Arthropathie hemophilique

L’hémophilie est un trouble hémorragique héréditaire lié au chromosome X causé par un déficit en facteur de coagulation ; facteur VIII pour l’hémophilie A et facteur IX pour l’hémophilie B, quasi exclusivement rencontrée chez les sujets de sexe masculin. Les divers degrés de déficit définissent la maladie comme étant mineure avec un taux de facteur de coagulation entre 6 à 40%, modérée entre 1 à 5% et sévère moins de 1%. La prévalence de l’hémophilie A est estimée à 1/5 000 naissances, celle de l’hémophilie B est de 1/30 000 naissances [1,2]. Quatre-vingt cinq pour cent des patients présentant une hémophilie souffrent de l’hémophilie A tandis que 15% d’entre eux souffrent de l’hémophilie B. Mais à Madagascar, il y a presque autant d’hémophile A que d’hémophile B.

Les patients atteints d’hémophilie sévère sont particulièrement symptomatiques et présentent des saignements spontanés dès la petite enfance, principalement dans le système musculo-squelettique et moins fréquemment des hémorragies de la muqueuse ou du cerveau.

L’histoire naturelle de l’arthropathie hémophilique a été bien décrite. Les saignements intra articulaires à répétition provoquent une hypertrophie synoviale chronique et des lésions cartilagineuses, avec une destruction articulaire graduelle selon Hilgartner [4], Roosendaal [5] et Rodriguez [6]. Le traitement de l’hémophilie est basé sur l’injection intraveineuse du facteur de coagulation déficient.

L’arthropathie hémophilique est douloureuse, destructrice et invalidante. Elle peut mettre en jeu le pronostic fonctionnel devant l’handicap qu’elle engendre et surtout l’altération de la qualité de vie des hémophiles. Elle prédomine au niveau des articulations portantes, surtout au genou et à la cheville, moins fréquemment au niveau de la hanche. [11,12]. L’arthropathie hémophilique est la principale complication de l’hémophilie sévère. Celle-ci est secondaire à la répétition des hémarthroses. Un patient hémophile sévère va présenter plusieurs épisodes d’hémarthroses, spontanément ou après un traumatisme mineur.

Lors d’une hémarthrose, la synoviale résorbe les éléments hématiques, mais de moins en moins efficace à mesure que les épisodes se multiplient. La surcharge en fer des synoviocytes et des chondrocytes provoquent leur lyse, libérant des enzymes lysosomiales responsables d’une synovite selon Klukowska [13]. Progressivement, les villosités synoviales deviennent hyperplasiques ; la synoviale s’épaissit et la vascularisation synoviale et périarticulaire s’accroit. L’hypertrophie synoviale devient progressivement fibreuse et acellulaire. L’altération du cartilage est secondaire à la libération intra-articulaire des produits de dégradation du sang, à l’hyperpression intraarticulaire et à l’hyperplasie synoviale qui entrainent des érosions aux zones de réflexion de la synoviale selon Kerr R .

Les sièges préférentiels des hémarthroses sont : 45% au niveau du genou, 30% au niveau du coude, 15% au niveau de la cheville, 3% au niveau du poignet, 2% au niveau de la hanche et 2% au niveau des autres articulations. [15] Sur le plan biologique, la numération plaquettaire, le temps de saignement et le taux de prothrombine (TP) sont normaux, mais le temps de céphaline activée (TCA) est allongé. Le dosage des facteurs de coagulation établit le diagnostic et la gravité de l’atteinte. [16] Il faut distinguer l’arthropathie hémophilique d’une arthrite chronique juvénile car elle peut simuler radiographiquement une arthropathie hémophilique (tuméfaction synoviale, raréfaction osseuse locorégionale, altérations ostéocartilagineuses, hypertrophie épiphysaire, lésion de remodelage.) .

Sur la méthodologie 

A Madagascar, aucune étude n’a été faite concernant l’arthropathie chez les hémophiles, d’où l’intérêt de la présente étude. Il s’agit d’une étude monocentrique, prospective durant 5 mois qui a été réalisée au Centre de Traitement de l’Hémophilie CTH du Centre Hospitalier Universitaire Joseph Ravoahangy Andrianavalona allant du 1er Novembre 2017 au 31 Mars 2018. Néanmoins, cette étude est limitée par la faible taille de l’échantillon ne permettant pas de refléter la réalité et le nombre exact des hémophiles malgaches. Pour le moment, les centres de traitement de l’hémophilie et les registres régionaux permettant de suivre et de recenser des nouveaux cas d’hémophilie sont à mettre en place. Par ailleurs, les patients habitant dans les provinces n’arrivent pas à suivre de façon régulière les recommandations venant du centre. C’est la raison pour laquelle nous avons réalisé cette étude. Nous suggérons la création d’antennes provinciales pour une meilleure prise en charge des hémophiles ainsi qu’un suivi perpétuel du traitement.

Concernant les résultats 

Selon la fréquence 

Notre étude a permis de colliger 30 cas d’arthropathies hémophiliques sur une période de 5 mois. Ce qui constitue une série relativement importante de cette entité hémato-pathologique peu étudiée. La fréquence élevée retrouvée dans notre étude se distingue de celle rapportée par Windyga à Polande [9], mettant en évidence 2269 hémophiles en 2 ans avec 23 cas d’arthropathies donnant une fréquence de 1,01%. Cette différence peut être expliquée par la limite des moyens diagnostiques, surtout celle des plateaux techniques dans notre pays, la non accessibilité aux soins et la méconnaissance de cette entité rare. Nous ne disposons pas des centres régionaux afin de pouvoir recenser des nouveaux cas et nous manquons surtout des personnels médicaux pour être bien formés dans la pratique de prise en charge de l’hémophilie et dans les antennes régionales, les correspondants sont à former. De même, une étude espagnole menée par Lucia [18] avait rapporté 45,4% (n =142) d’arthropathies chez les hémophiles sévères sur une période de 1 an.

L’étude menée par Biss et al [19] en 2008 au Canada avaient rapporté 2663 cas d’hémophiles dont 81% hémophiles A (n = 2161) et 18% d’hémophilie B (n = 502).

La faible taille de l’échantillon limite notre étude même si nous avions constaté une fréquence assez remarquable de l’arthropathie. Nous suggérons la création de centres régionaux de traitement de l’hémophilie ainsi que la formation des personnels médicaux afin d’élargir et de mener des études multicentriques pour un état des lieux représentatif de tout Madagascar.

Répartition des patients selon l’âge 

L’âge moyen des patients de notre échantillon était de 18 ans avec des extrêmes de 5 et 47 ans. La tranche d’âge de 11 à 20 ans prédominait dans 36,67% des cas; suivie de celle entre 1 à 10 ans et de 21 à 30 ans avec un taux de 26,67% chacune. Boco V et al [20] ont rapporté 29 cas d’arthropathies hémophiliques à Cotonou avec un âge moyen de 19 ans. L’étude de Strauss et ses collaborateurs [21] retrouvaient un âge moyen de 30 ans chez 21 hémophiles avec arthropathie sur une période de 5 ans. De même, Windyga [9] retrouvait un âge moyen de 26 ans pour l’hémophilie A et de 23 ans pour l’hémophilie B présentant une arthropathie. D’autres études menées par Molho et al [22] en 2000 retrouvaient 116 cas d’arthropathies chez les hémophiles avec un âge moyen de 23 ans, celle rapportée par Aznar [36] en Espagne avec un âge moyen de 22 ans chez 70 hémophiles présentant une arthropathie. En Autriche, Eidher [23] rapportait un âge moyen des hémophiles est un peu élevé de 32,9ans. L’étude menée par Masaoka et al [24] en 2006 avaient trouvé un âge moyen de 42 ans chez 42 hémophiles. L’arthropathie hémophilique semblait toucher la population jeune dans notre étude. Ce qui fait que notre étude se rapproche de l’étude africaine menée par Boco [20] en 1995. Ceci pourrait être expliqué par le fait que nous manquons des moyens thérapeutiques afin de limiter la survenue de l’arthropathie. Nous n’arrivons pas à couvrir la totalité de nos patients dans la prévention et c’est pour cela l’arthropathie apparait dès le jeune âge.

Répartition selon la sévérité de l’hémophilie

Durant cette étude, nous avions constaté que l’arthropathie touche principalement les hémophiliques sévères ; soit 90% de l’échantillon. Selon Barg et al [25], l’arthropathie cause une importante morbidité chez les patients hémophiliques sévères. L’étude menée par Strauss et ses collaborateurs [21] avaient rapporté 21 cas d’hémophilie. Tous ses patients étaient hémophiliques sévères et dont l’arthropathie atteint surtout l’articulation du coude. Par contre, l’étude espagnole menée par Lucia [18] avait rapporté 32,8% d’hémophilie sévère, 30,6% par Biss et al [19] au Canada, 30% par Larsson et al [26] au Suède et 39% à Nederland par Plug et al.[27] De même, l’étude menée par Windyga à Polande [9] avait rapporté la prédominance de l’hémophilie sévère dans l’arthropathie ; 59,7% dans l’hémophilie A et 56,6% dans l’hémophilie B. Dans l’étude menée par Masaoka et al [24], ils ont trouvé également la prédominance de l’hémophilie sévère dans 64% de leur cas, 28% d’hémophilie modérée et 7% d’hémophilie mineure.

On pourrait dire alors que l’arthropathie touche principalement les hémophiles sévères, donc notre étude concorde bien avec les données de la littérature.

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Table des matières

INTRODUCTION
METHODE ET RESULTATS
I. Objectif
II. Cadre de l’étude
III. Méthodes
III.1. Recrutement de la population de l’étude
III.1.1. Type de l’étude
III.1.2. Période
III.2. Critères d’inclusion
III.3. Critères d’exclusion
III.4. Paramètres étudiés
III.5. Analyse statistique
IV. Résultats
IV.1. Fréquence de l’arthropathie
IV.2. Répartition des patients selon la tranche d’âge
IV.3. Répartition des patients selon le type de l’hémophilie
IV.4. Répartition des patients selon la sévérité de l’hémophilie
IV.5. Répartition des patients selon la fréquence des hémarthroses
IV.6. Répartition des patients selon la localisation des hémarthroses
IV.7. Répartition des patients selon le siège de l’arthropathie
IV.8. Répartition des patients selon les articulations atteintes
IV.9. Répartition des patients selon les signes radiologiques
IV.10. Répartition des patients selon les signes échographiques
IV.11. Répartition des patients selon le traitement
DISCUSSION
I. Sur la méthodologie
II. Concernant les résultats
II.1. Selon la fréquence
II.2. Répartition des patients selon l’âge
II.3. Selon la sévérité de l’hémophilie
II.4. Selon la fréquence des hémarthroses
II.5. Selon la localisation de l’hémarthrose
II.6. Selon le siège de l’arthropathie
II.7. Selon les signes radiographiques
II.8. Selon les signes échographiques
II.9. Selon le traitement
II.9.1. Traitements médicamenteux
II.9.1.1. Traitement substitutif
II.9.1.2.Autres traitements
II.9.2. Traitements non médicamenteux
II.9.2.1.Traitement conservatif
II.9.2.2. Traitement chirurgical
CONCLUSION
REFERENCES BIBLIOGRAPHIQUES
ANNEXE

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