La polyarthrite rhumatoïde (PR) est le rhumatisme inflammatoire chronique le plus fréquent, source de handicap fonctionnel potentiellement sévère, susceptible de perturber gravement la qualité de vie sociale et professionnelle du malade (1). La PR peut survenir à tout âge mais on l’observe surtout entre 40 et 60 ans. Le diagnostic précoce de la maladie est un préalable à la mise en œuvre sans délai d’un traitement de fond, dès les premiers mois d’évolution, dans l’objectif d’une rémission rapide et d’un meilleur pronostic à long terme. Ce traitement de fond comporte : le traitement de fond dit conventionnel et la biothérapie. Dans le traitement conventionnel se trouvent l’hydroxychloroquine, la sulfasalazine, le Léflunomide et le Méthotrexate (MTX). Parmi eux, le Méthotrexate est le premier à recommander, utilisé en monothérapie devant toute PR débutante (2) et disponible à Madagascar. Cependant, l’utilisation du médicament nécessite des précautions particulières pour avoir une efficacité et pour prévenir les effets secondaires pouvant causer l’arrêt du traitement.
POLYARTHRITE RHUMATOIDE
EPIDEMIOLOGIE
La polyarthrite rhumatoïde (PR) est le plus fréquent des rhumatismes inflammatoires chroniques (3). Elle retentit globalement sur la qualité de vie, sur les capacités de travail et à long terme sur l’espérance de vie (4). Elle est présente dans le monde entier, peut survenir à tout âge mais on l’observe surtout entre 40 et 60 ans. A cet âge, la prévalence de la PR est 4 fois plus chez la femme que chez l’homme. Cette prédominance féminine s’atténue après 70 ans. Il y a des grandes variations en fonction des pays et des ethnies (5). La prévalence de la PR en Europe du Nord et en Amérique du Nord est de l’ordre de 0,8 % de la population adulte. Dans certains pays où le taux de consanguinité est important, cette prévalence est particulièrement élevée comme chez les Indiens Chippewa (5,3 %). A Madagascar, le cas de PR recensé dans le service de Rhumatologie Befelatanana en 2010 est de 14 avec un sex ratio de 0,4 (6).
PHYSIOPATHOLOGIE
L’origine de la PR reste inconnue malgré des progrès considérables qui ont été faits dans sa compréhension. Mais dans tous les cas, plusieurs facteurs interviennent dans le déclenchement de cette maladie (7) dont :
– les facteurs hormonaux, comme la grossesse surtout dans l’année qui suit le post-partum (8), l’allaitement (9), et les facteurs hormonaux surtout endogènes que exogènes (10).
– le terrain génétique prédisposé, par lequel le taux de concordance pour la PR chez les jumeaux homozygotes atteints est en moyenne de 13 %.
– les facteurs environnementaux comme les agents infectieux viraux (EpsteinBarr), bactériens (E. coli) et mycobactériens (4). D’autres facteurs environnementaux, comme le statut social, la vie urbaine par rapport au mode de vie rural, le régime alimentaire, ont été aussi incriminés dans le déclenchement de la PR.
– Les facteurs immunologiques.
De façon schématique, l’immunopathologie de la PR peut être divisée en trois phases distinctes : une phase de déclenchement impliquant surtout l’immunité innée, une phase d’inflammation de la membrane synoviale impliquant plutôt l’immunité acquise, et une phase de destruction articulaire secondaire à l’action des cytokines mais aussi à la prolifération pseudotumorale des synoviocytes par défaut d’apoptose (11).
SIGNES
Polyarthrite rhumatoïde au début
Signes cliniques
Il s’agit dans 70 % des cas (12), d’une oligoarthrite distale d’apparition progressive, intéressant les poignets, une ou plusieurs articulations métacarpophalangiennes (surtout la 2ème ou la 3ème) ou interphalangiennes proximales jamais distales, parfois les avant-pieds. Ces articulations sont douloureuses, partiellement enraidies et le rythme des douleurs est caractéristique d’un rhumatisme inflammatoire : nocturne, réveillant les malades, maximum le matin au réveil, entraînant un enraidissement articulaire qui cède dans la matinée. L’atteinte articulaire est fixe et relativement symétrique. Parfois les articulations concernées sont légèrement enflées, et les doigts peuvent prendre un aspect “ en fuseau ” très évocateur. Des signes généraux associés avec discrète altération de l’état général, fièvre à 38°C, amaigrissement et surtout asthénie, sont fréquents. Dans certains cas, l’atteinte articulaire peut commencer par les genoux ou les coudes.
Dans 20 % des cas environ, la PR commence comme une polyarthrite aiguë fébrile avec importante altération de l’état général, évoquant volontiers un état infectieux. D’autres modes de début sont possibles mais plus rares :
– l’atteinte rhizomélique touchant les hanches et les épaules (5% des cas)
– la monoarthrite (poignets ou genoux surtout)
– Des manifestations articulaires inflammatoires intermittentes mono ou oligoarticulaires comme le rhumatisme palindromique, retrouvé dans 25 % des cas environ.
– Des polyarthralgies sans signes objectifs, persistant pendant plusieurs mois.
– Exceptionnellement, au décours d’un traumatisme (13) et aussi par des manifestations extra-articulaires isolées : vascularite, atteinte pleuro-pulmonaire, nodules rhumatoïdes.
Dans tous les cas une atteinte tendineuse dont les ténosynovites sont fréquentes au début de la PR, et ont une grande valeur diagnostique. Elles peuvent intéresser les tendons extenseurs des doigts, les fléchisseurs des doigts, ou le tendon de l’extenseur ulnaire du carpe.
Signes biologiques
Syndrome inflammatoire
Le syndrome inflammatoire biologique existe dans 90% des cas, avec augmentation de la vitesse de sédimentation globulaire (VS), et/ou de la C Réactive protéine (CRP) mais la normalité n’élimine pas le diagnostic. L’électrophorèse des protéines sériques objective une augmentation des alpha-2 et, parfois, des gammaglobulines. Et il existe parfois une anémie modérée d’origine inflammatoire.
Marqueurs biologiques
– Le facteur rhumatoïde (FR) : c’est un anticorps anti-gammaglobulinique qui appartient le plus souvent à la classe des IgM mais il peut être aussi de type IgA, IgG, IgD ou IgE (12). Les méthodes sérologiques classiques de détection des FR ne mettent pratiquement en évidence que les FR de type IgM qui sont seuls agglutinants. Elles sont nombreuses, et ce sont : la réaction de Waaler-Rose, le test au latex, la détection par néphélométrie laser, et l’ELISA qui reste la méthode la plus sensible dans la détection de ces FR.
– Les anticorps anti-peptides cycliques citrullinés (anti-CCP) : ils ont une valeur pronostique pour la PR (14, 15). Le test ELISA commercialisé est le plus utilisé pour leur détection.
– Anticorps antinucléaires (AAN): Leurs recherches doivent être systématiques au cours de la PR débutante, notamment pour éliminer une éventuelle maladie lupique. Dans tous les cas, on trouve dans la PR des AAN dans 15 à 30 % des cas, mais à un titre généralement assez faible.
– Typage HLA de classe II
– Liquide synovial : il est de type inflammatoire, riche en cellules et constitué en majorité de polynucléaires neutrophiles. Parfois la formule est à prédominance lymphocytaire. On peut retrouver aussi du FR dans le liquide synovial mais rare.
– Histologie synoviale : elle est généralement utile dans les monoarthrites pour éliminer une autre origine. La synovite est caractérisée par une hypertrophie des villosités synoviales et une multiplication des franges.
Signes radiologiques
Radiographie standard
Les radiographies comportent au minimum un cliché du thorax, des clichés de face et de profil des mains ; des poignets et des pieds de face, à la recherche d’éventuelles lésions érosives ou d’un pincement de l’interligne articulaire (16). Mais la radiographie de début est dans la plupart des cas normale.
Autres techniques d’imagerie
L’échographie et l’IRM articulaires sont actuellement en plein développement pour améliorer le diagnostic, l’évaluation et le suivi de la PR. Ces deux techniques apparaissent plus sensibles que l’examen clinique pour détecter précocement la synovite articulaire et plus sensible que la radiographie standard pour détecter les premières érosions osseuses (16, 17). De plus, l’IRM précoce pourrait avoir un intérêt pronostique.
Manifestations articulaires à la phase d’état
Aspects cliniques de la polyarthrite rhumatoïde
L’atteinte des mains est la plus fréquente, rencontrée dans 90% des cas et souvent inaugurale. Les déformations classiques les plus caractéristiques à la main sont la déviation cubitale des doigts “en coup de vent” (Fig 1), la déformation en “col de cygne” qui touche plus particulièrement l’index et le médius, la déformation en boutonnière qui est fréquente, la déformation du doigt en “maillet” ou en marteau plus rare. Enfin l’atteinte du pouce qui est particulièrement fréquente, prenant soit l’aspect du pouce en “Z” liée à l’arthrite métacarpo-phalangienne, soit l’aspect en pouce adductus secondaire à une arthrite trapézo-métacarpienne. Les poignets sont les sièges d’une arthrite dans plus de 70% des cas, avec une atteinte précoce de l’articulation radio-cubitale inférieure, luxation de la styloïde cubitale et arthrite radio carpienne favorisant la limitation articulaire et l’instabilité douloureuse du carpe. L’atteinte des pieds avec souvent, des arthrites métatarso-phalangiennes, de subluxation ou luxation plantaire des métatarsiens. Des arthrites talo-naviculaires et sous-taliennes sont également fréquentes. Les genoux sont fréquemment touchés, avec une arthrite prédominante dans le compartiment fémoro-tibial externe. On observe parfois un kyste du creux poplité qui peut se rompre et donner un tableau “pseudo-phlébitique”. Les épaules sont également fréquemment touchées, avec initialement une synovite scapulo-humérale et souvent une bursite sous-deltoïdienne entraînant non seulement des lésions cartilagineuses puis osseuses mais également des lésions périarticulaires, notamment de la coiffe des rotateurs. Les coudes sont touchés dans 40% des cas environ et leur atteinte s’accompagne dans la plupart des cas d’une attitude antalgique en flexion. La coxite rhumatoïde est retrouvée dans environ 15% des cas. Il s’agit d’une localisation particulièrement grave du point de vue fonctionnel et souvent peu accessible aux traitements généraux ou locaux.
Le rachis cervical est intéressé dans près de 40% des cas. L’arthrite de la charnière cervico-occipitale est la plus classique. Et il peut s’agir d’une arthrite occipito-atloïdienne et surtout atloïdo-axoïdienne qui peut se traduire par des douleurs cervicales hautes ou par une luxation atloïdo-axoïdienne secondaire à la destruction du ligament transverse et souvent asymptomatique. Cette lésion peut entrainer une compression médullaire cervicale haute. Les ténosynovites sont pratiquement constantes à la phase d’état de la PR, essentiellement à la main et au pied où elles favorisent les déformations et peuvent se compliquer de ruptures tendineuses, notamment sur les extenseurs et les fléchisseurs des doigts.
|
Table des matières
INTRODUCTION
PARTIE I: REVUE DE LA LITTERATURE
1. POLYARTHRITE RHUMATOIDE
1.1. EPIDEMIOLOGIE
1.2. PHYSIOPATHOLOGIE
1.3. SIGNES
1.3.1. Polyarthrite rhumatoïde au début
1.3.2. Manifestations articulaires à la phase d’état
1.3.3. Manifestations extra-articulaires
1.4. DIAGNOSTIC
1.4.1. Diagnostic positif
1.4.2. Diagnostic de gravité
1.5. TRAITEMENTS
1.5.1. Buts
1.5.2. Moyens
1.5.3. Indications thérapeutiques
1.5.4. Surveillance
2. METHOTREXATE
2.1. DEFINITION
2.2. MECANISME D’ACTION
2.3. METABOLISME
2.4. MODE D’EMPLOI
2.5. EFFETS SECONDAIRES
2.5.1. Effets secondaires digestifs
2.5.2. Effets secondaires hépatiques
2.5.3. Effets secondaires hématologiques
2.5.4. Effets secondaires respiratoires
2.5.5. Effets secondaires infectieux
2.5.6. Effets oncogènes
2.5.7. Autres effets secondaires
2.6. INTERACTIONS MEDICAMENTEUSES
PARTIE II: NOTRE ETUDE PROPREMENT DITE
1. MATERIELS ET METHODES
1.1. MATERIELS
1.1.1. Patients
1.1.2. Critères d’inclusion
1.1.3. Critères d’exclusion
1.1.4. Critères de jugement
1.2. METHODES
1.2.1. Type d’étude
1.2.2. Paramètres à étudier
1.2.3. Analyse statistique
2. RESULTATS
2.1. Résultats généraux
2.2. Paramètres démographiques
2.3. Paramètres diagnostics
2.4. Paramètres thérapeutiques
2.5. Paramètres selon la surveillance
PARTIE III: DISCUSSION ET SUGGESTIONS
1. DISCUSSION
1.1. Sur la méthodologie
1.2. Sur les résultats
1.2.1. Résultats généraux
1.2.2. Paramètres démographique
1.2.3. Paramètres diagnostics
1.2.4. Paramètres thérapeutiques
1.2.5. Paramètres de surveillance
2. SUGGESTIONS
Pour les malades de PR eux même : éducation thérapeutique
Pour les médecins généraliste : Formation Médicale Continue
Pour le gouvernement et le ministère de tutelle
CONCLUSION
ANNEXE
BIBLIOGRAPHIE