ASPECTS EPIDEMIOLOGIQUES ET ETIOLOGIQUES DES MASSES ABDOMINALES DE L’ENFANT
Les masses abdominales chez l’enfant correspondent à des néoformations ou processus, se développant dans la cavité abdominale. Elles sont souvent de découverte fortuite. Leurs étiologies sont multiples et peuvent traduire chez l’enfant le développement d’une pathologie intra mais aussi retro péritonéale .Toute les structures et tous les organes sont susceptibles de développer une tumeur maligne comme le neuroblastome, le nephroblastome, le lymphome malin non hodgkinien, hépatoblastome …etc.
Les manifestations cliniques sont variables en fonction de la localisation, et peuvent parfois être asymptomatiques ou révélées par des complications.
Le diagnostic étiologique des différentes masses abdominales est difficile a posé par le simple examen clinique. La démarche diagnostique fait appel à la fois aux éléments cliniques, aux techniques d’imageries et à certains éléments biologiques. Actuellement, les progrès technologiques réalisés par l’échographie et la tomodensitométrie permet une approche plus précise et plus sure du diagnostic.
LA CAVITE PÉRITONÉALE
Elle est située entre les 2 feuillets du péritoine et cloisonnée par les replis Péritonéaux. Le méso-colon transverse la divise en 2 étages, un au-dessus : c’est l’étage sus-méso colique, un autre au-dessous : c’est l’étage sous-méso colique.
L’étage sus mésocolique
◆ L’estomac :
C‘est une vaste poche musculeuse qui constitue le segment initial du tube digestif sousdiaphragmatique. Il fait suite à la portion très courte de l’œsophage abdominal, il est l’organe essentiel de la loge phrénique gauche.
◆ Le duodénum et le pancréas :
Profondément situés contre le plan pariétal postérieur de la partie moyenne de la cavité abdominale, le duodénum et le pancréas sont deux organes étroitement solidaires puisqu’à leur communauté de situation et de rapports s’ajoutent une véritable relation de continuité, les canaux pancréatiques s’abouchant dans le deuxième duodénum, des connexions intimes avec la voie biliaire principale.
◆ Le foie et les voies biliaires :
La plus importante des glandes annexes du tube digestif, doué de fonctions métaboliques complexes indispensables à la vie, le foie est un organe volumineux situé à la partie supérieure et droite de la cavité abdominale dans l’étage sus mésocolique, sous la coupole diaphragmatique droite. Une de ses principales particularités est sa vascularisation très riche, à la fois artérielle par l’intermédiaire des artères hépatiques, et veineuse par l’intermédiaire de la veine porte qui lui apporte tout le sang veineux issu du tube digestif. Le foie contient en outre un réseau de capillaires veineux interposés entre les branches de la veine porte et la veine cave inférieure ou système porte hépatique. Il possède, de plus, son propre appareil excréteur formé par les canaux biliaires donnant naissance aux voies biliaires extra-hépatiques par l’intermédiaire desquelles la bile se déverse dans le duodénum .
◆ La rate :
Est un organe lymphoïde en étroites connexions avec le système porte, profondément située dans l’étage sus mésocolique de l’abdomen, au dessous de la coupole diaphragmatique gauche, en arrière et en dehors de l’estomac, en avant du rein gauche, au-dessous de l’angle colique gauche, dans une loge péritonéale, la loge splénique. Entièrement masquée par la partie inférieure du gril Costal.
Étage sous mésocolique
◆ Le grand épiploon :
Formé par le cul de sac inferieur de mésogastre postérieur, le grand épiploon unit la grande courbure au colon transverse et retombe comme un tablier devant les anses grêles.
◆ Les anses grêles :
Portion mobile de l’intestin grêle, les anses font suite à la portion fixe, le duodénum, le grêle est formé par le jéjunum et l’iléon.
◆ Le colon :
Le colon est la portion de gros intestin qui fait suite à l’intestin grêle, et s’étend de l’angle iléo caecale au rectum. Il se distingue des anses grêles par son calibre, sa fixité partielle, et sa situation en cadre autour de l’étage sous mésocolique. Le colon droit s’étend de la terminaison de l’iléon à la moitie du colon transverse. Le colon gauche s’étend de la moitié du transverse au rectum.
LA RÉGION RETROPERITONEALE
C’est une cavité secondaire de la cavité abdominale, située derrière la cavité Péritonéale. Elle contient plusieurs éléments vasculo-nerveux et lymphatiques, ainsi que les organes rétro-péritonéaux.
La région rétropéritonéale médiane
Elle est située devant le rachis lombaire et constitue une importante voie de passage pour l’aorte abdominale, la veine cave inférieure dans sa portion sous diaphragmatique, le système nerveux végétatif, avec de très nombreux nerfs végétatifs destinés à la portion sous diaphragmatique du corps, les uns longent les faces latérales du rachis lombaire, et forment la chaîne sympathique lombaire et d’autres plus complexes, s’organisent en lacis nerveux préaortiques, et dépendent du plexus solaire. Cette région contient aussi l’axe lymphatique situé essentiellement autour de l’aorte abdominale et de la veine cave inférieure. Il collecte non seulement les lymphatiques des viscères abdominaux, mais aussi une partie des lymphatiques de la paroi abdominale et des viscères pelviens. Il comprend les ganglions para aortiques, les troncs lymphatiques et le canal thoracique.
Les régions rétro péritonéales latérales
Au nombre de deux, elles sont situées immédiatement en dehors de la région pré vertébrale de gros vaisseaux, entre le péritoine pariétal postérieur (PPP) en avant, et les muscles de la paroi lombo-iliaque en arrière. La région rétropéritonéale latérale contient essentiellement les reins et leurs pédicules, les glandes surrénales, les uretères, la deuxième portion duodénale et le pancréas.
Rappel sur les principales étiologies des MA chez l’enfant
Masses rétropéritonéales
(Environ 2/3 des cas) L’échographie abdominale qui est réalisée devant la découverte d’une masse abdominale permet plus souvent de déterminer si la tumeur est rétro ou intrapéritonéale .Ceci pourra être précisé sur le scanner ou l’IRM qui est le plus souvent réalisé pour préciser le diagnostic et faire le bilan d’extension. Lorsque la topographie rétropéritonéale de la masse est affirmée, on s’attache alors à savoir si elle est intra- ou extrarénale.
Tumeurs rénales
La tumeur rénale la plus fréquente de l’enfant est le néphroblastome, aussi appelé tumeur de Wilms. Elle représente 5,9 % des cancers observés chez les enfants de moins de 15 ans. L’incidence annuelle est estimée à 7,8 nouveaux cas par an et par million d’habitants de moins de 15 ans en France [3]. Il s’agit d’une tumeur dérivée de cellule précurseur rénales embryonnaires pluripotentes. Le nephroblastome survient classiquement entre 2 et 5 ans et est le plus souvent découverte à l’occasion d’un examen systématique fait par le pédiatre. Elle peut également être révélée par une hématurie ou un syndrome douloureux abdominal qui doit faire craindre une hémorragie intratumorale, rétropéritonéale, voire une rupture intrapéritonéale. Dans tous les cas, il faut rechercher une hypertension artérielle associée (d’origine vasculorénale) pour pouvoir rapidement la traiter. L’échographie retrouve généralement une masse rétropéritonéale volumineuse, bien limitée, souvent hétérogène, avec des zones liquidiennes et tissulaires, bordée par un éperon de parenchyme rénal sain confirmant son siège intrarénal. Le rein controlatéral doit être exploré à la recherche d’une tumeur bilatérale ou de lésions de néphroblastomatose et la perméabilité de la veine rénale homolatérale et de la veine cave inférieure notée de même qu’une éventuelle localisation hépatique. Le scanner ou l’IRM précise le caractère fonctionnel des deux reins, recherche une atteinte du rein controlatéral (parfois minime), et d’éventuels signes de rupture. La radio de thorax systématique de face et de profil et le scanner thoracique protocolaire recherchent des métastases pulmonaires qui sont retrouvées dans environ 10 % des cas. Des métastases hépatiques ou osseuses sont possibles mais beaucoup plus rares et doivent faire rechercher une histologie inhabituelle. En cas de doute diagnostique (âge de survenue, présentation clinique ou radiologique atypique, tableau infectieux), une ponction biopsie à l’aiguille fine (diamètre inférieur ou égal à 18G) est réalisée par voie postérieure, en milieu spécialisé, pour une analyse pathologique faisant éventuellement appel à des techniques de biologie moléculaire. Dans tous les autres cas où les éléments cliniques et radiologiques sont caractéristiques, une chimiothérapie préopératoire est débutée en milieu spécialisé aujourd’hui encore, sans confirmation histologique du diagnostic avant l’intervention chirurgicale qui consiste classiquement en une urétéro-nephrectomie totale. Le traitement postopératoire guidé par l’histologie et le stade, comporte de la chimiothérapie associée à une radiothérapie de la loge rénale en cas de chirurgie incomplète. Les autres tumeurs malignes du rein sont plus rares. Certaines d’entre elles ont une signature moléculaire qui facilite leur diagnostic. En période périnatale et avant l’âge de trois mois, la tumeur rénale la plus fréquente est le néphrome mésoblastique ou tumeur de Bolande dont le traitement est uniquement chirurgical et peut être entrepris devant un aspect radiologique souvent caractéristique (lésion bien limitée d’aspect infiltrant). Lorsque l’histologie montre une forme totalement ou partiellement hypercellulaire, il est important de rechercher sur du matériel préalablement congelé la présence du transcrit de fusion spécifique du fibrosarcome infantile (ETV6/NTRK3), lésion maligne qui nécessite un bilan d’extension plus complet et une surveillance spécifique [4] Après l’âge de trois mois, le néphroblastome est la tumeur la plus fréquente, et il est donc recommandé de proposer une chimiothérapie première s’il existe un risque de rupture peropératoire en raison du volume ou de la consistance de la tumeur .
Tumeur retro péritonéale extrarénale
La tumeur rétropéritonéale extrarénale la plus fréquente de l’enfant est le neuroblastome. Elle représente la troisième cause de cancer chez l’enfant de moins de15 ans après les leucémies et les tumeurs du système nerveux central. Le neuroblastome représente 5 à 10 % des tumeurs malignes de cette tranche d’âge, mais il est responsable de 15 % des décès par cancer pour cette même tranche d’âge. Il survient en règle dans la petite enfance (30 % avant 1 an, 96 % avant 10 ans). Il s’agit d’une tumeur dérivée de cellules embryonnaires de la crête neurale qui est caractérisée par une grande hétérogénéité de présentations cliniques et de pronostics, avec d’une part une possibilité de régression spontanée pour les tumeurs diagnostiquées en période périnatale, et d’autre part des formes graves métastatiques et/ou présentant une progression tumorale menaçante chez les enfants plus d’un an. L’examen clinique recherche une hépatomégalie et des nodules sous-cutanés en faveur d’une forme métastatique spéciale (syndrome de Pepper ou stade IVs) chez les enfants de moins de 6 mois, une altération de l’état général avec pâleur et douleurs osseuses en faveur d’une forme métastatique , des signes de compression médullaire évoquant une localisation paravertébrale en sablier et pouvant nécessiter une prise en charge urgente [6]. L’échographie retrouve une masse surrénalienne, pararachidienne ou périvasculaire selon qu’elle dérive de la médullosurrénale, du système nerveux sympathique paravertébral ou périartériel. L’existence de calcifications est inconstante, évocatrice, mais non spécifique. La confirmation diagnostique est apportée par l’élévation des catécholamines urinaires (présente dans 80-90 % des cas) et par des explorations contribuant au typage du neuroblastome et à son bilan d’extension : 1) ponction biopsie à l’aiguille fine qui permet de définir les caractéristiques pathologiques et génétiques de la tumeur qui constituent des facteurs pronostiques majeurs (amplification de l’oncogène MYCN) ; 2) scintigraphie à la MIBG (métaiodobenzylguanidine, spécifique des tumeurs adrénergiques) montrant une fixation au niveau des sites tumoraux primitifs (dans 80 % des cas) ou métastatiques ;et 3) bilan médullaire (myélogramme et biopsie ostéomédullaire) recherchant un envahissement médullaire présent dans 50 % des cas au diagnostic. La prise en charge thérapeutique est complexe et stratifiée en fonction de multiples critères pronostiques : stade, âge, opérabilité de la lésion, amplification ou non de l’oncogène MYCN ainsi que d’autres critères biologiques. Elle peut ainsi aller d’une observation simple à un traitement multimodal avec chimiothérapie, chimiothérapie haute dose avec réinjection de cellules souches périphériques, chirurgie, radiothérapie, et traitement d’entretien par acide rétinoïque [7]. Les autres tumeurs rétropéritonéales sont rares.
CONCLUSION
Les masses abdominales chez l’enfant posent un problème diagnostique et thérapeutique. Elles peuvent être en rapport avec une pathologie bénigne, mais le plus souvent elles sont liées à une pathologie maligne. Ce travail est une étude rétro prospective portant sur les MA diagnostiquées au sein de l’unité d’oncologie pédiatrique du service de pédiatrie du CHU GT de Février 2005 à Décembre 2014. L’objectif etait d’analyser les aspects épidémiologiques, les caractéristiques cliniques et paracliniques, et d’identifier les différentes étiologies. 161 malades sont diagnostiqués comme porteurs de MA durant cette période. L’âge de nos patients variait entre 1an et 15 ans avec une moyenne de 6 ans. La tranche d’âge la plus touchée etait de 1 à 5 ans (50,93%). Le sexe ratio M/F etait à 1,37. La masse est découverte par les parents dans 50,3% des cas. Ces masses sont intrapéritonéales dans 56,5% des cas et rétropéritonéales dans 43,5% des cas. Les étiologies de ces masses sont multiples, elles sont dominées par les lymphomes de Burkitt (44,10%), les nephroblastomes (33,5%) suivi des neuroblastomes (7,5%). A la lumière de ces résultats, les MA chez l’enfant ne sont pas rares, et cachent derrière plusieurs étiologies, le plus souvent maligne.
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Table des matières
I. Introduction
II. Objectifs
III. Généralité
IV. Méthodologie
V. Résultats
VI. Commentaires et discussion
VII. Conclusion
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