Argumentation de l’ordre du « vrai/faux » ou du « possible/nécessaire »

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Des savoirs raisonnés

Les savoirs scientifiques ne sont pas de l’ordre du vrai et du faux. Si c‘était le cas, les élèves ne se concentreraient que sur la solution. Les savoirs scientifiques doivent être raisonnés, apodictiques : la solution ainsi que les raisons sont connues (« je sais que ça ne peut pas être autrement et pourquoi »). Il ne s’agit pas de donner les savoirs aux élèves mais plutôt que ces derniers comprennent la nécessité dece savoir comme solution possible à une problématique. Ainsi, une séquence sur les mouvements corporels s’attardera à expliquer la conception des membres et pourquoi cela ne peut pas être autrement au lieu d’une simple description.
Les savoirs scientifiques sont donc des savoirs raisonnés qui résultent de la construction de problèmes explicatifs. Aussi, les élèves produisentdes raisons dans des situations où ils sont en mesure d’explorer le champ des possibles et de développer des arguments pour ou contre des idées explicatives, d’où la nécessité d’étudierl’argumentation.
La figure ci-dessous illustre la manière dont se construisent les problèmes explicatifs.

Des savoirs partagés

A la fois explicatifs et apodictiques, les savoirs scientifiques sont aussi des savoirs partagés et comparés à des références théoriques d’où l’importance des débats et des argumentations. En effet, un savoir ne sera vraiment scientifique que s’il est partagé par une communauté scientifique. La classe peut donc représenter cette communauté scientifique lors de la construction de savoirs scientifiques.
Ces trois caractéristiques du savoir scientifique émoignent bien de l’intérêt d’étudier le débat scientifique, notamment sur le plan de l’argumentation. Dans la seconde partie de notre cadre théorique, nous nous attarderons donc sur lescaractéristiques du débat scientifique, sa nature et ses fonctions.

Le débat scientifique

Dans cette seconde partie, nous allons tout d’abord essayer de comprendre ce qu’est un débat scientifique dans le domaine de interactions verbales. Nous nous intéresserons par la suite aux différents rôles et fonctions du débat scientifique. Enfin, il nous a paru important de citer le rôle primordial qu’à l’enseignant de mener le débat.

L’utilité du débat scientifique

En étudiant dans un premier temps les programmes scolaires de 2008, on note que le débat permet « l’observation, le questionnement, l’expérimentation et l’argumentation » et « développe […] l’esprit critique » (p. 24). Les di fférentes recherches montrent aussi que le débat scientifique est un moyen de construire des avoirs scientifiques par le biais des différentes interactions langagières, qui peuvent treê orales (échanges verbaux entre élèves) ou écrites (schémas et textes explicatifs). Dans mon propre cas, j’ai décidé de travailler sur les interactions orales ; elles apparaissent à deux mom ents dans l’apprentissage des savoirs scientifiques selon Astolfi et Peterfalvi (1993) : lorsque l’élève prend en compte ses représentations initiales et lorsqu’il élabore un nouveau modèle alternatif. L’évolution des conceptions des élèves vers un nouveau modèle, plusproche du savoir scientifique, nous permet de définir le changement conceptuel.
J. P. Astolfi et B. Peterfalvi (1993) établissent trois niveaux pour que se produise ce changement conceptuel (annexe 1) :
• Le repérage qui correspond à la prise de conscience de la conception ;
• La fissuration ou la déstabilisation conceptuelle à savoir la confrontation entre différentes idées des élèves ; le but est que l’élève se rende compte que son explication ne fonctionne pas ;
• Le franchissement : pour cela, l’élève a besoin d’une autre explication disponible qui est « mentalement satisfaisante ».
Les débats collectifs portent sur des productions explicatives élaborées en groupes. Cette phase permet de voir qu’il existe différents types de conceptions, de discuter sur ces productions afin de clarifier les oppositions et de provoquer des remises en question. Il apparait alors nécessaire que l’élève prenne en compte ses conceptions, qu’il soit déstabilisé et qu’il élabore un modèle alternatif. Le débat scientifique permet cette construction de savoirs scientifiques d’où la nécessité d’une discusion critique.

La diversité des débats

Bien que nous ayons limité notre étude au débat purement scientifique, on y trouve encore plusieurs différences. En effet, les débats scientif ques peuvent porter sur différents sujets : une recherche d’explication, des propositions de protocoles expérimentaux, des études de documents.
Le débat auquel nous allons nous intéresser se veutexplicatif : il s’agit d’expliquer certains problèmes scientifiques ou certains phénomènes. Durant ce débat conduit par l’enseignant, les élèves sont pleinement impliqués et y engagent leurs idées : c’est le modèle du socioconstructivisme. L’enseignant n’est là que pour organiser le débat, poser des questions explicatives mais en aucun cas pour valider ou invalider des hypothèses d’élèves ou donner la réponse. Selon C. Orange (2012), le débat explicatif sert « à organiser et délimiter le champ des possibles » (p.50). Cela aboutira à une « ident ification de nécessités qui donneront aux savoirs construits leur caractère apodictique, c’est-à-dire une certaine nécessité » (p.50) comme nous l’avons vu dans la première partie.

Les fonctions du débat

Le débat scientifique possède trois fonctions ; expliquées par C. Orange (2005) :
– Une fonction pédagogique : les élèves sont actifs t es’impliquent dans le débat. C’est l’occasion de travailler l’argumentation oral e ;
– Une fonction didactique : elle est en lien direct avec les dimensions sociales de l’apprentissage comme par exemple le cas de la survalorisation de la continuité dans l’organisation du corps humain. Le débat aide l’élève à remettre en cause ses conceptions ;
– Une fonction épistémique : lors du débat, on cherchà savoir « pourquoi ce ne peut pas être autrement » et non pas simplement « savoirque c’est comme ça ». Il apparaît alors que les savoirs scientifiques sont de type argumentatif. Afin qu’ils se construisent, une discussion critique est nécessaire.

Le rôle de l’enseignant

Bien que l’on considère que lors d’un débat, les élèves sont les principaux acteurs, le rôle de l’enseignant n’en reste pas moindre. Son premier rôle est de permettre à l’élève de s’impliquer intellectuellement dans le débat scientifique. Cela peut se faire en amont du débat par un travail individuel puis en groupe. Durant le débat, l’enseignant doit être le garant des règles d’écoute et permettre aux élèves par l’autorisation et l’accompagnement donnés à chacun d’eux de penser devant et avec les autres. Le second rôle de l’enseignant est d’orienter l’élève vers l’explicatif. Pour cela, il doit amener l’élève à comprendre que ce qui est discuté pendant le débat fait partie du savoir scientifique(savoir pourquoi cela ne peut pas être autrement) et que c’est la mise à jour, la confront ation et le « travail » des types de conceptions qui est important. Enfin, l’enseignant doit accompagner l’argumentation pour entrer dans l’explication.
Afin de comprendre la dynamique d’un débat, nous allons donc nous focaliser dans la troisième partie sur le contenu argumentatif du discours des élèves. Après avoir abordé les différentes façons d’étudier un débat ainsi que lesdifférents types d’argumentation, nous étudierons plus précisément les fondements des argumentations utilisées dans la classe, sur ce qui fait qu’elles sont reçues et acceptées par les autres élèves.

La place de l’argumentation dans les débats explicatifs

Bien que les débats permettent l’émergence et la confrontation des conceptions des élèves, il apparaît que l’argumentation a une place central e dans les débats explicatifs lorsque ces derniers permettent la construction de savoirs raisonnés, donc de définir un champ des possibles permettant ainsi l’identification de nécessités.

Qu’est ce que l’argumentation ?

L’argumentation consiste à présenter des arguments sur et/ou contre quelque chose ou quelqu’un. Selon Le Petit Larousse illustré, l’argument est une « preuve, une raison qui appuie une affirmation, une thèse ». Différentes formes d’arguments peuvent être utilisées au cours d’un débat scientifique (Weisser, 2003):
• L’affirmation sans justification . Elle peut être considérée comme le degré zéro de l’argumentation puisque qu’elle s’apparente à un ju gement de fait et qu’aucun argument n’est distingué. Elle est cependant peu fréquente puisque le conflit sociocognitif induit par le débat amènera les enfants à essayer de prouver leur dire.
• La reformulation. C’est un moyen de montrer par la paraphrase que la proposition d’un camarade est comprise.
« X : Et aussi avec un fil, hein, ça donne pas beau coup d’énergie, alors il faut deux fils pour que ça donne beaucoup d’énergie.
Y : Moi, je suis d’accord avec X : le bout de fil absorbe l’électricité qu’il y a sur la languette. Ca va sur le plot ou sur la vis. Ensuite, dans l’ampoule, l’électricité du plot et de la vis vont se transformer en bonne électricité, pour allumer l’ampoule. (sens du courant) » ;
• La réfutation. Elle prouve la fausseté ou l’insuffisance d’une proposition ou d’un argument. Par extension, elle en vient à désigner un procédé de rhétorique consistant à nier une proposition sans pour autant apporter de preuve valide de cette négation ;
• L’argument d’autorité. Il fait référence à une autorité politique, morale,scientifique reconnue et experte.

Les modèles de l’argumentation

C. Orange (2012 et 2003) distingue trois types de modèles de l’argumentation :
• Un modèle dialogal de Plantin qui implique un discours entre au moins deux personnes ;
• Des argumentations sur les possibles ;
• Un modèle monologal qui implique le discours d’une seule personne avec des argumentations sur l’impossibilité ou la nécessitéd’un énoncé explicatif.

Le modèle dialogal de l’argumentation de Plantin

D’une manière plus générale, Plantin (2005) affirmeque la remise en cause d’un point de vue engendre un désaccord qui est source de l’activité argumentative. Lors du débat scientifique, c’est par le biais des échanges que vont s’exprimer les différents points de vue qui s’opposent sur une même question. Ce désaccordest thématisé dans le débat. Toujours selon Plantin, trois actes fondamentaux existent :
– Trouver une solution au problème à savoir une explication et des arguments pouvant la prouver : c’est le rôle du proposant ;
– Montrer son désaccord par une argumentation contre: c’est le rôle de l’opposant ;
– Douter, se remettre en question, en refusant de prendre position pour telle ou telle thèse : c’est le rôle du tiers.
Le discours dialogal évolue alors en un discours à trois personnes que Plantin nommera trilogal. Un rôle n’est pas obligatoirement attribu é à une personne en particulier. Cette personne peut passer par plusieurs rôles au cours d’ un débat. Si le débat est abordé selon ce modèle dialogal, le rôle du tiers sera particulièrement étudié dans la résolution du problème scientifique.

Des argumentations sur les possibles : représentations et schématisations

Un autre modèle de l’argumentation existe, de manière complémentaire à la première. Il se focalise sur les argumentations permettant de développer le champ des possibles. En effet, lorsqu’un élève présentera son affiche, il fera appel à des images afin de construire une schématisation devant son interlocuteur. Divers échanges dans la classe ont lieu où les interlocuteurs reconstruisent cette schématisation avec leurs propres représentations. Cela permet de stabiliser une idée présentée et de s’assurer que tout le monde est en accord avec elle. Ainsi, la proposition pourra être reçue et deviendra un sujet discutable au sein de la classe. Au cours d’épisodes argumentatifs, les élèves s’accorderont sur ce que veulent dire les uns et les autres. C’est donc un moyen pour échanger des arguments.
Lors de la présentation des affiches, il y a toujours, selon C. Orange (2003), une « négociation » des schématisations proposées. Lescritiques, questions et remarques des élèves forcent les élèves qui ont produit une affiche à produire une explication.
Ainsi, cette fonction de l’argumentation semble très importante puisqu’elle permet d’une part « la compréhension » et d’autre part « la prise en considération par la classe d’idées qui vont alors être discutées ». C’est une « condition ed possibilité de la problématisation ».

Le modèle monologal

Les deux modèles vus précédemment permettent d’étudier une bonne partie des débats scientifiques mais n’apparaissent pas suffisant quant à la manière bien souvent implicite dont les argumentations sont reçues et acceptées par les autres élèves. Ainsi, le modèle monologal, puisque produit par un seul locuteur, se centre sur les argumentations d’une seule personne de l’ordre de l’impossibilité ou de la nécessité d’un énoncé explicatif, sans les relier explicitement à un contre-discours. Ces argumentati ons de preuve permettent de construire des raisons et parfois de manière implicite. Par exemple, lorsqu’un élève dit lors d’un débat sur la nutrition : « elles ont oublié de dire que ça trie parce que sinon il y a de la mauvaise nourriture qui va dans les muscles », les autres élèves ont compris pourquoi ce qui ste mauvais ne doit pas aller dans les muscles, l’élèven’a pas eu besoin de l’expliciter. C’est une évidence partagée par l’ensemble de la communauté t esur laquelle s’appuie bon nombre d’argumentations. Les fondements des argumentations des élèves ne sont pas toujours clairement énoncés par ces derniers. Le modèle de oulminT s’apparente à un modèle monologal et est très utile pour comprendre sur quoi se fondent les argumentations des élèves. Nous avons donc vu que les élèves, lorsqu’ils étaient locuteurs, avaient pour but de faire comprendre un phénomène, un mécanisme aux autres èvesél. Ils utilisent alors un registre explicatif compris par le reste de la classe à condi tion qu’il soit implicitement partagé par celle-ci et négocié. Nous allons maintenant étudierquels sont les fondements des argumentations des élèves et en quoi ils permettentla construction de nécessités dans la recherche de savoirs scientifiques.

Le modèle de Toulmin

Le schéma de l’argumentation

Afin d’étudier les fondements des argumentations, nous allons nous baser sur le modèle de Toulmin utilisé dans les années 1950 qui nous permettra de classifier les arguments selon leur fondement. Selon cet auteur (1993 et 1958), « tous les canons de la critique et de l’évaluation des arguments sont en pratiques dépendants du champ». L’argumentation est donc dépendante du sujet traité, de la classe, des références communes aux élèves et de l’histoire de leurs travaux communs. Il faut cependant que les élèves dépassent ce contexte afin de produire des argumentations pertinentes.
Selon Toulmin, une argumentation se compose :
– d’une thèse ou d’une conclusion (C) ;
– de faits invoqués à l’appui de cette thèse : la base de la thèse (D pour données) ;
– d’une garantie (à savoir une règle, un principe, un énoncé) permettant et justifiant le passage des données à la conclusion (G) ;
– d’un fondement permettant l’acceptation de la garant ie faisant autorité (F).
Cela conduit au schéma de l’argumentation suivant :
Ce schéma permet de traduire les interventions argumentatives des élèves implicites en explicites, de penser l’argumentation selon les champs argumentatifs et de comprendre sur quoi s’appuient les enfants pour produire des arguments expliquant les raisons. En plus des composantes citées précédemment dans une argumentation, Toulmin distingue aussi le « vraisemblablement » et le « sauf si ».
Le modèle de la figure 3 nous permet alors de comprendre la garantie et le fondement que nous nommerons la loi de passage des données à la conclusion.

Les conclusions et les données dans les argumentations
C. Orange (2003), à la suite de l’étude d’un débat sur la nutrition avec le modèle de Toulmin, a catégorisé les données et les conclusions.En voici les catégories pour les données :
• Schématisation d’un autre groupe ou élève ;
• Schématisation de son propre groupe ;
• Invocation d’une expérience ou d’une observation ;
• Affirmation théorique ou sur les modèles ;
• Mention au problème que l’on traite.
Pour les conclusions, C. Orange a choisi les catégories suivantes :
• Jugement sur les productions ou les idées d’un autre groupe ;
• Affirmation générale sur ce que doit être une réponse ;
• Affirmation théorique ;
• Réfutation d’une objection.
Lorsque l’on croise les catégories données avec celles des conclusions, la majeure partie des argumentations se révèle être du type : schématisation d’un autre groupe ou élève / jugement sur les productions ou les idées d’un autre groupe. L’analyse de la production d’autres élèves aboutit très souvent au fait qu’ell ne convient pas. Le second type d’argumentation productive que l’on trouve est l’inv ocation d’une expérience ou d’une observation / affirmation théorique. Il apparaît aussi que les conclusions et les données sont très variées.
Les différents types de garantie et fondement
Marc WEISSER et ses collègues (2003) ont repéré, suite au débat analysé, quatre types de garantie et donc de fondement possibles :
• Garantie / fondement logique ;
• Garantie / fondement empirique ;
• Garantie / fondement ayant recours à un expert ;
• Garantie / fondement fonctionnaliste.
Les garanties de type logique se fondent sur des règles couramment admises, sur des lieux communs. Les élèves tentent de déduire ce qui va sepasser. Bien que ces déductions n’aient aucune valeur scientifique, elles sont appliquées lors d’un raisonnement logique, une fois considérées valides. C’est le cas de l’énoncé n°1veca l’opposition du bon et du mauvais et de l’énoncé n° 3 du tableau précédent. On trouve aussice genre d’opposition avec l’utilisation et la consommation.
Lors des garanties de type empirique, l’élève a recours à des expériences passées, qui ont eu lieu dans son vécu personnel scolaire ou extrascolaire. C’est le cas dans l’énoncé n°2.
A côté de ces deux types de garantie, on trouve la garantie fondée sur la référence à des experts qui pourrait aussi être nommée l’argument d’autorité. Trop souvent ici, les élèves ont tendance à bloquer la compréhension des raisons et des nécessités du phénomène et à ne plus chercher pourquoi il en est ainsi. Puisque « c’est écrit », « maman me l’a dit » ou « je l’ai entendu à la télé», c’est comme ça.
Enfin, la garantie fonctionnaliste consiste à attri buer une fonction à un objet pour qu’il serve à quelque chose.
De même qu’avec les données et les conclusions, onconstate là aussi une variété de fondements utilisés.
L’argumentation a bien un enjeu important dans la construction des savoirs scientifiques lors d’un débat explicatif. Alors qu’il existe plusieurs axes d’études d’un débat, nous retiendrons celui de Toulmin, qui permet d’étudier les fondements des arguments des élèves. La partie qui suit explicitera la méthodologie utilisée pour analyser un débat scientifique et les argumentations au cours de ce dernier.
Méthodologie
Méthodologie du recueil de données
Pour tenter d’obtenir des réponses à ma problématique « quelle est la place et le rôle de l’argumentation orale dans la construction de savoirs dans le débat scientifique en cycle 3 ? », il m’a paru évident de mener directement au sein d’une classe une séquence de sciences en cycle 3, incluant un débat scientifique au cours d’une séance. Le déroulé de la séquence se trouve en annexe 2. Les données qui vont être le support de mon analyse correspondent aux interactions verbales lors de ce débat scientifiqueréalisé au cours de l’année scolaire 2012 – 2013. Ce débat scientifique s’inscrit dans une séquence d’enseignement ayant pour thème l’étude des mouvements corporels en cycle 3, programmé dans le BO de 2008 dans le domaine du fonctionnement du corps humains et la santé sous l’intitulé « Les mouvements corporels (les muscles, les os du squelette, les articulations) ». Il se situe dans la séance deux de cette séquence.
Les objectifs de la séquence étaient de connaître al place, le rôle et le nom des articulations dans le corps ainsi que de comprendre la relation entre les os et les articulations pour permettre le mouvement. L’objectif de la première séance était de recueillir les conceptions initiales des élèves. Pour cela, je suis partie d’une situation problème, appartenant à leur quotidien : « Que se passe-t-il dans ton bras quand il est tendu et quand il est plié ? ». La séance ne portant que sur l’articulation au niveau des os, il a été précisé à la classe que l’on ne s’intéressait pas aux muscles, et que ces derniers seraient abordés plus tard. Dans un premier temps, les élèves ont répondu individuellement à lasituation de départ par un schéma, de façon à ce que chacun s’implique intellectuellement et prenne conscience de ses propres représentations. Cette étape permet de constater les connaissances qu’ont les élèves sur ce sujet. Dans un second temps, les élèves ont été mispar groupe de quatre ou cinq enfants qui étaient à côté les uns des autres. Chaque groupe a réalisé le même travail que précédemment à savoir un schéma et un texte explicatif sur une affiche, qui sera utilisée pour la seconde séance. Pour ce faire, les élèves ont mis de côté eursl écrits initiaux afin qu’ils n’en choisissent pas un sans raison.
La séance numéro deux avait pour objectif de remett en question les conceptions des élèves en les confrontant avec ses pairs et de construire des savoirs scientifiques portant sur une recherche d’explication à travers une discussion . Ces objectifs nécessitaient diverses compétences de la part des élèves appartenant à lacompétence 6 « les compétences sociales et civiques » et à la compétence 7 « l’autonomie et l’initiative » du socle commun de connaissances et de compétences de l’élève telles que :
– respecter les règles de la vie collective ;
– prendre part à un dialogue : prendre la parole deva nt les autres, écouter autrui, formuler et justifier un point de vue ;
– coopérer avec un ou plusieurs camarades ;
– s’impliquer dans un projet individuel ou collectif ;
– respecter des consignes simples en autonomie.
La seconde séance débute par un rappel de ce qui avait été fait la fois précédente. Après avoir disposé les affiches au tableau (qui se trouvent en annexe 3), les enseignantes ont procédé à une lecture orale de ces dernières et ontrépondu aux questions des élèves. De plus, des photos des affiches ont été distribuées à chaqueélève, au cas où certains ne verraient pas bien le tableau. Par la suite, les élèves ont étémenésa à les confronter individuellement par le biais d’un tableau à remplir en justifiant pourquoi le schéma d’une affiche fonctionnait ou non.
Lors de cette première phase, l’élève est face auxconceptions des autres groupes de classe. Il doit être capable de juger les conceptions des utresa élèves et de dire si elles sont conformes ou non à sa propre conception. Cette phase peut ent raîner chez lui une mise à distance de sa propre conception. Ensuite, le débat scientifique aété réalisé en classe entière. Il correspond à l’étape de fissuration ou de déstabilisation conceptuelle (Astolfi et Peterfalvi, 1993) où les élèves confronteront leurs différentes idées. Lesnseignants avaient pour objectif de centrer le débat sur les nécessités pour que le bras fonctionne et puisse se plier, à savoir qu’il ne faut pas que ça tombe, que ça bloque ni que ça bouge dans to us les sens. La trace écrite attendue était la suivante :
Pour que le bras fonctionne et puisse se plier :
Il ne faut pas que ça tombe Il  ne  faut  pas  que  ça Il  ne  faut  pas  que  ça  bouge bloquedans tous les sens
Cependant, par manque de temps, l’écriture de cette première trace écrite n’a pas été réalisée. L’intégralité des échanges oraux ont été enregistrégrâce à l’installation d’une caméra et de deux dictaphones, placés à différents endroits de la classe, avec l’accord de tous les représentants légaux des élèves. En effet, tous lesélèves pouvant intervenir, il était nécessaire de disposer du matériel dans le plus d’endroits possibles. L’enregistrement du débat obtenu dure vingt-cinq minutes. Les échanges ont ensuite té retranscrits et sont analysés dans la partie suivante.
La mise en pratique de ces séances s’est déroulée ansd une classe de CM1 composée de 29 élèves, en milieu d’année. La majeure partie du débat scientifique a été menée par deux étudiantes en formation à l’Ecole Supérieure du Professorat et de l’Education (ESPE) de Nantes pour le métier de professeur des écoles puisje suis intervenue dans la dernière partie. Les élèves de la classe m’étant inconnus, aucun prénom ne figurera dans la transcription.
Méthodologie d’analyse
Une fois les enregistrements réalisés, je les ai retranscrit (annexe 4) en essayant de reprendre exactement les mots des élèves et des enseignantes pour l’intégralité des interventions de chacun. Cela permet d’avoir un reflet fidèle du déroulement du débat scientifique.
La légende suivante a été choisie pour la retranscription du débat :
• M1 : enseignant n°1
• M2 : enseignant n°2
• M3 : enseignant n°3 (moi-même)
• Ex : élève (les prénoms n’étaient pas connus)
• XXX : inaudible
La transcription du débat m’a permis d’observer plusieurs phases dans les argumentations des élèves et dans le rôle de l’enseignant. J’ai donc décidé de traiter le débat par ordre chronologique en le découpant en plusieurs phases :
– La phase 1 : énoncés 1 à 52. Elle correspond à la mise en place du débat et à un début de discussion sur les affiches ;
– La phase 2 : énoncés 53 à 108. Cette seconde phasecorrespond à un tournant dans le débat ; les élèves tentent de l’orienter vers un savoir assertorique alors que les enseignants essayent de maintenir le débat vers unsavoir apodictique ;
– La phase 3 : énoncés de 109 à 143. Les élèves sontici réellement bloqués pour trouver des raisons à ce qu’ils disent ;
– La phase 4 : énoncés 144 à 182. Cette phase correspond à un débat sur la présence ou non d’une boule, de l’ordre du vrai ou du faux ;
– La phase 5 : énoncés 183 à 244. Cette dernière phase correspond à l’intervention du troisième enseignant qui recentre le débat sur un onctionnementf possible ou non du bras.
Pour chaque phase, nous préciserons ce qui a fonctionné ou non, tant du point de vue des élèves que de l’enseignant. Les argumentations seront ensuite analysées plus précisément ainsi que le rôle de l’enseignant.
Analyse de données
Cette troisième partie propose trois niveaux d’analyse du débat scientifique mené en classe de CM1. Tout d’abord, je propose une analyse globale et chronologique du débat afin d’en tirer des conclusions générales. Ces conclusions suscitent des questions auxquelles je tenterai de répondre par une analyse plus précise de l’argumentation des élèves, notamment en utilisant le schéma de Toulmin. Enfin, le rôle de l’enseignant donnera aussi lieu à une analyse puisque qu’il semble influencer énormément le bon déroulement d’un débat en classe.
Analyse chronologique du débat
Le débat scientifique se compose de 244 unités verbales. Il est découpé en cinq phases que nous allons caractériser au fur et à mesure. La première phase se déroule de l’énoncé 1 à l’énoncé 52. Les enseignantes lancent le débat en tilisantu comme support les fiches individuelles que les élèves ont rempli concernantle fait que l’affiche fonctionne ou non. Ces fiches restent à disposition des élèves pendant tout le débat. Les élèves annoncent d’emblée s’ils sont d’accord ou non par des expressions du t ype « moi je suis d’accord », « c’est faux » ou « oui, non ». Des précisions ou rectifications sur certaines affiches sont apportées, bien qu’elles aient déjà été présentées avant le débatDès. le début, les élèves semblent chercher à se mettre d’accord sur le nombre d’os dans le bras puis apparaît l’idée d’une « boule » entre les os, au niveau du coude. On se retrouve donc ici sur des savoirs de l’ordre du « vrai » et du « faux ». Il semble aussi important de noter que les échanges repassent à chaque fois par les enseignantes. Le début de ce débat s’apparente alors plus à un cours dialogué. Les enseignantes tentent de mettre la classe d’accord sur le nombre d’os et sur la possible présence d’une boule. Peut-être est-ce un moyen declôturer ce « faux débat » pour ensuite échanger sur les nécessités et possibilités de chaque production.
Le déroulement de la phase 2, allant de l’énoncé 53à l’énoncé 108, prouve bien cette volonté des enseignantes. En effet, en 63, l’enseignante recentre le débat sur les possibilités du fonctionnement du bras. Cela a lieu trois fois de suite mais sans obtenir les résultats escomptés.

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Table des matières

INTRODUCTION
1. Cadre théorique de référence
1.1. Les savoirs scientifiques
1.1.1. Une recherche d’explication
1.1.2. Des savoirs raisonnés
1.1.3. Des savoirs partagés
1.2. Le débat scientifique
1.2.1. Définition
1.2.2. L’utilité du débat scientifique
1.2.3. La diversité des débats
1.2.4. Les fonctions du débat
1.2.5. Le rôle de l’enseignant
1.3. La place de l’argumentation dans les débats explicatifs
1.3.1. Qu’est ce que l’argumentation ?
1.3.2. Les modèles de l’argumentation
1.3.2.1. Le modèle dialogal de l’argumentation de Plantin
1.3.2.2. Des argumentations sur les possibles : représentations et schématisations
1.3.2.3. Le modèle monologal
1.3.3. Le modèle de Toulmin
1.3.3.1. Le schéma de l’argumentation
1.3.3.2. Exemple d’études sur l’argumentation selon Toulmin
1.3.3.3. Les conclusions et les données dans les argumentations
1.3.3.4. Les différents types de garantie et fondement
2. Méthodologie
2.1. Méthodologie du recueil de données
2.2. Méthodologie d’analyse
3. Analyse de données
3.1. Analyse chronologique du débat
3.2. Analyse des argumentations
3.2.1. Argumentation de l’ordre du « vrai/faux » ou du « possible/nécessaire »…
3.2.2. Analyse des argumentations des élèves selon le modèle de Toulmin
3.3. Analyse du rôle de l’enseignant dans le débat scientifique
CONCLUSION
Bibliographie

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