Les tumeurs osseuses malignes primitives (TOMP) sont des proliférations cellulaires anormales, destructrices et envahissantes, développées au dépend du tissu osseux. Elles sont extrêmement rares et représentent 0.2% de toutes les tumeurs malignes [20, 29, 32, 103]. En Amérique du Nord et en Europe, l’incidence des TOMP chez l’homme de sexe masculin est de 0.8 nouveaux cas pour 100000 habitants par an [32, 103]. Cependant des incidences plus élevées sont observées dans certains pays comme l’Argentine, le Brésil (1,5 – 2) et Israël (1,4). [32] En Afrique et en particulier au Sénégal, l’incidence des tumeurs osseuses malignes primitives reste encore mal connue du fait de l’absence d’un registre des cancers. Leur diagnostic repose sur la confrontation des arguments cliniques, radiologiques et anatomopathologiques. L’âge du patient et le siège de la lésion occupent une place de choix pour évoquer un type histologique de tumeur osseuse [32, 58]. Les tumeurs malignes osseuses les plus fréquentes chez le sujet jeune entre 10-25 ans sont représentées par l’ostéosarcome et le sarcome d’Ewing et intéressent la région métaphysaire des os longs. Chez l’adulte, après 40 ans, c’est le chondrosarcome (plus de 50% au niveau des extrémités des os longs) et l’ostéosarcome secondaire à une maladie de Paget qui sont les plus fréquents [20, 32, 106]. L’incidence des TOMP est relativement plus élevée chez l’homme à l’exception de l’ostéosarcome parostéal [106] et des tumeurs à cellules géantes. Il n’y a pas de prédilection raciale à l’exception du sarcome d’Ewing qui est rarement observé chez les noirs aux Etats Unis [106].
Rappel Embryologique
Mise en place de la colonne vertébrale
Les vertèbres, constituées d’un corps et d’un arc postérieur, se forment autour de la chorde et du tube neural primitif. Elles dérivent d’un groupe de cellules mésenchymateuses issues de la partie ventrale des somites, qui forment autour de la chorde et du tube neural un ensemble métamérisé (sclérotomes). Chaque sclérotome se scinde en deux demi-segments crânial et caudal, de devenir différent. Le demi-segment caudal croît en direction du demi-segment crânial du sclérotome sous-jacent, avec lequel il fusionne, en incorporant le tissu mésenchymateux interstitiel et l’artère inter-segmentaire. La zone de jonction entre les demi-segments de sclérotome s’épaissit et forme le disque intervertébral, lieu de passage des nerfs spinaux. La chorde dorsale régresse tout le long des corps vertébraux mais persiste au niveau des disques intervertébraux sous forme de nucleus pulposus. La différenciation ultérieure de la colonne vertébrale se fait par ossification des corps vertébraux précartilagineux (en avant de la chorde) et des arcs vertébraux (en arrière du tube neural), séparés par les disques intervertébraux, qui ne s’ossifient pas.
Mise en place des côtes
Les côtes sont des excroissances des vertèbres thoraciques. Elles dérivent de petites condensations mésenchymateuses, nommées processus costal qui apparaissent vers J35 de part et d’autre des corps vertébraux. Toutes les vertèbres thoraciques et cervicales possèdent ces processus, mais seul ceux des vertèbres thoraciques se développent en côtes.
Mise en place des membres
Les bourgeons des membres supérieurs et inférieurs apparaissent respectivement vers J26 et J28. Les bourgeons forment des reliefs symétriques ventro-latéraux à la hauteur des premiers somites (C5 à C8) pour les membres supérieurs et près de l’appendice caudal (L3 à L5) pour les membres inférieurs. L’évolution des bourgeons des membres supérieurs et inférieurs se fait selon le même schéma, avec décalage dans le temps pour les membres inférieurs. Dans un premier temps, les bourgeons s’allongent et forment deux segments proximal et distal, séparés par un sillon circulaire. Le segment distal s’aplatit en palette où s’identifient les rayons des doigts(ou des orteils), avec une organisation antéro-postérieure. La séparation des doigts survient au cours de la 6e semaine après régression du tissu intercalaire par apoptose. Le segment proximal se divise à son tour en deux segments distincts, à l’origine de l’avant-bras et du bras (ou de la cuisse et de la jambe).
Rappel anatomique
L’os
Le corps humain comporte 206 os qui, avec les articulations forment le squelette. Anatomiquement, le squelette peut être subdivisé en squelette axial (crane, colonne vertébrale, cotes, sternum et os hyoïde) et en squelette périphérique (membres et pelvis). Les os sont subdivisés selon la taille et la forme en os longs, os courts, os plats et os irréguliers. Les os longs et les os courts sont constitués de deux extrémités appelées épiphyses séparés par un corps ou diaphyse. Entre épiphyse et diaphyse se trouve la métaphyse.
A la coupe, on distingue macroscopiquement deux parties différentes. Une partie périphérique, constituée d’une substance massive : L’os compact ou corticale. Dans les os plats, et dans les épiphyses et métaphyses des os longs, on voit un réseau d’apparence spongieuse, formé de travées osseuses séparées : l’os spongieux. Entre les mailles de ce réseau se trouve la moelle osseuse. Dans la diaphyse d’un os long se trouve le canal médullaire qui contient de la moelle rouge ou de la moelle jaune. Les vaisseaux sanguins et les nerfs pénètrent dans l’os par les foramens nourriciers. Dans certains os, on trouve des canaux permettant le passage des vaisseaux sanguins ; il s’agit le plus souvent de veines et l’on parle de veines émissaires.
Le cartilage
Le cartilage est élastique à la pression et à la flexion. C’est un tissu dépourvu de vascularisation et d’innervation. Il est découpable et se compose de cellules et de substance intercellulaire. La nature de la substance intercellulaire détermine le type de cartilage. On différencie trois types de cartilage : le cartilage hyalin, le cartilage élastique et le cartilage fibreux [87].
– Le cartilage hyalin est ferme, translucide, bleuâtre et laiteux chez le sujet jeune. Chez l’adulte, il est opaque et légèrement jaunâtre [15, 92]. Le cartilage hyalin est observé dans le squelette provisoire de l’embryon, le cartilage articulaire, le cartilage des voies respiratoires et les cartilages costaux.
– Le cartilage élastique est jaunâtre et retrouvé au niveau de l’oreille externe, de l’épiglotte et de la trompe d’Eustache.
– Le cartilage fibreux est retrouvé au niveau des disques intervertébraux, des disques articulaires du genou, du maxillaire inférieur et de la symphyse pubienne .
Rappel histologique
Le tissu osseux
Composition du tissu osseux
Le tissu osseux est constitué d’une trame protéique sur laquelle se fixe la phase minérale qui représente 70% du poids total de l’os sec.
➤ La trame protéique
Elle est constituée essentiellement de fibres de collagène de type I qui représentent environ 90% de la phase organique de l’os entourées d’une substance fondamentale inter fibrillaire. Les fibres de collagènes sont arrangées parallèlement au sein d’une même lamelle osseuse, mais leur orientation varie d’une lamelle à l’autre, ce qui confère à l’os sa structure lamellaire. La substance inter-fibrillaire est constituée de composants variés tels que des glycoprotéines (ostéonectine, ostéopontine, sialoprotéïne osseuse), des protéines contenant des résidus d’acide glutamique carboxylé (ostéocalcine), des phosphoprotéines, des phospholipides, des protéoglycanes, des cytokines et des facteurs de croissance.
➤ La phase minérale
La phase inorganique de la matrice osseuse qui confère à l’os sa rigidité et sa résistance mécanique et représente aussi une importante réserve minérale. En effet, environ 99% du calcium et du magnésium sont incorporés dans les cristaux qui constituent la substance minérale osseuse. Celle-ci est essentiellement composée de phosphate de calcium cristallisé sous forme d’hydroxyapatite.
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Table des matières
INTRODUCTION
REVUE DE LA LITTERATURE
I. RAPPELS
1. Rappel Embryologique
1.1. Mise en place de la colonne vertébrale
1.2. Mise en place des côtes
1.3. Mise en place des membres
2. Rappel anatomique
2.1. L’os
2.2. Le cartilage
3. Rappel histologique
3.1. Le tissu osseux
3.2. Le tissu cartilagineux
II. ETUDE CLINIQUE ET PARACLINIQUE
1. Les circonstances de découverte
2. L’examen clinique
3. L’examen paraclinique
3.1. L’imagerie
3.2. La biologie
3.3. L’anatomie et la cytologie pathologiques
III. CLASSIFICATIONS
1. Classification histologique
2. Classification TNM des TOMP
IV. FORMES ANATOMOCLINIQUES DES TOMP
1. Les ostéosarcomes
1.1. Les ostéosarcomes primitifs
1.2. Les ostéosarcomes secondaires
2. Les chondrosarcomes
2.1. Les chondrosarcomes primitifs
2.2 Les chondrosarcomes secondaires
3. Les tumeurs à cellules géantes
4. Les tumeurs de la famille Ewing (Sarcome d’Ewing/PNET)
5. Les adamantinomes
6. Les chordomes
7. Les tumeurs fibreuses et fibro-histiocytaires
7.1. Les fibrosarcomes
7.2. Les histiocyto-fibromes malins
8. Les tumeurs musculaires, vasculaires, adipeuses et nerveuses
8.1. Les léiomyosarcomes
8.2. Les angiosarcomes
8.3. Les liposarcomes
8.4. Les schwannomes malins
9. Les tumeurs hématopoïétiques
CONCLUSION