]. Par contre chez les enfants plus âgés le tableau clinique dans l’accident ischémique artériel est généralement dominé par des anomalies neurologiques plus spécifiques, similaires à celles des adultes [24,63] tels que l’hémiplégie, l’hémiparésie et l’aphasie. En effet l’hémiplégie était le signe clinique prédominant dans notre cohorte constituant une prévalence de 33,3% des AVCI de l’enfant. Ces données sont conformes à ceux de certains auteurs qui situe cette prévalence entre 16,2 et 62 % [5,7]. D’autres auteurs trouvent une prévalence beaucoup plus élevée 84,3% pour Ndiaye et al en 2015 [53] 94% pour Earley et al. en 1998 [24]. Les crises convulsives étaient rencontrées autant dans les hémorragies cérébrales que dans les accidents ischémiques .
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Table des matières
INTRODUCTION
MATERIELS ET METHODES
1. Type d’étude
Il s’agissait d’une étude transversale rétrospective et prospective
2. La période d’étude
3. Le Cadre d’étude
4. Population d’étude
4.1. Les critères d’inclusion
Ont été inclus tous les patients âgés de moins de 16 ans avec un diagnostic d’AVC
posé au scanner cérébral dont les images étaient disponibles
4.2. Les critères de non inclusion
4.3. Caractéristiques de la population d’étude
4.3.1. Age
4.3.2. Le genre
4.3.3. Antécédents des patients
4.3.4. Indication de la TDM
5. Matériels et méthodologie
5.1 Matériels
5.2 Méthodologie
5.2.1. Conditions de réalisation de l’examen
5.2.2 Technique d’acquisition
5.2.3. Paramètres étudiés
6. Analyse statistique et comparative
RESULTATS
1. Délais de réalisation du scanner
2. Type D’AVC
3. Répartition des AVCI selon le territoire parenchymateux
4. Répartition des AVCI artériels selon les territoires vasculaires
5. Répartition des AVCH selon le territoire parenchymateux
6. Les Signes associés et complications
7. Type d’AVC en fonction de l’âge
8. Type d’AVC en fonction du genre
9. Recherche de facteurs risques et étiologiques
10. Aspect clinique en fonction du type d’AVC
11. Aspects évolutifs des AVC
DISCUSSION
1. Données épidémiologiques et cliniques
1.1. Prévalence des AVC
1.2 Age et genre
1. 3 Présentation clinique des AVC
1.4 Délais diagnostics
2. Données de l’imagerie
3. Facteurs de risques et étiologies
4. Bilan d’évolutivité
CONCLUSION ET RECOMMANDATIONS
RÉFÉRENCES
ANNEXES