Epidémiologie
Contrairement à ce que pensait Georges Huntington en 1872, la MH a une prévalence non négligeable dans de nombreuses régions du globe (4). Elle affecte 5-7/100 000 personnes dans la population caucasienne (1). La prévalence la plus élevée a été rapporté près du lac Maracaibo au Venezuela, où environ une personne sur 200 est atteinte (4). Des régions de l’Europe à la fois du Nord et du Sud, présentent une prévalence élevée (5,7 pour 100 000 habitants) (5). Cependant, elle est particulièrement rare en Finlande et au Japon (1). Aux USA on rapporte une prévalence de 5,15/100 000 habitants (9). En Afrique, les études de prévalence ont surtout concerné l’Afrique du Nord où on rapporte une prévalence de 1 à 4/100 000 habitants (6) et l’Afrique du Sud avec une prévalence de 0,65 à 3,5/ 100 000 (7). En Afrique de l’Ouest, la prévalence de cette maladie est méconnue. La littérature rapporte une seule étude sur deux familles totalisant quatre cas au Burkina Faso (8). Au Mali, bien que des cas aient été répertoriés dans les registres de consultation du Service de Neurologie du CHU du Point « G », Bamako, aucune confirmation génétique n’a été faite et il n’existe pas de données publiées des cas cliniques.La maladie touche indistinctement les deux sexes. L’âge de déclaration de la maladie se situe entre 35 et 44 ans (4).
Impact psychosocial
L’annonce du diagnostic de la MH comme toute maladie chronique est ressentie par de nombreux patients comme un événement extrêmement pénible, si ce n’est catastrophique sur le plan psychologique. La MH est une atteinte qui touche la personne dans sa totalité : son vécu corporel, ses processus psychiques intimes, ses comportements, ainsi que ses interactions avec le monde qui l’entoure. Le diagnostic réveille fréquemment des doutes profonds et des remises en question de sa propre existence, des relations avec les proches et de sa vie professionnelle. La gestion psychologiquedu diagnostic représente pour beaucoup un défi énorme, d’où l’intérêt du conseil génétique. Les symptômes moteurs et psychiques conduisent à une perte de productivité non seulement du patient mais aussi de son entourage. Ceci conduit à une augmentation du DALY (Disability-Adjusted Life Years) avec son impact sur l’économie familiale, surtout dans les pays sous-développés.
Rappel historique
Au Moyen-âge, on considérait les gens atteints de chorée comme possédés par le démon, et il est probable que plusieurs des femmes exécutées lors du procès des sorcières de Salem au XVIIe siècle étaient atteintes de la MH. Deux siècles plus tard (1872), c’est presque dans la même région des Etats-Unis que George Huntington (Figure 1) décrit la maladie en la distinguant des autres types de chorée par son caractère héréditaire et son début tardif (3). En 1983, Nancy Wexler et Jim Gusella identifièrent le bras court du chromosome 4 comme porteur du gène associé à la MH (10). Mais ce n’est que 10 ans plus tard (1993) que le gène et la mutation responsables de la pathologie seront précisément identifiés (11). Cette découverte conduit à l’élaboration du test diagnostic. Néanmoins, malgré une meilleure compréhension de la pathogenèse et le développement de modèles murins de la MH ces dernières décennies, aucun traitement n’altère l’évolution de la maladie
Rappel anatomique
Le système nerveux est un système complexe dont le fonctionnement de base est électrique. Selon des considérations anatomiques, physiologiques ou fonctionnelles, on décrit: le système nerveux central (encéphale, moelle épinière) et le système nerveux périphérique (nerfs crâniens et nerfs rachidiens). L’encéphale est constitué par le cerveau, le tronc cérébral et le cervelet. Son organisation interne est divisée systématiquement en substance grise (les noyaux des neurones) et substance blanche (les axones). Le cerveau est constitué de deux hémisphères cérébraux réunis par le corps calleux, une écorce de substance grise constituant le cortex recouvre la substance blanche et des amas de substance grise: noyaux gris centraux. Ces noyaux gris centraux sont constitués par les ganglions de la base (le noyau caudé, le putamen, les segments externes et internes du globus pallidus, la substance noire, réticulée et compacte ainsi que le noyau sous thalamique) et le thalamus (Figure 2). Le noyau caudé et le putamen constituent le striatum.Les noyaux gris centraux constituent un ensemble de structures sous-corticales qui jouent un rôle crucial dans le comportement psychomoteur, en étroite collaboration avec le cortex cérébral. N’ayant aucun accès direct aux motoneurones spinaux, les ganglions de la base influencent le comportement moteur en agissant principalement sur les neurones des circuits moteurs du thalamus et du tronc cérébral. Chez les primates, l’axe principal de cette boucle est formé d’une série d’éléments dont l’arrangement séquentiel est le suivant : 1 est le striatum, comprenant le noyau caudé, le putamen et le noyau accumbens ou striatum ventral, 2 est le globus pallidus (GP), 3 est la substance noire (SN), et 4 réprente les noyaux ventrolatéraux du thalamus dont les neurones prémoteurs acheminent l’information ayant été traitée par les ganglions de la base (GB) vers le cortex cérébral (Figure 3). Le striatum constitue la « porte d’entrée » des ganglions de la base. Ses principales afférences proviennent de l’ensemble du cortex cérébral, du thalamus et de la substance noire compacte (SNc). Les structures de sortie des ganglions de la base sont la substance noire réticulée (SNr) et du segment interne du globus pallidus (GPi). Ces structures exercent une influence inhibitrice médiée par l’acide y-aminobutyrique (GABA) sur les neurones thalamocorticaux glutamatergiques situés dans le thalamus ventral. Deux voies, directes et indirectes (Figure 2-7) permettent d’acheminer l’information entre le striatum et les autres structures des GB.
La chorée
Chez l’adulte, la chorée est le principal symptôme de la maladie (on parle encore souvent de “chorée de Huntington”). La World Federation of Neurology la définit comme la « succession de mouvements spontanés excessifs, abrupts, imprévisibles et irréguliers ». Au début, la chorée peut être très discrèteet prendre la forme de haussements de sourcils, de clignements, de pianotage des doigts, de gestes stéréotypés ou de mouvements intégrés à des gestes d’allure volontaire (23). Les patients n’en sont pas conscients le plus souvent (24), et ces mouvements choréiques sont alors interprétés comme de la nervosité, des tics, de la maladresse. La chorée est majorée par la fatigue, le stress (calcul mental) ou l’émotion et peut être transitoirement interrompue par le patient (23) et cesse habituellement au cours du sommeil. A un stade plus avancé, elle peut concerner tout le corps.
Dystonie, troubles de la coordination gestuelle, akinésie
La bradykinésie et pauvreté du mouvement sont également présentes en début d’évolution et vont souvent progresser vers un syndrome akinéto-rigide. Ces altérations du contrôle du mouvement se répercutent précocement sur la motilité oculaire (25). L’atteinte de la musculature pharyngée et laryngée, généralement moins évidente en début de maladie, peut être responsable d’une dysarthrie (avec une parole saccadée, de débit irrégulier, dyspnéique, perturbée par des mouvements involontaires respiratoires et pharyngés et dysphagie). Dans les stades avancés, les dystonies sont fréquentes, plus marquées chez les patients les plus jeunes (23). Elles évoluent parallèlement à la bradykinésie et aux troubles oculomoteurs (26).
Les troubles cognitifs
Les troubles cognitifs débutent discrètement, pas toujours en même temps que les troubles moteurs et s’aggravent progressivement pour aboutir à une démence de type sous-cortical: ralentissement de la pensée, troubles mnésiques, attentionnels et surtout des fonctions exécutives (dans la réalisation des tâches complexes) (28). Ces troubles peuvent être majorés par des troubles comportementaux. Au début, les troubles d’attention, de planification et de la mémoire des faits récents prédominent et les fonctions instrumentales sont atteintes dans les stades les plus tardifs (29). Les troubles d’attention et de concentration sont initialement au premier plan, gênant les patients, car sources d’erreurs dans l’activité professionnelle ou d’oublis dans la vie quotidienne. Le syndrome dysexécutif comporte des difficultés de planification, de flexibilité cognitive, de sélection, manipulation et intégration de l’information. Les troubles dysexécutifs affectent le comportement du patient dans des situations de moins en moins complexes au cours de l’évolution, ce qui a un retentissement global dans la vie quotidienne (30). Les troubles mnésiques concernent sélectivement les mémoires antérograde, procédurale et de travail (23). Les troubles de la mémoire procédurale sont étudiés lors de l’apprentissage de tâches motrices, qui montrent une difficulté de mémorisation de la séquence de gestes, indépendante des troubles moteurs (31). Des troubles de la mémoire de travail ont aussi été mis en évidence, notamment dans les tâches visuelles (32). Des troubles visio-spatiaux apparaissent aussi précocement, correspondant à des difficultés d’organisation des informations spatiales (difficultés de perception et de jugement des relations spatiales, de détection de différences entre deux images, d’orientation ou de copie de schémas…). Les fonctions instrumentales atteintes sont essentiellement les praxies, notamment idéomotrices, aggravant les troubles moteurs (23).
L’extraction d’ADN
Nous avons disposé pour l’extraction d’ADN de deux laboratoires bien équipés. Le kit d’extraction est Puregene Blood DNA Kit C (Qiagene, CA, USA). Le matériel utilisés pour l’extraction d’ADN est cité et décrit en annexe 1. Le protocole d’extraction était le suivant :
– Lyse des GR: Une première étape consiste à éliminer les globules rouges. On ajoute aux prélèvements effectués 30 ml d’une solution (RBC lysis solution) qui fera éclater les globules rouges. Les globules blancs étant beaucoup plus résistants, ne seront pas détruits. Comme les globules rouges ne contiennent pas d’ADN, celui-ci sera extrait des globules blancs.
– La centrifugation: La centrifugation permet de séparer les globules blancs des débris de globules rouges. Centrifugé à 2000xg (rcf) à 25° et céla pendant 2 mn. À la fin de la centrifugation, il apparaît au fond du tube un culot blanc (ce sont les restes de globules blancs) et un surnageant rouge (ce sont les débris de globules rouges) que l’on va retirer du tube.
– La destruction des globules blancs: (ou lyse des blancs) : Pour cette étape, on utilise une solution agressive de détergent afin de déstabiliser la membrane des globules blancs et le noyau de la cellule. On ajoute 10 ml de solution de lyse cellulaire « cell lysis solution » puis vortex fortement pendant 10 s et ainsi une solution gluante est obtenue. Suite à cette étape, le tube contient un mélanged’ADN, et les restes des cellules (fragments de protéines, résidus de la membrane de la cellule et toutes les molécules du cytoplasme).
– Précipitation de l’ADN: Grace 3.33 ml d’une solution de Protein precipitation, vortexée vigoureusement pendant 20s puis centrifuge à 25°C 2000 x g (rcf)* pendant 5 mn. On met d’abord délicatement de l’isopropanol 2 dans un nouveau tube de 50 ml et on mélange délicatement le tube. Une fois la centrifugation terminée le liquide sera versé dans de nouveaux tubes contenant de l’isopropranol, puis remué 50 fois, on observe la formation d’une masse opaque, sous forme de « pelote » : c’est l’ADN.
– Élimination de la solution de lyse : Le tube doit repasser dans la centrifugeuse à 25°C, 2000xg (rcf)* pendant 3mn; pour mettre la pelote d’ADN au fond du tube. Ainsi, on pourra éliminer le surnageant contenant les restes de la cellule sans toucher à l’ADN.
– Lavage à l’éthanol : On ajoute 10 ml d’éthanol 70%: préparé à partir de 35 ml d’éthanol pur et 15 ml d’eau pour un tube de 50 ml. Pour débarrasser le culot de toute impureté après de multiples manipulations, il va être lavé en le remuant plusieurs fois. Centrifuger à 25°C à 2000xg (rcf) pendant une minute
– L’hydratation de l’ADN : Quand l’ADN est en pelote sèche, il ne peut être utilisé pour des analyses de biologie moléculaire. On doit donc le réhydraté dansune solution de 500 µl de solution d’hydratation d’ADN « DNA hydration solution ». L’ADN sera totalement réhydraté lorsque la pelote aura disparu. Pour une meilleure hydratation de l’ADN, on chauffe le tube à 65°C pendant 1 heure. Une fois l’heure épuisée, centrifuger l’ADN sur une courte durée de quelques secondes pour pouvoir rassembler les gouttelettes éparpillées dans le tube suite de l’évaporation. Placer l’échantillon en léger balancement durant toute la nuit.Le lendemain l’échantillon d’ADN pur sera centrifugé brièvement et mis dans un nouveau tube gradué avec le sticker correspond, conserver à -80° C pour un stockage prolongé
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Table des matières
DEDICACES
REMERCIEMENTS
LISTE DES ABREVIATIONS
LISTE DES TABLEAUX
LISTE DES FIGURES
1 INTRODUCTION
2 OBJECTIFS
2.1 Objectif général
2.2 Objectifs spécifiques
3 GENERALITES
3.1 Epidémiologie
3.2 Intérêt
3.2.1 Intérêt épidémiologique
3.2.2 Intérêt diagnostique
3.2.3 Impact psychosocial
3.2.4 Intérêt pronostique
3.3 Rappel
3.3.1 Rappel historique
3.3.2 Rappel anatomique
3.3.3 Rappel génétique
3.4 Physiopathologie
3.5 Diagnostic
3.5.1 Diagnostic positif
3.5.2 Diagnostic présymptomatique
3.5.3 Diagnostic prénatal
3.5.4 Diagnostic différentiel
3.5.5 Evolution
3.6 Prise en charge
3.6.1 But
3.6.2 Moyens
3.6.3 Indications
4 METHODOLOGIE
4.1 Type et période d’étude
4.2 Cadre de l’étude
4.3 Population d’étude
4.4 Echantillonnage
4.4.1 Critères d’inclusion
4.4.2 Critères de non inclusion
4.5 La procédure de collecte des données
4.5.1 L’information
4.5.2 Enrôlement et consentement
4.5.3 Le test génétique
4.5.4 Variables
4.5.5 Recueil et analyse des données
4.6 Limites de l’étude
4.7 Considérations éthiques
5 RESULTATS
5.1 Epidémiologie
5.1.1 Fréquence
5.1.2 Sexe des patients
5.1.3 Age des patients au moment de l’inclusion
5.1.4 Professions
5.1.5 Origine géographique
5.1.6 Ethnie
5.2 Evaluation clinique
5.2.1 Age de début des symptômes
5.2.3 Symptômes présents lors du diagnostic
5.3 Aspect génétique
5.3.1 Histoire familiale
5.3.2 Origine de la transmission
5.3.4 Nombre de répétitions de CAG
5.3.5 Résultat imagerie cérébrale
5.4 Traitement
5.5 Evolution
5.6 Observation
5.6.1 Observation 1
5.6.2 Observation 2
6 COMMENTAIRES ET DISCUSSION
7 CONCLUSION
8 RECOMMANDATIONS
REFERENCES
ANNEXES
FICHE SIGNALETIQUE
SERMENTD’HIPPOCRATE
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