Aspect epidemio-clinique des traumatismes balistiques en neurochirurgie

Les traumatismes balistiques sont la conséquence de la pénétration dans l’organisme d’un projectile : balle, plomb, fragment métallique provenant de l’enveloppe ou du contenu d’un engin explosif (grenade, mine, obus, bombe, etc.). Ils ne sont plus l’apanage des guerres. En effet aujourd’hui aux États-Unis par exemple, « modèle » de la violence civile urbaine, on dénombre 230 millions d’armes à feu en circulation, 24 000 tués et 300 000 blessés par an, soit l’équivalent des pertes des forces américaines durant le conflit du Vietnam .

Une étude épidémiologique française a colligé 22 000 plaies par armes à feu et armes blanches, sur une période de 10 ans [2]. Elle retrouvait une topographie lésionnelle différente pour les plaies par armes à feu et celles par armes blanches. Les premières touchent essentiellement l’extrémité céphalique, les secondes le tronc (thorax et abdomen). Les plaies par armes représentent en France 5 à 13% des traumatismes et 1% de la totalité des victimes prises en charge par les SMUR [3,4]. Le ratio arme blanche/arme à feu est variable en fonction des pays. En France, ce rapport varie selon les auteurs de 3/2 à 6/1 [2,4]. Aux États-Unis, ce rapport est inversé allant de 2 plaies par arme à feu pour une plaie par arme blanche jusqu’à atteindre 9/1 en Caroline du Nord [5,6]. Ces traumatismes surviennent dans la moitié des cas suite à une agression, dans un tiers des cas par autolyse [7]. La mortalité globale des traumatismes pénétrants en pré hospitalier est de 15 % (6 % par arme blanche et 32 % par arme à feu) [3,4]. À l’hôpital, elle est évaluée à 8 %, respectivement 2 % et 16 % pour arme blanche et arme à feu [2]. Pour ce qui est des traumatismes crâniens par arme à feu, ils restent rares en France. Ils sont principalement dus aux tentatives de suicide, moins fréquemment aux agressions ou aux accidents de chasse [8]. Caractérisés par l’impact d’un projectile à haute cinétique, il s’agit souvent de traumatismes crâniens graves avec une morbimortalité importante [9]. Dans les pays en développement, les plaies par arme à feu constituent la troisième cause de traumatisme vertébro-médullaire au sein de la population civile, après les accidents de la voie publique et les plaies par arme blanche. Elles sont également la principale cause de traumatisme rachidien avec atteinte viscérale .

GENERALITES

Notion de balistique 

Les armes à feu utilisent la force explosive de la poudre dont les propriétés ont été redécouvertes au XIIIe siècle. A partir des canons utilisés durant la guerre de 100 ans les armes à feu ont suivi une évolution majeure notamment au cours du XIXe siècle pour aboutir aux armes actuelles.

Les blessures résultant de projectiles d’arme à feu peuvent être très différentes. Elles dépendent de l’arme incriminée, de la trajectoire du projectile par rapport au corps qui est atteint, de la distance du tir et surtout des caractéristiques du projectile [13]. La balistique se définit comme la science du mouvement des projectiles. Cette discipline est divisée en balistique interne, balistique de la trajectoire et balistique d’impact .
• La balistique interne est l’étude du projectile à l’intérieur de l’arme ;
• La balistique de la trajectoire correspond à l’étude du projectile tout au long de son parcours aérien ;
• La balistique d’impact « terminale » qui correspond à l’étude de la pénétration des solides par le projectile.

Balistique lésionnelle

La balistique lésionnelle n’est autre que la balistique terminale appliquée au tissu vivant. Elle se définit comme la science qui étudie les effets des projectiles appliqués aux tissus vivants .

Eléments de balistique

Les plaies par armes à feu représentent un ensemble très hétérogène, compte tenu de la variété des types d’armes. En règle générale, les plaies par arme à feu sont plus graves que les plaies par armes blanches. Les lésions entraînées par un projectile (profil lésionnel) dépendent de nombreux facteurs .

Énergie
L’équation E = 1⁄2 x m x v2 permet de comprendre que la vitesse (v) est plus importante dans l’énergie dissipée à l’impact que la masse (m) du projectile. Elle permet de séparer les projectiles à haute vitesse ou haute énergie, (jusqu’à 1000 m/s) des armes de poing à basse vélocité ou basse énergie .

Distance
La diminution du pouvoir lésionnel en fonction de la distance est particulièrement importante dans le cas des plaies par armes de chasse. A une distance inférieure à 3 mètres, elles ont un pouvoir lésionnel majeur (effet emporte-pièce), alors qu’à une distance supérieure à 10 mètres les lésions sont modérées (criblage superficiel) .

Phénomène de cavitation
Un projectile qui traverse un milieu homogène provoque l’apparition sur son trajet d’un tunnel d’attrition appelé cavité permanente (figure 1). Les tissus y sont broyés et détruits. Le temps du passage du projectile, un mécanisme d’étirement et de refoulement tissulaire très brutal crée une zone lésionnelle temporaire. Cette zone peut atteindre 25 fois le diamètre du projectile en fonction de son énergie et des propriétés élastiques du milieu traversé. Cette zone lésionnelle est appelée cavité temporaire. Ce phénomène est d’autant plus important que l’énergie dissipée est élevée .

Stabilité du projectile

Après un tunnel de pénétration rectiligne, « le neck » (figure 1), les projectiles ont tendance à basculer et présentent ainsi un front de pénétration plus large augmentant la taille de la cavité permanente. Ce basculement est un élément spécifique d’une arme et d’une munition donnée [15]. Les projectiles homogènes en plomb non blindés (armes de poing) ont tendance à s’écraser, augmentant ainsi leur front de pénétration par effet de champignonnage. Certains projectiles sont conçus pour se fragmenter et entraîner la génération de projectiles secondaires .

Les munitions sont très nombreuses, leurs calibres et leurs poids sont très variables. Leurs compositions peuvent avoir un effet sur les blessures observées. On distingue :
– les munitions homogènes faites le plus souvent de plomb et qui vont entraîner un effet de champignonnage par écrasement ;
– les munitions chemisées ou blindées dont le corps est recouvert de métal, ce qui évite leur fragmentation ou leur écrasement ;
– les munitions semi-chemisées dont le nez n’est pas recouvert de métal et dont l’enveloppe va se défaire et se fragmenter dans les tissus ;
– les munitions artisanales dont les billes de plomb étaient par des fragments de métal qui se comporte comme les éclats ;

Par ailleurs, le pouvoir lésionnel des munitions dépend aussi de leur forme, de leur caractère explosif ou non, de leur capacité à se fragmenter, en particulier .

Caractéristiques des tissus exposés 

Plus leur densité est élevée et leur élasticité faible (organes pleins abdominaux, reins, cerveau, cœur), plus le transfert d’énergie est important entre le projectile et l’organe concerné avec un phénomène de cavitation important. Les organes peu denses et élastiques (poumons, organes creux) sont plus tolérants vis-à-vis des traumatismes balistiques et « absorbent » plus facilement l’énergie transmise. L’os, enfin, se fragmente avec génération d’esquilles multiples qui se comportent comme autant de projectiles secondaires .

Physiopathologie des traumatismes balistiques

Mécanisme lésionnel

On définit ainsi pour chaque type de balle, un orifice d’entré, un trajet rectiligne plus ou moins long appelé « Neck » . Lorsque la balle a basculé et transmis son énergie, une zone d’attrition résiduelle dite zone de cavitation permanente (crushing) faite de tissus broyés définitivement détruits, formant le lit idéal de l’infection. Enfin une zone de cavitation temporaire est créée (stretching) , responsable d’un refoulement très brutal et bref des éléments de voisinage, source de dégâts .

Profil lésionnel 

C’est la méthode qui permet de quantifier les lésions tissulaires produites par broiement et étirement par un projectile. Il est le résultat de la [18] :
– Vitesse
– Distance de pénétration
– Cavité permanente
– Cavité temporaire
– Bascule, déformation, fragmentation .

L’association des phénomènes de cavité permanente et temporaire, qui sont variables en fonction des propriétés balistiques de l’agent vulnérant, permet de définir pour chaque type de projectile un profil lésionnel ou « wound profile », en milieu homogène mou . Ainsi, on distingue plusieurs types de profil lésionnel :
– Le tournoiement correspond à des retournements successifs du projectile responsable de cavitations temporaires dont la taille est proportionnelle à celle du projectile. C’est le cas des éclats et de tout projectile ayant perdu son aérodynamisme, tel qu’une balle ayant ricoché ;
– La bascule caractérise les balles blindées des fusils d’assaut. Tout projectile cylindro-ogival est en effet instable avec une tendance naturelle à basculer .
– Les balles blindées d’arme de poing, courtes, arrondies, et homogènes sont des projectiles à basse vitesse (450m/s). Elles sont caractérisées par leur stabilité et ont pour profil lésionnel un simple tunnel d’attrition sans cavitation temporaire importante ;
– Le champignonnage et la fragmentation sont les deux types de profils lésionnels des balles non blindées (munitions des forces de l’ordre et des fusils de chasse).
– Le polycriblage, est provoqué par les balles en plombs de chasse ou chevrotines. Appliqué au thorax, qui est fait de parties molles plus ou moins homogènes et de structures osseuses plus ou moins résistantes, le comportement balistique du projectile peut être considérablement modifié. Il peut se produire des déviations, des déformations et des fragmentations du projectile.

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Table des matières

INTRODUCTION
PREMIERE PARTIE : RAPPELS
1 GENERALITES
1.1 Notion de balistique
1.1.1 Balistique lésionnelle
1.1.2 Eléments de balistique
1.1.2.1 Énergie
1.1.2.2 Distance
1.1.2.3 Phénomène de cavitation
1.1.2.4 Stabilité du projectile
1.1.2.5 Caractéristiques des tissus exposés
1.2 Physiopathologie des traumatismes balistiques
1.2.1 Mécanisme lésionnel
1.2.2 Profil lésionnel
1.2.3 Types de lésions
1.3 Lésions anatomiques
1.3.1 Au niveau de la tête
1.3.2 Au niveau du rachis
1.3.3 Traumatismes associés
1.3.3.1 Lésions associées au traumatisme crânien
1.3.3.2 Lésions associées au traumatisme vertébral
1.4 Conduite à tenir et prise en charge
1.4.1 Evaluation clinique
1.4.2 Clinique d’un traumatisé crânien par balle
1.4.3 Clinique d’un traumatisé rachidien par balle
1.5 Evaluations paracliniques
1.5.1 Radiographie
1.5.2 Tomodensitométrie (TDM)
1.5.3 Imagerie par Résonance Magnétique (IRM)
1.5.4 Angiographie cérébrale des plaies cranio-cérébrales
1.5.5 Imagerie du bilan initial
1.6 Principes du traitement neurochirurgical
1.6.1 Traitement des traumatismes crâniens par balle
1.6.2 Traitement des traumatismes rachidiens par balle
DEUXIEME PARTIE: METHODES ET RESULTATS
1 MATERIELS ET METHODES
1.1 Cadre de l’étude
1.2 Type d’étude
1.3 Population et critères d’étude
1.3.1 Population étudiée
1.3.1.1 Critères d’inclusion
1.3.1.2 Critères de non-inclusion
1.3.1.3 Variables étudiées
1.4 Mode d’échantillonnage
1.4.1 Mode et collecte des données
1.4.2 Outils statistiques
1.5 Limite de l’étude
1.6 Les considérations éthiques
2 RESULTATS
2.1 Caractéristiques épidémio-démographiques
2.1.1 Selon l’âge
2.1.2 Selon le genre
2.1.3 Selon la profession
2.1.4 Selon la provenance
2.1.5 Selon les circonstances étiologiques
2.2 Caractéristiques anatomopathologiques
2.2.1 Siège des lésions
2.3 Types de lésion
2.4 Clinique
2.4.1 Examen général
2.4.2 Signes neurologiques
2.4.2.1 Chez les traumatisés du crâne
2.4.2.2 Chez les traumatisés du rachis
2.5 Signes paracliniques
2.5.1 Biologie
2.5.2 Les examens radiologiques effectués
2.5.3 Les résultats d’imagerie
2.6 Variables thérapeutiques
2.6.1 Traitements médicamenteux
2.6.2 Traitements chirurgicaux
2.7 Complications
2.8 Séquelles
TROISIEME PARTIE: DISCUSSION
1 DISCUSSION
1.1 Aspect épidémiographique
1.2 Fréquence selon l’âge
1.3 Fréquence selon le genre
1.4 Fréquence selon la profession et la provenance
1.5 Fréquence selon l’étiologie
1.6 Anatomopathologie
1.6.1 Fréquence selon le siège
1.6.2 Fréquence selon le type de lésion
1.7 Aspect clinique
1.7.1 Etat général
1.7.2 Signes cliniques
1.7.2.1 Traumatismes au niveau de la tête
1.7.2.2 Traumatisme au niveau du rachis
1.7.3 Traumatismes associés
1.8 Paracliniques
1.9 Traitements
1.9.1 Traitements médicaux
1.9.2 Traitements chirurgicaux
1.9.2.1 Au niveau crânien
1.9.2.2 Au niveau rachidien
1.10 Complications et séquelles
CONCLUSION
REFERENCES BIBLIOGRAPHIQUES

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