AROME et les hydrométéores

Les hydrométéores, variables microphysiques du modèle AROME

Représentation de l’atmosphère 

AROME (Application de la Recherche à l’Opérationel à Méso-Echelle) est le modèle numérique utilisé depuis 2008 par Météo-France pour la prévision opérationnelle du temps en France métropolitaine (Seity et al., 2011). Des prévisions à J+1 et J+2 sont fournies cinq fois par jour par le modèle (réseaux de 0 h, 3 h, 6 h, 12 h et 18 h TU), avec une échéance variable allant jusqu’à 48 h.

Le domaine géographique du modèle, centré sur la France, est montré en figure 1.1. Les conditions aux bords sont fournies par le modèle global ARPEGE (Action de Recherche Petite Echelle Grande Echelle), également maintenu par Météo-France. Une bande de 20 km de largeur est prévue sur les bords du domaine AROME pour le couplage (à sens unique) depuis ARPEGE, via la méthode de relaxation de Davies (Davies, 1976).

L’atmosphère est représentée dans AROME sous forme discrétisée, horizontalement, verticalement et temporellement. Le domaine réduit d’AROME lui permet d’envisager un maillage plus fin que celui d’ARPEGE, tout en gardant un coût numérique abordable. Sa résolution horizontale de 1,3 km depuis 2015 (Brousseau et al., 2016) le classe ainsi dans la catégorie des modèles résolvant explicitement la convection profonde. AROME s’affranchit de l’hypothèse hydrostatique généralement appliquée à grande échelle. Verticalement, l’atmosphère est discrétisée en 90 niveaux, plus resserrés vers la surface qu’en altitude, de manière à mieux représenter les phénomènes de basses couches. AROME utilise une coordonnée verticale hybride. Proche de la surface, les niveaux verticaux correspondent à une élévation au-dessus du relief, ils « suivent le terrain ». Au sommet du modèle, ils coïncident avec les isobares. Entre-deux, la coordonnée verticale est une combinaison linéaire de l’élévation et de la pression hydrostatique.

À titre indicatif, chacun des 90 niveaux du modèle comprend 1440 × 1536 points de grille (Brousseau et al., 2016). Cela implique qu’environ 1,32 Go de mémoire sont requis pour stocker en double précision une variable définie en tout point du maillage 3D. La représentation de l’atmosphère dans AROME est aussi discrétisée temporellement, avec une résolution de 50 s. À chaque pas de temps, le modèle calcule l’évolution de treize variables, dynamiques, thermodynamiques ou liées au contenu en eau atmosphérique, appelées variables pronostiques du modèle.

Les variables pronostiques

On peut diviser ces variables pronostiques en deux catégories. Les variables du noyau dynamique décrivent les phénomènes se produisant à des échelles supérieures à celles de la grille, tandis que les variables de la physique décrivent les phénomènes d’échelles inférieures (phénomènes sous-maille).

Les variables du noyau dynamique 

L’évolution de ces variables est décrite par le système des équations d’Euler, dans le cas non-hydrostatique et compressible (Bubnová et al., 1995). Ces équations expriment la conservation de la masse, de la quantité de mouvement et de l’énergie. Les variables du noyau dynamique (ou variables de la dynamique) sont :
— la pression de surface Ps, la température T et les deux composantes u et v du vent horizontal ;
— deux variables non-hydrostatiques, liées à la pression et à la divergence verticale de l’écoulement.

Les variables du noyau dynamique peuvent aussi être représentées dans un espace spectral. Pour chaque niveau vertical, les variables sont artificiellement étendues au nord et à l’est du domaine de manière à rendre le champ bipériodique. L’écriture spectrale des champs est ensuite obtenue par une double décomposition de Fourier avec troncature elliptique. L’intégration temporelle du noyau dynamique se base sur un schéma semi-implicite qui permet d’affaiblir la contrainte de stabilité numérique de Courant-Friedrichs-Lewy, en traitant de façon implicite les ondes les plus rapides (ondes acoustiques et de gravité). L’utilisation d’un schéma semi-lagrangien pour traiter les termes d’advection permet d’affaiblir encore cette contrainte et ainsi d’utiliser un pas de temps de 50 s correspondant à un nombre CFL bien supérieur à l’unité (Bénard et al., 2010). Notons pour finir que la résolution « effective » d’AROME n’est pas celle de la grille ∆x =1,3 km, mais plutôt de l’ordre de 9∆x à 10∆x (Ricard et al., 2012). Une partie de cette différence peut être reliée à l’utilisation du schéma semi-implicite.

Les variables de la physique 

Ces variables représentent des quantités qui varient à des échelles inférieures à la maille du modèle. À chaque pas de temps, on ne peut donc qu’estimer l’évolution de quantités intégrées à l’échelle d’une maille :
— une variable d’énergie cinétique turbulente (TKE, Turbulent Kinetic Energy) ;
— les variables de la microphysique nuageuse (ou simplement microphysique s’il n’y a pas d’ambiguïté). Elles décrivent l’eau atmosphérique sous tous ses états. Au champ d’humidité spécifique qv s’ajoutent 5 champs de contenu en eau condensée, appelés champs d’hydrométéores (ou simplement hydrométéores). Il s’agit des contenus en eau nuageuse liquide ql , cristaux de glace qi , pluie qr, neige qs et graupel qg, présentés plus avant dans la section suivante.

Ces variables ne sont pas représentées spectralement, mais à chaque point du maillage (représentation « points de grille »). Elles sont soumises à chaque pas de temps à une étape d’advection et de diffusion, sauf pour l’humidité spécifique et la TKE (qui sont uniquement advectées). En ce sens, les variables de la physique sont influencées par la dynamique du modèle. Inversement, elles agissent aussi sur l’évolution des variables du noyau dynamique via les processus sous-maille (rayonnement, turbulence, microphysique nuageuse, interactions avec la surface, convection). Ces processus sont modélisés colonne par colonne par la physique du modèle, dont les principales paramétrisations proviennent du modèle de recherche Méso-NH (Lafore et al., 1998 ; Lac et al., 2018). Ces processus peuvent modifier à chaque pas de temps les valeurs des treize variables pronostiques, y compris les variables dynamiques que sont le vent et la température.

Le schéma microphysique

Représentation des hydrométéores

Le schéma microphysique est la partie de la physique du modèle qui décrit à chaque pas de temps les processus liés à l’eau atmosphérique, tels que la condensation, l’évaporation ou la formation de la pluie dans un nuage par exemple. Dans AROME, le schéma utilisé est ICE3, décrit en détail par Lascaux et al. (2006). Ce schéma regroupe les hydrométéores en cinq catégories (ou classes). Pour une catégorie donnée, la composition d’une maille est décrite par son contenu massique uniquement, ce qui classe ICE3 parmi les schémas microphysiques à un moment. Le contenu massique est adimensionnel, en kg d’eau condensée par kg d’air sec dans ICE3 ou par kg d’air total dans le reste du modèle.

Parmi les hydrométéores, les deux premières catégories du tableau correspondent à des particules nuageuses, tandis que les trois dernières correspondent à des particules précipitantes. La durée de vie de ces dernières est normalement plus courte, puisque leur sédimentation les appelle à disparaître peu à peu lors de leur chute vers le bas du modèle.

On note également que trois classes d’hydrométéores sont employées pour décrire les hydrométéores sous phase glacée, ce qui explique le nom d’ICE3. Une extension ICE4 existe également, qui ajoute une classe de grêle à ICE3.

Le schéma à deux moments LIMA (Liquid Ice Multiple Aerosols, Vié et al. (2016)) prolonge le schéma microphysique ICE3 en rajoutant comme variables pronostiques la concentration N en nombre de particules, pour l’eau nuageuse, la glace nuageuse et la pluie . Les deux moments utilisés sont ainsi le moment d’ordre 3 et le moment d’ordre 0 (N = R n(D)dD) de la distribution de taille. Le remplacement d’ICE3 par LIMA dans AROME est actuellement à l’étude. LIMA permet une meilleure représentation des distributions de taille et donc des processus microphysiques, et permet de prendre en compte des phénomènes tels que l’impact des aérosols en tant que noyaux de condensation (non modélisé par ICE3).

On peut relever deux raisons pour lesquelles LIMA n’est pas encore le schéma opérationnel pour la microphysique nuageuse dans AROME :
— Le coût numérique (nombre d’opérations, temps de calcul, mémoire requise) augmente avec la complexité du schéma (nombre de variables et nombre de processus décrits).
— La validation du schéma dans AROME n’est encore que partielle, et son apport n’est pas encore véritablement démontré.

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Table des matières

Introduction
1 AROME et les hydrométéores
1.1 Les hydrométéores, variables microphysiques du modèle AROME
1.1.1 Représentation de l’atmosphère
1.1.2 Les variables pronostiques
1.1.3 Le schéma microphysique
1.2 Les observations des hydrométéores
1.2.1 Observations in situ
1.2.2 Observations indirectes depuis le sol
1.2.3 Observations indirectes depuis l’Espace
1.3 L’assimilation de données
1.3.1 Un problème important mais non-trivial
1.3.2 Formalisme général de l’assimilation de données
1.3.3 Techniques de résolution du problème bayésien
1.3.4 L’assimilation opérationnelle dans AROME
1.4 Assimiler les hydrométéores ? État de l’art
1.4.1 Motivations
1.4.2 Difficultés pour analyser les hydrométéores
1.4.3 Les méthodes indirectes
1.4.4 Les méthodes directes
2 Les schémas EnVar
2.1 Estimation d’une matrice B ensembliste
2.1.1 L’Ensemble D’Assimilations AROME
2.1.2 Estimateur standard de la covariance
2.2 La localisation
2.2.1 Atténuer le bruit d’échantillonnage
2.2.2 Augmenter le rang de la matrice de covariance
2.2.3 Utiliser une matrice localisée dans la pratique
2.2.4 Variantes, extensions et alternatives à la localisation
2.2.5 Le revers de la médaille
2.3 Le bon schéma pour les hydrométéores ?
2.3.1 Modélisation des erreurs d’ébauche
2.3.2 Non-gaussianité, non-linéarités, positivité
2.3.3 Ajouter une variable de contrôle
2.4 Ajout des hydrométéores dans l’EnVar AROME
2.4.1 Covariances verticales moyennes
2.4.2 Fonctions de structure
2.4.3 Analyses et incréments
3 Quelle localisation pour les hydrométéores ?
3.1 Tenants et aboutissants de l’article
3.1.1 Contexte et problématique
3.1.2 Choix de la méthode d’estimation de la localisation optimale
3.1.3 Adaptation de la méthode de Ménétrier et al. (2015) aux hydrométéores106
3.1.4 Diagnostics de localisation
3.1.5 Conséquences pour l’EnVar AROME avec hydrométéores
3.2 Article
4 Évaluation par expériences d’assimilation cyclées
4.1 Introduction
4.2 Configuration des expériences
4.2.1 Période d’étude
4.2.2 Cyclage
4.2.3 Analyses et prévisions
4.2.4 Schémas de localisation
4.3 Choix des observations de référence et des scores
4.3.1 Vapeur d’eau et nuages
4.3.2 Cumuls de pluie
4.3.3 Variables classiques
4.4 Résultats
4.4.1 Impact de l’initialisation des hydrométéores
4.4.2 Avec d’autres schémas de localisation
4.5 Conclusion
Conclusion

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